V
Le repas d’anniversaire se passait plutôt bien. Les trois frères avaient même délaissé leurs ordinateurs respectifs pour aider leur mère à mettre le couvert et préparer les plats. C’était juste un peu délicat de les amener jusqu’à la table sans se salir les pieds.
Afin de manger avec appétit, Élaine fit l’effort mental de se rendre aveugle au reste de la pièce. Quand on lui proposa de reprendre des pommes de terre pour finir le plat, elle accepta par pure politesse. On rit en lui disant qu’elle mangeait comme un ogre et qu’elle allait devoir faire du sport pour éliminer tout ça.
Après le dessert, Zacharie se leva. Il s’éloigna un peu de la table, baissa son pantalon et s’accroupit. Élaine le fixa, sidérée. Personne ne dit rien. Élaine se tourna vers Xavier, qui sauçait consciencieusement son assiette avec un morceau de pain. Se sentant observé, il croisa les yeux d’Élaine, sans comprendre leur expression. Puis il enfourna sa bouchée. Tandis que Zacharie rebouclait sa ceinture, sa mère le contemplait avec un sourire attendri. Élaine la fixa à son tour avec un regard d’intense stupéfaction.
- Quel coquin ! s’exclama la mère, l’air plus touchée qu’embarrassée. Mais quel culot… Il en faut bien dans la vie.
Puis elle se pencha vers Élaine, et lui glissa sur le ton de la confidence :
- Tu sais, j’ai toujours su que mon fils avait une grande sensibilité.
Élaine contempla alors la crotte fraîchement déféquée, la tête remplie de questions insolubles.
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