C'était un paisible matin, mais pas pour elle ...
Anastasia se leva à cinq heures du matin. Elle ouvrit la fenêtre qui donnait sur la ruelle peu fréquentée à l'aube. Un air froid, sec vint frôler ses joues. Elle sentit sa nausée s'évanouir petit à petit. La vieille femme s'habilla d'un manteau et enroula une écharpe verte autour de son cou : elle ne voulait pas attraper un rhume au début de cet hiver glacial. Elle se dirigea alors vers la cuisine où elle se préparait une tasse de thé vert fumant avec des donuts achetés la veille. Elle alluma le radiateur, s'assit confortablement sur le canapé puis prit silencieusement son petit-déjeuner. Le petit salon avait l'air encore endormi, les couleurs des tableaux paraîssaient mornes. Certainement, cette saison était la plus dur dans l'année, mais le pire était sa solitude pendant les nuits pleuviales. Elle aurait aimé raconter à ses petits fils des contes de fée, ou entendre les plaintes infinies de ses filles, ou aller dîner dans un restaurant romantique avec son mari ... Malheureusement elle était seule dans son monde restreint ; son fils, qui était son remède, finit par la quitter. Elle se demandait où pouvait-il se trouver à ce moment-là ? Elle ne le saura peut être jamais.
Soudain, son visage se crispa et elle gémit longtemps en mettant sa main ridée sur son ventre. Depuis combien ces maudites douleurs la faisait souffrir ? Elle ne se rappelait plus. Et si c'était quelque chose de grave ? s'inquiéta-t-elle en fermant ses yeux. Sa santé la tracassait ces derniers temps : somnolence, nausée, maux de têtes très fréquents ... Devrait-elle se rendre chez un spécialiste ? Mon dieu, il va m'accorder un sac rempli de médicaments trop chers. Pourvu qu'il ne me demande pas toute ma pension de retraite pour le traitement si j'en aurais besoin ...
Elle passa son temps à regarder des documentaires sur les écoles et les nouveaux programmes pour chaque niveau. Elle souriait en évoquant ses souvenirs de jeunesse. Elle était une charmante institutrice de français, qui aimait ses élèves et son métier. Pour rien au monde elle n'aura renoncé à ceci. Mais cette foutue loi l'avait poussée à prendre sa retraite, et elle n'avait qu'à résigner.
* * *
Enfin elle se décida à consulter la pharmacie la plus proche pour un apaisant de douleurs. Elle se prépara rapidement à midi - elle savait que la nausée l'attaquerait de nouveau - puis ferma sa porte à clé. Les marches de l'escalier furent comme le mont Everest pour elle. Anastasia bougeait péniblement car sa vision était embrouillée. Elle descendit trois marches, soudain elle s'évanouit et tomba sur le mosaïque humide. Le dernier son qu'elle avait entendu avant de perdre connaissance était le cri de sa voisine : "Madame, madame !!!"
Annotations