Chapitre dix-neuf : La créature du marais écrit par Orphéa_x

Noémie et Papyon marchaient depuis des heures sous la canopée dense et certainement plein de dangers. Pire encore, leur nouveau compagnon, enorgueilli par sa récente victoire, n'en finissait plus de pérorer sur ses aptitudes exceptionnelles au combat. Tout le monde l'avait toujours sous-estimé, de par sa petit taille, mais tout le monde sait que ce n'est pas ce qui compte...il le leur avait bien prouvé à tous ces détracteurs ! A commencer par Noémie et Papyon qui s'étaient déjà imaginés réduits en cendres au fin fond d'une jungle perdue dieu-sait-où dans la galaxie !

- Ca va, on a compris ! T'es balaise ! Woohoo ! Tu veux un chocolat ?

- Belle façon de remercier celui qui vous a sauvé la vie ! rétorqua le chevalier. Bande d'ingrats !

- On aurait très bien pu s'en sortir seuls !

Pousse pas le bouchon trop loin...! intervint Noémonde. Je te signale quand même que sans lui, vous étiez foutus !

- Ouais, ouais... J'attends quand même de le voir face au dieu Dictateur !

- Qui ça, moi ? demanda le sauveur insignifiant sur son cheval ailé. N'importe quand je l'anéantis ce concentré de moisissure céleste ! Y'a qu'à demander !

- Mais bien sûr ! roula des yeux Noémie.

A mesure qu'ils s'enfonçaient dans la jungle, elle sentait ses forces l'abandonner. Toute cette aventure la fatiguait. Certes, cette récente victoire avait ravivé quelque peu l'espoir de rentrer chez elle, mais l'idée que l'aventure ne fît que commencer l'emplissait déjà d'un doute et d'une forme de lassitude harassants. D'ailleurs, à côté du chevalier, l'utilisation de son prisme lui semblait tout à coup quelque peu inutile, comme si en fin de compte, il n'était pas suffisant. Et pourtant, elle était la bien la Noémère n'est-ce pas ? La Noémie originelle ? Dans n'importe quel monde elle aurait dû être en mesure de mettre fin à tout ça d'un claquement de doigt !

- A quoi tu penses ? demanda Papyon qui la sentait contrariée.

- A rien. Je suis fatiguée. On devrait camper ici, la nuit sera bientôt là.

Ici, ici ? l'interrogea Néomonde.

Noémie balaya la zone du regard. En effet, il n'y avait guère de place où bivouaquer au milieu des arbres. Ils avancèrent encore un peu tandis que la lumière du jour diminuait, quand par un heureux hasard bien déterminé, ils arrivèrent aux abords d'un marais. Tout le monde se mit d'accord pour camper là, et chacun s’affaira à construire un semblant de campement.

Quand tout le monde fut plus ou moins installé, Papyon alla chercher des fruits. Noémie, quant à elle s'était posée sur un vieux tronc aux abords du point d'eau et regardait dans le vide. Il y avait les Noémerveilles à l'origine de la quête, les Noémonstres qui faisaient tout le boulot (disons-le franchement !) et dont elle ne connaisait d'ailleurs, quasiment rien, et les Noémerdes qui pululaient aux quatre coins de la galaxie, tels des staphylocoques dorés un peu trop présents...

Si elle espérait venir à bout du Dieu Dictacteur, il lui fallait certes un plan, mais il lui fallait surtout des informations. Elle avait des armes, des coéquipiers (certains plus utiles que d'autres), mais maintenant il lui fallait en apprendre suffisamment pour parvenir à bout du boss final. Et clairement...c'était pas gagné !

Je sais que tout ça semble presque impossible, mais tu vas y arriver. Tu es la Noémère, si quelqu'un doit réussir, c'est bien toi ! glissa Noémonde dans le silence.

- C'est bien beau de dire ça, on t'a vaincu donc t'as plus rien à faire ! Et puis pourquoi tu pourrais pas m'aider un peu plus aussi ?

On en a déjà discuté. Pas la peine d'insister. Et puis les deux ex-machina c'est pour les faibles ! Les vrais héros forgent leur destinée dans le sang, la sueur et les larmes. Tu veux être une vraie de vrai ou tu veux jouer les personnages de seconde zone ?

- Rooh ça va ! La seconde zone, n'est la seconde zone que si l'on considère la première !

Eh bien ! On va aller loin comme ça...!

Noémie fit mine de ne rien entendre et poursuivis sa contemplation mélancolique, lorsque sortie de l'obscurité de la jungle, une petite boule de lumière s'avança vers le bord de l'eau. Elle eut d'abord du mal à voir ce qu'était cette étrange lumière mouvante, mais bientôt elle entendit un sifflement, et elle lorsque la lumière s'arrêta enfin, elle put distinguer à travers le halo de lumineux, l'insignifiante silhouette du chevalier Naelteriens Pustulous.

Tu sais très bien que c'est pas son vrai nom !

- Gnagnagna...

De mieux en mieux...

Alors qu'elle l'observait un peu plus attentivement, elle se rendit compte que ce dernier était complètement nu et n'avait pour seul "tenue" qu'une étrange arme, elle aussi lumineuse et ressemblant à la sorte d'éclair d'un Dieu bien connu.

- Mais ça va pas de s'exposer comme ça à la face du monde ?! Personne n'a demandé à voir ça ! cria-t-elle à son encontre.

- Ah je ne vous avais pas vu ! Mais en vérité ça ne fait aucune différence, car ceci est ma tenue de pêche !

- Ta tenue de...pff ! railla Noémie, exaspéré par le nabot de lumière. Pêcher dans un marais ?

- Je ne sais pas pour vous, mais là d'où je viens, il y a tout plein de bonnes choses dans le fond de ces eaux croupies !

- Là d'où tu viens...du néant quoi ? C'est carrément logique...

- Vous me remercierez quand vous pourrez manger autre chose que les pauvres fruits de Papyon !

- Eh oh ! Je ne te permets pas avorton à tête de lion ! rétorqua l'intéressé, revenant de sa cueillette.

Mais le chevalier avait déjà disparu dans les profondeurs, à tel point d'ailleurs, que l'on n'apercevait même plus son aura de lumière.

- Fruit ? proposa le cueilleur.

- Fiche-moi la paix !

Noémie n'était décidément pas de très bonne humeur. Papyon déposa sa petite récolte sur le sol et mangea l'un d'eux en regardant Noémie s'éloigner vers l'autre bord du marais. Il sentait bien que quelque chose n'allait pas, mais il ne savait pas comment l'aider.

C'est alors qu'un faisceau de lumière concentrique apparu tel un flash dans l'eau. Noémie et Papyon s'approchèrent et virent des centaines de poissons flotter à la surface. Le nabot de lumière sorti du fond de l'eau, le torse gonflé d'orgueil et un sourire arrogant au bout des lèvres.

- Non mais je rêve... Il les a tous tués...!

- Eh eh ! Vous ne vous y attendiez pas, n'est-ce pas ? Créatures de peu de foi !

- Quel idiot ! reprit Noémie, Mais quel idiot ! On n'a pas idée de me flanquer d'un parasite pareil !

- Quoi ? Mais -

- Qui tuerait tous les poissons pour un repas ?! Hein, qui ?

- Allons, allons... j'ai juste un peu de mal à doser ma puissance parfois, mais le résultat est là !

- Aucun respect pour Mère Nature...siffla Papyon.

- Oh toi l'insecte, on ne t'a pas sonné ! Franchement...y'a plus qu'à se baisser pour ramasser !

Noémie fulminait. Ce soir, la bêtise atteignait de nouveaux sommets. Trop fatiguée pour continuer à se prendre la tête, elle s'apprêtait à leur tourner le dos, quand une masse informe et boueuse s'éleva de la surface du marais, engloutissant au passage le chevalier nabot dont la lumière disparue sans crier gare. Papyon recula, effrayé par ce monticule bizarre qui avait maintenant interrompu sa progression verticale. Deux yeux se creusèrent au milieu du tas de boues, puis une bouche, et bientôt Noémie sentit au fond d'elle-même qu'elle et cette créature semblaient liées.

- Qu'est-qu'-est-ce-que-c'est que ça ? bégaya Papayon.

- Je n'en suis pas sûre mais quelque chose me dit que c'est...

...la première Noémerveille !