Il est allongé là, dans l’herbe haute de la prairie. À l’ombre d’un vieux chêne, il profite de la chaleur de l’été. La brise fraîche agite les feuilles et fait onduler l’herbe autour de lui. Les mains derrière la nuque, il observe le ciel qui s’étend à perte d’horizon. Sur cette immense mer céleste flottent quelques nuages blancs comme neige. Tout est calme, paisible. Quelques oiseaux chantent au loin, leur chant mélodieux résonne comme du cristal. Il prend une profonde inspiration, s’imprégnant du lieu. L’air frais est pur, il porte le parfum des fleurs de la prairie. Il sourit doucement en entendant le bruissement de l’herbe. Sa femme et sa fille viennent le rejoindre dans ce cadre idyllique.

  La petite n’a pas encore six ans. Elle lâche la main de sa mère pour suivre un papillon. Ses cheveux blonds flottent lorsqu’elle court pieds nus dans l’herbe verte. Sa robe jaune pastel s’agite au rythme de ses pas. On pourrait la confondre avec une dryade sortie des bois. Elle s’arrête et laisse échapper un rire cristallin. La fillette s’assied dans l’herbe et commence à tisser une couronne de fleurs. La femme s’allonge sur le coté, tout près de lui. Elle le regarde de ses yeux bleus, un léger sourire étire ses fines lèvres. Ses cheveux châtains tressés en une natte épaisse reposent sur son épaule avant de plonger dans l’océan herbeux de la prairie.

  Tout est si calme, il se sent si bien… Il ferme les yeux, et se laisse bercer. Il se sent porté, comme doucement soulevé de terre. Il ne réagit pas, ne bouge pas. Lentement, il expire profondément et s’endort. Une larme de bonheur coule sur sa joue.

  Dans le bloc opératoire, l’équipe médicale s’active. L’air est lourd, l’odeur de sang est acre. Seul résonne un long bip continu. Le chirurgien recule, s’essuie le front et regarde l’horloge accrochée au mur. Une date, une heure, et le silence.