Épilogue
Andross s’avança sur le quai, au loin, les bateaux commençaient à disparaître derrière l’horizon. Un mince filet de sang coulait de son bras droit, et il était sûr que son visage était totalement brulé. Cela ne l’empêchait pas de marcher, son corps ne sentait pas la douleur, il n’en était plus capable. Il marcha encore jusqu’à atteindre la partie à moitié détruite, le cadavre du compagnon de Luke avait par chance échappé aux particules d’Ekerim, et n’avait pas pourrit. Le Daevas se pencha pour ramasser sa relique, l’arc doré était encore chaud et remplit de mana.
— Sans toi jamais ils ne se seraient échappés, dit-il au corps inanimé de Sokann. J’aurais dû te tuer quand j’en ai eu l’occasion.
De la magie résiduelle flottait encore autour du barbu, impossible à voir à l’œil nu, mais facile à ressentir pour n’importe quel mage expérimenté. Son âme était encore là. Andross tendit le bras vers le sol, et un bras jaillit de son ombre pour attraper Sokann, et lentement l’attirer à l’intérieur, jusqu’à le faire totalement disparaître. Le blessé frissonna, il ne sentait pas la douleur, mais ses réserves de mana étaient quasiment vides, et la fatigue commençait à peser sur ses épaules.
Andross se retourna vers la ville, à présent complètement déserte, dans laquelle un gigantesque humanoïde sans tête donnait des coups de pieds dans des maisons, comme un enfant en colère. Malgré la fuite de son ancien allié, la mission restait une réussite totale. Il était parvenu à appeler un démon, premier pas vers leur objectif final. Ekerim arracha une tour du château, avant de la jeter de toute ses forces le plus loin possible. Elle s’écrasa avec fracas sur un voilier non lui du Daevas. Le vent continuait de porter toujours plus loin les particules noires, et partout ou elles tombaient la mort frappait.
Un sourire éclaira le visage suturé d’Andross, un autre défi l’attendait dès qu’il serait complètement rétabli : comment contrôler une telle calamité ?
Le roi d’Astria congédia ses derniers conseillers, avant de soupirer longuement en s’affalant sur son trône trop petit pour lui. Vingt ans en arrière il lui fallait une campagne entière pour présenter le moindre signe de fatigue, et aujourd’hui une simple journée de paperasse l’éreintait déjà. Il caressa son visage dur et marqué par la guerre, en sentant que déjà sa barbe commençait à repousser. Elle commençait à devenir grise, tout comme ses longs cheveux qui tombaient sur ses épaules.
Une question lui revenait souvent, Que deviendrait ce pays après sa mort ? Son fils se montrait déjà d’une grande sagesse, et les Altius feraient de leur mieux pour l’épauler. Aucune armée ne pouvait rivaliser avec celle d’Astria, les soldats Drociens l’avaient appris à leur dépend. Une seule offensive de sa part, sans même utiliser sa relique, et ils avaient demandé un cessez-le-feu.
— Le temps des guerres est bien loin derrière, murmura-t-il en caressant son alliance.
Aelioss allait se lever pour regagner ses quartiers, quand la porte s’ouvrit avec fracas. Il n’avait même pas senti Katz Dieb s’approcher, il se faisait vraiment vieux.
— Quelle surprise ! dit-il de sa voix grave et puissante. Je ne m’attendais pas à te revoir aussi tôt, j’espère que ça ne signifie pas que le roi t’as mis dehors ?
— J’aurais préférée, répondit-elle sèchement.
— Que se passe-t-il ? demanda Aelioss, en comprenant que quelque chose n’allait pas. Ou sont tes hommes ?
— Morts, nous avons passés l’avant-poste sans problème, étant donné qu’il n’y avait personne. Puis des types avec le visage masqué nous ont attaqués par surprise, tous des mages et des combattants expérimentés. J’ai pu m’en débarrasser, mais les autres n’ont pas eu cette chance. Ils étaient malins, une fois morts leur corps se désintégraient, impossible de les examiner.
— Tu as une idée sur leurs identités ?
— A ce moment là je n’étais sûre de rien, mais j’ai senti que quelque chose n’allait pas en Drocia. Je suis née là-bas, mais jamais mon pays ne m’a paru aussi triste et menaçant. Mon cheval n’a pas survécu à l’attaque lui non plus, alors j’ai utilisé la libération pour me rendre à Helmstedt le plus rapidement possible. Chaque village que j’ai croisé était complètement vide, y compris le mien.
Aelioss vit que Katz serrait les poings, il ne dit rien pour la laisser terminer son histoire.
— Je suis arrivée à la capitale, mais il était déjà bien trop tard. Avez-vous déjà entendu parler d’Ekerim ?
— Ekerim ? répéta le roi. Le démon ? Celui capable qu’on dit capable d’écraser des civilisations ? C’est une vieille légende que l’on m’a déjà racontée oui.
— Il était là, un géant plus grand que le château, je n’ai pas eu à m’approcher plus pour voir le massacre qu’il avait commis. Les murs de la ville étaient effondrés sur eux même, la pierre était entrain de pourrir comme un fruit trop mûr, et partout où mon regard se posait, je pouvais voir des cadavres en décomposition.
Si elle cette histoire venait de n’importe quel autre de ses soldats, Aelioss aurait eu des doutes. Mais Katz Dieb était son meilleur élément, et donc tout cela était forcément vrai.
— Est-ce que cette chose se déplaçait ? demanda-t-il, en réfléchissant à ce qu’il fallait faire.
— Oui, mais je suis resté deux jours devant la ville, et il n’a pas quitté l’enceinte de la cité. J’ai mis cinq jours à revenir en courant le plus rapidement possible et j’espère qu’il est encore là-bas. Mais si ce monstre décide de marcher vers Astria... Je ne sais pas comment nous pourrions l’arrêter.
— Nous allons trouver un moyen ensemble, rassura Aelioss. Je vais rassembler tout le monde pour une réunion d’urgence.
— Une telle créature... Elle n’a pas pu apparaître comme cela, dit Katz en se mordant la lèvre. Qui aurait pu réveiller un monstre pareil ?
— As-tu déjà entendu parles des Daevas, répondit le roi.
— La secte ? Pourquoi feraient-ils ça ?
— Si seulement je pouvais le savoir.
Luke entendit du bruit derrière lui, et reconnut Elise à sa manière de marcher, toujours sur la pointe des pieds. Elle s’installa à côté de lui à l’arrière du bateau, en lui tendant un gobelet rempli de vin.
— Merci, dit-il en attrapant le verre.
— Tu devrais rentrer à l’intérieur, conseilla-t-elle en frissonnant. Il fait froid la nuit.
— J’aime bien l’air marin, répondit-il en souriant. Pas toi ?
— Je n’irais pas jusque à dire que j’ai le mal de mer, mais je suis bien mieux sur la terre ferme.
Il l’attira doucement contre lui, et elle se blottit confortablement sous son manteau. Ils restèrent encore quelques instants sous le ciel étoilé, profitant en silence de la présence rassurante de l’autre.
— Comment va Eddie ? s’enquit Elise.
— Mal, très mal. Il essaie de le cacher en plaisantant sans arrêt, mais je vois bien que la mort de Sokann l’a touché.
— Ce n’est pas le seul, Sho’Ryu ne fait que s’entraîner jusqu’à tomber de fatigue, quant à toi tu ne fais que te morfondre.
— Eh ! Je ne me morfonds pas, je réfléchis.
— Tu n’es pas responsable Luke, je te l’ai déjà dit. Que tu sois là ou non la ville aurait quand même été détruite.
Elle l’embrassa sur la joue, et il eut soudain moins froid.
— Je sais, mais si j’avais agi différemment, peut-être que l’on aurait pu sauver plus de monde.
Elise soupira, et enleva doucement le gant sur la main droite de Luke, avant de caresser la marque en forme d’œil.
— Tu penses vraiment que c’est la meilleure chose à faire ?
— Si je maîtrisais ce pouvoir, j’aurais pu arrêter ces créatures, j’aurais pu combattre Andross, et je suis même persuadé que j’aurais pu repousser ce géant.
— Ce n’est pas dangereux ?
— Si, très. J’ai peur de me faire dévorer par ce qui se trouve à l’intérieur de moi. Mais si je ne fais rien je serais coupable. L’ancien Luke était un Daevas, j’en suis sûr à présent. Si je ne fais rien pour m’opposer à eux, ce serait comme redevenir lui.
— Alors on va y arriver, mais on va faire ça ensemble. Demain on t’aidera tous, et si tu as l’impression de perdre pied, d’être surpassé par ce pouvoir, alors on viendra tous te récupérer.
Il lui sourit, et ils s’embrassèrent avec passion, pendant que leur embarcation continuait de voguer paisiblement.
Et voilà, c’est la fin du premier tome ! Jusqu’à présent je n’avais jamais réussi à écrire une aussi longue histoire sans abandonner, et je tiens à sincèrement remercier Reveusesanstalent (qui en a beaucoup en réalité) et Guy de Grenoble qui m’ont soutenu tout le long, et sans qui je me serais sûrement démotivé. Je remercie aussi le meilleur dessinateur que je connaisse : theoperru (allez le suivre sur instagram) pour m’avoir fait la couverture !
J’ai vraiment pris beaucoup de plaisir à écrire, et j’espère que vous en avez eu autant en me lisant. J’ai beaucoup de nombreux rajouts à faire, et de nombreuses fautes à corriger pour que tout soit parfait, mais je suis satisfait de ce premier tome.
N’hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, qu’est ce que vous avez aimez, quels sont les moments qui vous ont moins plu, qu’est ce que je pourrais améliorer, quel est votre personnage préféré, etc... Bref dites moi tout, j’ai très envie de connaître votre opinion !
Je vous remercie encore de m’avoir lu jusqu’ici, et si vous êtes la pour la suite j’espère qu’elle vous plaira aussi !
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