Je suis mort
Je suis mort.
Je dois l'être.
Pourtant je ne comprends pas.
Il doit y avoir quelque chose. Un passage ? Un changement ? Un nouveau monde ?
Des flammes dans mon cas !
Des flammes sûrement...
Et il n'y a rien.
Un soir, je me suis tué.
Le lendemain, je me suis retrouvé dans mon bureau.
A mon travail.
Et je n'ai pas compris.
Je suis mort.
Cela fait deux cents ans que je le suis.
Et pourtant...
C'est long deux cents ans. Vous imaginez ?
Je me suis réveillé à mon poste et je ne l'ai plus quitté.
Sans cesse à mon bureau, dans les locaux de la Préfecture de Police.
Au moins, j'ai pu me rappeler mon métier.
J'étais inspecteur de police.
De cela, j'en suis sûr !
Je suis mort...
Oui.
Et maintenant ?
J'ai suivi les collègues. J'ai assisté à leurs recherches maladroites ou au contraire j'ai applaudi quand quelqu'un se montrait brillant.
J'ai rarement été impressionné, je dois avouer.
Mais j'ai vu les heures passées à leur poste par certains, j'ai vu les hommes poussés à bout, j'ai vu les femmes commencer à être acceptées dans nos rangs.
Cela m'a choqué...et puis j'ai accepté.
Le changement a du bon.
Je suis mort.
Je hante mon bureau et la salle des archives.
Je ne me souviens plus de mon nom mais je sais une chose !
Je cherche quelqu'un.
Et c'est pour cela que je suis encore là.
Coincé dans ce monde.
Deux cents ans !
Sans qu'on me voie, sans qu'on me parle, sans qu'on pense à moi.
Et un jour...
Un jour, un jeune sergent est entré dans la salle des archives et m'a regardé, soulagé de me voir.
Je n'ai pas compris.
Il m'a simplement dit :
" Ha inspecteur ! J'ai besoin de vous !"
J'ai hésité à me lever.
Je devais faire erreur.
Mais le jeune homme a insisté :
" Je suis le sergent Rivette, on m'a dit de demander à un inspecteur de m'accompagner pour mon premier jour. Comme vous semblez désoeuvré..."
Deux cents ans que j'étais désoeuvré.
Je me suis levé et j'ai juste lancé un :
" Je vous suis, sergent."
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