Chapitre 4
Deux mois s’étaient écoulés depuis le cataclysme lorsque l’on nous annonça une deuxième expédition sur la 9eme planète. Les journalistes soupçonnaient le gouvernement d’avoir trouvé quelque chose pour régler le problème.
Arthur ne cessait de répéter :
- Mais ils ne peuvent pas résoudre le problème !
Je voyais bien que ma mère commençait doucement à s’énerver et je m’en réjouissais secrètement. Un mois plus tard encore, alors que j’étais au collège, un tremblement énorme secoua le bâtiment.
D’un commun réflexe, nous nous accroupîmes tous pour nous mettre sous les tables, comme on nous l’avait enseigné lors de nombreux entraînements.
Il n’y eut pas de dégâts, mais le directeur passa dans notre classe pour nous dire que nous étions autorisés à quitter l’école pour retourner à la maison. En rentrant, je fis un détour pour aller chercher ma sœur, et nous rentrâmes à la maison.
Autour de nous, on pouvait voir les dégâts du deuxième cataclysme. Certaines maisons étaient détruites, ou certains murs des immeubles s’étaient effondrés. Élise me demanda, avec un peu de peur dans la voix :
- Qu’est-ce qu’il s’est encore passé ?
- Je suppose qu’il y a eu une deuxième météorite qui est entré en collision avec nous.
- Mais on n’a pas de chance !
- Ce n’est pas de la chance, c’est l’univers qui se ligue contre nous, dis-je. Il faut accélérer, maintenant, il y a quand même un risque de tsunami.
Ma mère nous accueillit en nous serrant chacun dans ses bras :
- J’ai eu si peur pour vous ! Ils vous ont laissé sortir ?
- Oui, dis-je. Ils n’ont pas clairement dit leur raison, mais je pense que c’est pour que les parents ne s’inquiètent pas trop.
- Et ils ont bien raison ! affirma ma mère. Aux informations, ils ont dit que cette fois, c’est tombé sur l’Afrique et sur l’Europe. Comme c’est assez loin de nous, nous n’avons pas à craindre de tsunamis.
- Ça nous évitera des ennuis en plus, dit Arthur alors que nous entrions. J’ai vu des maisons détruites. Nous avons encore eu beaucoup de chance.
Le soir, notre président de région prononça un discours. Comme nous étions reliés au Royaume-Uni et que celui-ci était détruit, c’était lui le chef à présent.
Il déplorait les membres des familles morts et espérait que l’opération sur la 9eme planète était prometteuse. Élise demanda, les sourcils froncés :
- C’est moi où il vient de prendre le pouvoir de force ?
- C’est son droit de devenir le roi de ce pays, affirma ma mère.
- Et puis, il ne faut pas discuter, poursuivit Arthur. Nous sommes en crise, et j’espère qu’il sait ce qu’il fait.
Depuis qu’il avait retrouvé du travail, Arthur se comportait de plus en plus comme un vrai adulte. Mes espoirs furent réduits à néant alors qu’il disait :
- On n’a pas besoin d’une mauviette à la tête du pays !
- Tu iras lui dire, si tu n’es pas content, suggérai-je, ironique.
- Très bonne idée, Matt ! dit Arthur, n’ayant pas perçu mon ton ironique. Tu deviens mature, c’est bien.
- Tandis que toi, tu régresses, pensai-je.
Les yeux des trois personnes présentes dans la pièce se tournèrent vers moi, et je compris que j’avais dû prononcer à voix haute ce que j’avais pensé. Arthur se précipita sur moi et me poussa contre le mur.
Ma tête claqua contre le mur, et je m’écroulai, sonné. Arthur se pencha au dessus de moi et grinça :
- Tu vas regretter tes paroles, gamin !
Ma main se glissa dans la sacoche et je sortis une carte, - de celles qu’on utilise pour les jeux de carte - un dix de Pique.
- Qu’est-ce que tu crois pouvoir faire avec ça ? rigola Arthur. Tu veux me couper ?
Ma mère saisit soudain Arthur par derrière et le souleva en arrière. Arthur protesta :
- Laisse-moi lui donner la correction qu’il mérite !
- Calme-toi ! Va faire un tour dehors !
Arthur fronça les sourcils, puis en sortant, me lançant un regard soupçonneux. Je gardais le carte devant moi jusqu’à ce que j’entendis la porte de l’appartement claquer. Ma mère continua :
- Élise, tu fais ce que tu veux. Matt, viens dans ta chambre. On doit parler, tous les deux.
J’acquiesçais tandis que je rangeai la carte dans ma sacoche, puis je suivis ma mère jusque dans ma chambre. Elle prit soin de fermer la porte derrière elle, tandis que j’allais m’asseoir sur mon lit, avant de laisser éclater sa colère :
- Tu es sérieux ? Tu as failli le tuer ?
- Un dix de Pique n’aurait rien fait, dis-je. Il aurait eu une petite coupure et Arthur m’aurait laissé tranquille ! Ç’aurait été mieux comme ça !
- Je crois que tu sous-estimes amplement le pouvoir des cartes ! Un dix de Pique peut trancher un bras, ou pire ! S’il est bien utilisé, il peut conduire quelqu’un dans le coma !
- Et alors ? Tu n’as pas vu comment il me traite ! C’est sûr, tu es aveuglée par l’amour, et tu ne vois pas combien il est désagréable avec nous !
- Si, je le vois, mais je suis certaine que...
- Et ça fait dix ans que ça dure ! poursuivis-je. Ça ne ferait que un mois, ça irait, mais dix ans ! Il ne nous a jamais aimé !
- Tu ne l’aides pas, ça s’est sûr ! cria ma mère. Si tu arrêtais de dire des paroles venimeuses, ça irait !
- Mais j’essaie déjà de ne pas m’énerver ! Mais on dirait que cet imbécile le fait exprès ! Je ne sais vraiment pas pourquoi tu t’es mis avec lui !
- Lorsque tu étais plus petit, il était beaucoup plus gentil et agréable, soupira ma mère.
- Alors que maintenant, c’est tout le contraire !
- Ce qui a changé, c’est toi, dit ma mère. C’est toi qui l’énerve. C’est toi, le problème. Donc, tu vas partir quelques temps d’ici, d’accord ?
Je restai bouche bée, tandis qu’elle continuait :
- Je pense que tu devrais aller voir mes parents à Dysart, d’accord ?
- Pourquoi tu ne dirais pas ça à Arthur ? répliquai-je.
- Ses deux parents sont morts, répondit ma mère.
- Donc, tu préfères Arthur à ton propre fils ?
- Il est plus facile de régler ton problème que celui d’Arthur.
- Je n’y crois pas, murmurai-je. Mais je n’ai pas le choix, n’est-ce pas ? Pendant combien de temps resterai-je là-bas ?
- Tu pars vendredi, pour les vacances. Tu iras chaque vacances là-bas.
Je me pris la tête entre les mains, et soupirai longuement. Ce que venait de dire ma mère signifiait que je ne pourrais pas voir mes amis durant les vacances. Sans un bruit, ma mère quitta ma chambre, me laissant réfléchir.
Je restai un long moment comme ça, puis je poussai un long cri de rage et tapai contre le mur, de toutes mes forces. Tenant mon poignet ensanglanté, j’attendis que la douleur passe un peu avant de commencer à faire mon sac.
Les deux semaines chez mes grands-parents passèrent très vite. Contrairement à ce que je craignais, tout se passa bien et je ne m’ennuyais pas une seconde. Lorsque je retournai à Dubbo, je compris que la situation avait changé.
Mon beau-père se montrait plus violent que d’habitude. Je demandai à ma sœur :
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Il a encore perdu son travail, expliqua ma sœur.
- Est-ce que... Est-ce qu’il a frappé maman ?
- Pas devant moi en tout cas, me détrompa Élise.
- J’espère qu’il ne va rien faire de mal, pensai-je. Sinon, je serais obligé d’utiliser les cartes.
Le soir même, on nous apprit que la deuxième expédition sur la 9eme planète était terminée et que les astronomes étaient rentrés. Le lendemain, alors que je regardai mes messages, l’un de mes amis me demanda :
- As-tu vu le message du président des États-Unis ?
J’allai voir rapidement sur Twitter, et en effet, il y avait un message du président Wells qui disait :
- Moi, président des États-Unis, je démissionne de mon poste pour meurtre. En effet, j’ai ordonné la mort des scientifiques Amélie et Mike Prick, il y a quatre ans. Il n’y aura aucun successeur.
Lorsque je le montrai à mes parents, ma mère poussa un cri horrifié, tandis que mon beau-père restait de marbre, les sourcils froncés :
- C’est qui, Mike Prick ?
- Mais enfin, tu ne le connais pas ? Il a découvert qu’il y avait de l’eau sur Titan ! Il a été assassiné il y a trois ans !
- Je ne m’intéresse pas à l’astronomie, dit Arthur.
- Tu devrais, répliquai-je. C’est peut-être grâce aux astronomes qui sont en ce moment en train de montrer le résultat de leur recherche que nous allons être sauvés !
- Ils ne peuvent rien faire ! martela Arthur.
- D’après certains reportages, dit ma mère, il semblerait que la taille de la planète ait diminué, et que nous sommes hors de danger. Nous sommes donc sauvés.
- Il y a eu deux météorites, dit Arthur. Pourquoi pas trois ?
- Tu es d’une mauvaise foi ! soupira ma mère.
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