Chapitre 8
Tout le monde était assis en silence, épuisés. La journée avait été éprouvante. Ils avaient marché à un rythme effréné sans faire de pose. Emile avait demandé de s’arrêter vers midi, mais Marie avait catégoriquement refusé. « C’est trop risqué, il est plus prudent de continuer » c’était-elle justifiée. Et elle avait eu raison. Peu de temps après, ils avaient manqué de se faire repérer par deux soldats qui fouillaient la forêt. Ce fut Iris qui les avait repérés la première. Elle s’était éloignée un instant du groupe pour se soulagée derrière un arbre. Elle les avait rejoints avec précipitation en disant qu’elle avait entendu es voix. Marie avait alors pressé l’allure et toute la bande avait dût encore accélérer le pas. Après plusieurs heures de marche intensive, Marie c’était enfin arrêtée et avait déclaré qu’ils allaient faire une halte pour la nuit. Tous avaient alors soupiré de soulagement et s’étaient aussitôt écroulés.
— Je ne sens plus mes pieds, dit soudain Emilie, pour rompre le silence.
Personne ne releva les propos de la jeune fille.
— J’ai faim, ajouta-t-elle supportant mal le silence.
— Arrête de te plaindre, lui dit doucement Sarah, on a tous faim et on est tous fatigués.
— Mais on n’a rien avalé depuis hier soir. Si on ne mange pas, on ne tiendra pas longtemps.
Laurent l’écoutait sans réagir. Elle avait raison, ils avaient tous besoins de manger pour reprendre des forces, mais pour le moment il n’avait pas le courage de faire quoi que ce soit. Il avait d’abord envie de se reposer un peu.
Les minutes passèrent et la nuit commençait à tomber. Au bout d’un moment, Marie se leva brusquement et s’éloigna.
— Où est-ce que tu vas ? demanda le prince
N’obtenant aucune réponse, Laurent décida de la suivre. En passant, il prévint sa sœur pour ne pas l’inquiété. Quand il rattrapa la jeune fille, elle était occupée de ramasser du bois.
— Du feu ? tu crois que c’est une bonne idée ? on risque de nous repérer.
Elle s’interrompit et regarda le ciel.
— Il va faire froid cette nuit.
Laurent leva également les yeux. On commençait à apercevoir de nombreuses étoiles dans le ciel, mais ce qui attira surtout l’attention du prince se fut l’absence totale de nuage. En cette saison, la journée, les températures étaient agréables, la nuit en revanche il pouvait faire très froid, surtout lorsque le ciel était dégagé. Il frissonna, le temps commençait déjà à se rafraîchir. Il ne réfléchit pas longtemps et aida la jeune fille à ramasser des branchages.
Quand elle estima qu’ils avaient ramassé suffisamment de branches, Marie demanda :
— Tu sais allumer un feu ?
— Oui, bien sûr !
Elle lui mit son tas de bois dans les bras et, sans rien ajouter, elle s’enfonça plus loin dans la forêt.
— Attend ! Ce n’est pas prudent…
Il ne termina pas sa phrase. Marie s’était retournée sèchement. Elle le regardait fixement, l’air énervée.
— Va allumer le feu ! ordonna-t-elle.
Devant l’air sévère de la jeune fille, le prince ne discuta pas et retourna rejoindre les autres. De retour au campement, il déposa le bois au sol et entreprit d’allumer le feu. Il dut s’y prendre à plusieurs reprises mais il finit par réussir. Il souffla un peu pour aider le feu à prendre et en quelque instant, des flammes se mirent à danser et à consumer les branchages. Il avait pris soin de garder une partie du bois pour alimenter le feu au cours de la soirée.
— Tiens.
Laurent sursauta. Il était tellement absorbé par sa tâche qu’il n’avait pas entendu sa sœur approcher.
— Mets ces pierres autour du feu pour éviter qu’il ne se propage.
Il prit les pierres qu’elle lui tendait et les installa autour du feu.
— Pourquoi veux-tu aller au royaume d’Allad ? demanda-t-elle quand il eut fini.
Avant de répondre, le prince regarda d’abord dans la direction de Sarah et Emilie. Les deux jeunes filles étaient en grande discussion et ne leur prêtaient pas la moindre attention. Il examina ensuite la forêt pour s’assurer que Marie n’arrivait pas. Quand il fut certain que personne ne l’entendrait, il répondit enfin à sa sœur.
— J’aimerais me rendre à Gitral. Il y a là-bas, une grande bibliothèque dans laquelle j’espère trouver des informations sur le royaume d’Erabitsa.
— Erabitsa ? Je n’en ai jamais entendu parler. Où est-ce ?
— Au nord.
— Mais au nord, il n’y a que les Terres Désolées.
Devant l’incompréhension d’Iris, Laurent lui relata tout ce que sa mère lui avait expliqué la veille. Quand il eut fini, il lui fit promettre de ne rien dire aux autres. Il ne voulait pas vraiment cacher ses intentions aux trois jeunes filles mais il sentait que ses recherches pourraient mener à des découvertes dangereuses et il ne voulait surtout pas les mêler à ça.
— Promis, dit-elle avec un sourire complice
Il adorait quand sa sœur souriait de cette façon.
Ils restèrent ensuite assis, là, en silence, profitant de la chaleur des flammes. Ce cours instant de calme et de quiétude fut vite interrompu par Emilie qui s’était rapprochée.
— Laurent, tu ne saurais pas où est Marie ? demanda-t-elle en s’asseyant à côté du prince. Voilà un moment qu’elle est partie et je commence à m’inquiété
Il posa une main sur l’épaule de la jeune fille et dit d’une voie qu’il voulait rassurante :
— Non je ne sais pas où elle est mais ne t’inquiète pas je suis sûr qu’elle va bientôt arriver.
— Laurent à raison, dit Iris, elle ne va plus tarder.
— Tu vois, ils pensent comme moi, ajouta Sarah qui venait de les rejoindre.
Mais Emilie ne semblait toujours pas rassurée. Il faisait nuit noire à présent et la seule chose qui éclairait le campement, c’était les flammes du feu de camp. Laurent se leva, bien décider à partir à la recherche de la jeune fille. Il fut à peine debout que Marie sortit de derrière un arbre. Elle tenait trois lapins morts par les oreilles.
— Marie ! dit Emilie en se précipitant à sa rencontre, je commençais à m’inquiéter.
— Tu va réagir comme ça à chaque fois que je m’absente ? demanda-t-elle avec un soupir d’agacement.
Elle tendit les lapins devant elle et, avant qu’Emilie n’aie le temps de répondre, ajouta :
— Tu as dit que tu avais faim alors je t’ai apporté de quoi mangé.
— Merci, je me charge de les préparer, dit la jeune fille.
— Tu sais faire ça toi ? demanda Marie sceptique.
— Bien sûr.
Emilie sourit, saisit les lapins puis, d’un pas assurer, alla s’installer un peu à l’écart pour commencer à les évider. Laurent la suivit un instant du regard. Il porta ensuite son attention à Maie qui venait d’installer à côté de lui.
— Tu es consciente qu’elle n’a probablement jamais évider un animal de sa vie ? lui demanda-t-il.
— Oui mais bon, si elle a envie de le faire je ne vais pas l’en empêcher.
— Je vais l’aider sinon on n’aura jamais à manger.
Il se leva et rejoignit Emilie qui regardait les proies sans savoir quoi en faire.
— Besoins d’un coup de main ? demanda-t-il avec un sourire
— Je veux bien, répondit-elle en lui rendant son sourire, je ne sais pas ce qu’il m’a pris. Je n’ai jamais fait ça de ma vie, je n’ai pas la moindre idée de comment m’y prendre.
— Ne t’inquiète pas, je vais te montrer.
Il se saisit d’un des lapins et tata sa taille à la recherche d’un couteau mais n’en trouva pas. Il fut d’abord surpris puis se rappela qu’il n’en avait pas. Il regretta de ne pas en avoir pris un aux mercenaires lors de sa fuite se matin. Par contre, Marie en avait un, il l’avait vu prendre un poignard sur un des hommes. Il lui demanda l’autorisation lui emprunter son poignard.
— Tu as intérêt à me le rendre, lui dit-elle en lui tendant l’arme.
— C’est promis
Il retourna près d’Emilie et commença à dépecer le lapin. En lui expliquant comment il s’y prenait. La jeune fille le regardait attentivement. Une fois la peau de l’animal retirée, il entreprit de le vider. Emilie suivait le moindre de ses gestes sans jamais détourner le regard. Quand il eut fini, il lui tendit le couteau.
— A ton tour.
Elle se saisit de l’arme et entreprit de reproduire au mieux les gestes du prince. Elle prenait son temps. Laurent l’observait avec attention, la corrigeant de temps à autre. Quand elle eut vidé complètement son lapin, elle le brandit fièrement devant elle.
— J’ai réussi, j’ai vidé mon premier lapin.
— Bravo ! la félicita Laurent.
Avec un grand sourire, elle s’attela au dernier. Ces gestes étaient plus assurés, elle était plus à l’aise.
— Dis-moi, pourquoi essaie-tu autant d’impressionner Marie ? demanda soudain Laurent
Elle ne répondit pas tout de suite, trop concentrée sur sa tâche. Il ne la pressa pas.
— Je n’en sais trop rien, répondit-elle une fois l’animal vidé.
Elle posa le couteau avant de s’expliqué :
— La première fois que je l’ai vue, c’était lors de la sélection dans son village. Elle m’a tout de suite impressionnée. Beaucoup d’entre nous refusent de faire partie de l’armée mais Marie est la première à s’être rebellée ouvertement. Je la revoie encore cracher au visage de Lord Phorus. Elle m’inspire et j’aimerais tellement être aussi courageuse qu’elle.
Laurent la sentait si habitée par ce qu’elle disait qu’il l’écoutait sans oser l’interrompre. Emilie continuait ses explications, lui parlant de leur fuite, de leur première nuit dans les bois et surtout de sa peur de décevoir Marie. Elle lui parla ensuite de sa relation avec Sarah. De comment, lorsque la jeune fille était venue s’installer dans son village natal, elle se faisait charrier par les autres enfants du fait de sa timidité. Elle l’avait alors tout de suite prise sous son aile. Les deux jeunes filles s’étaient très vite liée d’amitié et depuis, elles ne se quittaient plus. Elle finit par s’interrompre quand son ventre se mit à gargouiller.
— Nous ferions peut-être bien de faire cuire ces lapins, dit le prince soulagé qu’Emilie se taise enfin.
La jeune fille prit les lapins et le couteau et se rapprocha du feu. Elle les embrocha sur les longues branches que lui tendait Laurent. Il lui demanda ensuite de placer une des branches au-dessus du feu, pour faire cuire l’animal, et de laisser les autres de côté. Quand il estima qu’il était suffisamment cuit, le prince découpa le lapin et distribua les morceaux de viandes à tout le monde. Quand se fut au tour de Marie, il lui rendit également le couteau comme il le lui avait promis. La jeune fille lui prit le poignard le rattacha à sa taille sans rien dire.
Son tour terminé, il retourna s’assoir près d’Emilie, mit le deuxième lapin à cuire. Il commença ensuite à manger le dernier morceau de viande. Tous mangeaient en silence, le repas leur faisant le plus grand bien.
Laurent allait retirer le deuxième lapin du feu quand il se figea. Il avait entendu un bruit. Il guetta les horizons mais ne vit rien d’anormal. Il jeta un œil furtif aux autres, Sarah et Emilie continuaient leur repas, elles ne semblaient ne rien avoir remarqué. Iris et Marie, en revanche, s’étaient également figée.
— Courrez ! hurla soudain Marie.
Au même moment, un homme apparut dans le chant de vision du prince. Laurent reconnu immédiatement Jack, l’un des mercenaires qui l’avait enlevé. Il se mit précipitamment debout, mais l’homme arrivait déjà à sa hauteur. Il se saisit alors de la branche avec le lapin occupé de cuire et s’en servit comme javelot. L’arme improvisée atteignit le mercenaire en pleine poitrine. Surprit, il ralentit un peu. Le prince en profita pour se mettre à courir et rejoindre les autres sous le couvert des arbres.
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