Rire en sol majeur

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Me voilà, débarquée dans un pays inconnu, moi, la charmeuse dégingandée échappée d'une autre époque. Je suis une polyglotte des silences, avec des regards et des sourires pour seuls dialectes en ces lieux inhospitaliers.

Je me promène de rue en rue, de plage en plage, à la recherche d'un visage ami qui saura me guider et me sortir du marasme de ma timidité. Sur les plages naturistes où je fais tache, emmitouflée de mes habits, mon visage devient rubicond de confusion à chaque tentative de conversation. J'ai l'impression que je ne m'habituerai jamais à ces endroits concupiscents près desquels j'habite désormais. Quand on m'aborde, les mots en réponse semblent se conchier dans ma tête, et je me sens comme une étrangère perdue au milieu d'un dictionnaire vivant. Je scrute les expressions faciales des gens qui me font face, sans comprendre ce qu'ils me disent. Des exhortations au bonheur et au laisser-aller, je crois. Je ne suis pas douée pour le laisser-aller. Alors je poursuis mon chemin.

C'est alors que je croise le regard d'un jeune homme qui a l'air de se sentir aussi bizarre que moi. Il est une anomalie dans la foule de baigneurs. Il me sourit d'un air malicieux et commence à me lutiner en m'improvisant un discours avec des gestes extravagants. Je ne peux m'empêcher de rire, m'interrogeant : est-il échappé d'un asile, d'une prison ? Que veut dire le récit mimé incompréhensible auquel il se livre ?

Nous reprenons notre chemin côte à côte, jusqu'à la gare où j'aime bien aller car les voyageurs se pressent trop pour remarquer mon trouble. Je remarque un piano posé là, comme une énigme à résoudre. Mon cœur palpite d'excitation. Des pianos dans les gares, je savais qu'il en existait, mais je n'en avais encore jamais observé. Je m'installe sous les yeux curieux de mon compagnon silencieux.

Son sourire obséquieux me surprend, l'admiration grandit dans ses prunelles. Il s'anime alors et se met à danser de façon excentrique autour du piano, contaminant les passants de sa bonne humeur délurée. Ceux-ci se mettent à applaudir, embabouinés par le morceau enfiévré que je joue et les gesticulations qui les amusent.

Les barrières linguistiques n'existent plus. Mon cœur bat au rythme des touches. La folie du type qui m'accompagne et la musique qui résonne créent une faille dans le temps. Les gens s'arrêtent et me sourient, et ces sourires appellent d'autres sourires, toujours plus beaux.

Je suis un peu triste que ma mélodie s'achève. Le jeune homme étrange s'incline en targuant un geste théâtral, fier de ce qu'il pense être un grand spectacle. Nous nous regardons, riant ensemble de cette rencontre absurde et du pouvoir de la musique pour transcender les barrières.

Le garçon et moi repartons. Il se met à courir, à un moment. Je me sens vivante, connectée à ce nouvel endroit de manière bien plus profonde que les mots ne pourront l'exprimer. Qui aurait pensé qu'un jeune homme bizarre et un piano dans une gare pourraient m'ouvrir les portes de cette aventure comique et mélodieuse ?

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