Les suspects.

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Pour les autorités, le plus marquant dans cette affaire est l’absence d’indices malgré la violence avec laquelle la famille a été torturée et assassinée.

La première hypothèse évoquée par les enquêteurs est celle d’un cambriolage qui aurait mal tourné et dans lequel un élément extérieur serait venu avorter l’effraction. Mais cette dernière est vite abandonnée, les enquêteurs considérant que si une tierce personne avait été témoin du crime et avait fait fuir les contrevenants, elle aurait probablement libéré la famille avant de contacter les autorités.

La seconde hypothèse, celle d’un tueur en série méthodique et organisé, est elle aussi très vite mise de côté. Selon les experts, le besoin de reconnaissance et l’égo démesuré de ce type de criminel les poussent à signer leurs crimes pour faire parler d’eux.

L’enquête va piétiner pendant plusieurs mois jusqu’à ce qu’une lettre anonyme soit réceptionnée par le bureau du shérif de Rigby, le 8 octobre.

Le suspect potentiel y explique comment et pourquoi il aurait torturé et tué la famille Sheridan, avant d’enlever le petit Josh pour en faire son « esclave sexuel ». L’homme se décrit comme détraqué et violent, avec des tendances perverses, pédophile et sado-maso.

Seulement, plusieurs incohérences vont rapidement être relevées par les experts de la police scientifique :

— Les corps ne sont pas décrits aux emplacements exacts où ils ont été retrouvés et leurs positions ne sont que très approximatives.

— La description que l’individu fait des objets utilisés pour les sévices n’est que partiellement exact.

— Le meurtrier présumé décrit avec beaucoup de détails la façon dont il aurait abusé sexuellement de la famille, en insistant sur le fait d’avoir « offert sa semence et ses divers fluides corporelles » à chacun d’entre eux, tandis que le petit dernier était forcé de le regarder faire.

Seulement, aucune trace de fluides corporelles ou de liquides séminales extérieur à ceux des membres de la famille n’a été retrouvé sur la scène du crime et les sévices sexuels perpétrées ne sont pas d’ordre physique, mais uniquement faites à l’aide d’objets.

La méthodologie et le besoin de perfection des tueurs en série ne laisse aucune place à l’approximation. Dans la grande majorité des cas, l’excitation suscitée par leurs crimes, allant jusqu’à la stimulation sexuelle, leur confère une prodigieuse mémoire photographique, auditive et olfactive qui leur permet de se souvenir du moindre détail, allant jusqu’à leur permettre de décrire les odeurs et parfums ou même certains sons. Un besoin compulsif de reconnaissance et d’admiration qui les poussent à une précision exacerbée dans la mémorisation des détails.

Les experts graphologues vont déterminer qu’il s’agit d’un homme d’âge moyen, peu éduqué aux vu des nombreuses fautes d’orthographe et erreurs de grammaire. Il est dépeint comme un mythomane narcissique en mal de médiatisation.

Une spécificité graphologique va leur permettre de le localiser dans la banque nationale des délinquants et criminel.

Dans la plus grande discrétion, Donald Harris, un afro-américain de 33 ans, arrêtés plusieurs fois pour attentat à la pudeur et consommation de stupéfiant, est arrêté à son domicile de Salt Lake City le 1 novembre 1986, alors qu’il s’apprêtait à poster une nouvelle lettre anonyme.

Après cinq jours d’interrogatoire et plusieurs examens psychologique, les experts confirment qu’il n’a rien à voir avec l’affaire Sheridan et qu’il souffre d’une forme grave du syndrome de Münchhausen. Il sera tout de même inculpé et écroué pour possession et diffusion de photographies pédopornographique, suite aux nombreuses images trouvés à son domicile lors de la perquisition.

Retour à la case départ pour les enquêteurs.

L’affaire végète jusqu’au matin du 6 janvier 1987, jour où le bureau du shérif de Rigby reçoit et enregistre un mystérieux appel anonyme :

Une voix masculine explique détenir le petit Josh et réclame dix millions de dollars en échange de sa libération. Lorsque l’officier au bout du fil demande à entendre la voix de l’enfant, l’homme raccroche.

Il rappelle le soir même en précisant qu’il souhaite que l’argent soit mis dans un sac de sport et déposé aux pieds de la statue d’Abraham Lincoln au Lincoln Mémorial situé à Washington, le samedi 10 janvier à 11 h du matin précise. Il raccroche à nouveau sans certifier la présence de l’enfant.

Malgré la méfiance des autorités, un vaste dispositif est mis en place autour du monument pour interpeller le suspect. Des centaines de policiers en civil et agent du FBI sont dépêchés sur place. Des snipers sont postés sur les toits des bâtiments alentour et des barrages de police sont disséminés aux quatre coins de la ville, prêt à le cueillir en cas de fuite.

À 11 h précise, un agent dépose un sac rempli de faux billet aux pieds de la statue, puis s’éloigne sans se retourner. Au bout de quelque minute, un homme s’empare du sac et se met à courir en direction du Arlington Mémorial Bridge sûr lequel il est intercepté par des agents du FBI.

L’affaire est remise sûr le devant de la scène et les médias diffusent très largement la photo de celui qu’on surnomme « Le monstre de Rigby ».

Andrew Fergusson jr, 36 ans, est le coupable idéal ; arrêter 6 fois pour cambriolage et vol avec violence, il sera décrit comme sans pitié, pervers et avide de sang par la presse à scandale.

Mais pour les enquêteurs, la vérité est tout autre.

Après un mois d’interrogatoire et après avoir baladé la police et le FBI à travers plusieurs états, Fergusson n’a toujours pas avoué l’endroit exact où il détient Josh.

Les autorités vont fouiller toutes ses propriétés ainsi que celle de son ex-femme et de ses parents en vain. Fergusson et un menteur pathologique qui cherchait juste un moyen rapide de s’enrichir, tout en ayant son petit quart d’heure de gloire.

Pour le prouver, la police va alors avoir recoure à une méthode peu orthodoxe : ils font imprimer un faux magazine qui dépeint Fergusson comme un lâche incapable d’avoir assassiné la famille Sheridan.

Le piège fonctionne, Fergusson avoue ne pas savoir où se trouve Josh. Il est condamné pour entrave à une enquête fédérale ainsi que plusieurs délits mineurs et écope de 15 ans de prison avec suivi psychiatrique.

L’affaire et définitivement classé sans suite le 10 juillet 1994, faute d’indices.

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