Comme un serpent
Lové autour de mon cerveau que tu entoures de tes froids anneaux,
Tes crochets gouttent d'un venin mortel qui ruisselle
Dans mes lobes spongieux, sillons et circonvolutions.
Oui pour l'instant tu dors mais je sens que tu te tors,
Quelque chose t'a dérangé dans ton sommeil et déjà je m'éveille
Le matin avec l'âme lourde de mauvais chagrin.
Je suis dans le creux de tes ondulations, si bas que je ne me vois plus remonter.
A quoi bon lutter contre toi l'infernal python, j'ai du mal à respirer ;
Et bien étouffe-moi et mes noires pensées, mets ta proie au trépas.
Ne plus penser, ne plus souffrir, c'est ce que tu as à m'offrir
Et j'avoue que je suis tenté de troquer ma vie torturée contre cette fausse paix.
Mais non, que dis-je, je ne vivrai plus jamais la trêve
Si je continue de boire ton immonde sève.
La peine immense et sanglante dont tu m'enserres
Vaut-elle de fermer à jamais mon coeur au bonheur éphémère ?
Mon agenda est une plaie béante qui s'infecte, puante,
A ton contact le passé est tout noir et l'avenir se fait dérisoire
Sans relief et sans promesse autre que la souffrance sans cesse.
Ah, tu siffles maintenant, un son strident
Qui me vrille le crâne, tu pourrais le fendre sans arme
Ton echo suffit pour cela. Suis-je perdu en toi
Ou est-ce toi qui te perds au fond de moi ?
Confusion, perte de sens, je vis de nouveau sous ton emprise
Celle qui engourdit mes sens et qui mon moral brise.
Je ne peux plus respirer, insoutenable apnée.
Ton venin a pénétré mon coeur dont les battements se font lourds,
Je veux que s'arrêtent ces coups de gong sourds
Quitte à ne plus jamais jouir de leur musique.
Tu m'as mordu, c'est ce qui pique
Mes yeux embués, gorge nouée.
Je n'y vois plus clair, l'étau se resserre.
Tout ce qui brille maintenant, c'est l'éclat de tes écailles.
Tu es descendu à présent dans mes boyaux et entrailles
Que tu tentes de broyer, douleur à son apogée.
A qui manquerai-je quand tu en auras fini ?
Je n'apporte à mes proches que des larmes et des soucis.
Ils se porteront mieux sans moi, je me laisse dériver.
Congestionné et froid, je ne souris plus, mange à peine et ne dors plus.
Ca sent la mort-aux-rats et cette fois tu l'auras ton repas,
J'abandonne ma carcasse à tes mâchoires démantibulables.
Démembre-moi, disperse mes restes,
Que plus jamais on ne me sauve de ta peste,
Ceci n'est pas un appel au secours, je veux enfin crever
L'abcès purulent qui me gangrène tout entier.
Quoi, tu te retires ? Mais qu'est-ce qu'il font encore, malheureux !
Ne me ranimez pas, lisez l'épitaphe que son étranglement a tatouée sur ma peau,
J'étais si proche du but, je leur en veux,
Qu'on me laisse périr, c'est tout ce que je vaux.
Mais non, l'aigle noir a terrassé le reptile,
Il me faudra du temps pour me remettre de cette attaque vile
Sachant qu'il reviendra à sa place dès l'aigle sauveur envolé.
Dans le dos de mes médecins, de mes proches et alliés
Je tâte les tubes qui s'égouttent dans mes veines,
Rappel de petits serpents qui s'y enfoncent sans peine.
Les draps qui me recouvrent sont la mue
Du mal qui reviendra grandi d'une plus grosse armure.
En attendant mon coeur bat fort,
Comme pour tenir mon ennemi éloigné, qui déteste les vibrations.
Je suis au comble de l'émotion.
Qu'ai-je failli faire encore ?
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