Fièvre nocturne
Je commence à frissonner. Je ne suis pas bien, j’ai froid tout à coup. J’attrape une bouteille d’eau dans le pack posé dans à l’entrée de la loggia. Ne pas tomber, je retourne à la chambre.
Je me laisse tomber sur le lit. Il faut que je retire mon vieux t-shirt trempé de sueur.
Je me tourne sur le dos, et comme une sorte d’anguille je me tortille pour enlever ce bout de tissu humide qui me colle à la peau, j’arrive enfin à mes fins. Je le jette sur la chaise.
Toute nue, je vois que j’ai la chair de poule sur tout le corps. Je ramasse mon peignoir pour finir de m’éponger et me réchauffer, puis je me colle au radiateur.
Ce bon vieux radiateur de chauffage collectif, celui dont les tuyaux claquent la nuit quelque part dans l’immeuble… ce radiateur si chaud, qui me réchauffe.
Je me sens bizarre, fébrile, mais pas au sens médical du terme, fébrile au sens charnel.
Mais je me laisse glisser doucement dans les limbes de cette brume ensommeillée qui me guettait depuis un moment.
Je marche nue, dans l’eau de la rivière, en remontant le faible courant. j’ai de l’eau jusqu’aux fesses, je laisse mes mains flotter à contre-courant, je suis bien, détendue, légère, à trois-quatre mètres de moi, sur un rocher mes amis hollandais nus se prélassent au soleil, ils ne me voient même pas, je suis toujours aussi admirative de la poitrine de Magda, cette belle poitrine fière et ferme comme dressée face au soleil.
Je souris de les voir si bien, je ne les dérange pas, j’avance, et les laisse derrière moi.
Je suis maintenant aux abords d’une plage de petits galets, où jouent les enfants Martin, ils ne remarquent même pas ma nudité, leurs parents sont là, Maman me sourit, elle est très belle et rayonnante dans son maillot de bain couleur émeraude, assise sur un petit fauteuil de toile. Sous ses mains un livre retourné sur ses cuisses. Elle ne lit pas, elle profite de ce petit instant de bonheur passé en famille. Si elle savait.
Je sens le poids du regard de son mari, un regard un peu inquiétant, est fixé sur moi, lui par contre ne prête plus attention ni à ses progénitures, ni à sa chère et tendre épouse. Il me suit du regard, et ignorant cela, je continue de remonter le courant, et perd de vue cette petite plage.
Devant moi, la rivière se rétrécit et le courant s‘intensifie.
Malgré tout je continue d’avancer, au milieu de hauts rochers ronds que des rapides contournent en petites cascades.
Je suis obligée de me hisser avec les bras pour avancer, grimper sur des rochers bordant le lit de la rivière.
Il fait bon, je marche sur les rochers réchauffés par le soleil, et je suis assourdie par le bruit entêtant de cette eau qui file dans les rapides.
Devant moi un petit trou d’eau avec une cascade de faible hauteur. Je me glisse dans l’eau et j’avance au pied de cette mini-cascade, j’ai de l’eau à la taille, je vois que je ne peux plus avancer, c’est un cul-de-sac trop haut pour moi, comme un mur.
Tout à coup, je sens des mains se plaquer contre mes seins et les serrer passionnément, je sens un corps se coller à mes fesses et mon dos, un souffle chaud dans mon dos. J’essaie de résister mais le prédateur tient sa proie, il me plaque contre le plat vertical du rocher attenant, j’essaie de crier, mais le son de la cascade couvre tellement ma voix que moi-même je ne l’entends pas.
Mes mains à plat sur le rocher ne peuvent rien faire de plus, je tourne la tête désespérée, je vois ce mari croisé plus tôt, le regard fou, étrangement désespéré mais déterminé.
J’essaie de lui faire non de la tête, il ne me calcule pas, il me veut. Je tente de résister encore lorsque avec l’aide de son pied il me fait écarter les jambes, je suis perdue, je sens son érection glisser entre mes fesses. Pourquoi ne reste-t-il pas avec sa famille, sa femme si mignonne ?
Il me veut.
Mais ce n’est pas possible, NON, il vient du mauvais côté, non s’il vous plaît non, je sens comme une brûlure qui me parcourt tout le dos.
Je me réveille angoissée, les yeux pleins de larmes, et mon dos me brûle encore, le souffle haletant, je sens que je suis en train littéralement de cuire contre le radiateur qui chauffe à bloc.
Je me décolle du radiateur et remets correctement mon peignoir, sûr que le métal contre ma peau ça ne fait pas bon ménage.
Je me sens mal, mal dans ma tête et dans mon corps. Je comprends ce qu’il m’arrive, je n’assume pas mes faits et gestes. Ou peut-être suis-je en train de, de les digérer. Je ne sais plus trop.
Je souffle, il n’y a pas la même lumière qui filtre des volets, le jour doit être en train de tomber.. je suis complètement azimutée.
Je m’assieds au bord du lit, la tête dans les mains…
j’essuie mes larmes avec la manche du peignoir.. en essayant de rassembler mes idées, mais j’ai du mal, j’ai chopé la mort, et en plus j’ai un gros coup de blues qui vient de me tomber dessus.
J’allume ma chaîne hi-fi, et mets un peu de musique en toile de fond. Je sais ce qu’il me faut, un bon remontant. Je me dirige vers le petit coffre à bouteilles du salon et en sors la bouteille d’eau de vie que mon homme a récupérée auprès d’un de ses potes savoyard… Je me sers un petit verre à liqueur, je trempe les lèvres, ça me chauffe direct, je n’arriverai pas à tout boire, alors comme ils disent : hop cul-sec..
Le feu descend dans ma gorge et mon estomac… je tousse, je pleure mais pas de tristesse… la chaleur me remonte au front en passant par les oreilles....
L'histoire complète et la suite dans "À la découverte de soi..."
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