Chapitre 43 :

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La maison de pierre, était plongée dans une poussiéreuse obscurité. Sho’Ryu attendait calmement, captant tout les sons alentours du mieux que possible. Il y avait une respiration à sa gauche, des bruits de pas lointains, mais rien d’autre autour d’eux. La petite fille à côté de lui était blottit contre son kimono, et le bretteur dut gentiment la repousser pour pouvoir attraper son katana blanc, Shiroi. Il entendit alors une voix dans sa tête.

Fais attention, tu as déjà beaucoup utilisé mon pouvoir aujourd’hui.

Sho’Ryu ignora l’avertissement, et il sentit la puissance de l’arme se répandre en lui. Depuis la tragédie de la ville souterraine, auquel le bretteur ne pouvait s’arrêter de penser, il avait atteint un niveau de maîtrise supérieur. Auparavant il maniait ses armes à la perfection, mais les lames jumelles restaient des armes pour autant. Aujourd’hui elles étaient des extensions de son propre corps, il avait atteint un état supérieur à la Libération, il était en « symbiose » avec ses armes.

La peau de sa main droite se mit à pâlir, devenant de plus en plus blanche, et il commença à ressentir parfaitement la magie autour de lui. Il était une de ses sources, puissante mais affaiblie, l’enfant en était une autre, plus faible et apeurée. Sho’Ryu en ressentit d’autres, heureusement plus éloignés. Elles étaient sinistres, désordonnées, chaotiques, elles appelaient à l’aide, tout dégageant une envie de sang.

Rassuré de se savoir en sécurité, et sentant un profond mal de crâne apparaître, Sho’Ryu rangea l’arme, avant de caresser la tête de la petite fille à côté de lui.

— Tout va bien, ici nous sommes en sécurité.

Elle ne répondit rien. L’enfant était la seule personne « vivante » que Sho’Ryu avait rencontré ici. Après plusieurs semaines de marche, il s’était engagé dans l’armée pour affronter Drocia, mais lors du premier combat, il s’était contenté de courir pour passer de l’autre côté de la forteresse drocienne. Quand il entrait en symbiose avec ses deux lames il était véritablement inarrêtable, et les soldats n’avaient pu que constater son passage sans pouvoir réagir.

Une fois en Drocia, il était arrivé à Mendig. On lui avait alors annoncé que les seuls bateaux qui partaient pour Egen, le faisaient depuis la capitale. En quittant ce premier village, jamais Sho’Ryu n’aurait pu deviner ce qui l’attendait dans le second. Même de loin, il avait un mauvais pressentiment. Les maisons avaient l’air abandonnés et sinistres, construites en pierre et en bois, avec des poutres apparentes, leur donnant un bel aspect. Cependant bien que ce soit le début d’après-midi, personne n’était visible.

Il avait à peine pénétré dans l’enceinte du village, qu’il avait sentit le piège se refermer sur lui. La pénombre avait pris place autour de lui, comme si la nuit était tombée en un instant. Un brouillard épais s’était aussi levé, réduisant encore son champ de vision. Sho’Ryu avait alors sentit des présences partout, tout son corps lui avait hurlé de s’enfuit le plus rapidement possible, et sans même prendre le temps de les rencontrer, il avait fui pour se cacher dans une maison. Il avait alors trouvé une petite fille, recroquevillé dans un coin, totalement muette et apeurée.

Dès lors, le bretteur était allé de bâtiment en bâtiment, fuyant les étranges présences. Il avait tenté de quitter le village à plusieurs reprises, mais une sorte de barrière le bloquait systématiquement, et il n’avait pas encore réussis à passer au travers.

Sortant de ses pensées, il se leva pour fouiller dans les placards de la maison. Il n’y trouva que des vieux biscuits, qu’il partagea avec l’enfant. Après plus de deux semaines à se nourrir de cette manière, Sho’Ryu commençait à avoir sérieusement faim. La petite fille remua, et il se rendit compte qu’elle dormait.

Depuis combien de temps n’ai-je pas dormis non plus ?

Il utilisa Shiroi, et devant l’absence totale de danger, il laissa ses paupières se fermer doucement.


Un bruit sourd le réveilla en sursaut, il voulut se relever d’un bond, mais la petite fille dormait à poing fermée sur lui. Il la secoua pour la réveiller, tout en vérifiant la situation.

Ils étaient entourés, les sources de magies maléfiques étaient partout, et il y en avait même sur le toit. Les choses attendaient, essayant parfois d’ouvrir les portes et les fenêtres que Sho’Ryu avait prit le temps de verrouiller. Maudissant son inconscience, le bretteur arracha un morceau de rideau, et fit monter la petite fille, à présent paniquée, sur son dos. Il enroula le bout de tissu autour d’eux, pour qu’elle soit maintenu derrière lui, et ne tombe pas au mauvais moment.

— Accroche-toi bien, on doit se déplacer, lui expliqua-t-il doucement.

Sho’Ryu monta à l’étage, et fit un travers une des fenêtres une des formes passer. Il se recula pour prendre de l’élan, puis courut avant de bondir à pleine vitesse. Il brisa la vitre, et se réceptionna le plus gracieusement possible après une chute de quelques mètres. Les créatures s’agitèrent derrière lui en grognant, tandis qu’il s’enfuyait le plus rapidement possible.

— Ne te retourne pas, ordonna-t-il entre deux respirations rapides. Ils ne nous suivront pas.

Comme pour le faire mentir, une forme le dépasse d’un bond pour lui bloquer la route. Sho’Ryu n’eut pas le temps de l’observer, car une main pleine de griffe longue comme un couteau le forcèrent à se baisser.
D’habitude elles ne me suivent pas, pensa-t-il en maudissant la situation. Pourquoi sont-elles enragées comme cela ?

Il se remit à courir en changeant de direction, tout en entendant les monstres le poursuivre. Il bifurqua plusieurs fois, mais les créatures ne le lâchaient pas d’une semelle, certaines courant même sur les toits. Sho’Ryu commit une erreur supplémentaire, en s’engageant dans la mauvaise rue. Un cul de sac s’imposa à lui, le forçant à se retourner.

Les monstres d’approchèrent lentement, voyant que leur proie n’avait plus d’option de fuite. Le bretteur put enfin voir à quoi ressemblaient ses poursuivants, et directement il sentit son estomac se retourner, et un haut de cœur le saisir.

Les choses avançaient à quatre pattes, mais se dressèrent sur celles arrières en s’arrêtant. Leurs muscles étaient hypertrophiés, au point de déchirer leurs vêtements, qui pendaient en lambeaux. Leur peau avait une teinte marron-gris, comme celle d’un cadavre en décomposition, parfois de larges plaies étaient visibles sur les monstres, sans qu’aucun sang n’en coule. Le pire fût leur visage, semblable à celui d’un humain, mais bloqué sur une seule expression de souffrance, comme si la créature subissait une douleur intense en permanence. Des griffes et des crocs proéminents venaient compléter le tout, leur donnant un aspect à la fois triste, et dangereux.

— Maman !

— Quoi ? s’étonna hurla Sho’Ryu.

La petite fille s’agitait dans son dos, et voulait à tout prix descendre. Quand le bretteur fit volteface, il vit une créature accrochée au mur, qui tenait les bras vers eux. Le monstre avait un visage vaguement féminin, mais il ne put croire qu’il s’agisse de la mère de l’enfant.

— Arrête de bouger ! grogna le Nijimien.

Sho’Ryu dégaina ses deux katanas, et les supplia intérieurement de leur prêter son pouvoir. Il sentit la « symbiose » débuter, et la peau de sa main droite se mit à pâlir, tandis que la main gauche s’assombrit. La puissance des deux reliques se déversa en lui comme un torrent, et comme la dernière fois qu’il avait utilisé ce pouvoir, Sho’Ryu dut lutter pour garder sa conscience intacte.

Un des monstres beugla avant de se jeter sur lui, la lame blanche fusa plus rapidement que les griffes, et la lame traversa la créature sans la blesser physiquement, mais trancha sa conscience, la faisant tomber inanimée au sol. Profitant de la brèche, Sho’Ryu se propulsa en avant pour fuir, tout en tranchant un monstre, avec la lame noire cette fois-ci. Malgré les protestations de la petite fille derrière lui, le bretteur continua de courir, ses jambes avalant les mètres à une vitesse inhumaine. Cependant les choses se déplaçaient à quatre pattes, et le poursuivaient inlassablement, l’empêchant de créer une vraie distance entre eux.

Encore plus vite !

Il puisa encore plus dans la puissance des lames jumelles, et accéléra davantage. Après vingt secondes de course, son corps tout entier lui criait de s’arrêter, ne supportant déjà plus la magie des armes.

Sho’Ryu s’arrêta sur ce qui ressemblait à la place du village, pour reprendre son souffle quelques instants. Il ne pouvait utiliser la « symbiose » qu’une minute à pleine puissance, et après cela une terrible fatigue s’emparait de lui. Plus aucune créature ne faisait du bruit autour de lui, alors il utilisa Shiroi pour vérifier la présence de sources magiques.

C’est à cet instant qu’il la ressentit, une magie bien plus puissante et profonde, et d’une noirceur presque infinie.

Sho’Ryu tourna la tête, pour voir trois hommes armés s’avancer à travers la brume.

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