Séraphine

Une minute de lecture

Il y a eu d’abord un tintement à peine audible. Les apprentis levèrent la tête et entrèrent à l’abri des petites salles d’étude parsemées tout au long du couloir.

Puis le cliquetis se fit plus fort. Séraphine entra dans la pénombre du grand couloir suivie par une enfant, presque adolescente déjà, en longue tunique blanche et pieds nus. Les tintements venaient des clochettes en métal à ses chevilles. Quand Séraphine s’arrêtait, elle s’arrêtait, et les petites cloches à ses pieds laissaient au large couloir venteux un peu de répit.

Séraphine s’approcha d’une des fenêtres arquées donnant vers la vallée. Elle était encore très jeune malgré son veuvage, frêle dans sa robe ample, les cheveux clairs entortillés dans de tresses savantes autour de ses oreilles.

Dans les jardins, un troubadour accordait son instrument. L’enfant s’approcha doucement d’elle, le cliquetis la sortit de sa rêverie.

- Dame Séraphine ? s’essaya une voix derrière.

Elle se tourna lentement, la fille se décalant dans un même mouvement avec une ponctuation de clochettes.

Derrière elle se tenait un petit homme sans âge, en habits noirs.

- Le mage Alzemond peut vous recevoir, dit-il en s’inclinant.

Séraphine reçut l’information avec un regard encore embrumé et fit un pas pour le suivre, mais le secrétaire hocha la tête :

- Votre assistante doit rester ici.


Au début il y avait un cliquetis d’argent qui rythmait son passage. Il y avait le monde et la marche du temps tel qu’ils avaient été créés. Avant que tout ne se précipite, on pensait que le temps coule au-dessus de nos têtes comme un fleuve tranquille. On croyait que tout était tel qu’il fallait être, tel qu’on l’avait écrit.

Malgré les convulsions du monde, il y avait toujours ce grand fleuve placide au-dessus de nos têtes.

Puis ce fut Alzemond.

Et ce fut Séraphine.


Eveline regardait le plafond blanc de sa chambre. Qui était Séraphine ? Qui était Alzemond ? Pourquoi il y avait tant de tristesse tapie au fond de ce rêve ? Et puis elle se rappela Anne-Lise et la tristesse l’envahit tout entière.

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