L'église

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Une intense lumière éblouit ses yeux et un sentiment immense d'apaisement prit possession de son corps. Alya se sentait voler, alors que ses pieds touchaient le sol de pierre millénaire.

Elle avançait malgré elle vers l'autel d'une église qui ne comptait comme plafond que la voûte céleste crépusculaire. Immense et majestueuse, elle était démesurée. Toute notion de temps et d'espace avait disparu.

Ses pas étaient lents, emprunts d'une grâce mystique. Cette belle lueur, là, au loin, l'attirait tel un aimant. Son coeur palpitait d'une foi insoupçonnée.

Autour d'elle, sur les bancs, priaient des silhouettes anonymes d'hommes, de femmes et d'enfants. Recroquevillées, ratatinées, amorphes, sous des épreuves trop lourdes à porter.

Il y avait tant de peur, de tristesse, de colère qui vibraient autour d'elle. Cette présence au coeur de l'édifice semblait comme les apaiser, leur donner l'énergie suffisante pour ne pas disparaître.

Alya essaya de ne pas faire dévier ses pas de l'allée centrale de la nef, afin de ne pas risquer de se noyer dans ce maelström d'énergie émanant des priants.

Bien qu'elle se sentait plongée toute entière dans cette scène surréaliste, la jeune femme avait la certitude d'être une simple observatrice. Invisible.

Elle s'arrêta aux premières marches devant le choeur. Son regard chercha les vitraux, mais seule l'intense lueur capta son attention. Sa luminosité variait au rythme de sa respiration. Elle était vivante.

Une sensation de paix et d'apaisement l'incita à fermer les yeux et apprécier cet instant. Les trois marches la suivaient maintenant.

C'est alors que la sensation de chaleur laissa place à un froid intense qui remonta son corps de ses pieds jusqu'à sa tête. L'apaisement devenait oppression. Et angoisse.

Elle rouvrit les yeux. La panique la gagna. La lueur arborait une toute autre luminescence. Ses contours informes brillaient maintenant d'un noir intense. Son coeur, autrefois blanc nacré, paliptait d'un rouge sanguin.

Une mélopée dissonante de prières souffreteuses happa son attention vers l'assemblée.

Les silhouettes s'étaient redressées, dévoilant au niveau de leur coeur un fil tentaculaire connecté à la source de lumière.

Leurs regards n'avait plus rien d'humain. La folie habitait leur corps, la colère muait leurs mains en couteaux de chair, le désespoir agitait les bouches aux mâchoires hurlantes. Et dans ces orifices béants : le néant.

Un spectacle sinistre qui installa une terreur intense dans le coeur d'Alya. Elle se retourna vers le choeur.

La lueur semblait l'observer. Et déjà, deux énormes fils rouges s'approchaient dangereusement d'elle.

Trop tard...

Cette chose se nourrissait de ces pauvres gens...

Alya ne trouva la force que de pousser un hurlement, étouffé dans les plaintes collectives qui gagnaient en volume. Son corps paralysé était offert tel un festin à l'abomination qui hantait ces lieux.

Elle ferma les yeux. Comme pour essayer d'atténuer la douleur qui s'annonçait. Et sa mort imminente. Seule.

Dans un dernier souffle d'espoir, elle pensa à ses parents, à ses années de bonheur, aux rires, aux joies, à cette vie heureuse. Au moins, elle avait pu connaître tout cela...

Comme une ultime provocation adressée à la chose qui la dévorerait, face à cet amas de malheur, elle se mit à sourire.

Ce sourire, personne n'avait jamais réussi à le lui retirer. Et elle le garderait jusqu'au bout.

Deux mains saisirent ses épaules d'une étreinte maternelle, la tirant vigoureusement en arrière. Ses pieds quittèrent le sol, happés par cette force inconnue s'étirant depuis l'entrée de l'édifice.

Dans les airs, Alya remonta la nef, effleurée par les mains infames des priants qui tentaient d'arrêter son irrésistible évasion.

Son corps soustrait comme une pièce d'échiquier passa les portes immatérielles de l'église et chuta dans un vide étonnament réconfortant. Loin de ce cauchemar.

Et de là-haut jaillit un hurlement strident, sombre et aigu à la fois. Abyssal. Plein de rage. Et de frustration.

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