… Et c’est une victoire de Peraldo, qui renouvelle donc son mandat… tout de suite le discours du vainq…

— Fils de catin.

Assise en tailleur sur son canapé, bouffée par le temps et l’humidité, Lavande coupe sans attendre son holoécran, d’un simple geste de main vers son capteur-commande, elle préférait la bonne vieille télécommande mais elle l’avait perdu depuis belle lurette… peut-être même deux jours après l’acquisition de l’appareil.

Elle attrapa une fine ardoise à côté d’elle, puis d’un geste habile de doigt dessus, en fit sortir un hologramme, celui du logo du système d’exploitation en chargement. Elle guidait cet appareil avec ses doigts, juste en dessous, sa main droite gérait le curseur et sa main gauche permettait de tourner les différents fichiers, logiciels… ou même l’écran dans un jeu vidéo… mais Lavande n’en avait pas de ça, ni le temps, ni l’envie… mais surtout pas l’argent.

Un stip’ de talent était plutôt bien payé, certains pouvaient même devenir richissimes voire célèbres, ensuite ils créaient des réseaux et n’avaient même plus besoin de se salir les mains. Néanmoins cela lui était impossible, car avant d’en arriver là, il fallait accepter des contrats que Lavande considérait comme trop sales pour qu’elle puisse encore avoir la moindre estime d’elle-même… assassiner d’accord, mais au moins que je tue une pourriture…

Puis elle pensa au nombre de personnes qu’elle avait dû exterminer avant d’atteindre la cible de ses contrats… même s’ils travaillaient pour la pourriture, cela faisait d’eux quoi exactement ? Lavande grimaça, c’était ce type de question qui pouvait ruiner un stip’, cette vie elle avait choisi de la mener. Depuis son retour de Wángcháo Chéng, elle aurait pu faire tout à fait autre chose, mais jamais rien de respectable. Quoiqu’elle ait songé à se mettre à des métiers plus classiques, comme serveuse par exemple… mais elle n’aurait jamais pu se retenir une fois confrontée à un connard qui l’insulte ou lui fait une remarque bien déplacée. Bien sûr qu’on lui avait proposé de tourner dans des vidéos porno, c’était très courant de proposer cela aux personnes qui revenaient à New Valley une fois qu’ils avaient tout perdu… certains acceptaient, regrettaient, se suicidaient…

Le roster tourne et les corpos qui gèrent la merde s’en mettent plein les fouilles.

Non, elle avait choisi de faire ce qu’elle savait le mieux faire : frapper, tirer, tuer (et même investiguer.)

Elle ouvrit alors sa messagerie perso, remplit de publicités, d’arnaques… et de quelques tentatives d’Espoir de renouer contact. L’holo au-dessus de l’ardoise affichée son visage, elle activa le mode lecture, et la voix de son frère, mimé à la perfection par le logiciel, lu la totalité de ce qu’il lui avait envoyé.

Lavande, au milieu du récit, fut prise d’une envie de se mettre des gifles… elle ne se comprenait pas, pourquoi l'avait-elle ignorée tout ce temps ? Elle avait un profond regret qui lui étreignait les tripes, la gorge… elle coupa immédiatement la voix de son frère.

La bouche pâteuse, elle attrapa une bouteille d’eau trouble à côté d’elle, pas les moyens de se payer une eau correctement filtrée. Elle en but la moitié puis décida de passer son index en dessous de l’ardoise pour remonter aux messages les plus récents.

La jeune femme faillit recracher le liquide qu’elle avait encore en bouche quand elle vit le nom du correspondant, du tout dernier message.

Meï.

Elle l’ouvrit immédiatement, s’imaginant qu’elle aurait enfin une réponse sur ce foutu nom, ce foutu visage, qui lui hantait l’esprit, la seule chose dont sa matière grise daignait se souvenir de toutes ces années passées chez les Ming.

Non, elle n’eut pas… de réponse sur tout cela, néanmoins c’est tout autre chose qui la fit bondir de son canapé. Elle attrapa le chapeau de Tony, son trench puis fila de son appartement sans plus attendre.

Tiens bon Espoir, j’arrive.