Chapitre 2
Quelques heures passèrent, et l’heure de l’arrivée en 2100 approchait. Nous avions conclu tacitement une paix entre moi et Arthur, mais je le surveillais du coin de l’œil, ne lui faisant pas confiance.
Alors que le reste de ma famille commençait le décompte de la dernière minute de l’année 2099, j’ouvris une fenêtre pour contempler le ciel nocturne. J’eus peur qu’Arthur n’en profita pour me jeter dehors, mais me consolai en pensant :
- S’il fait ça, ma mère le quittera.
C’est alors que je vis distinctement un énorme comète foncer vers la Terre, et, tandis que ma sœur et ma mère comptaient :
- 5, 4, 3, 2, 1 ! Bonne année !
Un immense choc se fit entendre, et je faillis passer par la fenêtre lorsqu’un tremblement gigantesque secoua toute la ville. Élise et Arthur tombèrent au sol, tandis que ma mère se retenait de justesse a une table.
Nous crûmes un moment que l’immeuble allait s’effondrer, mais tout s’arrêta aussi soudainement que c’était venu. Élise bredouilla :
- Qu’est-ce que, qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Il y a une énorme comète qui a foncé sur la Terre ! criai-je.
- Ce n’est pas le moment de faire ton intéressent, Matt ! cria en retour Arthur.
- Parce que tu crois que j’ai inventé ça ? Mais il faut te faire soigner ! J’ai vu une météorite foncer sur la Terre !
- Tu insinues que je suis un malade mental ? gronda Arthur en se portant à mon contact.
- Tu l’es, parce que sinon, tu ne me ferais pas de mal ! Personne ne frappe les enfants !
Pendant ce temps, ma main glissait lentement vers ma sacoche. Arthur dit, tout en me soulevant de terre ( c’est un imbécile, mais un imbécile avec des muscles ) :
- Sauf que je suis ton père ! Beau-père ou père adoptif, j’ai des droits sur toi ! poursuivit-il, un étrange sourire aux lèvres Comme celui de te mettre une bonne correction !
Ma mère surprit ma main qui plongeait dans la sacoche, et intervînt précipitamment :
- Ce n’est pas le moment de se disputer !
- Mais tu admettras quand même que ce gamin...
- C’est mon fils, et pas le tien, à ce qu’il me semble ! dit-elle d’un ton sans réplique. Élise et Matt, vous vérifiez que rien n’est cassé dans l’appartement. Arthur, tu viens avec moi, on va voir si les voisins ont besoin d’aide.
- Tu as trop bon cœur, murmura Arthur en se laissant entraîner.
J’échangeai un regard avec Élise, puis nous partîmes immédiatement inspecter nos chambres. Il n’y avait aucun dégât dans cette partie de l’appartement, même dans la chambre de ma mère.
La salle de bain, la salle à manger - où nous nous trouvions lors du réveillon - et la cuisine n’avaient pas non plus souffert. Dans la plafond du salon, il y avait par contre un énorme trou d’où l’on pouvait apercevoir l’appartement du dessus.
Le responsable du trou était un fauteuil assez ancien, mais pas assez lourd pour craquer le plafond. J’avais déjà remarqué que le plafond était abîmé à cette endroit. Ça et le tremblement avait dû le fissurer suffisamment. Une tête apparut dans le trou :
- Bonjour ! Est-ce que vous pensez que vous arriverez à porter ce fauteuil pour que je puisse le récupérer ?
- J’y arriverai avec ma sœur, affirmai-je, tandis que celle-ci arrivait dans le salon.
A nous deux, nous réussîmes à lever le fauteuil assez haut pour que le couple du dessus puisse le récupérer. Ils nous remercièrent puis nous finîmes d’inspecter l’appartement, avant d’aller voir ce que faisait ma mère et Arthur.
Ils étaient en train de discuter avec animation avec les voisins. Le fils des voisins d’en face vint vers nous :
- Vous savez ce qui s’est passé ?
- Il y a eu une météorite qui a foncé sur la Terre, dis-je.
- C’est vrai ? On va tous mourir alors !
- Si la météorite était tombée sur nous, on serait d’ors et déjà mort, observa Élise.
- Je le sais ! Mais si la météorite est tombée dans la mer, il va y avoir un tsunami dans les heures qui viennent !
- Calme-toi, dis-je d’un ton rassurant. Si c’est le cas, les spécialistes et le gouvernement nous préviendront et on se mettra à l’abri.
- Et puis, il y a souvent des signes avant-gardistes lorsqu’il y a des tsunamis, dit ma sœur. La mer se retire avant de revenir beaucoup plus fort.
Le voisin et moi la regardâmes d’un air éberlué. Je demandai :
- Comment sais-tu tout ça ?
- Je me documente, dit-elle comme si c’était évident.
- Tu racontes n’importe quoi, souffla le voisin. Comment une gamine de ton âge pourrait savoir ça ?
- Tu as le même âge que moi, je te rappelle, répliqua ma sœur.
- Et ce qu’elle dit est vrai, dis-je. Je l’ai étudié en cours l’année dernière. Au collège, on nous apprend ça.
Ma mère vînt vers nous à ce moment. Elle me prit à l’écart et me dit :
- La situation est critique. Plusieurs personnes ont vu comme toi la météorite. Donc, on passe en mode d’urgence. Tu vas allumer la télé, d’accord ? Et je ne veux pas de disputes avec Arthur, et je ne veux pas non plus que tu inquiètes ta sœur. Promets-le moi.
- C’est compris, acquiesçai-je. Je te le promets.
Il n’était pas nécessaire de compliquer la chose. Je retournai dans le salon - où il y avait toujours un trou béant - et pris la télévision pour la mettre dans la salle à manger.
Je me doutai qu’il serait indiscret de regarder la télévision alors que les voisins du dessus pourraient nous entendre. Alors que j’installais la télévision, Arthur entra précipitamment :
- Qu’est-ce que tu fais là ? Tu tentes de voler la télévision ?
J’allai répliquer, mais je me souvins de la promesse faite à ma mère et dit, plus doucement :
- Va voir dans le salon, si tu veux.
Il fronça les sourcils, sans que je ne sache si c’était parce que je lui avais répondu poliment ou pour une autre raison. Il marcha à pas rapide vers le salon, tandis que j’allumai la télévision. La voix du présentateur se fit entendre dans l’appartement :
- C’est une situation inédite que nous vivons là. En effet, il semblerait qu’une météorite soit tombée en plein sur l’Asie !
- Pourquoi y-a-t-il un trou dans le plafond ? demanda Arthur.
- Le fauteuil des voisins du dessus est tombé. Demande aux voisins, si tu veux.
- Non, ça va, je te crois, grommela Arthur
- Maman a dû lui parler, pensai-je. Ce n’est pas normal. Mais il doit se dire exactement la même chose sur moi.
- Pour l’instant, nous ne savons pas grand chose, reprit le journaliste. L’Asie a été complètement effacée de la carte, et a priori il ne reste qu’un grand désert. D’après nos contacts en Russie, tout l’est de ce pays a été rasé, mais la capitale, Moscou, subsiste encore. La Chine, le Japon et le Moyen Orient sont réduits à néant. Chers téléspectateurs, ne vous inquiétez pas si vous subissez des pertes de données, des coupures de courants ou autre, car la plupart des données étaient stockées en Asie. Selon les experts, il n’y a pas de tsunamis à craindre en Océanie. Demain, des astrophysiciens vont se rassembler dans le monde pour évaluer la situation.
La télévision s’éteignît d’un coup. Arthur cria :
- Qu’est-ce que tu as fait ?
- Je n’ai rien fait ! protestai-je. Le journaliste a dit qu’il y allait avoir des coupures de courant ! Tu n’as pas écouté ou quoi ?
Et voilà. En deux minutes à peine, la promesse faite à ma mère vola en éclat. Avant que nous n’en venions au mains, ma mère intervînt :
- Arrêtez ! Arthur, cesse de te montrer aussi agressif. Élise, Matt, allez vous coucher. On n’en reparlera demain matin.
J’acquiesçai, et je partis me coucher. Un peu plus tard dans la matinée - car c’était le matin-, la porte de ma chambre s’ouvrît. A peine réveillé, ma main se tendit automatiquement vers la sacoche que j’avais posé près de mon lit.
- As-tu à ce point peur d’Arthur ? demanda ma mère en posant sa main sur la mienne.
- On ne sait jamais, répondis-je, endormi.
Ma mère soupira, puis m’embrassa sur le front avant de me laisser me rendormir.
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