PSY 4 : Blear Makes
Contrairement au reste de leur bande, j’avais reçu Blear Makes dans mon bureau bien avant les autres. La première fois fut lorsqu’elle avait quinze ans, et j’héritai par la même occasion de son dossier, ayant été suivi par l’ancien psychologue de Saint-Clair. En le parcourant, j’admis que leur rencontres furent nécessaire : ce n’est pas tous les jours qu’on reçoit une jeune fille de treize ans enceinte de cinq mois.
Elle avait fait la démarche seule, ses parents niant ses besoins et sa détresse psychologique. Par chance, elle était une de ses femmes dont le ventre ne grossissait pas à vue d’œil, cachant son petit bidon de vêtements amples. Son travail avait consisté à la préparer mentalement à l’accouchement, une vision qui l’épouvantait, ou encore à la rassurer quant à sa capacité d’être une bonne mère. Comment l’être lorsque sa figure maternelle incarnait la méchanceté à l’état pur ? La jeune fille forte s’était transformée en une plus fébrile, laissant des flots couler sur ce bureau qui en avait supporté tant d'autres.
Ce fut éprouvant, mais puisqu’elle vint, cette fois-ci aussi, à ma rencontre de son plein gré, je lui demandais de me raconter son histoire.
Fille de la famille la plus influente et la plus conservatrice du pays, Saint-Clair lui réservait une place depuis le jour de sa naissance. Ainsi, entrer dans l’école la plus prestigieuse du pays revenait à franchir les portes de sa maison : une place qui en valait plus la peine que sa propre demeure, selon elle. Réussite était au mot d’ordre dans ces deux lieux, mais elle préférait de loin l’école car elle n'avait pas à y supporter sa mère. Celle-ci, sévère, sournoise, snob, que de vilains mots commençant par la lettre "s" pour la définir, tout comme l'animal à la langue fourchue.
Blear arriva donc dans cette école avec de grosses responsabilités sur le dos, entre devenir la meilleure élève de sa classe, obtenir le grade de présidente des délégués, continuer ses activités extrascolaires en plus des cours, et le fait qu'elle ne pouvait se permettre de craquer. Ce qui la sauva, du moins c'est ce qu'elle pensait à l'époque, c'est un garçon. Il était dans la même école qu'elle en primaire, c'est de cette manière que beaucoup de couples se formaient à Saint-Clair. Les petits bourgeois qui se côtoyaient dès l'enfance s'unissaient à l'adolescence. Elle avait donc déjà été en contact avec lui, mais jamais pour établir une vraie conversation. Cette fois, étant dans la même classe, elle ne put s'empêcher d'avoir de l'intérêt pour ce garçon, dénommé John-Eric. Jamais, à l'inverse de tous ses autres camarades de classe, il ne l'avait traité comme un être supérieur.
Il venait d'une bonne famille, inscrite dans la liste qui aurait peut-être la chance d'être relié à une des sept familles Richess. L'espoir faisait vivre. Il était très bon élève en plus de ça, si Blear n'existait pas, il aurait peut-être été le président des délégués des premières années, mais il se contenta du second rôle. Ils se retrouvèrent donc à travailler ensemble même en dehors des classes, partageant réunions et cessions d’études à la bibliothèque. Blear m’expliqua qu’il fut sa lueur d’espoir dans ce monde de riches. Elle perdait le peu d’amis qu’elle avait car elle était trop occupé pour les gracier de sa présence. John-Eric subissait le même sort, ayant des parents aussi strict qu’elle. Ils sont devenus amis et très vite, à force de se côtoyer, l’amour est tombé du ciel. Elle aimait tout chez lui, sa douceur surtout et ses yeux verts qui hypnotisait les siens. Il la traitait avec respect, comme un égal, et ensemble, ils avaient l’impression d’être de vrai adolescents, expérimentant toute leur première fois. Elle avait le sourire aux lèvres lorsqu’elle me comptait leurs aventures.
J’entendais souvent ça, les élèves adoraient l’internat car ils pouvaient se faufiler dans les chambres des uns et des autres. Ils passaient beaucoup de temps en cachette, laissant les autres élèves imaginer ce que bon leur semble. Ce n’est ni l’innocence, ni la naïveté qui les poussa à s’embraser dans le lit de l’autre, mais bien ce côté d’eux, trop adulte pour leur âge, que leurs parents avaient exacerbés. Ils n’avaient pas treize ans dans leurs têtes lorsqu’ils faisaient l’amour et que sans le savoir, ils s’apprêtaient à donner la vie.
Elle perdit son sourire en se rappelant la suite, entre nausées, fatigue, perte de poids et d’appétit. Jamais elle n’aurait cru, et c’est sa mère qui reçut les résultats. Elle ne comptait plus les gifles qu’elle s’était prise, les pleurs qu’elle avait laissés s’échappés. Un état déplorable, une obligation d’aller à l’école, mais personne ne devait savoir : “Débrouille-toi”, c’est ce que sa mère lui avait dit. Sans compter, l’interdiction de voir John-Eric, alors qu'il acceptait toutes les responsabilités. Et l’avortement ? Contre nature !
Suivre les cours en étant enceinte, cacher ses formes avec des vêtements qui ne lui allaient pas et éviter de manger pour ne pas trop grossir, la pression était à son comble. Au sixième mois, elle fut hospitalisée, son fils en danger. Le quotidien de l’école ne lui manquait pas, mais revenir dans sa demeure fut pire. Toute la journée dans son lit, elle mangeait des livres de cours, sans relâche, parce qu’elle ne devait pas perdre le niveau. Sa faible condition, les vomissements à répétition, la malnutrition, personne ne les prenait en compte parce que sa mère estimait qu’elle méritait ce qui lui arrivait.
Billy est né, une nuit d’aout, dans un accouchement des plus douloureux. C’est le majordome qui l’avait conduit, attendant la dernière minute, jusqu’à ce qu’elle perde les eaux pour l’amener à l’hôpital. Les infirmières la dévisageait, ce n’était qu’une gamine. Un certain dégoût s’émanait de leurs visages durant tout le travail. Elle se sentit plus seule que jamais, accouchant sans le soutien de personne, mis à part celui du docteur qui voyait ce nouvel arrivant comme l’enfant du diable. La douleur pour cette vie qu’elle n’avait pas demandée, elle s’en rappelait parfaitement. Mais lorsqu’elle eut son fils dans les bras, le sentiment qui la parcourut dépassa tous les autres : l’amour. Les parents de John-Eric et lui-même exigèrent qu’on les laisse entrer. En découvrant Blear et Billy, il sut qu’il voulait faire sa vie avec les deux personnes qu’ils aimaient le plus au monde.
Ils supplièrent leurs parents tout deux pour rester ensemble, mais les parents Makes refusaient cet affront. Sans cet accident, leurs familles auraient pu se lier, mais ils avaient trop peur pour leur réputation. Ils payèrent les médias, l’hôpital, l’école pour que ce secret soit garder. Et ils voulurent envoyer Billy chez les grands-parents de John-Eric, il aurait une bonne éducation à Londres. Blear réussit à gagner du temps, jouant sur l’allaitement pour garder son fils à ses côtés. Ça ne dura qu’un an où elle reprit les cours et où elle rentrait chez elle tous les jours pour s’occuper de Billy. Mais elle ne tenu pas le rythme, morte de fatigue, et ce qu’elle redoutait arriva, il partit à Londres. Elle ne s’y était pas opposé longtemps car les grands-parents de John-Eric étaient d’une gentillesse incommensurable. Elle le verrait moins, mais lui ne vivrait pas dans ce monde, vil et sournoi, où elle avait grandi. Sans compter que l’envoyer là-bas signifiait que John-Eric gardait sa place de père.
Elle avait les larmes aux yeux parce que malgré toutes ses belles paroles, elle souffrait de son absence. Et elle ne supportait pas voir le père de son fils, son premier amour, vivre la même chose. Ils agissaient comme des étrangers à l’école, elle ne savait même plus ce qu’elle ressentait à son égard et c’est de cette manière qu’elle se retrouva attachée à une autre famille. Le garçon qu’elle fréquentait, Justin, venait aussi d’une bonne famille et lorsque ses parent l’apprirent, ils furent heureux de penser qu’elle avait trouvé son futur partenaire. Mais il restait un bémol, sa mère avait raison, il serait le bon s’il acceptait son secret. Elle lui en avait fait part, la veille du bal.
- Il ne l’a pas accepté, déduis-je à sa mine déconfite.
- Non, et maintenant tout le monde sait...
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