III - Bienvenue à l'Épi Noir (3)
« Voilà vos professeurs. Quand je les appellerai, veillez à ce que tous tournent bien sur eux. C’est un fantasme d’adolescente qui remonte. Haha ! »
Madame Cresson est marrante elle aussi en fait, elle a une quarantaine d’années et est châtain foncé. Ses cheveux sont coiffés en un carré vaporeux court qui lui va à ravir, ses petits yeux noirs sont cachés derrière des verres ovales bleus. Cela lui donne un regard sévère. Sa tenue est digne du Ying et Yang, blazer noir en velours dévoilant une chemise blanche aux boutons noirs entrouverte, un pantalon blanc chic et des bottines noires.
« Alors j’appelle madame Alvarez. Caroline Alvarez. »
La première de la file se mit au centre de la cour tournant et fut encouragée à recommencer sous les applaudissements. Madame Cresson fit donc évoluer son idée à deux rotations par personne, j’espère que les élèves ne feront pas pareil, car bonjour la honte.
Après nous avoir salués avec une révérence, Madame Alvarez rejoignit la directrice adjointe sur l’estrade. Elle attrape le micro et on entendit sa belle voix comme une mélodie à nos oreilles.
« Bonjour ! Je m’appelle Caroline Alvarez, professeure d’histoire-géographie et d’éducation civique du COXY… Non ! Attendez du AROW. »
La première professeure est blonde et a une vingtaine d’années, elle mesure dix centimètres de moins que moi. Des cheveux longs avec une frange qu’elle relève, dévoilant deux yeux verts brillants cachés derrière des verres ronds transparents. La couleur se retrouve sur sa veste en cuir et s’assortit à son long pantalon noir et à ses escarpins gris.
Toute la cour explosa de rire, ils sont des dieux pour mettre l’ambiance à l’Épi Noir. Madame Cresson hilare s’excusa de la maladresse de sa collègue reprenant.
« Est-ce que ça se voit autant qu’on a improvisé ? Haha ! Excusez le cafouillage de Madame Alvarez qui représente le AROW et non le COXY. Maintenant, veuillez accueillir Madame Glascow. Jessica Glascow. »
La concernée semble avoir le même âge que Madame Alvarez ou de Sandra. Je peux voir que l’effectif de l’Épi Noir est jeune et moderne, comparé à l’idée que je me faisais du pensionnat. Non ! On oublie Germaine Machin du COXY, je n’ai pas retenu son nom à rallonge. D’ailleurs, miracle, elle n’est pas là. Bon débarras.
Jessica Glascow est plus grande qu’Alvarez et a de longs cheveux châtains foncés dégradés et des yeux bleus perçants. Elle est vêtue d’un t-shirt blanc aux couleurs de New York, l’emblème de celle-ci étant clairement visible, un jean bleu marine et des escarpins noirs.
Elle tourna gracieusement trois fois et fut applaudie. Montée sur l’estrade, elle prit la parole pendant que certains élèves fantasmaient sur la poitrine plantureuse de la directrice adjointe. Quand les filles ne la jalousaient pas.
« Bonjour ! Je m’appelle Jessica Glascow, professeure de français et responsable du HORF. » annonce-t-elle en descendant.
Et maintenant monsieur Aguignon. François Aguignon.
Il a la trentaine, est chauve et a des yeux noirs. Plus grand que ses deux collègues réunies et vêtu d’un costume noir qui cache ses rondeurs. Sa cravate pastel contraste avec le look sinistre. Et il a de plus belles chaussures vernies que le CPE.
Nous sommes subjugués de voir ce dernier s’agiter avant de tourner sur lui-même et de manquer de tomber. Malgré cela, on applaudit l’homme qui garde son sérieux et fut le suivant à monter sur l’estrade rejoindre madame Cresson.
« Bonjour ! Je suis François Aguignon votre professeur de mathématiques et je représente le SLOX. Merci. »
J’aurais dû m’en douter, il avait la tête du prof de maths. En tout cas il est moins austère que mes anciens, j’imagine que c’est au tour de la prochaine, une rousse assez âgée. En effet son nom fut rapidement su.
« Accueillez notre presque retraitée, madame Allowing. Sidonie Allowing. »
Plus petite que les autres, Madame Allowing est rousse avec la raie au milieu et des yeux marrons. Sa personnalité excentrique se ressent dans la composition de sa tenue : une longue robe rouge avec des serpents dorés gravés à l’arrière. Des talons rouges complètent cette œuvre d’art. Alors deux possibilités : Prof d’arts plastiques ou de langues. Me tromperais-je ?
En tout cas, j’ai peur qu’elle se blesse en dansant. Je ne veux pas qu’elle se sente humiliée par nous tous, connaissant les élèves, c’est ce qu’ils font généralement. Ceux d’ici l’encouragent, ce qui me rassure.
Je suis bluffé, elle a proposé une prestation comparable aux jeunots. Malgré son certain âge, elle a montré une agilité admirable et a tourné deux fois. Applaudissons là. J’ai hâte de savoir si j’ai vu juste.
« Merci Florence et je ne suis pas encore retraitée. Haha ! Je vais être là pour un long moment. Hello everybody. Your back to school is going well ? My name is Sidonie Allowing and I’m the english teacher of the ÉCHO group. Thanks »
PROF D’ANGLAIS ! J’avais raison. Youpi ! Elle est complètement cinglée, en fait, j’adore ça. Ces profs sont géniaux, ça me change de mes anciens bahuts. Allez, à qui le tour. Peut-être le beau brun aux yeux verts, les filles vont faire des arrêts cardiaques si certaines parties de son corps sont dévoilées, accidentellement.
« Monsieur Dumoulin est appelé à l’accueil. Xavier Dumoulin. »
J’explose de rire en entendant la directrice jouer les caissières de supermarché. Il est tout aussi jeune que les premières qui se sont présentées. Des cheveux bruns courts et des yeux verts, ne serait-il pas un petit cliché du beau gosse ténébreux ? Fort possible.
Le vert semble être sa couleur car elle colore aussi ses habits. Sa veste est kaki, il a un jean blanc ainsi que des bottes noires. Je ne m’attendais pas à ce qu’un professeur fasse du breakdance, mais l’effet est réussi, c’est un pro.
En le voyant faire le mouvement de la coupole, je l’ai vu redevenir un ado. Les autres gars à côté sont la bouche ouverte. La casquette lui irait bien à Dumoulin. J’ignore sa matière enseignée mais je sens que les filles vont se ruer pour être dans sa classe.
Les applaudissements et chants de la victoire s’entendirent à la fin de sa chorégraphie. Son sourire ravageur lancé à l’assemblée fit s’évanouir une blonde, Barbara, est-ce toi ? Ah non ! Dommage. J’ai atterri où moi ? Une comédie musicale à l’américaine ?
« Wouah ! J’avais oublié que tu avais fait du breakdance dans ta jeunesse. Haha ! » répondit surprise la directrice adjointe.
« Eh ! Eh ! Vous avez vu le pro ? Non sans rire. Bonjour, mon nom est Xavier Dumoulin, je suis professeur d’espagnol et je représente le FLOP ! » fit-il avec un geste symbolisant son groupe : un F en l’air.
Un long silence s’installa dans la cour, la blonde qui s’était relevée, retomba inerte. L’hypoglycémie, quel fléau. Xavier Dumoulin essaya de briser le malaise et avec son sourire brillant, repartit à sa place. Non, je ne ferais pas cette blague, il a été assez humilié comme ça.
« En tout cas, vous venez de faire un… FLOP »
Quelqu'un a sorti ce que je pensais à voix haute, immédiatement la cour est prise d’un autre fou rire. Est-ce que c’était la voix de Barbara ? L’enseignante à la peau mate est la suivante, elle fut annoncée par la directrice adjointe qui semble beaucoup s’amuser. La voilà repartie en enfance.
« Et maintenant notre charmante professeure Yasmina Talmy. »
Je pense qu’elle est algérienne à cause de son nom et de sa peau mâte plus foncée que la mienne. Le prénom aussi y est pour quelque chose. En tout cas, ça n’enlève rien à sa beauté. Elle a la même taille que Caroline Alvarez, ses cheveux sont bruns, lissés et courts, des mèches lui tombent sur le front. Une robe blanche affine sa silhouette et s’associe aux escarpins, chaussures qu’affectionnes ces madames.
Sa danse fut poétique, je m’imaginais dans un pays oriental. Elle est applaudie et fonce sur l’estrade. J’espère savoir vite dans quelle classe je serais. En tout cas la pédagogie de l’Épi Noir est innovante et fait participer les élèves. Différente des traditionnelles présentations, où seuls les profs sont actifs.
« Bonjour ! Je m’appelle Yasmina Talmy et je suis votre professeure d’enseignement numérique et de technologies. Je suis la responsable du COXY. »
Le COCCYX est dirigé par une belle femme. Okay ! Silence Ben. Tes remarques sont désespérantes. La belle brune est la suivante après elle et attend son nom. Madame Cresson aime faire durer le suspens.
« J’appelle Madame Clyze. Diana Clyze. »
D’une trentaine d’années et de la même taille que Monsieur Aguignon. Je suis au bord du malaise, elle est si belle. De longs cheveux bruns descendent jusqu’à son dos et caressent sa belle peau lactée. Ils cachent aussi un de ses yeux, un œil vert pâle, celui d’une louve.
Sa tenue se constitue d’un chemisier pourpre qui la met en valeur, d’un jean noir et de bottines ébène. La voir se trémousser me fait quelque chose, sauf que la réalité revient vite à moi. DIANA. Regarde le problème, le A est de retour, pour me jouer un mauvais tour.
Ce n’est pas la seule, Cassandra, Sandra, Elsa… Quand elle a fini, j’applaudis plus fort que les autres, me faisant remarquer et sa voix nous annonce avec douceur, sa spécialité.
« Bonjour ! Je suis Diana Clyze et professeure de sciences physiques-biologie, référente du JINX. »
Elle se dirige vers les autres revenus à leur place initiale avant que le dernier nom ne soit donné. Mon cœur bat la chamade et je la regarde, les yeux grands ouverts.
C’est au tour du dernier prof, celui aux baskets rouges. Je peux voir de loin, la ligne de ceux qui ont dansé et qui attendent l’ultime candidat.
« Et pour finir, je clos cette présentation de vos professeurs avec notre honorable Occhon. Thomas Occhon. »
Il a de courts cheveux blonds et ma taille. Même s’il est relativement jeune, dix ans doivent nous séparer, voire plus. Ses yeux bleus sont un prétexte à le haïr, puis-je lui les voler tout comme sa belle chemise assortie ? Un jean noir et les fameuses baskets rouges sont les derniers éléments qui l’habillent. Un prof avec des baskets ? C’est dans quel monde que ça arrive ?
Quoiqu’il en soit, il est tout autant doué que Dumoulin. Le sport semble être son dada. Ma matière de rêve, si seulement il ne pouvait y avoir que ça à l’école, je ne sécherais jamais. Haha !
Après avoir enchaîné des figures incroyables et dignes de l’acrosport. Thomas Occhon se précipite sur l’estrade et attrape le micro en quelques secondes. Les filles devinent la musculature de son corps à travers le textile. Pff ! J’ai mieux à faire, comme admirer Madame Clyze.
« Bonjour ! Je m’appelle Thomas Occhon et je suis votre professeur de sport, responsable du groupe ODIN. Merci à tous ».
Voyez vous ça. Comme c’est étonnant. Il est en tout cas sympa, hâte de commencer les cours, moi. Florence Cresson leur demanda une dernière chose et en un rien de temps, ils furent alignés et saluèrent synchronisés. Rideau, comme on dit au théâtre.
Derniers applaudissements avant que les choses sérieuses commencent. Après les présentations, il faut dispatcher les élèves, et il y en a beaucoup. Ce n’est pas une mince affaire. Les profs disparaissent vers une table éloignée remplie de feuilles blanches en pagaille.
« Maintenant il est temps de vous dispatcher dans les groupes, vous avez pu le constater, notre pédagogie est innovante, mais nous ne sommes pas laxistes, détrompez-vous. Je laisse maintenant la parole à Madame Alvarez qui va annoncer les élèves de son groupe. Caroline, c’est à vous.
« Merci Florence. Bon ! Les élèves du groupe AROW sont : Marie Armande, Kayla Azuka, Quentin Blairy, Zoé Cylian, Stéphen Doxy, Christelle Éniet...
Les élèves appelés suivirent l’enseignante d’histoire-géo, nous n’en faisons pas partie. Ce fut le tour de Jessica Glascow la prof de français, j’ai totalement zappé qu’elle a un prénom qui finit en A, en fait.
La jolie femme aux yeux bleus attrape une feuille avec plus d’une vingtaine de noms et grâce à sa voix cristalline, nous aida à poser un nom sur un visage. Ainsi les longues lignées d’inconnus ont une identité propre. Que j’oublierais très vite.
« Les élèves du groupe HORF, suivez-moi dès que je prononce votre nom: Julien Aclon, Mélodie Adellin...
« Ah bah tu vois, Damien t’a confondue avec cette Mélodie. Tu crois qu’elle est blonde ? »
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