Chapitre 3 : La mystérieuse conteuse de la bibliothèque
Pour Fumie, la bibliothèque était son lieu favori.
Un sanctuaire rassurant qui la protégeait contre les méchancetés du monde. Elle aimait beaucoup les livres de son père qu'elle lisait de temps en temps quand il lui demandait comment elle trouvait ses histoires. Des fois, Fumie lui donnait quelques idées provenant de son imagination mais ce qu'elle aimait le plus c'était plonger dans le monde de ses ouvrages préférés : les contes de fées où tout était magique et tout le monde arrivait à trouver le bonheur d'une manière ou d'une autre.
Fumie souhaitait du fond du coeur que son père et Hime puissent retrouver le sourire.
Qu'un jour, Papa puisse rencontrer une belle princesse qui le rendrait heureux. Tonton Taka était en train de discuter avec la bibliothécaire tandis que Hime était partie au rayon réservé aux activités domestiques afin de chercher un livre de cuisine.
Takafumi fut surpris de ne pas rencontrer le vieil homme qui avait l'habitude de tenir cet endroit. Il y rencontra à la place une femme à la peau basanée et au regard de biche dont les yeux reflétaient une inhabituelle nuance d'améthyste. Une gaijin? Sa longue chevelure ondulée à la couleur de jais tombait en cascade le long de ses épaules et son corps plantureux dissimulé derrière une simple robe bleue marine devait plaire à bon nombre d'hommes vu le regard timide et appréciateur de certains lecteurs présents.
Il remarqua un grand de beauté près de la commissure de ses lèvres dessinées en un sourire bienveillant. "Bien le bonsoir, bel homme au coeur pur, le salua-t-elle dans un japonais parfait en posant une pile de vieux livres, avez-vous besoin d'un renseignement au sujet d'un ouvrage?"
Takafumi réprima un soupir devant la façon dont la bibliothécaire minaudait. Enfin, c'était plutôt la remarque sur sa beauté qui le faisait tiquer. Il avait toujours eu ce genre de réputation au collège puis au lycée professionnel.
Celle du bel ikemen que toutes les filles voulaient et que tous les garçons enviaient et admiraient.
Même maintenant, alors qu'il n'avait que vingt-neuf ans, Takafumi fut l'objet de l'admiration de beaucoup de monde : ses traits réguliers semblaient sans défauts, il avait tendance à plaquer sa courte chevelure noire avec du gel pour paraitre plus sévère mais ça ne suffisait pas. Ses yeux noirs légèrement en amande furent même cachés derrière des lunettes de confort mais ce détail ne rebutait malheureusement pas ses admiratrices. Il avait même repoussé sans ménagement Reina lorsqu'il s'était aperçu qu'elle voulait tromper Hiro avec lui.
Son frère n'avait pas pas ce genre de soucis vu son air habituellement débraillé et décontracté. Il l'enviait aussi un peu pour cette raison.
Personnellement, lui-même ne s'était jamais questionné quel était son type à ce sujet. "Je cherche un conte pour mes deux nièces, répondit-il froidement avant de regarder les deux petites filles avec affection, une histoire classique pour changer un peu." Il avait l'habitude de prendre surtout des romans d'aventure mais connaissant Fumie, elle voudrait certainement lire un conte.
La bibliothécaire croisa un moment ses mains aux doigts fins décorées de bagues dorées avant d'observer un instant Fumie et Himeka en plissant les yeux. Son sourire énigmatique s'élargit pendant qu'elle laissa courir un doigt sur un saphir ornant un de ses anneaux. "J'ai le livre parfait pour ces jeunes princesses, déclara-t-elle en prenant deux livres de la pile, et je vous en donne un en plus au cas où ce ne serait pas assez."
Takafumi prit les deux ouvrages qui lui évoquaient plus d'anciens grimoires que de simples livres de poche. Il leur passerait La Belle au Bois Dormant pour ce soir et réserverait Blanche Neige et les sept nains au cas où Hiro les confierait de nouveau. Le pauvre devait aussi animer des conférences en plus de son boulot d'écrivain. "Merci, je dois les rendre quand?
- Oh, un mois fera l'affaire, répondit la bibliothécaire en s'éventant de la main, et au fait, appelez-moi Cherry. C'est mon petit surnom.
- Euh... D'accord, Cherry-san, fit Takafumi avec hésitation. Il avait du mal avec les personnes extraverties contrairement à son frère. Elles avaient tendance à plus l'intimider qu'autre chose. Il appela ensuite ses deux nièces qui le rejoignirent quelques instants plus tard. A son grand étonnement, ce fut Himeka qui avait un livre à la main. "J'aimerai bien essayer ces recettes, déclara fièrement la petite fille en lui tendant le livre, comme ça Fumi et Papa mangeront de nouveaux plats.
- Tu n'as rien pris, Fumi?, demanda ensuite gentiment Takafumi à l'adresse de sa nièce cadette.
- Je... Je n'ai rien trouvé d'interessant, lui répondit nerveusement Fumie en baissant les yeux, je suis désolée, oncle Taka."
Takafumi sentit une bouffée de colère l'envahir en voyant la réaction de Fumi à cette question. Il fut déjà très remonté envers Reina mais là, il l'était encore plus contre cette femme égoiste. "Tu n'as pas à t'excuser, Fumi, la rassura-t-il en lui ébouriffant les cheveux pour demander ensuite à Himeka, Hime, passe ton livre à Cherry-san. Après, on rentre à la maison.
- D'accord, tonton, fit Himeka en lui passant l'ouvrage, voilà.
- Tenez, déclara ensuite Takafumi en passant les ouvrages à Cherry qui les enregistra grace à sa douchette. "Alors, deux contes et un livre de cuisine... C'est bon. Vous pouvez donc les rendre dans un mois, continua-t-elle en donnant les trois livres à Takafumi, et j'espère que les histoires vous plairont, ajouta la bibliothécaire avec un petit sourire à l'adresse de Fumie et Himeka.
- Je les connais par coeur, rétorqua Hime en prenant la main de sa petite soeur, mais Fumi adore les lire donc ça ne me gêne pas."
Fumie hocha timidement la tête pendant que Cherry eut un petit rire. "Quelles adorables soeurs vous faites, s'émerveilla-t-elle avec un sourire affectueux, passez une bonne soirée, les salua-t-elle après au moment où leur oncle leur annonça qu'il était temps de partir.
La bibliothécaire les regarda partir sans que son sourire ne s'efface.
Voir ces deux petites filles l'avait rendue nostalgique mais elle ne regrettait pas d'assumer son role de conteuse. C'était juste que sa famille lui manquait un peu. Bon, toujours est-il que deux candidates ont trouvé leurs princes, pensa-t-elle en rangeant les livres dans les rayons, il faut que je prévienne leurs marraines.
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