Manoé relâche son étreinte, et me prend la main :

 - Nous ne devrions pas traîner... ma fiancée doit sûrement me chercher partout... elle est assez collante, nous nous voyons peu souvent...

 - Oui, je comprends...

Il me caresse la joue:

 - Je dois trouver une solution pour annuler ce mariage... cela risque de me prendre du temps, et il va y avoir pas mal d'obstacles sur notre route... il faudra que tu me fasses confiance, d'accord ?

Je lui serre la main un peu plus, et lui fais un sourire:

 - Je te fais confiance... j'attendrai...

Il me fait un tendre baiser, et me prend à nouveau dans ses bras :

 - Je n'arrive pas à te lâcher... tu m'as vraiment manqué, Kimi... ça a été très dur pour moi de garder mes distances... je voyais bien que tu n'étais pas bien...

 - Ce n'est rien... l'important c'est que maintenant tu sois là...

Il passe une main dans mes cheveux, pour me recoiffer. Il s'éloigne de moi, prend soin d'essuyer mon maquillage qui a coulé, et me sourit :

 - Je vais descendre le premier. Je t'enverrai un message pour te dire quand tu pourras descendre. Je préfère m'assurer que personne ne soit dans les parages... je connais bien cette maison, ils ne se poseront pas de question s' ils me voient descendre... toi, en revanche, ça va paraître assez louche...

 - Oui, je vais attendre ton message. Ne t'en fais pas.

Nous nous regardons un moment, il me donne un dernier baiser sur la joue, puis il quitte rapidement la pièce. Je me laisse tomber contre le mur. Mon cœur palpite. L'avoir retrouvé, sentir son corps contre moi, m'a fait tellement de bien... j'ai du mal à réaliser qu'il soit de nouveau avec moi. Je pose mes mains sur ma poitrine, ferme les yeux, et fais un large sourire.

Je reste quelques minutes, sans bouger, à me repasser en boucle le film de nos retrouvailles, quand j'entends mon téléphone vibrer dans ma pochette. Je me baisse pour la ramasser, et le prends. Je constate alors que j'ai un appel en absence, et un message.

L'appel provient de Eden. Merde... il a dû me chercher partout ! Je l'avais complètement oublié... j'ouvre ensuite le message de Manoé : « Tu peux descendre, tous les invités sont dans la véranda, en train de manger ». Je souffle, me tapote les joues, puis descends en direction du salon.

Je marche rapidement jusqu'à la terrasse, et rejoins Eden, qui a les yeux rivés sur son téléphone.

 - Eden !

Il lève rapidement les yeux sur moi :

 - Kimi, je t'ai cherchée partout ! Je commençais à m’inquiéter... tu étais passée où ? J'ai aperçu Manoé et je...

Il s'arrête soudainement de parler, et me fixe, en se mordant la lèvre. Son visage se décompose, et son regard rejoint peu à peu le sol. Un long silence s'installe entre nous.

La cousine d'Eden nous rejoint, d'un pas pressé :

 - Eden, tu ne viens pas manger ?

Il met quelques temps à lever son visage vers elle :

 - Si... je cherchais juste... Kimi...

Sa voix est grave et il serre les poings. Je réalise alors qu'il a compris la raison de mon absence... je pose ma main sur son bras, qu'il retire immédiatement.

 - Allons manger... ils nous attendent, dit-il sur un ton sec.

Il se retourne, et avance en direction de la véranda. Je crains alors que la situation dégénère... je le suis d'un pas rapide.

Après quelques minutes de marche, nous arrivons dans la véranda. De grandes tables dessinent un carré, et les invités ont tous pris place, devant de somptueux plats.

 - Je vous ai garder des places côte à côte... on se retrouvera plus tard Eden !

Sa cousine va s’asseoir à côté de son père, et nous nous asseyons. Il pose ses coudes sur la table, et son visage dans le creux de ses mains. Je le regarde, ne sachant quoi lui dire... il semble être énervé.

Je scrute les alentours, et aperçois Manoé, assis aux côtés de sa fiancé. Son regard est posé sur moi, et il me fait un léger sourire. Je lui souris également, mais il porte très vite son attention sur ses voisins, et entame une discussion.

Je tourne alors la tête vers Eden, qui le fusille littéralement du regard. Il se sert un verre de vin, et le boit d'une traite, avant de s'en resservir un deuxième.

 - Eden... tu devrais faire attention à ne pas trop boire...

Il vide son verre, et se tourne face à moi :

 - Ne t'inquiète pas... je ne ferai pas de scandale. Du moins, pas ici...

Il se ressert un autre verre, mais je pose ma main sur son bras pour le stopper.

Il s'arrête, et me regarde de nouveau :

 - Cette soirée était une très mauvaise idée... je savais bien que l'invitation cachait quelque chose... mon oncle a toujours su qu'avec mon pseudo frère, c'était compliqué. S'il m'a invité dans le but d'une réconciliation, il est complètement abruti... je ne l'ai jamais autant détesté qu'en ce moment...

Il retire ma main de son bras, et vide son verre.

 - Eden... tu vas être saoul...

Il passe ses mains sur son visage, et défait sa cravate.

 - On respire pas avec ça...

Il passe une main dans ses cheveux, et semble de plus en plus nerveux. Il lève la tête au plafond, soupire, et jette à nouveau des regards foudroyants à Manoé. Je ne sais pas du tout comment le calmer... et j'ai vraiment peur qu'il perde le contrôle.

 - Eden, si ça ne va pas, nous devrions rentrer...

Il me regarde un bon moment, puis se sert un verre.

 - Eden, s'il te plaît... arrête de boire !

Il se lève brusquement. Les invités le regardent un moment, et il sourit :

 - Bon appétit à tous ! dit-il, en quittant la véranda.

Je jette un rapide coup d'œil à Manoé, qui est toujours dans sa discussion, et semble imperturbable. Je me lève alors à mon tour, pour rejoindre Eden.

Je le vois marcher en direction du jardin, j'enlève alors rapidement mes escarpins pour le rattraper.

 - Eden, attends !

Il ne me prête pas attention, et continue d'avancer rapidement. Je me mets alors à courir pour le rattraper. Quand j'arrive à son niveau, je lui attrape le bras, il s'arrête mais il retire ma main, et se remet à marcher. J'avance alors rapidement devant lui, et pose une main sur sa poitrine, pour l'arrêter de nouveau:

 - Pourquoi est-ce que tu me suis ? Tu me prends pour un gamin ? , dit-il, sur un ton très nerveux.

Il me fixe avec un regard noir :

 - Non, mais tu n'as pas l'air bien... je n'ai pas envie de te laisser seul dans cet état...

Il passe ses mains sur ses yeux :

 - Je ne supporte plus cette situation. Je vais vraiment finir par le tuer...

 - Ne dis pas ça...

Il souffle, et reprend la parole :

 - Avant, je gérais la situation... j'ai fais beaucoup d'efforts pour être simplement un ami pour toi, et je me disais que cette histoire entre vous passerait, et que peut-être tu finirais par t'intéresser un peu à moi... mais ce connard apparaît toujours, et revient à la charge... et ça commence vraiment à me faire péter les plombs...

Il m'attrape soudainement le visage, et pose ses lèvres sur les miennes. Prise au dépourvu, je n'ai pas eu le temps d'esquiver son baiser. Je pose mes mains sur sa poitrine, et tente de l'éloigner, mais il me tient fermement, et je n'arrive pas à le repousser. Il m'embrasse avec ardeur, tout en me serrant contre lui. Je lui donne alors des coups sur le torse, pour qu'il lâche prise. Après quelques minutes, il finit par s'éloigner de moi.

Je suis vraiment sonnée par ce qu'il vient de se passer. Je le regarde, interloquée.

Il fait quelques pas en arrière :

 - Putain... je te dégoûte tant que ça ?

Je suis sans voix. Je ne trouve pas les mots pour lui répondre. Il passe une main sur son front, et reprend ses pas. Il s'arrête, et se tourne vers moi :

 - Il vaut mieux que tu rentres en taxi. Je vais en appeler un pour qu'il vienne te chercher dans quelques minutes... je pense que tu ne voudras plus me revoir après ça.

Il me regarde un moment, puis reprend son chemin, et ne s'arrête plus.