10. Lovham - III : Les Lions (ne) mourront (pas) ce soir
-Evran, dépêche-toi ! lui cria Shylvia.
-Je vais aussi vite que je peux !
-C’est pas assez ! Va plus vite ! On va pas tenir, à ce rythme ! hurla Karloff.
Tandis qu’Evran s’efforçait à crocheter la maudite serrure de cette maudite grille menant à une autre section des égouts, à la lueur des torches illuminant faiblement les lieux, Karloff repoussait des Errants hurlants à coups de masse et de bouclier et Shylvia, à l’aide de ses pierres imprégnées de magie qu’elle incrustait sur ses gants, lançait des sorts mineurs en rafale tout en jouant de l’épée. La puanteur des égouts était déjà difficilement supportable, mais maintenant, il fallait ajouter l’odeur âcre qui se dégageait de ces choses lorsqu’elles saignaient et mourraient, sans compter celle immonde lorsque leur chair brûlait. Ils avaient beau en occire deux ou trois, le double accourait dans ces couloirs sombres, humides et crasseux. En même temps que s’accumulait les corps sans vie de ces horreurs, l’endurance de Karloff et Shylvia chutait dangereusement.
-EVRAN ! hurlèrent ces derniers en chœur.
-Putain de serrure de mes… ! J’y suis presque !
Karloff repoussa un Errant d’un revers de son bouclier, pendant que Shylvia plantait celui qui attaquait son compagnon par derrière et qu’elle projeta vers une bande qui accourait vers eux une belle gerbe de feu rosé, qui les enflamma. Un Errant se jeta sur Shylvia, qui fut sauvée par la charge de bouclier de Karloff contre l’ennemi avant qu’il ne lui écrase le crâne d’un bon coup de botte bien placé. Trois Errants accoururent tout de suite après. Karloff en bloqua un, Shylvia embrocha un autre mais le troisième parvint à passer, pour attaquer Evran.
-RAAH ! Me dérange pas, enculé !
L’Errant se jeta sur lui mais il se décala juste à temps pour qu’il se mange la grille en pleine face, avant de la lui écraser violemment, de sorte à ce qu’il ne se relève pas, le temps de finir de crocheter cette foutue serrure !
-EVRAN ! hurlèrent de nouveau Karloff et Shylvia, qui commençaient à ne plus tenir.
CLAC !
Le cliquetis salvateur !
-C’est bon ! hurla Evran en ouvrant la grille en vitesse. Allez, on se tire !
-Enfin ! s’écria Shylvia.
Les trois Lions Écarlates détalèrent comme des lapins, les Errants à leurs trousses, tout en cherchant un passage vers l’air libre.
-De tous les endroits où l’on pouvait être envoyé, pourquoi on a eu les égouts !? s’énerva Evran. Y a rien de pire que les égouts ! Y a jamais rien de bon, dans les égouts ! Juste de la merde ! De la merde et des emmerdes !
-Tais-toi et cours ! Tu feras de l’esprit plus tard ! lui cria Shylvia.
Ils arrivaient à maintenir une distance entre eux et leurs poursuivants. Du moins, Evran et Shylvia pourraient le faire encore un bon moment, mais pas Karloff. Du fait de son surpoids, il était plus lent et se fatiguait plus vite. On lui avait pourtant dit que cela lui porterait préjudice un jour et ce jour était peut-être venu. Mais s’il se faisait attraper, elle et Evran aurait peut-être…
Cette pensée la surprise et la dégoûta au plus haut point. D’autant plus étonnant qu’elle venait d’elle. Sacrifier Karloff ? Shylvia aurait préférée s’ôter la vie plutôt que de faire ça !
-Là ! Une échelle ! cria Evran.
En effet, à quelques mètres devant eux, une échelle menant à une source lumineuse faible mais distincte. Evran l’atteignit en premier et grimpa aussi vite qu’il put, tandis que Shylvia attendait Karloff et l’encourageait à se dépêcher ; qu’il y était presque.
-Shylvia ! Qu’est-ce que tu fous ! Grimpe vite ! lui ordonna Evran.
-Je ne pars pas sans Karloff ! Allez, mon grand ! Encore un effort !
-P… partez sans moi ! cria-t-il alors qu’il avait commencé à ralentir, le souffle court.
-Hors de question que je t’abandonne ici ! cria Shylvia en commençant à générer une sphère bleutée.
Les Errants gagnaient du terrain sur Karloff et ce dernier ralentissait de plus en plus. Il n’arriverait pas à rejoindre l’échelle à temps !
-Plus vite, plus vite…, marmonna Shyliva avec un regard paniqué sur ce qu’elle voyait tandis que sa sphère bleutée prenait de l’ampleur.
Il en était hors de question ! Hors de question qu’eux, sans doute les derniers Lions Écarlates, meurent dans les égouts sordides d’une ville inconnue remplie de monstruosités humanoïdes !
-KARLOFF !! À TERRE !!!
Ce dernier, sans se poser de questions, obéit et se jeta à plat ventre au sol, en le protégeant la tête. La sphère bleutée de Shylvia se compressa rapidement jusqu’à atteindre la taille d’une bille puis elle la lança sur ce qui devenait une horde d’Errant. Quand la petite sphère toucha l’un d’eux, il y eut une énorme explosion et un air glacé envahit le couloir, soufflant au passage les torches alentours. Vint alors le givre sur les parois et sur les Errants, dont les mouvements ralentirent au fur et à mesure avant de s’immobiliser, tandis que leurs cris inhumains mourraient avec eux à mesure qu’ils se transformaient en statues de glace.
Puis le silence. Un silence bienvenu, après un assourdissement de cris horribles.
Shylvia, épuisée par le sort qu’elle venait de lancer, chancela et tomba sur ses fesses. Karloff prit un temps pour reprendre un souffle normal, se releva pour la rejoindre et lui offrit sa main afin de l’aider à se relever. Shylvia l’accepta et lorsqu’elle se tint de nouveau sur ses pieds, elle le gifla. Assez fort. Ce qui le surpris.
-Ne me demande plus jamais de partir sans toi ! Plus jamais !
-Mais…
-JAMAIS !
Son cri résonna entre les parois et un nouveau mal de crâne l’assaillit. Karloff fut un peu effrayé de sa réaction. Il l’était toujours quand elle s’énervait bien. Shylvia vint ensuite le prendre dans ses bras et, le visage caché contre son torse enveloppé, elle lui marmonna que s’il mourrait, elle mourrait aussi. Karloff ne sut que dire ni que faire, à part la prendre dans ses bras pour tenter de la calmer un peu. Tout en faisant en sorte qu’il ne voit rien, Shylvia sourit quand il la prit dans ses bras.
-Hé ! Vous deux ! Si tout va bien maintenant, vous pourriez monter ! Avant que d’autres de ces trucs décident de venir tailler une bavette !
-On arrive, lui dit Shylvia en se décollant de Karloff.
Les deux grimpèrent finalement à l’échelle pour rejoindre Evran, pour atterrir dans une petite ruelle sombre qu’ils quittèrent rapidement pour les rues fantômes de la ville. Ayant besoin de se poser un instant et de préférence à l’abri, ils s’arrêtèrent devant une maison qui semblait vide mais fermée à clé. Karloff se sentait mal de pénétrer chez quelqu’un sans y être invité, mais Evran, alors qu’il venait de crocheter la serrure, lui dit que s’il voulait rester dehors avec les monstres, c’était son choix et entra dans la maison. Shylvia prit la main de Karloff et le tira à l’intérieur. Ils fermèrent la porte et pendant que Karloff restait près de l’entrée, les deux autres inspectaient la demeure. L’endroit était poussiéreux et plongé dans un silence de mort. Le sous-sol était condamné mais l’étage, vide de toute présence, paraissait sûr. En plus, il y avait un lit dans l’une des pièces pour se reposer. Après cela, ils barricadèrent les entrées avec des meubles avant de monter dans cette chambre pour se poser et souffler. Evran, sans consulter ses camarades, s’accapara le lit en premier. Voyant la cheminée, Karloff pensa allumer un feu pour se réchauffer. Par chance, il y avait une bûche dans le foyer et il utilisa des restes d’un meuble en bois qu’il cassa pour le petit bois. Shylvia alluma le tout avec un sort et ils s’assirent, autant pour se reposer que pour faire l’inventaire de leur équipement. L’une des pierres incrustées dans son gant droit de Shylvia, une bleu, était fissurée et avait perdu de son éclat. Inutilisable. La pierre rouge brillait encore de mille feux et la jaune semblait avoir légèrement ternie. Celles de son gant gauche, une blanche, une violette et une noire, brillaient toujours.
Elle enleva délicatement la bleu, qui se transforma aussitôt en poussière fine, puis fouilla dans sa sacoche pour en prendre une autre. La dernière de cette couleur.
-Il ne me reste qu’une pierre de glace, leur déclara-t-elle. Et celle de feu commence à perdre de son éclat.
-J’ai presque plus de couteaux de lancer, dit Evran qui avait étalé ses affaires sur le lit. Je vais devoir jouer les économes.
-Moi, il ne me manque rien. J’ai de la chance, après ce qui s’est passé dans les égouts… Si vous avez besoin de tonifiants ou autres, demandez.
-Ça ira, fit Evran. Mais bordel de merde, où est-ce qu’on a atterri ? On se faisait aspirer dans une fumée noire quand on met les pieds dans cette ville, on se réveille dans des égouts, on tombe sur des… des… J’ai pas les mots pour décrire ces trucs, à part que ça a l’air humain sans l’être ! Et en plus de ça, c’est agressif et ça nous poursuit en horde !
-Je crois que le plus effrayant, c’est l’absence de personnes dans cette ville…, fit Karloff. Vous avez remarqué qu’on a croisé personne, depuis qu’on est sorti des égouts ?
-Ouais. Et c’est pas comme si il n’y avait jamais eu personne dans ce fichu endroit. Suffit de voir cette maison ! C’est clair qu’il y a eu des résidents, à un moment donné ! Où est-ce qu’ils ont bien pu aller ?
-Si ces monstres traînaient dans les rues, soit ils sont morts soit ils ont fui la ville. Ce que je leur souhaite…
Shylvia n’était qu’à moitié concentré sur la conversation, plus préoccupée par les récurrents maux de tête qu’elle ressentait depuis leur arrivée dans ces bois. Pire encore, ces maux s’étaient amplifiés. Elle n’en avait pas parlé à ses compagnons mais son état commençait à l’inquiéter et elle espérait, secrètement, que cela passerait.
-Reposons-nous, proposa Evran. Après ces péripéties, on en a besoin. En plus, je commence à avoir un mal de crâne, là… On repartira à la recherche des autres, après.
-Oui, approuva Shylvia. En plus, je m’inquiète pour ces enfants…
-Ils savaient que ce ne serait pas une promenade de santé mais je comprends…
Après avoir rangé ses affaires, Evran ne tarda pas à bien s’installer sur le lit et à s’endormir, sans doute terrassé par toutes ces émotions. Karloff s’allongea sur le tapis poussiéreux et ferma les yeux pour les reposer. Shylvia, elle, s’installa dans un fauteuil non loin de la cheminée. Par bonheur, celui-ci était plus que confortable. Toutefois, même si elle était fatiguée, elle ne ferma pas les yeux comme les autres. Cette douleur au crâne la vrillait au point que s’endormir serait vain, vu qu’elle se réveillerait sans doute tout le temps à cause de ça.
Elle essaya tout de même d’offrir à son corps du repos, tout en fixant Karloff, assoupi près du feu. On aurait dit un ours qui hibernait. Un gros ours tout mignon…
Elle veilla ainsi ses compagnons pendant ce qu’elle estima deux bonnes heures.
Plus ou moins reposés, les trois compagnons quittèrent leur abri et entamèrent leur exploration de la ville, pour ne trouver que rues et ruelles désertes. Ou presque. À certains coins de rue, ils tombaient parfois sur un ou deux Errants marchant sans but en poussant des râles proches de l’agonie. Préférant éviter d’enchaîner les affrontements ou les courses-poursuites, ils faisaient des détours, parfois assez longs. Mais sans destination définie, leur exploration ne différait pas tant que ça d’une errance, à l’image de ces êtres errant au hasard.
-Hé ! Attendez ! s’écria subitement Evran.
-Quoi ? lui demanda Shylvia.
-Vous n’entendez rien ?
-Quoi ?
-Écoutez…
En tendant l’oreille, ils entendirent en effet un bruit léger non loin de là. Evran proposa qu’ils aillent voir, en mettant en avant qu’il s’agît peut-être des autres qui avaient besoin d’aide. Bien que Karloff ne fût convaincu qu’à moitié, ils y allèrent ensemble, tout en se tenant prêt à se battre si besoin il y avait. Et ce fût sans aucun doute la meilleure chose qu’ils aient décidé : en approchant, ils reconnurent sans mal le bruit typique de l’acier qui s’entrechoquait. Ils pressèrent alors le pas.
Sur une grande place, ils virent de leurs yeux ce qui étaient à l’origine de ce qu’ils avaient entendus. Devant eux, deux femmes se livraient batailles, dont l’une essayait vraisemblablement de protéger les trois autres, dont l’une semblait d’ailleurs mal en point.
Les deux combattantes étaient de vêtues de noir : l’une portait un long manteau noir d’encre avec pantalon et cuissardes assorties, l’autre un manteau et une robe en haillon sombre comme la nuit. Ces deux femmes portaient chacun un masque. Celle au long manteau avait la forme d’un corbeau, rappelant les masques que les médecins traitant la peste portaient. Quant à celle qui portait la robe en haillon, on aurait plutôt dit une visière en argent ornée recouvrant son visage et laissant libre sa chevelure d’argent flotter au vent.
Quant aux armes, toutes les deux possédaient un katana. Celui de la femme au masque de corbeau possédait une lame noire d’encre, tandis que celui de la femme à la visière d’argent paraissait on ne peut plus normal.
-Dame Iosephka ! cria l’une des femmes en arrière.
-Je vais la retenir ! fit la femme à la visière d’argent. Partez !
-Mais… !
-Obéissez !
La femme au masque de corbeau fondit sur la dénommée Iosephka et tenta une frappe en taille, qui fut bloquée.
-Maintenant !
Deux des trois femmes que Iosephka protégeait emportèrent la troisième et coururent sans se retourner.
-Elles peuvent fuir mais elles ne m’échapperont pas, déclara la femme au masque de corbeau à Iosephka.
-Je ne vous laisserai pas les corrompre !
-Les ? Elles ? Insignifiantes. Il n’y a que cette femme qui nous intéresse réellement. Le vieillard ne représente aucun intérêt pour nous. Sauf…
La femme au masque de corbeau appuya sur la lame de son arme, pour tenter de faire flancher son adversaire.
-Sauf si tu parles des nouveaux venus…
Iosephka parvint à se dégager et tenta une frappe dans un angle mort, mais la femme au masque de corbeau dévia la lame adverse avec une facilité presque indécente et la repoussa d’un coup de pied dans l’estomac, l’envoyant à terre.
-Iosephka… Tes coups me paraissent bien fades, par rapport aux dernières fois. Tu ne t’es pas encore entièrement remise, je me trompe ?
-Silence ! Qu’importe les blessures, je me dresserais toujours devant vous tous ! Et toi, plus que quiconque !
La femme au masque de corbeau soupira légèrement.
-Jusqu’ici, je t’ai épargné, par respect pour notre ancienne amitié et dans l’espoir de te faire changer d’avis…
-Trop aimable…
-... mais je constate que j’espère en vain. Et je suis lasse de tout ceci…
Elle leva son arme, prête à frapper.
-Adieu, Iosephka. Puisse les Ténèbres t’étreindre à nouveau, dans la mort.
Elle s’apprêtait à abaisser son bras et Iosephka ne bougeait pas. Le pouvait-elle seulement ? Ou était-elle résignée à mourir ? Dans tous les cas, c’était la mort qui l’attendait au bout.
-Même pas en rêve !
Shylvia, profitant d’une ouverture, lança un éclair qui frappa de plein fouet la femme au masque de corbeau et la sonna. Alors que Karloff accourait pour tenter de la renverser avec une charge de bouclier, qu’elle arrêta aisément avec sa lame, Evran accourut vers Iosephka, l’aida à se lever et commença à se sauver avec elle.
-Pourquoi vous avez fait ça, bande de cons ! hurla Evran alors qu’il s’éloignait autant que possible avec sa blessée. On aurait pu rester caché et attendre qu’elles finissent !
-Et laisser quelqu’un mourir sans rien faire ? Jamais ! lui cria Shylvia alors qu’elle courait pour le rejoindre. Karloff ! Suis-nous une fois que tu l’auras neutralisé !
-Compris ! fit ce dernier.
La femme au masque, ignorant complètement Karloff, fixait Shylvia et Evran portant Iosephka courir le long de la rue.
-Je vois… Le destin ou la chance… Bah, qu’importe.
-Qu’est-ce que tu marmonnes ? C’est ici que ça se passe ! lui lança Karloff en dressant son bouclier et tenant fermement sa masse. Ne compte pas sur moi pour te laisser passer ou m’igno…
-Tu me gênes. Disparrais.
D’un simple coup de pied, elle repoussa Karloff, son bouclier et son gabarit à facilement deux ou trois mètres, à son grand étonnement, avant de commencer à marcher vers ses compagnons.
-Reste ici ! C’est moi, ton…
Il n’eut même pas fini sa phrase que la femme au masque de corbeau fendit l’air devant lui avec sa lame, avant de reprendre sa marche. Karloff s’immobilisa malgré lui. Il sentit un de légers picotements sur sa poitrine alors que son bouclier se fendait en deux. Alors que la moitié de ce dernier tombait au sol, son vêtement fut entaillé au torse, puis la côte de mailles en-dessous, puis… sa chair. Subitement, l’entaille prit de l’ampleur et du sang en jaillit, avant qu’il ne tombe à genou au sol et ne s’écoule.
Shylvia, sentant que quelque chose n’allait pas, se retourna à cet instant et vit Karloff à terre, baignant dans son sang, tandis que la femme au masque de corbeau s’avançait vers elle. Elle ne pouvait le croire… Elle ne voulait pas le croire… Karloff… Karloff…
Dans un cri de rage, elle leva et tendit les mains en direction de la responsable de son malheur pour lui lancer le plus puissant sort possible, quitte à ce qu’il soit incontrôlable !
-Shylvia ! s’écria Evran qui s’était retourné en l’entendant crier. J’arr…
Il sentit un choc puissant sur sa nuque et perdit connaissance.
-Pardonnez-moi… Mais vous, au moins, elle ne doit pas vous attraper…, fit Iosephka en le portant à son tour.
À contre-cœur, elle se mit à courir en transportant Evran et en abandonnant Shylvia, alors que la femme au masque de corbeau, pendant sa marche, murmura :
-Yami no kokyû. San no kata…
Shylvia créa une boule d’électricité qui gonfla à vue d’œil. Elle visa sa cible et… celle-ci disparue de son champ de vision entre deux battements de cils. Pour se retrouver derrière elle et l’entendre murmurer :
-... Kage no ippo.
Un silence assourdissant. La boule d’électricité s’estompa. Shylvia ressentit d’abord des picotements à son épaule droite. Puis la sensation d’un violent coup de lame qui la déchirait, avec la blessure qui l’accompagnait. Un flot de sang ininterrompu… Le choc et l’exsanguination rapide lui firent tourner la tête et elle s’effondra à son tour. Elle puisa dans ses dernières forces pour tendre le bras vers Karloff. « Pitié… », pensa-t-elle. « Pitié… Si les dieux existent, pitié ! Ne le laissez pas mourir… », avant de perdre finalement connaissance.
Regardant la rue vide qui s’offrait désormais à elle, la femme au masque de corbeau soupira.
-Elle a donc réussi à filer. Avec l’autre, en plus.
Elle posa ensuite son regard sur le corps immobile de Shylvia.
-Enfin… Une sur trois, c’est déjà un début.
Elle s’agenouilla au-dessus du corps de Shylvia et posa avec délicatesse sa main. Alors qu’une fumée sombre se mit à envelopper la jeune femme, celle au masque de corbeau prononça ces mots :
-Puisse les Ténèbres t’étreindre.
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