3. Rôti
Autour d’une table de salon, quatre hommes en costumes dînent. Ils ont une apparence différente mais sont bien assortis. Le premier a une fine moustache et d’épaisses lunettes, le deuxième un bouc évoquant un maître chinois bien que d’apparence nordique, le troisième est rasé de près mais ses cheveux tiennent plus de la crinière que d’une véritable coupe, enfin le quatrième a une barbe fournie et mal taillée.
Le reste de leur corps est strictement identique, mêmes costumes, mêmes corpulences.
Autour de la table ils parlent, ils rient, ils mangent aussi. Dans leurs assiettes restent des traces de sauces et d’accompagnements, sur la table quelque douze bonnes bouteilles ont été à moitié vidées, dans un plat central repose en paix un énorme rôti.
Les quatre hommes s’esclaffent, celui à la barbe tend un smartphone sur lequel s’illumine la photo d’un quelque chose complètement grillé. Ses yeux semblent dire : « Vous avez vu comment je l’ai rôti ? ». Dans le sourire de celui à l’allure de maître chinois nous devinons : « Il l’avait bien mérité. »
L’homme rasé de près regarde une des bouteilles de vin rouge et se demande s’il est sérieux de se resservir, à moins que la vue du corps calciné du quelque chose sur l’écran ne le gêne. Celui à la moustache au contraire ajuste ses lunettes comme pour ne pas perdre une miette du spectacle qu’on lui propose.
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