Chapitre 1
Mon mari me fit comprendre qu'il n'appréciait plus les manifestations d'affection, surtout en public. Nous avions arrêté de nous tenir par la main, car il m'avait dit que lorsque nous nous étions rencontrés, que l'un de ses amis lui avait fait une petite plaisanterie au sujet de sa taille : « On dirait un gosse et sa mère ! » En effet, du haut de mon mètre soixante-dix et lui soixante-cinq, j'étais plus grande que lui. J'ai vite abandonné les talons, « on a l'air trop ridicule » m'avait dit Michaël. Ce devint également plus rare à la maison, il répétait souvent cette phrase : « les câlins ça sert à rien », et me dit de me rapprocher de lui uniquement si il y avait un but final : le sexe. « Sinon c'est pas la peine de t'approcher », disait-il. Je pense être devenue de moins en moins affectueuse à force d'entendre toutes ces phrases.
Êtes-vous rancuniers ? Celle de mon mari était tenace. Je me souviens d’un soir sur l'autoroute, où nous rentrions de vacances, un automobiliste nous doubla pour se mettre devant nous en freinant. Je dormais sur le siège passager quand Michaël s'écria :
— Eh ! Il m'a fait une queue de poisson ! La voiture devant nous accéléra, Michaël en fit de même et s’énervait de plus en plus en hurlant comment cet homme avait « osé » lui faire une une chose pareille. Je lui dis de laisser tomber, nous étions presque arrivés et les filles dormaient à l'arrière. Mais il n'écoutait personne, animé par son seul désir de vengeance. Nous avons donc pourchassé ce véhicule, jusqu'à ce que Michaël accélère et freine devant lui à plusieurs reprises. Satisfait de lui avoir infligé une punition, il me sourit et s'aperçut en levant les yeux sur un panneau que nous avions raté la sortie d’autoroute, et nous avons fait un détour de plus de deux heures pour rentrer à la maison. Peut-être ma peur d’aller à l’encontre de ses décisions découlait de scénarios comme celui-ci. D'ailleurs il me répétait souvent des phrases comme : « Tu sais pas qui je suis ! », ou bien : « Attention, tu ne me connais pas, je suis un dingue ! » et peut-être qu'à force de les entendre, je finis par m'en convaincre et ne le contredisais jamais. Quand il s'énervait, il hurlait que c'était lui le chef de famille. Il lançait des objets contre les murs et détruisait tous les bibelots dans la maison. La première fois, les larmes me sont montées aux yeux, il avait cassé dans la cuisine un objet que j'affectionnais. Lorsque cela se reproduisait, il me dit qu'il ne supportait pas me voir pleureur et quittait la pièce, ou partait en voiture et lançait :
— C'est bon, tu m'as gavé, je me casse.
Peu à peu, un climat de « terreur » se mit en place.
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