Alliance entre Grandeurs

- Royaume de Lenk -

Quatre semaines plus tôt

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Un silence épais empruntait sa douceur au moelleux tapis pourpre et or, étendu en historien du royaume. Celui-ci racontait avec faste la Guerre des Premiers Rois, exposait les batailles le long d’une rivière de sang et couronnait de fleurs emblématiques le Premier Roi de Lenk.

Blasphème au silence, un bouchon de liège fut retiré, une plume de paon trempée, une date importante inscrite au coin d’un papier vélin onéreux.

– Sendhar. Faites-moi part de vos désirs.

Les Rois prirent le verre de vin offert par un valet tiré à quatre épingles. Et Sendhar y trempa les lèvres le temps d’étudier sa réponse.

– Ma fille tient à garder, en sus de ses dames de compagnies, son personnel actuel, qui se verra donc hébergé par vos soins.

Pour Alfir, loger les domestiques de Tehka revenait à ouvrir ses portes à un constant espionnage des faits et gestes du royaume entier.

Une vague de colère partit de son bas ventre et monta vers son thorax. Il sentit l’ire emplir ses artères, pulsées par un coeur rouge de fureur. Ses muscles faciaux se crispèrent et une lueur assassine illumina ses yeux.

Mais il ne pouvait laisser s’échapper ce courroux impétueux.

Les yeux mis clos, il saisit son verre et refroidit son humeur d’une gorgée de vin frais, sans en éteindre le feu pour autant.

Alfir reposa son verre d’un geste sec. Le pied se brisa sous l’impact, le vin tangua d’un bord à l’autre de la coupe pour finalement sauter sur le tapis et s’ajouter au bain de sang couturé. Le roi toussa pour cacher sa gêne autant que sa colère réprimée, et laissa un valet inquiet et méticuleux vérifier l’état de sa main, avant de ramasser les débris.

Ignorant l’incident, le Roi de Lenk prit la parole:

– Greffier, veuillez inscrire la demande du Roi Sendhar de Tehka. Puis, s’il me le permet, vous inscrirez aussi son accord à un soutien à la défense du royaume, et en particulier au palais, pour assurer la sécurité de la princesse Ayela de Tehka, de ses dames de compagnies et son personnel.

Sendhar connaissait le manque du royaume de Lenk en soldats aguerris, ainsi que la situation tendue, sinon précaire, avec Senta et Khal, deux royaumes envieux des richesses de Lenk. D’après ses propres conseillers, Sendhar avait le choix entre s’allier avec lesdits royaumes et écraser Alfir, auquel cas il devrait partager les richesses en tiers, ou, comme il l’avait décidé, échanger sa fille et un soutien militaire contre la richesse du royaume de Lenk pour Ayela.

Le Roi de Tehka acquiesça du menton puis termina son verre.

Le greffier consigna les dernières paroles, appliqua un buvard sur les lignes sombres pour absorber le surplus d’encre, coula deux cercles de cire pourpres et demanda à ses Majestés d’y appliquer leurs chevalières en sceaux inviolables.

Le Greffier saupoudra les cachets d’une poudre d’or, referma le pot d’encre d’un geste consciencieux, nettoya sa plume d’un chiffon enduit de térébenthine et rangea le tout dans une pochette de cuir.

Il s’inclina et quitta les lieux, prêt à se rendre à la Salle des Conseils, attendus par les douze Conseillers de Lenk et les trois conseillers-émissaires de Tehka.