Chapitre 25

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Pendant près d’une semaine, j’avais repris mes habitudes. Les réunions du Conseil, mon travail d’impératrice ainsi qu’à lire les journaux de ma mère qui, pour l’instant, ne m’apportait que peu de réponses. À la fin de la semaine, alors que je lisais le journal numéro six de ma mère qui parlait principalement de son mariage avec mon père, le messager que j’avais envoyé porter la lettre aux deux grands chirurgiens frappa à la porte de ma chambre. Sans ajouter le moindre mot, il me tendit la lettre de réponse et partit aussitôt.


« Majesté, c’est un honneur de recevoir une lettre de votre part.

Veuillez m’excuser pour l’attente, mais je devais vérifier que votre mère ne dirigeait plus L’Empire d’Eryenne. Toutes mes condoléances pour votre mère. Je ne peux malheureusement vous aider, ne sachant pas moi-même pourquoi mon métier a été interdit.

Ne voulant être exécuté, j’ai dû fuir mon village natal pour aller à Thérénia où j’ai pu enseigner mon métier à de futurs médecins prodigieux. Oui, je suis né dans votre Empire et je connaissais très bien la famille impériale jusqu’à votre naissance, mais je vous expliquerai tout une fois chez vous. Je vous informe donc que je suis prêt, ainsi que mon collègue, à pratiquer l’opération de votre amie, à vivre au sein de l’Empire d’Eryenne et à enseigner mon métier aux jeunes de votre Empire, si vous l’acceptez bien sûr.

Le trajet jusquà votre château dure une journée. J’attends avec impatience l’arrivée de votre garde, nous serons prêts.

Avec toutes mes félicitations pour votre accession au trône, Dr Langstone. »


Dès que j’eus terminé la lecture de la lettre, j’enfilai un pull, je mis mes chaussures et je me précipitais dans le bureau de Juliette. Emma fut surprise en me voyant débouler ainsi dans la chambre de sa sœur avec un grand sourire.


— Tout va bien Elena ? Je croyais que tu étais très occupée cette semaine. demanda-t-elle

— En effet, je suis très occupée.

— Je vois. Qu’est-ce qu’il se passe alors ?

— Emma, ça te dérangerait de nous laisser seules un instant ? demanda Juliette qui semblait avoir compris.

— Euh non, bien sûr que non. Je reviens dans dix minutes.

— Merci, Emma, lui dis-je quand elle passa à côté de moi.


Suspicieuse, elle sortit du bureau, tout en observant nos réactions. Elle voulait savoir et ça se comprenait. Mais j’avais promis à Juliette de ne pas lui en parler. Mais maintenant que j’avais enfin une réponse, que j’avais un chirurgien prêt à l’aider, il allait falloir en parler à sa mère.


— Alors ? Qu’est-ce qu’il y a de si réjouissant ?

— J’ai deux chirurgiens qui sont d’accord pour t’opérer, ici. Tu n’aurais pas à te déplacer.

— Mais c’est génial ! Merci Elena.

— Par contre, tu vas devoir en parler. Tu veux que je t’aide ?

— Je m’occupe de ma mère, tu t’occupes de ma sœur ?

— On fait comme ça. Encore merci.


Elle me serra dans ses bras, à la fois heureux et rassuré. La laissant travailler, je sortis de son bureau et invitais Emma à me suivre. J’allais devoir la jouer fine. Emme était surprotectrice doublée d’une femme inquiète. J’allais devoir lui expliquer la décision de sa sœur, mais aussi de la mienne. J’allais devoir lui faire comprendre que j’avais fait ça pour aider Juliette, mon amie, et qu’elle n’avait pas à prendre ça pour un quelconque privilège.


— Tout va bien ? demanda Emma nerveuse.

— Laisse-moi réfléchir à comment te l’annoncer, rigolais-je pour détendre l’atmosphère.


Pourtant, ma phrase a eu l’effet inverse. Je vis le visage d’Emma se décomposé et dû intervenir immédiatement, avant qu’elle ne se fasse de fausses idées.


— C’est une super nouvelle, Emma. Ta sœur va enfin être sortie d’affaire.

— Je ne comprends pas.

— Juliette m’a dit que son traitement ne faisait presque plus effet. J’ai cherché et j’ai fini par trouver quelqu’un qui pourra opérer ta sœur, ici, en toute sécurité. Cette opération, elle mettra fin à toute sa souffrance. Elle sera enfin libre de faire ce qu’elle veut, quand elle veut.

— Mais pourquoi…

— C’est son choix, Emma. Et si elle m’a demandé avant de t’en parler, c’est pour pas que tu t’inquiètes. Elle m’en a parlé, j’ai accepté de l’aider, c’est tout ce que tu dois retenir.

— Merci.

— C’est normal. Ta sœur s’occupe d’en parler à ta mère.


Le sourire aux lèvres, Emma retourna dans le bureau de sa sœur et la prit dans ses bras. C’était dans ses moments-là que je comprenais qu’Emma me traitait en égale à ses sœurs. Elle était autant protectrice et inquiète avec moi qu’avec elle. Pendant que les deux sœurs lisaient la lettre du Dr Langstone, je demandais qu’on prépare trois voitures, dont deux de l’armée, une limousine ainsi que six gardes et trois chauffeurs qui allaient partir chercher les deux chirurgiens. Alors que j’étais perdue dans mes pensées, Emma m’interpella en m’indiquant que le Dr Langstone avait laissé son numéro de téléphone derrière la lettre. Je le pris et lui envoyai un message.


« Dr Langstone, ce fut un plaisir de recevoir votre lettre. Une équipe se prépare à partir afin de venir vous chercher. Si vous avez besoin de quoi que ce soit concernant mon amie ou durant le voyage, n’hésitez pas à me le faire savoir. L’Impératrice Elena de Stinley. »

« Bonjour, Majesté, vous est-il possible de me faire parvenir le dossier médical de la patiente afin que je puisse l’examiner avant mon arrivée ? »

« Je vais voir ce que je peux faire, mais je ne vous garantis rien. Les informaticiens de ma mère contrôlent encore mon accès à internet ainsi que celui de tout le royaume. C’est déjà un miracle que je puisse vous envoyer un message alors que vous habitez dans un autre royaume. »

« Je comprends très bien, Majesté. Faite de votre mieux. À très bientôt. »


Je me dirigeais ensuite dans les cuisines du château afin d’informer les cuisinières que dans deux jours, nous allions avoir deux invités au château. Je retournais ensuite dans ma chambre et m’allongeais sur le lit en envoyant un message à Océane. Peu de temps après, elle m’appela.


— D’ailleurs, j’ai contacté deux chirurgiens d’un royaume voisin pour opérer Juliette, la sœur d’Emma. C’était une demande de sa part.

— Tu es en train de me dire que tu vas rouvrir les frontières ?

— C’est exactement ça.

— Mais c’est génial Elena ! Tu devrais en profiter pour faire une annonce publique !

— Tu crois ? Et s’il pense que c’est précipité.

— Rien ne pourra faire plus plaisir aux habitants que l’ouverture des frontières Elena. Tu te rends compte que ça signifie la liberté pour tout le monde ?

— Dans ce cas, tu as raison, je devrais commencer à établir des contacts avec nos voisins avant de faire une annonce.

— C’est une très bonne idée. Je suis bien contente de t’avoir à mes côtés, j’ai les infos en avant-première.

— Non, mais je te jure, Océane.

— Aller, je rigole.


Elle raccrocha quelques minutes plus tard avec un grand sourire. Je l’avais entendu même derrière un téléphone. Ces moments avec elle, quel qu’il soit, je les chérissais chaque fois. Je posais mon téléphone sur mon bureau et descendis rejoindre Emma en cuisine, qui s’occupait d’un gros poulet.


— Elena ? Besoin de quelque chose ?

— Oui, j’aimerais que tu contactes les journalistes. J’ai une déclaration publique à faire.

— Encore ? rigola-t-elle. Pour quand ?

— Je ne sais pas encore. Quand j’aurais obtenu mes réponses. Mais qu’ils se tiennent prêts.

— Ce sera fait.

— Merci Emma.


Je retournais dans ma chambre et m’installai à mon bureau pour commencer à écrire mon discours. Rouvrir les frontières n’allait pas être simple. Finalement, je demandai à l’un des gardes postés devant ma porte de convoquer le Général dans la Grande Salle. J’espérais vraiment ne pas le déranger. J’arrivais en même temps que lui.


— Votre Majesté, commença-t-il. En quoi puis-je vous aider ?

— Commandant Fauster, j’aurais plusieurs questions à vous poser concernant les frontières.

— Je vous écoute.

— Comment ma mère a-t-elle fait pour fermer les frontières ?

— Elle y a posté des soldats afin d’empêcher quiconque d’entrer ou d’en sortir.

— Donc, pour les rouvrir, il suffirait que les soldats partent ?

— Si seulement c’était aussi simple. Avant de pouvoir faire partir les soldats des frontières, il faut s’assurer que les Royaumes voisins n’aient pas d’intention mauvaise envers notre Empire.

— Comment s’appellent les Royaumes voisins ? Je devrais peut-être contacter leur Roi ou leur Reine avant d’ouvrir les frontières.

— C’est une excellente idée. Regardez, j’ai une carte avec moi.


Il sortit une carte de sa poche et la déplia sur la table.


— Au Sud-Est, vous avez le Royaume de Thérénia avec comme Capital Amaldia. Au Sud-ouest, vous avez le Royaume d’Eldusia avec comme Capital Restia.

— Et ici, tout au sud ?

— Le Reinaume de Carandis avec comme capital Barrandis, un désert de glace. Même avant votre mère, l’Empire avait peu de relations avec ce Reinaume éloigné.

— Et cette petite île à l’ouest de l’Empire ?

— Une petite île libre du nom de Tifnia avec comme capital et unique ville Kelnya. C’est là-bas que s’exilaient les opposants politiques de l’Impératrice Julie.

— Je vois. Savez-vous qui sont les dirigeants ? Afin que je puisse les contacter.

— Malheureusement, non.

— Ce n’est pas grave. Merci pour votre aide Commandant Fauster.

— De rien, Votre Majesté. N’hésitez pas si vous avez d’autres questions.


Il quitta la Grande Salle en me laissant la carte sur la table. Je demandais alors à une domestique de demander à Juliette si elle pouvait me trouver le nom des dirigeants des territoires voisins. J’étudiais la carte pendant une vingtaine de minutes jusqu’à ce qu’elle revienne avec les noms. Le roi Eliard pour le Royaume de Thérénia, âgé de trente ans. Le Roi Sebastian et la Reine Margareth pour le Royaume d’Eldusia âgé de quarante-deux et quarante-six ans. Et enfin, la Reine Stephania pour le Reinaume de Carandis, âgée de vingt ans.

Peut-être que je parviendrais à établir de bonnes relations avec le Reinaume de Carandis, avec une reine qui n’a qu’un an de plus que moi. Pourtant, je savais que je devais privilégier des accords avec les deux autres Royaumes, étant frontalier. Surtout que les deux chirurgiens qui allaient venir soigner Juliette venaient de Thérénia. Je repliais la carte et retournais dans ma chambre pour commencer à écrire mes lettres. Plus vite elles seront écrites et envoyées, plus vite j’aurais une réponse et je pourrais ouvrir les frontières une bonne fois pour toutes. Cela ne pourrait qu’être bénéfique, pour eux comme pour nous.

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