Chapitre 6
Assise au bureau dans ma chambre, la tête enfouie dans mes mains, je tente de faire le point sur cette journée. Dans la même journée, j’ai été enchainée, tripotée à plusieurs reprises, torturée à l’aide d’un sex-toys et forcée de sucer un inconnu. Et plus encore, j’ai du mal à croire tout ce que j’ai appris aujourd’hui. Cet endroit existe-t-il vraiment depuis cinquante ans sans que personne n’en sache rien ? Et veulent-ils réellement faire de nous des soumis avant de nous vendre ?
Je ne suis pas une experte des relations BDSM mais il me semble que cela nécessite un accord commun entre les deux parties. Il est parfaitement illégal d’obliger quelqu’un à devenir soumis contre sa volonté.
Je grimace en me redressant. J’ai le sexe encore douloureux après ce qui s’est passé aujourd’hui. Je dois à tout prix quitter cet endroit. Mais je dois aussi être prudente, je ne veux pas être punie de nouveau. Je ne veux plus jamais vivre l’enfer d’aujourd’hui…
Je sursaute violemment quand quelqu’un toque à la porte de ma chambre. Avec prudence, je me lève et entrouvre légèrement. Jade me sourit à travers l’interstice :
« Je peux entrer ?
-Bien sûr. »
Je m’écarte et la laisse passer devant moi. Elle s’assoit sur la deuxième chaise, prenant grand soin de ne pas toucher aux menottes positionnées sur les bras de la chaise.
« Je t’ai apporté le cours de ce matin. Je crois que tu n’as pas réussi à prendre beaucoup de notes.
- Merci. »
Je m’assois près d’elle et commence à recopier ses notes.
Une fois terminé, je me redresse et la regarde. Timidement, je commence :
« Merci beaucoup pour tout à l’heure en sport, pour toute l’aide que tu m’as apporté. Tu n’étais pas obligée, ça aurait pu te valoir des ennuis à toi aussi. »
Elle hausse les épaules :
« On est tous dans la même galère alors si on ne s’entraide pas un minimum… »
Le silence s’installe pendant quelques minutes. Puis finalement, Jade murmure :
« On doit quitter cet endroit. »
Je hoche la tête en guise d’assentiment. La jeune femme reprend :
« Si on part maintenant, on est sûr d’être prises. Il faut en savoir un peu plus sur la sécurité des lieux et peut-être même essayer de savoir où l’on est. Si ça se trouve on n’est même plus en France. »
Je ne dis rien et Jade finit par se tourner vers moi :
« Tu n’es pas d’accord ?
- Si c’est juste que… »
Ma voix s’étouffe dans un sanglot et je reprends de manière quasiment inaudible :
« … je ne sais pas si je peux tenir quelques jours supplémentaires ici. C’est tellement… »
Je ne trouve pas de mot assez fort mais Jade semble comprendre. Elle me prend la main et la serre fort en guise de réconfort.
Avant qu’elle n’ait pu reprendre la parole, un garde entre :
« Il est dix heures, tout le monde au lit ! »
Jade quitte la chambre en me souhaitant bonne nuit.
Je me lève et me dirige vers l’armoire à la recherche de quelque chose qui pourrait faire office de pyjama.
« Il n’y a rien, vous dormez tous à poil. »
Je me dirige vers le lit et le garde m’emboite le pas. Je tâche de me déshabiller le plus vite possible tout en sentant sur mon corps le regard lubrique de l’homme. Puis je me jette sur le lit et rabat les couvertures sur mon corps nu.
« Tes mains, dans les menottes. »
Je redresse la tête et contemple l’énorme paire de menottes attachée à trente centimètres au-dessus de la tête de lit. Les bracelets mesurent bien quatre centimètres de large et un d’épaisseur et sont tout en métal. Pire que tout, d’étranges fils électriques sont reliés au métal. Je frémis en imaginant ce à quoi ils peuvent servir. Prenons-nous des coups de jus la nuit ?
Je me tourne timidement vers le garde :
« Comment peut-on dormir avec ça ?
- Pas mon problème, on ne veut pas que vous puissiez circuler librement la nuit. Le mécanisme s’ouvre automatiquement le matin à sept heures. »
Ce qui explique les fils. Pas de coups de jus donc.
Mais malgré cela, je refuse de me retrouver nue et enchainée dans le lit. Surtout quand n’importe quel garde peut entrer dans la pièce.
L’homme a visiblement perdu patience. Il m’empoigne les poignets et entreprend de me tirer en direction des chaînes.
« Non ! »
Je rue et parviens à mettre un coup de pied dans le ventre du garde. L’impact plie l’homme en deux, j’en profite pour quitter le lit et me diriger vers la porte en courant. Où aller ensuite, je n’y réfléchis même pas. Je tiens juste à m’éloigner de cet homme qui veut m’enchainer sur un lit où je me retrouverais totalement impuissante et à la merci du premier pervers qui décidera d’entrer dans ma chambre.
Je suis presque arrivée à la porte quand l’homme me rattrape et me soulève de terre.
« Reposez-moi ! »
Je me débats en tous sens jusqu’à ce que l’homme me jette sur le lit. Il m’attrape les poignets et cette fois-ci, parvient à les emprisonner. Sitôt qu’il s’éloigne de moi, je tire sur les chaînes. Mais je ne parviens qu’à me faire mal. Je suis bel et bien prise au piège.
Le garde halète un moment puis siffle entre ses dents :
« Je vais enchainer les autres puis je reviens m’occuper de toi. Tu vas regretter de m’avoir causé tant de difficultés salope. »
Puis il tourne les talons.
Je lutte à grand peine contre les larmes. Qu’est-ce qu’il va me faire ? Me frapper ? Me violer ?
J’attends une bonne vingtaine de minutes avant d’entendre de nouveau la porte s’ouvrir. L’homme ne vient pas immédiatement me voir, je l’entends farfouiller dans mon armoire. La nausée me gagne en me souvenant que toute une partie du meuble est occupée par du matériel de BDSM.
Quelques instants plus tard, il revient. Il porte plusieurs longues bandes de cuir entre les mains et son sourire torve ne me dit rien qui vaille.
Sous mes yeux horrifiés, il entreprend de me sangler au lit. Il fait passer chaque bande sous le lit puis la serre sur mon corps. Mes chevilles, mes cuisses, mon ventre et ma poitrine se retrouvent ainsi entravés. A la fin, je ne peux plus faire un geste.
« Petit cadeau pour ta première nuit ici. »
Il exhibe deux pinces en bois dont j’ignore totalement l’usage. L’homme doit lire l’incompréhension dans mon regard car son sourire se fait plus large encore :
« Tu ne connais pas ? Ce sont des pinces à seins. Je vais les placer sur tes tétons et tu les garderas toute la nuit. »
Je me débats contre les sangles en cuir tout en suppliant :
« S’il vous plait non, non, non ! »
Un râle de douleur m’échappe quand l’homme place une première pince. Il joue un peu avec et me regarde en souriant :
« Pas agréable hein ? »
Puis il positionne la deuxième. Sa main descend le long de mon ventre, s’arrête entre mes cuisses et titille un peu mon clitoris. Un spasme de douleur me secoue, témoin des heures que j’ai passé avec le vibro aujourd’hui. Enfin, l’homme tourne les talons, éteint la lumière et s’en va.
Allongée dans le noir, enchaînée, immobilisée et avec deux pinces à sein accrochées aux tétons, je commence à sangloter sans retenue.
Les heures passent, me larmes finissent par se tarir et enfin, je sombre dans un sommeil agité.
Une sonnerie stridente me sort violemment du sommeil. Il me faut un instant pour me rappeler où je suis, dans quelle position et pourquoi j’ai aussi mal aux seins.
Le mécanisme des menottes s’ouvre et mes bras tombent. Ils ont été suspendus tellement longtemps qu’il me faut un petit moment pour réactiver la circulation sanguine dans mes doigts.
Avec précaution, j’enlève la première pince. Le brusque afflux sanguin dans mon téton m’arrache un véritable cri de douleur. Des larmes roulent sur mes joues tandis que je tente de reprendre ma respiration. La douleur est cent fois pire que lorsque le garde a posé les pinces. Je serre les dents et retire la deuxième. La douleur est tout aussi abominable.
Enfin, j’entreprends de détacher les bandes de cuir qui me maintiennent prisonnière du lit.
Je me lève et prends une douche bien chaude en tentant d’ignorer que mes tétons sont encore violacés du traitement subi cette nuit.
J’ai à peine le temps de finir de m’habiller que Jade vient me chercher pour le petit déjeuner. Nous descendons ensemble les quatre étages pour nous rendre dans la salle de restauration prévue pour les soumis.
Nous nous asseyons à une table et je me force à avaler mes céréales. Mais la douleur lancinante de mes seins me coupe l’appétit.
« Je peux m’assoir ? »
Je redresse la tête et aperçois Anaïs, la jeune femme qui a tenu tête à madame Notat dans la salle où nous nous sommes réveillés.
« Bien sûr. » Acquiesce Jade.
Anaïs s’assoit en face de moi et commence à beurrer son pain. Sans me regarder, elle affirme :
« J’aime bien ton caractère Leïla.
- Mon caractère m’a déjà couté cinq heures avec un vibro et une nuit entière avec des pinces à seins. » Je grommelle.
Les filles grimacent en entendant ça.
« Ouais mais n’empêche que tu leur tiens tête. C’est hyper courageux. »
Je hausse les épaules en observant le reste du réfectoire, peu désireuse de m’appesantir sur le sujet. Je croise alors le regard de la fille à la frange auburn.
Je fais un discret signe de tête dans sa direction et demande aux deux jeunes blondes :
« C’est qui cette fille là-haut, seule à sa table ? »
Anaïs se tourne brièvement puis répond :
« Romane, pourquoi ?
- Je ne sais pas trop, elle me fout les jetons. On dirait presque que… »
Je n’ose pas finir ma phrase. Nous sommes tous dans la même situation, puis-je vraiment accuser cette fille d’aimer voir les autres souffrir ? Je me trompe peut-être. Et je ne voudrais pas lui attirer l’inimitié des autres à cause de vagues appréhensions. Après tout, elle n’a rien fait de répréhensible.
« Moi celle qui me fout vraiment les jetons, c’est Emma. » Reprend Anaïs.
Jade et moi nous tournons vers la jeune fille brune. Seule à sa table, elle mange tranquillement et regardant dehors d’un air rêveur.
Jade exprime ce que nous pensons toutes les deux :
« Pourquoi ? D’accord elle est un peu bizarre mais elle ne parait pas méchante.
- Elle a demandé à étudier ici… » Répond sombrement Anaïs.
Je me tourne vers elle, ébahis :
« Tu plaisantes ?! Qui voudrait être soumis ici ? Ils nous traitent comme des jouets sexuels !
- Je sais bien mais c’est pourtant la vérité. Je ne sais pas comment elle a trouvé cette école mais elle est ici de son plein gré. »
Je regarde Emma du coin de l’œil, peinant à croire ce que j’entends. Les gens qui tiennent cette école nous humilient, veulent faire de nous de simples esclaves puis nous vendre. Et elle, elle est volontaire pour subir tout cela…
Notre conversation est interrompue par Fabien qui se joint à notre table. Lui non plus ne semble pas avoir bien dormi mais cela ne l’empêche pas de nous adresser un large sourire :
« Salut les filles ! Prêtes pour quatre heures de littérature ? »
Anaïs grommelle :
« J’ai toujours détesté le français…
- Ne sois pas aussi défaitiste. Je vous parie vingt euros que l’on commence par étudier Cinquante Nuances de Grey ! »
Jade, Anaïs et moi sourions. Je ne parviens pas à comprendre comment ce garçon fait pour plaisanter en pareilles circonstances mais je suis heureuse de l’avoir avec nous ce matin.
En nous rendant dans la salle de littérature, nous nous apercevons avec horreur que ce cours sera en commun avec la classe dominante.
« Deux par table, un soumis et un dominant. » Ordonne la prof, une petite vieille aux cheveux gris répondant au nom de madame Berget.
Je m’assois au fond de la salle et suis rapidement rejointe par Mathieu.
Il me sourit et demande :
« Tu te rappelles de moi ? »
Je hoche la tête sans le regarder mais il m’attrape le menton et me force à le regarder.
« Je t’ai posé une question, je veux une vraie réponse.
- Oui, je me souviens. » Je marmonne.
Il semble satisfait et me relâche.
Madame Berget passe entre les rangs nous distribuer un exemplaire de Justine ou les malheurs de la vertu, œuvre du marquis de Sade, puis commence son cours.
Pendant une dizaine de minutes, je prends des notes en ignorant du mieux que je peux Mathieu. Mais ce dernier finit par aventurer une main sur ma poitrine pour m’attraper un mamelon. Je lâche un petit cri de douleur. Mes tétons sont encore bien trop sensibles pour être manipulés.
La prof se tourne vers moi, furieuse, et me demande :
« T’ai-je autorisé à t’exprimer jeune fille ?
- Non mais…
- Pas de mais. Les soumis ne doivent pas parler sans autorisation. A la prochaine remarque, je te bâillonne. »
Je hoche piteusement la tête. L’enseignante reprend son monologue et je tente de me reconcentrer sur le cours. Mais Mathieu glisse une feuille de papier volante sur mes notes. Dessus, une question :
Je t’ai à peine touchée, qu’est ce qui t’es arrivée aux seins ?
J’ignore la question mais Mathieu ne l’entend pas de cette oreille :
Réponds ou je m’arrange pour que la prof te bâillonne.
Un garde m’a obligé à porter des pinces à sein toute la nuit. J’ai les tétons hyper sensibles et douloureux ce matin
Ok, zone interdite donc aujourd’hui. T’inquiète, il y a d’autres façons de s’amuser ;)
Je préfère ne pas imaginer ce qu’il a prévu pour “s’amuser“.
Au fait, pourquoi le garde a fait ça ?
J’ai refusé de le laisser me menotter au lit
Vous dormez menottés ?
Oui
Toutes les nuits ?
Je crois
Je bande rien que d’imaginer la scène !
Le cours continue et au bout de deux heures, la prof nous autorise une courte pause. Mathieu n’a rien retenté à mon grand soulagement.
Mais c’était trop beau pour durer. En effet, peu avant la reprise, il s’approche de moi, un bâillon boule à la main.
« Je vais te faire crier de plaisir avant la fin du cours. Je préfère te bâillonner pour que tu ne nous déranges pas une seconde fois.
- Je croyais que vous ne pouviez pas nous toucher sans autorisation ? »
Le garçon hausse les épaules avec un sourire. Je comprends qu’il s’en fiche pas mal. Nous ne sommes rien d’autre que des jouets pour eux.
Ce constat me fait froid dans le dos. A quel moment peut-on passer du rang d’être humain à celui d’instrument sexuel ?
J’envisage de me battre contre le garçon mais ce dernier ordonne à deux de ses amis de me maintenir pendant qu’il me place le bâillon dans la bouche, ferme la lanière de cuir à l’arrière de mon crâne et ajoute un cadenas.
Lorsque le cours reprend, Mathieu m’oblige à m’assoir sur ses genoux.
Très lentement sa main descend le long de mon ventre et se pose sur mon sexe. Il commence à me masser le clitoris puis entre deux doigts dans mon intimité.
Ses jambes maintiennent les miennes grandes ouvertes et sa deuxième main vient se poser sur mon thorax, emprisonnant mes bras et m’empêchant de me débattre.
Il alterne les va-et-vient dans mon intimité avec des caresses sur mon clitoris et, à ma grande honte, mon corps, ce traître, commence à apprécier le traitement.
« Tu mouilles. » S’esclaffe Mathieu.
Fort de ce constat, il continue de plus belle, m’arrachant des gémissements de plaisir étouffés par le bâillon.
Dans un état second, je remarque que d’autres dominants ont entrepris de maltraiter le soumis à leur côté.
Jade me jette un regard de dégoût mêlé de honte tandis qu’un dominant lui suçote le téton.
J’atteins l’orgasme peu avant la fin du cours sous les ricanements de Mathieu.
Lorsque la sonnerie retentit, le jeune homme rejoint un groupe d’amis et ils partent ensemble déjeuner, sans me libérer du bâillon…
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