Chapitre 32 :
Le prince Etienne continua sa route, surpris par le regard du soldat.
J’ai l’impression d’avoir déjà vu ces yeux...
Il n’eut pas le temps de trop y réfléchir, car déjà le prince Roland recommençait à parler, expliquant moult choses peu intéressantes sur la ville. Les murs du château était proche, et l’on pouvait voir culminer ses plus hautes tours. Le soleil faisait briller le blanc nacré, et le prince de Ryke Fryst ne pu que s’imaginer dans un si beau château, celui de de Novis, la capitale de son pays, était bien moins impressionnant.
— Pardonnez-moi, s’enquit Etienne avec un faux sourire. Encore combien de temps avant que nous n’allions au château ? Cette petite balade commence à me fatiguer.
Son conseiller le fusilla du regard, et Roland fut surpris par une telle question.
Au diable les convenances ! J’en ai marre de marcher.
— Nous allons nous y rendre tout de suite, assura le second prince.
— Parfait.
Roland fit signe aux gardes de protéger un autre itinéraire, plus direct, et tous se remirent en place pour assurer la sécurité. Non sans devoir pousser quelques habitants au passage. Plus loin, Luke, Eddie et Sokann fermait le cortège royal.
— Ils prennent un chemin plus court ? observa ce dernier. Ils n’ont pas intérêt à moins nous payer !
— Quelque chose ne va pas ? demanda Eddie en repérant le malaise chez son ami.
— Le blond, c’est bien le fils du roi de Ryke Fryst c’est ça ?
— Oui, répondit Sokann. Le Sjef n’a pas pu faire le déplacement.
— Il faut à tout prix que je lui parle ! s’exclama Luke.
— Pourquoi ?
— Je... C’est plus qu’une impression, je suis sûr de l’avoir déjà rencontré avant.
L’information fit tout de suite tiquer Eddie, un début d’explication s’offrait à lui.
— Il t’aurait fait jeter dans « La Cage » ?
— Ça je ne sais pas trop, souffla Luke, encore sous le choc. Je dois aller le voir.
— Calme-toi ! intima Eddie en l’empêchant de s’avancer. C’est le prince d’un autre pays ! Tu penses vraiment pourvoir lui parler comme ça ?
— Je...
— On termine notre travail, et on en discutera ce soir, conclu Sokann.
La suite de leur mission se déroula sans le moindre problème. Ils virent le prince pénétrer dans l’enceinte du château, hors d’atteinte pour eux.
Plus tard sans la soirée, Luke faisait les cent pas dans leur chambre, incapable de se calmer. Cela faisait bien rire Eddie, qui ne l’avait jamais vu dans cet état.
— Tu peux te calmer tu sais ? se moqua-t-il avec un sourire. Il ne peut pas revenir plus vite.
— Je ne peux pas m’empêcher de réfléchir, répondit rapidement l’amnésique.
Il avait beau creuser et creuser encore, impossible de voir plus que cette scène avec la glace recouverte de sang. Sa mémoire était une pièce sombre, plus il cherchait, et moins il trouvait ce qu’il venait chercher. Après encore une heure, il s’assit finalement sur son lit, fatigué et avec un sérieux mal de crâne.
C’est ce moment que Sokann choisit pour pénétrer dans la pièce, le visage fermé.
— Alors ? l’agressa Luke.
— C’est quasiment impossible, dit-il en secouant la tête. Le prince reste un mois, mais ne sortira apparemment plus du château.
— On peut demander une audience ? tenta Eddie.
— Il ne va recevoir que des nobles ou des riches, et nous ne sommes même pas dans les registres de la ville de toute façon.
Luke jura intérieurement, c’était sa seule piste depuis des mois et elle allait lui filer sous le nez sans qu’il ne puisse rien faire. La même petite voix que ce matin lui soufflait que cela n’importait pas, qu’il n’avait pas besoin de retrouver la mémoire finalement. Mais une envie irrépressible de savoir avait prit le dessus, il ne voulait pas rester dans l’ignorance.
La solution le frappa sans prévenir, a la fois totalement stupide, et parfaitement logique.
— Il suffit de s’introduire dans le château dans ce cas dit-il à ses deux compagnons.
Sokann se mit à rire, mais le regard de l’amnésique était parfaitement sérieux, quant à Eddie, son sourire signifiait qu’il était déjà partant.
Ils pénétrèrent sans bruit dans la boutique sombre et poussiéreuse. Vu de dehors l’échoppe avait l’air tout à fait normale, bien qu’un peu délabrée, mais vu de l’intérieur c’était juste un débarras rempli de choses inutiles.
Il pourrait faire un peu de ménage quand même, pensa Luke en avisant une montagne de déchets dans un coin.
Sokann avait totalement disparu pendant quatre jours, soi-disant pour aller chercher la seule personne capable de les aider dans leur folle opération. A son retour, il les avait emmenés dans le quartier Ouest, Luke et Eddie était venu armés, au cas où tout cela se révèle être un piège.
— Il ne devrait pas tarder, dit simplement Sokann.
— Tu vas nous dire ce que t’étais partis faire ? s’impatienta le chasseur de relique.
— Voir Gorlon.
— Quoi ? cria Luke. Et il t’a laissés partir ? il eut un mouvement de recul et dégaina son katana. C’est un piège hein ?
— Peut-être, plaisanta Sokann en riant. Il est toujours très en colère contre vous, mais il n’aurait rien à gagner en vous tuant.
— Et qu’est qu’il gagne en nous aidant ?
— La preuve que les nobles ne sont pas si infaillibles que cela.
La voix venait du fond de la boutique, et un petit homme rondouillard s’avança vers eux. Il avait la mine affable, ainsi que des cheveux bruns coupés très courts, qu’une calvitie menaçait. L’homme continua de parler.
— J’ai déjà réussi à passer les murailles, se vanta-t-il. Mais je n’ai jamais osé rentrer dans le château lui-même, je tiens à ma vie voyez-vous ?
Il s’approcha d’une chaise, et balança tout ce qui reposait dessus sur le sol, avant de s’assoir dessus.
— Entre les soldats d’élites, et les Altius qui vivent là-bas, il faudrait être complètement fou pour vouloir s’y rendre !
— Et je t’ai apporté ce dont tu as besoin, déclara Sokann en désignant ses deux compagnons.
— Si vous réussissez à pénétrer à l’intérieur, et à laisser une trace de cet effraction, Gorlon est prêt à tout oublier et à grassement vous récompenser ! Il ne désire rien de plus qu’humilier la noblesse.
— Ça me fait un peu mal de travailler pour lui, cracha Luke.
— Tant qu’il nous aide, je m’en cogne, dit Eddie en souriant.
Le petit homme sauta de sa chaise avec agilité, puis s’avança vers l’amnésique pour lui tendre la main.
— Moi c’est Laz, j’espère que l’on va faire du bon travail ensemble !
— Je l’espère aussi, répondit Luke.
Ils débarrassèrent une table en utilisant la méthode du jeté de déchet, puis se mirent au travail sur un plan. L’opération allait avoir lieu dans une semaine.
Pour Luke et Eddie, les chances de s’en sortir vivant étaient quasiment inexistantes.
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