Le Bal des Emplumées

2 minutes de lecture

Nous n’étions pas amies mais de ces relations

Authentiques car nourries d’une sincère affection.

Du moins je le croyais au regard des moments

Que nous avons partagés huit années durant.

Une quasi décennie de rires et de larmes,

Et même de confessions, quand l’exercice, de l’âme,

Livrait le plus profond, bien au-delà les mots,

Et que nos émotions guidaient notre stylo,

Nous révélant fragiles, livrant des choses intimes,

Chacune dans son style, en prose ou bien en rimes :

L'écriture met à jour ces blessures que l'on scelle.

Au fil des ateliers, de consonne en voyelle,

Les mots comme l’émoi recevant bienveillance

Le groupe se souda et l’on vit l’émergence

D’une vraie appétence à toutes nous retrouver

Parfois même sans écrire, juste pour papoter.

Aussi je m’attendais à vous voir concernées

Par l'annonce du covid qui mon fils affectait

Me causant grand souci car il souffrait d'un asthme

Qui laissait redouter que les effets du miasme

Ne l'amènent dans un lit où bien que trentenaire

Il faudrait une machine pour lui donner de l'air.

Il y avait pour le moins matière à s'inquiéter

D’autant qu’il vivait loin, isolé qui plus est.

Je pensais recevoir, de vous, du réconfort :

Quand nos proches nous soutiennent on se sent bien plus fort.

Aussi fus-je surprise d'abord, et puis peinée,

D’avoir, pour toute réponse, pluie de banalités :

Celle-ci est en Bretagne, l’autre en télétravail,

Et dans tout ce bla-bla, pas le moindre détail

Montrant que mon message empli de désarroi

Ait pu vous faire, à vous, au fond, ou chaud ou froid.

Etant plutôt bonne fille, je mis votre mutisme

Sur l’effet confinement et tous les traumatismes

Qu’il avait provoqués dans chacune de nos vies.

Alors, un peu plus tard, quand mon fils fut guéri

Je rebondis sur l’une de nos conversations

Pour vous faire part, ravie, de cette information.

Mais ce fut là encore faire preuve de naïveté :

Une seule a réagi. Les autres sont restées

Totalement silencieuses, absentes, indifférentes.

Là encore j’ai trouvé votre aphasie navrante

Sans y trouver cette fois matière à l’excuser.

Une triste conclusion, alors, s'est imposée :

Nul doute, vous n’étiez pas tout autant impliquées

Dans notre relation que moi je ne l’étais.

Plus tard, quand l’une de vous, a lancé, comme une fleur,

Après, de la phase III, qu’il a eu sonné l’heure

« Que diriez-vous d’un verre en terrasse d’un café ? »

J’ai senti la rupture entre nous consommée.

J’ai été polie, moi, je vous ai répondu.

Mais je crains bien, Mesdames, qu’on ne m’y prendra plus.

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