Comment être content de son sort en étant personnage de roman ?...
Euh, mais pour qui elle se prend, en fait, elle? J'ai l'impression d'être un pantin à sa merci. Je ne sais pas comment le prendre. Et c'est un drame, son bouquin. Un drame, bordel! Pas une comédie où on se marre, noooon... Un bon gros drame où on chiale. Et moi, Bo Clayton, suis le personnage principal. Le centre du truc, en sommes. Comment dire? Je suis pas super content. Pas du tout, même. Depuis que cette foutue auteure est entrée dans ma vie, elle a tout bouleversé. Bon, elle vous dirait que c'est moi qui suis entré dans sa vie, mais non, et j'ai jamais rien demandé à personne, moi. Je voulais rester tranquille au chaud dans ma maison, pas embêté par une pseudo-auteure à la plume hésitante. Je la hait. Elle a fait en sorte que ma femme me quitte et que mon fils meurt. Et ceci, dès le premier paragraphe. J'ai l'impression que cette Chanel Lackaday prend ses personnages pour des Êtres d'encre et de papier. Rien de plus. Mais ce n'est pas ce que nous sommes!! Nous sommes vivants, bordel. Nous aimons, nous rêvons. Moi, j'avais envie d'être le personnage d'un roman magnifique, écrit par, je ne sais pas, Elena Ferrante, par exemple. Quelqu'un qui écrit bien. Pas quelqu'un qui va bâcler chaque chapitre. Et surtout pas quelqu'un qui va rendre ma vie de "personnage de roman" misérable... Moi, je voulais être protagoniste d'un bouquin comique! Et encore, seulement un personnage secondaire, comme ça tous les malheurs du monde ne me tomberaient pas sur le recoin de la gueule. Ah, les perso' secondaires, ces gens à qui il arrive rarement quelque chose, mais qui aident tout de même à maintenir l'histoire debout; même parfois à faire avançer la trame du bouquin... Mais bon, pour être tout à fait honête, les personnages secondaires, c'est un peu comme le boucher du coin, chez vous les Humains: on en parle rarement. C'est seulement quelqu'un d'utile de temps en temps. Il fait seulement avancer l'histoire quand il y a un dîner entre amis et que vous allez acheter de la côte de boeuf. Bref, vous avez compris ce que je veux dire. Et encore, si vous graillez pas de viande, le boucher du coin, c'est pas tellement une référence pour vous. Je juge pas. Les trucs que vous graillez, ça vous regarde. De toute façon, vous me prendriez jamais au sérieux, je suis un personnage de roman, bordel. Enfin, bref, j'ai une question (à laquelle vous ne pourrez pas répondre, puisque vous n'êtes que des Humains "ordinaires"): comment être content de son sort en étant personnage de roman? Et vous vous lisez, vous lisez! Comme pour encourager cette pseudo-auteure dans sa création d'un monde dramatique! Mon monde, bordel! En plus, je suis sûr que, pour encore plus bâcler, elle va trouver un moyen de me faire crever à la fin de son bouquin. Putain de vie.
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