Chapitre 8

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Le patron s’avança progressivement vers le bureau d’Inaya. En l’observant, elle ne put s’empêcher de ravaler sa salive.

« Euh, il y a un problème ? finit-elle par demander.

-Oui, un gros problème même. »

La voix stridente du vieil homme attisa la curiosité des étudiants. La plupart d’entre eux levèrent leur nez de leur bouquin.

« Il se passe quoi ?

-J’en sais rien… »

Il se plaça alors face à son interlocutrice.

« Eteins ton ordinateur et range tes affaires. » s’écria-t-il soudainement.

Le cœur d’Inaya manqua de rater un battement.

« Pardon ?

-Tu as très bien entendu. »

Elle fixa ce dernier d’un air ahuri.

« De quel droit vous vous permettez de m’ordonner ça ?! reprit-elle.

-Tu veux vraiment qu’on parle de droit ? rétorqua-t-il alors.

-Quoi ? »

Le vieil homme soupira, avant de poursuivre :

« Je peux savoir de quel droit TU te permets d’aller fouiller dans les dossiers des étudiants ?! »

Inaya resta sans voix, incertaine de comprendre la situation à laquelle elle faisait face.

« De… de quoi est-ce que vous parlez ? bafoua-t-elle.

-Arrête de faire l’innocente. T’as modifié la date d’emprunt d’une des personnes. »

Des murmures se firent alors entendre dans la salle. Inaya, de son côté, tenta de se justifier.

« Je crois que vous devez faire erreur…

-Ne me prends pas pour un idiot ! reprit-il en lui coupant la parole. J’ai horreur de ça ! »

Ce dernier continua de fixer la jeune fille d’un regard sinistre, lui suggérant de quitter les lieux.

« Mais comment est-ce qu’il a su ? songea Inaya. Pourtant, y a même pas de caméra… »

Elle tenta de dialoguer, en vain.

« Je ne veux pas d’un personnel qui use de son statut pour en tirer profit, alors sors d’ici ! »

Dépitée, la jeune fille se décida finalement à prendre ses affaires. Elle se contenta de se diriger vers la sortie de la bibliothèque, sans prendre en compte les remarques implicites de son patron agacé.

« Je suis dégoûtée… » pensa-t-elle en marchant à reculons.

Au même moment, aux abords de l’entrée, une horde d’étudiants se fit entendre.

Parmi eux, on pouvait remarquer Aaron, qui venait de descendre de la salle de travail, comme à son habitude. Il tenta de se frayer un chemin dans la foule.

« C’est quoi tout ce raffut ? questionna-t-il, surpris.

-T’as pas vu ? Y a eu une embrouille de fou à la BU ! » lui répondit une fille.

Il soupira :

« Tout ça pour ça ? Quelle fac de commères… »

Alors qu’il était sur le point de reprendre son chemin, de nouveaux étudiants s’immiscèrent dans la conversation.

« Quand même, là c’est du jamais vu !

-C’est clair ! Une embrouille entre le patron et la bibliothécaire quoi… »

Le brun s’arrêta net. Il se retourna alors vivement avant d’attraper le bras de la fille.

« Tu viens de dire quoi là ?

-Euh, j’ai dit qu’il y avait eu une embrouille entre le patron et la biblio… »

L’étudiant n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’Aaron la lâcha pour se précipiter vers la porte de l’entrée.

« Trop bizarre ce gars… » songea-t-elle en se frottant le bras.

Au moment où le brun dirigea sa main vers la poignée, il fut interrompu par la sortie d’Inaya.

« Inaya ! s’exclama-t-il.

-Aaron ?! Mais qu’est-ce que tu fais là ?

-J’ai entendu du grabuge ! Qu’est-ce qu’il s’est passé ?! »

Les étudiants agglutinés se mirent à les fixer attentivement. Inaya, honteuse, baissa la tête par réflexe.

« Vous regardez quoi là ? s’écria alors Aaron, tout en leur lançant un regard austère. C’est pas un spectacle en fait. »

Ils dévièrent leurs yeux.

« Laisse tomber, t’étais pas obligé… » murmura Inaya.

Le brun la scruta, avant d’être interpellé :

« Attends, pourquoi est-ce que tu tiens toutes tes affaires dans tes bras ?

-Hein ? bafoua son interlocutrice. Ah ça… C’est rien, j’ai démissionné !

-Pardon ?

-Oui, je sais c’est dur à croire haha ! Mais j’arrivais pas à concilier boulot et révisions, tout simplement…

-Elle se moque de moi ? songea Aaron, d’un air consterné.

-Bref, je suis pressée alors je dois y aller ! A plus tard. »

Aaron n’eut pas le temps de lui rétorquer quoique ce soit qu’elle s’en alla précipitamment.

Quelques minutes plus tard, le patron sortit à son tour. En voyant le rassemblement d’étudiants, il s’affola :

« Eh, du balai tout le monde ! Vous êtes en train de bloquer le passage ! »

Ils s’éloignèrent légèrement, tandis que le brun continuait à ruminer dans son coin.

« C’est donc lui le patron… »

Le vieil homme se faufila vers la cage d’escalier pour y allumer une cigarette. Aaron ne put s’empêcher de le suivre discrètement. Il finit par l’aborder :

« Excusez-moi… »

Il sursauta brusquement, avant de se retourner :

« Bon sang, mais ça va pas ?! Tu viens de me faire une frayeur !

-Désolé, c’était pas mon intention.

-Qu’est-ce que tu me veux, le mioche ?

-Il commence déjà à m’agacer, pensa Aaron. J’ai besoin de vous parler !

-Ah bon ? Et à quel sujet ?

-Au sujet d’Inaya… »

Le patron interrompit immédiatement le brun :

« Ah non ! C’est plus mon souci maintenant !

-Je vous demande de revenir sur votre décision !

-Quoi ?! Et pourquoi je ferais une chose pareille ? Elle a modifié la date d’emprunt d’un étudiant, donc elle mérite sa sanction !

-Quoi ? »

Aaron resta sans voix.

« Pourquoi est-ce qu’elle aurait fait une chose pareille ? songea-t-il, stupéfait. Par hasard, est-ce que vous sauriez c’était qui, cet étudiant ?

-Tu veux pas me laisser tranquille ? râla le patron.

-S’il-vous-plaît ! insista le garçon.

-Hm… un certain Aaron, si mes souvenirs sont bons… »

Aaron fixa son interlocuteur d’un air abasourdi.

« Pourquoi elle a fait ça ?! songea-t-il.

-C’est bon ? T’as fini avec ton interrogatoire ? »

Il reprit ses esprits :

« Non, attendez ! En fait, c’est moi Aaron.

-Quoi ?! s’exclama le patron, laissant tomber sa cigarette entre ses deux mocassins. Alors c’est toi le rigolo à l’origine de toute cette histoire !

-Oui, c’est exact. C’est moi qui lui ai demandé de modifier ma date d’emprunt pour ne pas payer.

-Pardon ?!

-Inaya n’y est pour rien. C’est pour ça que je vous le redemande, ne la licenciez pas ! »

Le patron éclata de rire :

« Haha, tu crois que c’est ça qui va me ramener l’argent perdu ? Tu veux que je t’applaudisse pour ton honnêteté ?

-Je vous rembourserai le triple du prix initial.

-Quoi ?! »

Le vieil homme s’arrêta un instant pour réfléchir. De nature plutôt avide, il ne lui fallut pas longtemps pour finir par se décider.

« Bon, c’est d’accord.

-Vraiment ?

-Oui, ça m’ennuyait de la virer je dois l’admettre ! (Il haussa les épaules.) Par contre, ça ne sera pas suffisant.

-Comment ça ?

-Je ne peux pas virer quelqu’un et le faire revenir le lendemain sans explication raisonnable. Ça entacherait mon honneur !

-Et donc ?

-Alors je vais t’interdire d’accès à la bibliothèque pendant quelques semaines. Je rendrai également ta fraude publique pour dédouaner Inaya de toute responsabilité.

-C’est une blague…

-A prendre ou à laisser. »

Aaron lâcha un soupir :

« Ok, j’ai pas vraiment le choix de toute façon.

-Bien. Marché conclu. »

Sur ces mots, la discussion se termina.

Le patron retourna à son poste. Le brun, de son côté, s’adossa contre le mur de la cage d’escalier et plaça la paume de sa main contre son front.

« Dans quoi est-ce que je me suis encore fourré… » songea-t-il en se laissant glisser.

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