Chapitre 1

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Allongée sur le rebord de ma fenêtre, je fixe le ciel nocturne tacheté de flocons pris dans la tempête.

Il est 16 heures et il fait déjà nuit noire. La rue, à la merci des faibles lumières municipales, est déserte. Mon appartement l’est tout aussi, plongé dans la pénombre, puisque les précédents locataires n'ont pas laissé une seule ampoule électrique - sans doute ont-ils cru que j'étais nyctalope.

Je suis arrivée ce matin depuis Paris Charles de Gaulle. Récupération des clefs de ma nouvelle résidence, puis arrivée du déménageur à midi... Enfin ça, c'était il y a cinq heures... Le hic ? Je l'attends toujours. Dans le noir. Heureusement, le chauffage marche, ce qui est une chance car il fait un froid de canard, ou devrais-je dire, un froid de Viking.

Copenhague, la ville mille fois fantasmée, est enfin à moi.

Copenhague, la ville douce et écolo. Ça va me changer de Paris la morose, de la France qui flanche. Combien de fois nous a-t-on répété que les Danois sont plus heureux, plus beaux, plus blonds, plus… tout ? Il me tarde de découvrir cela par moi-même, grâce au nouveau travail que j’ai décroché. En attendant, je songe à mes futures aventures, yeux plongés dans le vague. J'aimerais bien avoir quelque chose à faire, mais je n'ai pas encore internet ni de téléphone local. Heureusement, il y a mon ordinateur, qui, faute de divertissement, m'offre un peu de lumière. Et puis j'ai la chance d'avoir ma maman à mes côtés. L’indépendance, oui, mais modérée tout de même.

20 heures. Toujours pas de déménageur. Je ne crains pas qu'il ait volé la lampe héritée de mamy Nova ni les rideaux de tata Jacqueline, mais je commence quand même à paniquer un peu, faute de nouvelles.

22 heures. Le camion arrive enfin et entreprend de vider son contenu. Les deux déménageurs exercent leur art avec maitrise et rapidité dans une cage d'escalier elle aussi plongée dans l'obscurité - à croire que les déités nordiques de la lumière se moquent de moi, mais je ne vais pas me laisser abattre pour si peu. Les cartons s'accumulent, ma mère et moi éventrons les cartons à la recherche d'une lampe de bureau. Hallelujah, et la lumière fut !

Minuit, on tombe de sommeil dans mon cinquante mètres carré embourbé de cartons. Les déménageurs n'ont pas fini, mais je me racle la gorge et prend un air sûr de moi :

— Dites, il va falloir arrêter là...

— Ah bah non, on n’a pas fini !

— Il est minuit, on reprendra demain.

— Le chef ne va pas être d'accord, on n'a pas de nuitée prévue ici.

— Très bien, je vais appeler le chef.

Ni une ni deux j'allie le geste à la parole. J'ai payé une fortune pour un déménagement à 16 heures, pas à minuit. Le chef fait la gueule depuis son appartement bien au chaud en France - nul doute qu'il a de la lumière, lui. Je lui explique que ses gars et moi sommes crevés puis qu'on ne va pas déranger les voisins plus longtemps donc il leur paye l'hôtel et on continue demain. Je lui passe son employé, ils discutent un peu puis c'est acté. Ouf, ils repartent avec le camion et le reste de ma richesse.

Je baille, prête à m'avachir sur les cartons, mais ma mère sort les outils qu'elle examine déjà à la lumière de la lampe de chevet.

— On va monter le lit !

— Ça ne va pas la tête ? Je suis crevée !

— On va monter ton lit et on pourra ranger des cartons dessous, sinon demain il n'y aura pas la place de mettre tes meubles.

Je jette un rapide coup d'œil autour de moi. Elle a raison, en l’état actuel des choses, il est impossible de monter l'armoire - pièce maitresse de ma salle à manger. C'est vraiment pénible comme les mamans ont toujours raison. Je soupire et grogne afin de faire bonne figure, et m'attèle à la tâche avec elle. Monter un lit à la lumière d'une lampe de chevet, c’est cocasse.

À une heure du matin je m'écroule sur mon lit, entourée de mes possessions empaquetées et de la présence rassurante de ma maman.

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