2.2.3 Petite Fée
Je n'arrive pas à dormir. Mon cousin et Horace sont sortis en douce dans la nuit. Oliver est revenu d'un coup comme porté par une force mystérieuse. Horace rentre enfin, trois heures plus tard. Je les entends discuter. Horace évoque les raisons de la colère de Maeve.
Le soupir de mon cousin m'arrache une larme. À cause de moi, Maeve est fâchée contre lui. Je m'en veux tellement. Je sais que si j'ouvre la bouche, je risque de me prendre le poing d'Horace ou de mon cousin dans les dents. Ce n'est pas le bon moment pour leur présenter des excuses. Surtout qu'Horace est en train de faire des révélations sur Maléfique en nous croyant tous endormis.
Quand les filles ont eu six ans, un homme a voulu tuer Maeve. Merde. Horace parle de Père là. Cet été, Maléfique a eu de gros soucis. Le Procès. Elle ne voulait pas revenir. Elle ne voulait pas me croiser. La discussion se termine. Oliver et Horace sont crevés et se couchent s'endormant vite. Moi non. Je me morfonds de la situation. Il faut que je trouve le moyen d'apaiser les rancœurs de Maeve et de mon cousin à mon égard.
Petit déj. J'ai l'esprit embué par manque de sommeil. Maeve rentre dans la grande salle avec une fillette à ses côtés. Une très jolie fillette. Une rouquine à l'air doux. Un vrai petit bijou adorable. On dirait une petite fée. De longs cheveux d'un orange éclatant qui lui descendent au bas du dos. Des yeux noisette joyeux immenses. Des dents blanches. Un sourire... Mon dieu... Quel sourire.... Il lui mange la moitié de son visage. Louise me fait fermer la bouche en appuyant sur mon menton. J'en ai oublié de manger.
Les filles rejoignent Oliver et sa bande. Charline est une pipelette qui s'ouvre à tous. Elle a une voix délicieuse. J'oublie mon petit-déjeuner, fascinée par la nouvelle. Louise en profite pour me voler de la bouffe et me compare à un dessin animé que je ne connais pas. Elle me pique avec sa fourchette pour me faire revenir à la réalité à plusieurs reprises. Mon regard ne cesse d'être attiré par la jeune fille rousse.
Je dévore des yeux la petite rouquine sous les yeux amusés de Louise qui décide de me dessiner sur la main des petits cœurs et autres trucs de filles sans que je ne réagisse, trop absorbé par ma contemplation. Cette chipie se fait aider par mes potes et passe la journée à me casser les pieds sans que je ne me fâche ou réagisse.
Louise refuse de faire l'espionne pour satisfaire ma curiosité de midinette. Le lendemain matin, je m'aperçois que Charline porte le pyjama Licorne. La rouquine est joyeuse, enfantine, émerveillée par la magie, naïve et profondément gentille. C'est un petit ange.
Je suis fasciné. Je passe mon temps à observer Charline. À mon grand désespoir, la jolie rousse m'évite tout comme sa sœur. Louise parvient à discuter avec la nouvelle. En abordant des sujets purement féminins, elle se lie d'amitié avec elle. Pas une forte amitié, mais au moins des discussions pacifiques et respectueuses. Je sais que mon amie tente de glisser des informations pour faire changer d'avis les filles.
Elles se ferment dès qu'on parle de moi. Maeve a une fois répondu assez sèchement à Louise que j'avais des gènes de salop sans donner plus d'explications. Charline a tempéré en expliquant que je faisais ressortir des mauvais souvenirs. La présence de Charline a deux avantages. Maléfique est moins irritable et rigole même parfois.
J'ai une nouvelle passion. Observer Charline pendant des heures. Sans me lasser. Je me contrefous qu'elle soit moldue. J'ai l'impression de croiser un ange tous les jours. Même si elle ne me parle pas, la simple présence de la rouquine dans mes parages me rend heureux.
Louise se moque de moi parlant de coup de foudre. C'est un peu ça. Ma blonde amie est belle. Maeve, Sarah et Alice aussi. Charline est irréelle. Une beauté magique et ensorcelante, dont la vision me rend complétement stupide. Pour la première fois de ma vie, je bégaye dès que je la croise.
Mère m'envoie un hibou. Ils n'ont pas encore trouvé Maeve. Plusieurs alliés se sont grimés en élèves afin de fouiller Beauxbatons. Ils ont échoué. Ils envisagent de faire de même à Durstamg. Mère n'imagine pas une seconde que la meurtrière soit à Poudlard, dans mon dortoir de Serpentards. Cela me fait rire doucement.
Mon courrier retour est empli de mauvais sentiments, de colère contre l'incapacité de nos larbins. Un parfait courrier de petit con arrogant. Je deviens expert dans mon jeu de rôle. Mère et Bellatrix ne se doutent pas une seule seconde que je ne partage pas leurs idées. La seule personne qui sait, c'est Louise. Me faire passer pour un con me pèse. Surtout par rapport à mon cousin et sa bande.
Je suis encore trop jeune pour affronter Bellatrix. Je n'ai pas peur de Mère ou de Carrow. La folle me fait peur. Elle est si changeante. Si puissante. Elle aime torturer. Dès fois, j'ai l'impression que sa famille est le plus important pour elle. Des fois, que c'est Voldemort. Bellatrix l'appelle Lord Voldemort. Du coup, moi, c'est Bébé Lord ou fils des ténèbres. Les autres, y compris Mère, m'appellent Prince des ténèbres ou Monseigneur.
Je suis le seul autorisé à l'appeler Bellatrix. Elle s'est donné le nom de Reine Mère ou Altesse. Elle est folle. Elle se voit comme l'épouse de Lord Voldemort. Il est son roi. Elle se voit Reine. Je suis le prince héritier. Tant que je me comporte comme un connard de sang pur en société. Cette situation a tout de même ses avantages. Je peux mettre au pas les larbins assez facilement. Mon arrière-grand-mère me donne de l'argent de manière illimitée.
J'ai une idée pour Noël. Avec la complicité de Louise, j'achète des cadeaux pour les élèves défavorisés, que des choses utiles. Nous courrons les magasins. Ma blondinette chérie a la bonne idée de jeter un sort d'extension à son sac. Nous aurions eu l'air malin avec tout notre fourbi.
Pour rire, elle fait des essayages dans un magasin de vêtements. Elle se déguise pour me rendre joyeux. Le vendeur nous laisse faire. Nous n'abîmons pas. Je viens de claquer presque mille gallions. Je ne peux plus contenir ma joie quand Louise sort affublée d'une robe de bal improbable, magnifique et énorme. On dirait une princesse Disney. Maintenant que je la connais mieux, je sais que ma douce amie préfère les pantalons et les baskets. Un look sportif.
Cette robe, est tout ce qu'elle déteste, mais doit porter en tant que sang pur. Je me moque doucement, complice de son malheur. Je lui dis quand même qu'elle est vraiment magnifique. En toute amitié. Mon cousin est un idiot. Louise est vraiment une fille merveilleuse. Heureusement que c'est pour Maeve qu'il en pince. Charline et elle sont les seules à pouvoir se permettre la comparaison.
Je taquine mon amie sur ses sentiments à l'égard d'Oliver. Louise m'avoue qu'elle n'est plus amoureuse de lui. Elle idolâtre un chanteur à la mode en ce moment. Un roux adepte des bluettes. Le sujet de notre discussion dérive vers Charline, puis vers Horace, et enfin le reste de la bande de mon cousin, jusqu'à finir par Maeve. Louise essaye de m'aider à trouver un cadeau pour Maléfique. Un truc personnalisé, qui lui ferait vraiment plaisir. Elle aimerait que je me réconcilie avec notre amie.
J'ai une idée. Je me dirige vers le libraire. Je lui passe commande pour un livre très rare qui devrait intéresser Maeve. Louise me traîne ensuite vers une boutique de jouets. Il y a eu une naissance dans sa famille et elle veut absolument offrir un cadeau à son nouveau cousin. Je la suis à contrecœur. Les jouets, layettes et autres peluches ne sont pas mon univers. La blondinette me torture en me demandant mon avis et en me grondant lorsque je ne réponds pas assez vite ou à son goût à ses questions.
Quelqu'un d'étranger aurait l'impression de voir un vieux couple. Nous nous chamaillons et nous envoyons des piques affectueuses. Louise se décide enfin pour un ourson vert et un pyjama avec des lapins en broderie. Près des caisses, je repère soudain une nouvelle idée de cadeau pour Charline. Je saisis l'objet du délit et l'agite sous le nez de Louise d'un air satisfait. Mon amie fait semblant d'être désespérée de mon cas irrécupérable.
Je suis vraiment fier. J'ai trouvé de quoi rendre la rouquine heureuse sans qu'elle ne sache d'où ça vient. En plus, cela va faire râler certaines filles de Serpentards dont Louise qui devra supporter la vision quotidienne de mon cadeau. Cette idée me ravit. Casser les pieds des filles de Serpentards sans représailles.
C'est l'heure des cadeaux. Les colis sont livrés par hibou anonyme " De la part d'un bienfaiteur secret". Pour Charline, je lui envoie une énorme peluche de licorne assortie à son pyjama "De la part d'un admirateur secret". Lorsqu'ils reçoivent leurs paquets, c'est l'étonnement général, des cris de surprise et de joie.
Alors que j'observe la rouquine, je vois Maeve tourner et retourner son livre dans les mains. Un livre d'histoire consacré aux récits et légendes évoquant Morgane, super rare. Je sais qu'elle fait des recherches sur la fée ancestrale pour avoir plusieurs fois lu par-dessus son épaule ou emprunter les mêmes livres qu'elle. Il ne doit y avoir que quatre personnes qui savent sur quoi Maléfique effectue des recherches. Maeve, Charline, la bibliothécaire et moi.
Je croise le regard violet et le soutiens. Accroché à ses prunelles pendant plusieurs minutes, je sens qu'elle entre dans ma tête cherchant un souvenir lié aux cadeaux. Je lui permets de me voir acheter les objets, trimballer l'énorme peluche en la cachant sous un sort de dissimilation, emballer personnellement le livre ancien de Maeve et signer "De la part d'un autre rat de bibliothèque". Elle visionne ma joie lors du déballage. Maléfique ne cherche pas plus loin. Je perçois dans ses yeux qu'elle sait que je l'ai autorisé à voir cela. J'entends soudain sa voix dans ma tête.
- Merci Gargamel. T'as intérêt à être sincère sinon je t'explose ta sale gueule de sang pur.
Je lui souris en réponse et lève la main discrètement comme pour faire une promesse. Le repas du soir se déroule à merveille. Toute l'école est de bonne humeur. Ceux qui n'ont pas eu de cadeaux ne se sentent pas lésés, ayant un ami qui a bénéficié de ma générosité.
Certains croient que c'est Oliver le bienfaiteur. Il réfute et déclare ne pas disposer d'une telle somme d'argent. Louise et moi laissons planer le doute. Maeve ne dit rien. Elle semble songeuse.
- Il faut que je te parle ce soir. Peux-tu me rejoindre dans la salle commune quand tout le monde dormira ?
La voix de Maeve est de nouveau dans ma tête. Je hoche la tête pour lui répondre. Enfin, je vais pouvoir lui parler. Je trépigne d'impatience et dès que les gars rejoignent le dortoir, je lance un sort de sommeil profond.
Je me précipite vers la salle commune. Elle est vide. J'attends en relançant le feu, en rangeant des livres qui traînent, en regardant par le hublot le calamar géant. Je sens enfin une présence derrière moi. Je ne vois personne.
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