Chapitre VII

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Quand Victoire reprit conscience, elle était dans une charette, du moins c'est ce qu'elle pensait.

Elle voulut ouvrir les yeux mais ne vit rien. Elle voulut crier mais n'y parvint pas. Un baillon lui cachait la vue et un autre était placé devant sa bouche. Elle voulut bouger ses bras mais n'y parvint pas. Elle voulut bouger ses jambes mais n'y parvint pas. Ses mains avait été attaché derrière son dos et ses chevilles, liées.

« Où suis-je et qu’est-ce que je peux faire ? »

Une idée germa dans la tête de Victoire. La fillette se concentra très fort. Elle ne s’était jamais transformé et ignorait comment procéder mais d’après Uranus et Pitoucha, elle était capable de le faire. Elle ne pouvait pas se transformer en cheval ni en chiens pour pouvoir enlever ses liens. En serpent peut-être?

Tout à coup, les cahots de la charette cessèrent. Il y eut un léger grincement.

- Qu'est-ce que... ?! s'exclama une voix familière qui semblait être celle de Pierre. Mystère, que fais-tu là?

Tandis que les pas s'éloignaient, la fillette sentit une respiration pas très loin d'elle. Elle frissonna.

- Victoire ne tant fait pas. C'est moi!

On lui coupa les baillons et les cordes qui la retenait.

- Uranus? murmura-t-elle en gardant les yeux fermés à cause de la lumière encore trop aveuglante.

- Oui. Maintenant, écoutez-moi bien toutes les deux. J'ai coupé vos liens mais vous allez fuir seulement quand je vous donnerai le signal. Vous monterez sur Mystère et le laisserez faire. Est-ce clair?

Victoire mit un moment pour se rappeler qui était Mystère. C’était un étalon fougueux à la robe alezane. Elle ouvrit les yeux et vit vit un immense chat sauter par terre. Elle étouffa un cri de surprise.

Devant elle se trouvait un tigre au pelage bleu ciel avec des rayures et des ocelles dorées. Une corne ornait son front et deux immenses ailes aux membranes colorées de dégradés de couchers de soleil s’élevaient du dos à côté de pics dorsaux.

- Soeurette... que s'est-il passé? demanda Jaréa, hésitante.

Victoire se tourna vers elle. L’ainée ouvrit les yeux et vit la magnifique créature.

- Que... ?!

Le tigre bondit en avant et disparut du champ de vision des deux sœurs. L’ainée avait la bouche ouverte de stupeur. La cadette lui dit:

- C’est... je pense que c’est Uranus.

- QUOI ?

- Inutile de crier. C’est lui qui m’a délivré et à part cette créature, je ne l’ai pas vu.

L'ainée fronca les sourcils mais d'avoir pu ouvrir la bouche, des bruits d'affrontements retentirent. Victoire ferma les yeux en espèrant qu'Uranus s'en sorte bien.

- Sur mon dos, vite!

La fillette sursauta et rouvrit les yeux. Un cheval se tenait devant eux, les fixant d'un regard impénétrable. Jaréa intervint :

- On ne devait pas attendre le signal d'Uranus?

Mystère renâcla en réponse.

- Dépéchez-vous! reprit-il menacant.

- Monte devant moi soeurette.

Victoire jeta un regard reconnaissant à Jaréa et s'installa du mieux qu'elle put sur le dos de Mystère car il n'avait pas de selle, ni de licol. Sa soeur se hissa derrière elle. Elles eurent à peine le temps de se cramponner que le cheval démarrait en trombe. Avant qu’elles ne comprennent quoi que se soit, il s'enfonca dans la forêt et accélèra son allure. Victoire était ballotée dans tous les sens et Mystère ne semblait pas vouloir s'arrêter avant un moment. Ses muscles encore ankylosés la faisaient horriblement souffrir. Mais elle ne s'autorisait aucune remarque.

La chevauchée dura une bonne quinzaine de minutes sans pause. Le cheval sauta par-dessus plusieurs des obstacles, enjamba des buissons plein d'épines... Quand enfin l'étalon ralentit, Jaréa poussa un soupir de soulagement. Ils pénétrèrent dans une clairière que les quelques rayons du soleil caché par de gros nuages noirs avaient du mal éclairer.

- Mystère! cria une voix très familière.

- Pitoucha?! s'exclama Victoire, qui malgré sa grande fatigue reconnut les tâches brunes, noirs, blanches et grises la caractérisant. Tu es vivante?

- Et oui... Pierre m'a sacrément fait mal mais... je vais mieux. Je suis en revanche très très en colère contre moi-même. Je n'ai pas pu vous protéger!

- Je ne t'en veux pas.

Avant que la chienne puisse rétorquer quelque chose, Jaréa se laissa glisser à terre. Ses jambes se dérobèrent sous elle en tentant de se tenir debout. Aussitôt, Pitoucha accourut vers elle pour la soutenir. La jeune fille la remercia. Vctoire descendit à son tour et vacilla en sentant la douleur de ses jambes. Elle s'appuya sur Mystère. Celui-ci dit d'un ton légèrement épuisé:

- Nous devons nous protéger de l'averse!

- Ne t’inquiète pas Mystère ! J’ai trouvé un abri sûr pour passer la nuit.

Les deux jeunes filles le suivèrent en puisant dans leurs réserves. Il n'y avait pas de chemin et elles devaient sans cesse se baisser, achevant de les affaiblir. À plusieurs reprises, les deux soeurs trébuchèrent mais elles étaient toujours rattrapées in extremis par Pitoucha et Mystère. Au bout d'une marche éreintante, ils arrivèrent devant l'entrée d'une grotte alors que la pluie commencaient à tomber. Cachée entre un grand pin et un sapin, l'ouverture était vraiment bien dissimulé et nombreux devaient être ceux qui l'avaient manqué de peu.

Ils se glissèrent à l'intérieur. Victoire sentit un frisson parcourir son dos en respirant l'air humide de leur abri.

- Suivez-moi! leur intima la chienne.

- Mais on ne voit pas grand-chose! protesta Jaréa d'une voix rauque.

Vctoire se tourna vers sa soeur. Avant qu'elle ait pu ajouté quelque chose, Mystère ajouta:

- Agrippez un bout de ma queue. Je vous guiderais jusqu'à notre emplacement.

Les jeunes filles acquisèrent, trop exténuées pour discuter. Victoire agrippa quelques crins et tendit son autre main vers son ainée. Elles progressèrent ainsi dans le noir pendant un moment qui leur parut interminable.

- J'en peux plus....

Victoire se tourna vers Jaréa. Elle ne pouvait pas la voir mais l'imaginait sans peine.

- Courage! Nous arrivons! l'encouragea Pitoucha.

- Je ne peux pas...

- Mais si....

Ils reprirent leur progression. Très vite, les deux soeurs virent de la lumière au bout d'un tunnel. Elles s'arrêtèrent et regardèrent autour d'elle. Il y avait des gourdes et de la nouritture.

Jaréa s'écroula à même la pierre et s'endormit immédiatement. Pitouhca releva sa tête et s’allongea en dessous, lui faisant un coussin.

Victoire mastiqua un bout de pain et but une gorgée. Elle s'allongea ensuite et sombra dans un sommeil sans rêve malgré la dureté de son "lit".

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