Appelez moi Robin!

4 minutes de lecture

Je me rêvais Robin des bois des temps modernes, mais il semblerait que les riches soient encore plus véreux que les pires des vauriens. Cette nuit-là j’étais entré chez ce politicien, celui que l’on voit tout le temps à la télé. Je le savais en déplacement avec sa famille en Asie, c’était passé aux infos du soir, alors je me suis dit que ce serait tranquille, juste mettre la main sur des bijoux et peut-être quelques billets, puis ressortir de la maison. La routine. Avant de casser la vitre du salon, tout de noir vêtu, cagoulé et ganté, j’avais bien pris soin de vérifier qu’il n’y avait pas d’agent de sécurité. Le bris du verre allait déclencher l’alarme, comme toujours, donc je savais que je n’avais que quelques minutes pour déguerpir.

Les riches sont hautement prévisibles, c’est toujours un jeu d’enfant de faire le tour de leur immense propriété en un rien de temps. Des bibelots et des tableaux trop encombrants, étaient munis de systèmes de sécurité complexes. Des papiers importants et des diamants qu’il me serait impossible de revendre, cachés dans des coffres. C’étaient toujours les bijoux qui étaient les moins bien protégés. Je ne parle pas de ceux de très grande valeur, véritables objets de collection, mais des bijoux du quotidien qui, chez eux, ne sont jamais de la bagatelle. Peu de valeurs pour eux, beaucoup pour nous. C’est facile à fourguer ou à faire fondre, pour en tirer quelques centaines d’euros et faire de nombreux heureux dans le quartier pauvre. Je pouvais nourrir plusieurs familles pendant tout un mois avec une poignée de bijoux. Bien sûr pas de grands festins, mais assez pour que personne ne meure de faim. Je ne sais pourquoi, ce jour-là, mon attention fut distraite par un petit objet d’un vert scintillant, posé négligemment sur la commode de la chambre. Après avoir rapidement fourré mon butin de la nuit dans la poche zippée de mon blouson et allégée la tirelire du gamin de quelques billets que papa remplacerait facilement, j’étais sur le point de prendre la poudre d’escampette, lorsque je l’aperçu. Je ne savais pas ce que c’était mais une pulsion inexplicable me poussa à le mettre dans la poche de mon jean.

Le lendemain, comme à mon habitude, je retrouvais Freddy, mon ami d’enfance, et lui refourguais la moisson de quelques villas contre un peu de cash que je m’empressais d’aller dépenser au supermarché du coin. Après cela, je fis le tour des appartements des tours C et D, déposant quelques sacs de vivres chez les plus démunis et m’arrêtant plus longuement chez la vieille Madame Pia, notre doyenne presque centenaire, délaissée par ses enfants mais entourée de l’amour de ses douze chats. Madame Pia avait veillé sur moi toute mon enfance, elle était la grand-mère que je n’avais jamais eue, c’est pourquoi, sachant Minouche malade, il me parut normal de l’emmener moi-même chez le vétérinaire avec ce qu’il me restait d’argent. En échange elle m’offrit une part de sa fameuse tarte aux pommes et une boite avec un reste de ragoût. « Tu dois aussi prendre soin de toi, mon gamin » me dit-elle avec un air sérieux. Je lui souris et l’embrassa tendrement sur la joue avant de repartir, muni d’une petite cage, la petite chatte rousse à l’intérieur crachant son mécontentement d’être enfermée ainsi.

Je ne vis pas le coup arriver. Un instant j’avançais tranquillement en sifflotant, ma cage à la main, l’instant d’après j’étais étalé au sol, du sang coulant de ma mâchoire entrouverte sur le béton de la rue des cèdres. La cage avait volé et s’était écrasée à trois mètres de mon visage. Elle était, à cet instant, totalement vide. Minouche, enfin libérée, avait dû prendre ses jambes à son cou sans demander son reste. Un coup de pied me vrilla l’estomac, et tandis que je fermais les yeux sous l’emprise de la douleur, un autre coup de pied heurta mon visage. Une voix éraillée, que je ne connaissais pas, demanda : « Ou est-il ? », d’un ton sec. Mais de quoi parlait-il donc ? Les coups cessèrent un instant afin me laisser le temps de répondre. Tandis que je tournais la tête pour faire face à mon agresseur, la confusion dû se lire sur mon visage tuméfié car le balourd m’attrapa d’une seule main gigantesque et me plaqua contre le mur avec une force surhumaine. Les nombreuses cicatrices sur son visage et le tatouage en forme d’aigle sur son avant-bras ne laissèrent aucun doute sur son appartenance à un gang connu pour tabasser une cible, ou même s’en débarrasser plus ou moins discrètement, contre une généreuse récompense. Je ne savais pas si je devais me sentir flatté ou effrayé qu’un contrat ai pu être placé sur ma tête. Il sorti un papier froissé de sa poche et me le plaqua sous le nez. Je reconnu l’étrange bijou vert. Il s’agissait d’un pendentif en forme d’œil avec une émeraude en son centre. Cette babiole ne valait pas que j’y laisse la vie, je baissais donc les yeux vers ma poche pour indiquer à mon agresseur où la trouver. Un dernier coup de poing m’envoya valser de l’autre coté de la chaussée, inconscient.

J’aurais pu rester là, dans cette rue déserte de l’arrière quartier, me vidant de mon sang. Pourtant je me réveillai trois jours plus tard dans une chambre d’hôpital. Mes paupières étaient lourdes et ne laissaient passer qu’un léger trait de lumière floue. Un étrange présentiment d’une catastrophe imminente s’insinuait déjà en moi et sans savoir pourquoi, j’éprouvais le besoin de retrouver ce pendentif. Un miaulement familier se fit entendre et, pendant que ma vue commençait à s’éclaircir, je discernais petit à petit la forme d’une vieille dame assise dans un fauteuil à mon chevet, une étrange boule rousse sur ses genoux. Je ne le savais pas encore, mais une extraordinaire aventure était sur le point de commencer.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire NatF ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0