14. Lovham – VII : Mikhail, seul
Combien de temps s’était-il écoulé ? Jusqu’où cette maudite ville s’étendait ? Où pouvait bien se trouver les autres ?
Ces questions tournoyaient dans l’esprit de Mikhail depuis son arrivée dans ces lieux. Enfin, plus précisément, il s’agissait plus d’une chute pour finir par traverser un toit pourrissant et atterrir dans une maison de soin, dont les occupants étaient ces créatures humanoïdes aux cris effroyables qui se jetaient sur lui dès qu’il entrait dans leur champ de vision. Au début, il n’eut aucun mal à se débarrasser d’eux, tombant comme des mouches dès qu’ils étaient touchés par un coup de ses cestes bien placé. Mais bien vite, il se retrouva submergé par le nombre et, bien que l’idée le rendît malade, il dut se résoudre à prendre la fuite et quitter les lieux.
Pendant un temps qu’il ne parvint pas à déterminer, il a erré dans les rues en essayant de se faire le plus discret possible. Chose qui ne lui plaisait pas du tout ! « Y a que les éclaireurs et les voleurs qui se cachent pour avancer ! » grommela-t-il intérieurement. Lui qui avait toujours était du genre assaut frontal et à réclamer des duels à la vue de tous, sans once de subtilité, au nom de la virilité ou autres principes douteux pour arriver à ses fins. Un défaut, selon sa mère et son frère, handicapant quand on combattait au sein d’une troupe. Mais Mikhail était comme ça et dévier de ces traits était un manque inconditionnel de respect envers sa propre personne. Même si on lui avait appris que pour survivre, il fallait parfois mettre ses principes de côté et faire ce qu’il y avait à faire. Et Mikhail n’aimait définitivement pas ça ! Même à cet instant où son instinct lui criait qu’il ne gagnerait pas en agissant comme à son habitude.
-Vivement que je retrouve les autres…
Un grondement venant du ciel retentit. Encore. Depuis un moment, de menaçants nuages sombres couvraient le ciel étoilé qu’il voyait depuis son arrivée. Même lorsqu’elle était éclairée par une lune pâle et froide, cette ville dégageait un aspect sinistre. Et l’apparition de ces nuages ne fit qu’accentuer cela. Mikhail pensait qu’à tout moment, un orage allait éclater. Mais ces nuages étaient là depuis… depuis… Depuis combien de temps ? Il ignorait combien de temps s’était écoulé depuis qu’il a été séparé des autres. Il avait perdu toute notion du temps. « En même temps, comment tu peux savoir combien de temps est passé s’il fait tout le temps nuit ?! », fulmina-t-il à lui-même. Pour ne rien arranger, la faim et la soif le tiraillaient. Lors d’une énième poursuite, il avait perdu la sacoche, où il gardait quelques victuailles, ainsi que sa gourde. Jusqu’ici, il s’était forcé à ne pas rentrer dans une maison pour trouver de quoi se nourrir à cause d’autres principes qui paraissaient stupides dans cette situation, mais il n’avait presque plus de force et sans force, il ne serait pas en état de fuir ou combattre. Et ça, ce serait la pire des choses, compte tenu de sa situation.
-J’me déteste déjà pour ça…
Il choisit une maison au hasard et ouvrit la porte pour pénétrer à l’intérieur. Enfin, ouvrir… Verrouillée, il la défonça d’un bon coup d’épaule, espérant que les bruits n’aient pas attiré l’attention. La poignée et le verrou s’étant cassés dans le processus, il barricada l’entrée avec quelques meubles, en espérant que cela tienne, même sur un malentendu. Il fouilla alors l’endroit un peu plus sereinement en quête de quelque chose à se mettre sous la dent. N’importe quoi lui irait. Même un rat. Au point où il en était… Au cours de ses recherches, il trouva la cuisine et des bouteilles d’alcools en tout genre dans un caisse, soigneusement rangé dans un coin. Ce n’était pas le mieux pour étancher la soif mais c’était toujours ça de pris… Côté nourriture, les trouvailles ne furent pas au rendez-vous. Ce qui était comestible autrefois n’était plus que pourriture et nid à vers, à présent. Au point où Mikhail était convaincu qu’un alchimiste serait capable de composer mille poisons rien qu’avec le contenu d’une de ces marmites abandonnées. Il retourna la cuisine entière mais rien. Pas la moindre chose à manger sans que ça ne le fasse tomber malade. Dans le meilleur des cas.
Son ventre gargouillait, il était fatigué. Il ne s’était pas reposé depuis un bon moment, maintenant. Mikhail songea à dormir un peu avant de s’en aller d’ici et tenter sa chance ailleurs. Et puis, comme on le disait : « qui dort dîne ». Si ça pouvait l’aider à oublier la faim, même pour quelques instants.
Il explora la maison en quête d’un endroit où dormir un peu de manière un minimum confortable. Avec de la chance, dans un lit. Dormir sur le sol, caché comme un rat dans des ruelles sombres, n’avait rien de reposant. La chance lui sourit un peu. Il trouva une chambre dans cette maison avec un lit avec couvertures, oreillers et tout le reste. Du grand luxe, si on ne prenait pas en compte l’état « peu entretenu ». Certes, le lit était brisé et le matelas éventré, mais cela restait relativemetn confortable.
-Bah, j’ai dormi dans bien pire…
Complètement épuisé, il se laissa tomber dans le lit et se laissa étreindre par le sommeil, tout en se répétant à lui-même qu’il ne devait pas rester trop longtemps. Juste assez pour reprendre des forces…
Son sommeil fut agité.
Comme les autres fois, Mikhail se retrouva sur une plaine remplie de corps sans vie, baignant dans des rivières de sang, sous un ciel crépusculaire. Des hommes, des femmes, des enfants, des jeunes, des vieillards… Rien n’avait changé depuis la dernière fois.
Un silence de mort régnait en ces lieux alors qu’une silhouette marchait dans sa direction. Elle apparaissait humaine, massive, menaçante. L’instinct de Mikhail lui hurla que les intentions de ce qui approchait étaient mauvaises et qu’il devait s’enfuir. Et pourtant, il n’en fit rien. Après tout, c’était un homme ! Un vrai ! Fuir ? Hors de question ! Il ferait face et tant pis s’il y passait ! Au moins, on ne pourrait pas dire qu’il serait mort comme un lâche.
Subitement, la terre trembla sous ses pieds. Le décor autour de lui se dissipait, la silhouette se mit à courir vers lui en poussant des cris inhumains emplis de colère. Puis, Mikhail eut l’impression de tomber dans une noirceur profonde…
Un grand fracas suivi d’un autre tremblement le tira brutalement de son sommeil !
-Mais que… !?
La pièce se mit à trembler, secouant le lit. Le mobilier bougeait dans tous les sens avant de se renverser. Mikhail eut même l’impression que la pièce elle-même était en train de bouger.
-Oh, nom de… !
Pris de panique, il bondit du lit et se précipita vers la porte. Cette fois, il eut l’impression que le plancher s’inclinait. En regardant par une fenêtre, il se rendit alors compte qu’en réalité, tout le bâtiment était en train de pencher pendant ses tremblements, menaçant de s’effondrer.
-Nonnonnonnonnonnonnonnonnonnonnon !
Il devait sortir d’ici et vite ! Trop tard pour atteindre l’escalier ! Ses pieds décollèrent du sol et il chuta vers la fenêtre à l’opposé qui se retrouva en contre-bas, dû à la rotation pendant la chute, et passa à travers, pour atterrir lourdement dans la rue. Il n’eut pas le temps de pester qu’il vît la maison où il se trouvait auparavant tomber sur lui… et le sol en-dessous se fissurer.
-Merde, merde, MERDE !!!
Il commença à fuir à quatre pattes, pour se remettre sur deux rapidement et détaler aussi vite qu’il le put tandis que la maison commençait à s’écraser au sol tout en soulevant un nuage de poussière, avant de se faire engloutir par le sol qui s’ouvrit en deux.
-CHIIIIIIIIIIIIIER !!
Mikhail se rua dans la rue, poursuivit par cette fissure qui la lézardait, avant de s’ouvrir et la fendre en deux pour engloutir tout ce qui se trouvait à sa portée. Il avait beau courir aussi vite que ses jambes le lui permettaient, la fissure gagnait trop rapidement du terrain. À la fin, elle finit par le rattraper et le sol s’ouvrit alors sous ses pieds pour l’avaler à son tour, provoquant sa chute dans les entrailles de la ville. Mais au lieu d’une longue qui se serait terminé sur sa mort, ce fut une succession de courtes chutes avec des enchaînements de glissades, sans compter les percussions contre des surfaces dures. Un homme ordinaire serait déjà mort. Heureusement que Mikhail était né avec une meilleure constitution que la moyenne.
Ce qui n’empêcha pas un énième choc à la tête de lui faire perdre connaissance, alors que tout continuait de s’effondrer autour de lui…
La plaine… Le crépuscule…
La silhouette qui approche.
Fracasser écraser briser
Mikhail se réveilla brusquement en prenant une longue et profonde inspiration, comme s’il émergeait la tête hors de l’eau après être passé à deux doigts de manquer d’air. Puis vint la toux, pour expulser les corps étrangers qui avaient tenté de pénétrer ses poumons et permettre alors à l’air vicié d’y entrer, ce qui ne manqua pas de lui donna la nausée. Après s’être convaincu qu’il était bien vivant, il roula péniblement sur lui-même pour se retrouver sur le dos, le corps meurtri, en espérant qu’aucun os ne soit cassé. Il prit un instant pour s’habituer à la douleur et au passage, put observer ce qui se trouvait au-dessus de lui : une plaie béante en pleine ville qui offrait une vue sur un ciel nuageux menaçant. Visiblement, sa chute fut longue en plus d’être douloureuse, puisqu’il vit ce qui semblait être l’eau nauséabonde des égouts s’écouler par endroits depuis une certaine hauteur jusqu’à son niveau. Ce qui expliquait l’odeur.
Péniblement, il se redressa et posa la main sur quelque chose de dur et long. Il baissa les yeux et vit qu’il était assis sur des ossements. Il sursauta, surpris sur l’instant mais se ressaisit vite. Après tout, ce n’était pas le premier squelette qu’il voyait et il n’était pas question que ce soit le dernier.
Mikhail observa un peu mieux son environnement. Son nouvel ami squelettique n’était pas seul. D’autres gisaient à même le sol et les murs de la pièce étaient ornés d’os en tout genre : tibia, fémur, humérus, cubitus, radius, tout ce qui pouvait composer une colonne vertébrale, des crânes ; beaucoup de crânes... Certains de ces os étaient propres et bien blanc, comme s’ils avaient été nettoyés au préalable, d’autres avaient jaunis sous les effets du temps et… quelques-uns avaient même encore des lambeaux de chair sanguinolents rattachés à eux, comme si ces derniers avaient été prélevés sur des corps qui étaient, il y a peu, sur un corps qui était récemment mort. Ou pire, sur des personnes qui étaient encore vivantes à ce moment.
-Où est-ce que j’ai encore atterri, moi ?
Il se releva tout en gémissant de douleur en tenant ses côtes. Sûrement légèrement cassées, selon lui. Il allait devoir faire attention.
Pour l’instant, il devait quitter cet endroit lugubre ; trouver un moyen de remonter au niveau de la rue au-dessus de lui, en espérant qu’il y ait un passage qui le permettait. De toute façon, c’était mieux que de rester ici. Il se déplaça lentement, à cause d’une douleur gênante à la jambe, dans cette architecture lugubre faite de chair et d’os, éclairée par des torches dont la lueur des flammes blanchâtres donnait une allure fantomatique aux lieux.
-C’est d’un mauvais goût, leur décoration…
Couloirs, salles vides, escaliers qui descendaient ou montaient… L’endroit était un vrai dédale conçu par un fou. Une horreur pour Mikhail qui peinait à s’orienter à l’intérieur ! Plus d’une fois qu’il s’était retrouvé au même endroit ! Et lorsqu’il trouvait enfin son chemin, il avait le sentiment que ce n’était que par pure chance. Juste l’idée l’énerva ! Surtout quand il s’imaginait son frère ou sa sœur se moquer de son sens déplorable de l’orientation.
-BORDEL !
Il frappa un mur, brisant aisément un crâne qui se trouvait sur le chemin de son poing. « Voilà ! Ça sert à rien, mais ça défoule », pensa-t-il.
Au moment de reprendre sa route, il crut entendre un bruit, sans parvenir à déterminer son origine. Il se dit alors que cela devait être dû à son imagination, sous l’effet de la fatigue. Combien de temps avait-il erré dans ce labyrinthe ? Allait-il se perdre encore longtemps dans ce dédale de regagner la foutue surface ? Rien que l’idée le mit hors de lui !
Il entendit de nouveau le bruit, plus distinctement. Comme si quelque chose cognait contre les parois, entre autres. Qu’importe ce que c’était, ça se rapprochait. Et dans son état, s’il devait se battre, il n’était pas sûr d’en sortir victorieux.
-Que ce soit pour me battre ou m’échapper, ça risque d’être compliqué…
Durant son errance dans ce dédale d’os et de chair en lambeaux, le bruit ne fit que se rapprocher… tout en étant de plus en plus distinct… Il crut reconnaitre du métal qui s’entrechoquait et de multiples fracas. Il ne s’avançait pas trop en supposant qu’on se battait non loin d’ici. Et qu’importe qui ou quoi se battaient, c’était violent et ça faisait des dégâts autour d’eux.
-Dans d’autres circonstances, je serais bien allé voir. Mais là, je ferais mieux de m’éloigner le plus loin possible et…
Il s’arrêta alors subitement, se rendant compte de ce qu’il venait de dire, et se mit à se détester pour avoir dit ça, lui, l’homme toujours partant pour une bonne bagarre. Définitivement, il ne fallait pas que les autres l’apprennent ou, il en était sûr, non seulement ils se moqueraient de lui pendant longtemps, particulièrement Jo, mais en plus, il était convaincu qu’il passerait pour pour un peureux. Ou peut-être pire…
Soudain, un silence assourdissant. Voire inquiétant. Pendant un court instant.
Vint alors un cri puissant, rauque et inhumain, avant que le mur sur la gauche de Mikhail n’éclate. Les débris de chair et d’os que volèrent et le frappèrent le surprirent, le firent reculer précipitamment jusqu’à tomber à la renverse, sentant une intense chaleur déferler sur lui.
Il vit alors un homme… Non, cette chose n’avait d’humaine que la forme. Si cette chose avait été humaine, elle ne l’était définitivement plus maintenant. C’était grand, au moins deux mètres de haut. C’était massif, presque autant qu’un Orc adulte. Ça portait une armure sans heaume aussi sombre que le charbon mais qui luisait d’une lueur orangée au niveau des articulations. Là où l’on aurait dû voir la tête du porteur, des flammes qui s’échappaient de l’armure elle-même léchaient un crâne qui donnait l’impression de flotter. Ça avait éventré le mur en tenant fermement par le cou une personne encapuchonnée d’une main et en traînant une autre par sa cape. Un vent chaud, presque brûlant, provenant de cette chose lui soufflait dessus.
Ça semblait ne pas l’avoir encore remarqué. Les tripes du garçon lui crièrent qu’il fallait qu’il se sauve et vite ! Tant pis pour la fierté ou autres bêtises, il se releva vite pour se préparer à détaler d’ici ! Dans sa précipitation, malheureusement, il marcha sur un os qui se brisa sous son poids en faisant grand bruit dans ce couloir. Ça avait entendu cela et tourna le crâne. Pendant que les flammes léchaient ses mandibules, ça fixait Mikhail avec ses orbites vides. Du moins, vides jusqu’à ce qu’il lâche l’un des corps et pointe son doigt en direction de Mikhail. Une lueur dans chaque orbite apparut. Sa mâchoire s’abaissa et le son d’une voix rauque et profonde en sortit :
-Témooooooooin !
Peu de choses avaient effrayés Mikhail dans sa vie. Voir ce mastodonte balancer les corps sans vie tel une poupée de chiffon qu’il tenait pour se lancer à sa poursuite devint l’une d’elles ! La peur qui en découla lui permit de courir comme jamais il n’avait couru, mais ça avait de plus grandes jambes et ses foulées lui permirent aisément de ne pas se faire distancer. La douleur que ressentait précédemment Mikhail s’atténua, l’instinct de survie prenant le pas sur la douleur. Chaque élément de son corps se dédiaient à sauver sa peau, qu’importe que ses muscles soient au supplice ou que ses poumons lui donnaient l’impression de se déchirer à chaque tentative de prendre un souffle.
-Témoooooooin !
Ça hurla de nouveau avant de bondir et, de ses deux poings, tentant d’écraser Mikhail, qui avait commencé malgré lui à ralentir. Voyant sa mort probable arriver, il réunit ses forces pour bondir à son tour sur le côté au dernier moment, afin d’éviter l’attaque et se cogna contre un mur tandis que les poings de ça écrasa et fracassa le sol, le tout en dégageant une vague de chaleur presque brûlante. Ça rageait d’avoir raté son coup et se tourna vers Mikhail en poussant des cris de rage. Malgré l’absence de chair ; de muscles faciaux, on pouvait deviner un certain degré de colère, sans doute aidé par l’intensité des flammes qui léchaient le crâne.
-TÉMOIN ! hurla ça à Mikhail.
-Tu sais pas dire autre chose, tête de bougie ?!
Ça ne sembla pas apprécier ces paroles et décocha son poing pour frapper droit devant lui. Juste avant que le coup n’arrive, Mikhail eut le réflexe de protéger son visage en croisant les bras devant. L’impact fut violent. Il eut l’impression d’une dizaine de bœufs avaient chargés en même temps sur lui. Les os collés au mur derrière lui se cassèrent avec une aisance terrifiante. Malheureusement, cela ne s’arrêta pas là. Ça enchaîna le même genre de coups encore et encore, le mur s’affaissant un peu plus à chaque fois. Mikhail encaissa du mieux qu’il put, mais en plus de l’impact des coups, il dut endurer aussi la forte chaleur qui émanait de cette chose. Mais ce à quoi il ne s’attendait pas, c’était que ces coups de poings, plus que puissants, étaient également brûlants, comme si ces gantelets d’acier avaient été préalablement chauffés à blanc. Là où il recevait les coups, ses vêtements avaient brûlés et sa peau avait comme un peu fondue, sans parler de cette douleur atroce.
-TÉÉÉÉÉMOIN !
Ça se prépara à frapper un grand coup et celui-là, Mikhail était sûr de ne pas pouvoir l’encaisser sans le sentir passer. Mais c’était aussi une occasion : il profita de l’ampleur du coup pour l’éviter, même si cela résultat par une chute au sol. Au moins, le poing de ça traversa le mur sans que sa tête ne soit sur le chemin.
-Tééééé-moooo…
Ça s’était coincé le bras dans le mur et essaya de s’en extraire. Mikhail vit une chance de filer de là et de mettre le plus de distance possible entre cette chose et lui. Il se mit alors à courir aussi vite que son corps meurtri le lui permit, lorsqu’il entendit ce cri résonner entre les parois :
-TÉÉÉÉÉÉÉMOOOOOOOOOOOOIN !!!
Les sons des pas lourds de la chose le poursuivirent, accompagnés de grands fracas. Ça, cette chose massive, s’était lancé à sa poursuite et si on se fiait à ses cris, elle était déterminée, en plus d’avoir la rage au ventre.
Mikhail courut sans se retourner ; sans se soucier dans quelle direction il allait. Tout ce qu’il avait besoin de savoir, en entendant les pas, les fracas et les cris, était que s’il ralentissait ou s’arrêtait ne serait-ce qu’un instant, il était mort. Tout ce qui importait était que les foulées s’enchaînent sans s’interrompre, jusqu’à ce qu’il réussisse à mettre assez de distance entre lui et cette chose. Mais celle-ci parvenait, par il ne savait quel miracle, à quand même le talonner, poussant encore et toujours le même cri, accompagné de vagues de chaleurs infernales.
La course hasardeuse de Mikhail le mena vers un escalier providentiel qu’il décida de grimper. Avec de la chance, l’aspect étroit de l’endroit ralentirait son poursuivant. Il se mit à grimper les marches quatre par quatre pendant qu’il entendait un bruit de frottement d’acier contre de la pierre et des os, suivis rapidement d’un cri de rage. La chose était bien coincée ! Mikhail ne ralentit pas pour autant et continua de se hâter d’arriver en haut des marches. Il avait le souffle court et a vu sa vie défiler sous ses yeux plusieurs fois, mais il avait réussi.
-Plus jamais ça !
Il prit le temps de se poser pour se remettre de ses émotions, en faisant de son mieux pour ignorer l’odeur nauséabonde qui flottait. Le cadre des os et de la chair en lambeaux avait laissé place à de la bonne pierre humide avec de l’eau à la couleur suspecte qui coulait. Sans trop s’avancer, il se dit qu’il avait atteint les égouts.
-On avance lentement mais sûrement… Et vivement que je trouve les autres, parce que j’ai l’air d’un fou, à me parler à moi-même… Ce serait ça, la solitude ? Brrr, ça fait froid dans le dos…
Lui qui avait toujours été entouré, se retrouver isolé ne lui réussissait pas. Il reprit alors son errance et pria pour ne pas tomber sur d’autres mauvaises surprises en cours de route, bien qu’une petite part de lui n’y croyait pas trop.
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