Les premières pages (avec les fautes d'orthographe)

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"Bonjour Cumhail, aux yeux-azur.

*J’ai une histoire à te conter. Elle est importante. Elle te concerne. Et moi aussi.*

Je m'appelle Dara, la fille-chêne dans le langage Legorien. Ma mère me nomma ainsi lorsqu'elle m'a trouvé un matin blottie aux creux des racines d'un grand chêne qui était penché comme pour veiller sur moi, commença-t-elle.

Ma mère adoptive donc m'emmena chez elle et me fit passer auprès des gens du village pour la fille d'une de ses cousines éloignées morte en couche. Ce qui venait de la forêt étaient en effet assez mal perçu dans cette région et ma mère se refusait à m'abandonner.

Je grandis donc dans ce petit village de Legorie. Mais déjà toute petite j'étais différente des autres enfants, ils le savaient et me le faisais sentir par milles petites tortures. Heureusement je ne restais pas souvent avec eux, nous habitions une maisonnette au toit d'ardoise à la lisière de la forêt. La forêt était toujours à mes yeux bien plus accueillante que les villageois. Aussi chaque fois que je me sentais seule, je m'y réfugiais.

Durant ma petite enfance rien ne vint troubler notre vie paisible hormis quelques chamailleries mais en grandissant les différences s'accentuèrent : je grandis beaucoup plus vite que les autres enfants et à 12 ans je mesurais déjà ma taille actuelle ce qui me faisait une tête de plus que les garçons de mon âge, et les Legoriennes adultes. Les garçons enrageaient d'être dominés par une fille. Et comme j'avais une peau de pêche et que mes cheveux sont d'après ma mère aussi doux que les chatons du saule, les filles ne m'appréciaient pas plus.

J'avais 14 ans lorsque O' Dort, le fils du chef du village me traita de monstre pour la première fois. En fait, j'avais entendu murmurer les villageois dans mon dos à plusieurs reprises déjà mais jamais ouvertement : ma mère passait pour être une femme très sage, issue d'une lignée de mages capables de parler avec les autres mondes, les elfes, et autres êtres légendaires et même si ce n'était qu'une légende, on ne voulait pas se la mettre à dos. La devise des Legoriens est "on ne sait jamais…".

- Tu es un monstre, une horrible sorcière de la forêt, cria-t-il et sans reprendre son souffle il ajouta : D'ailleurs tu ne nous ressemble pas, tu n'es pas Legorienne, tu n’es pas des nôtres… Arrière sorcière !

- Non, c'est même pas vrai ! Je suis comme vous ! et puis y'a pas de démon dans la forêt, la forêt nous protège… répondis-je en criant moi aussi.

- Il n'y a que toi pour dire de telles sottises, tout le monde sait bien que la forêt est maléfique. Tu vois c'est la preuve que tu es un monstre…

Je ne me rappelle plus comment avait commencé cette querelle mais elle me bouleversa tellement qu'au lieu de rentrer à la maison, je partis directement vers les bois, aveuglée par les larmes que je n'avais pu retenir.

Arrivée à l'orée du bois, j'hésitais : je ne comprenais pas ce qu'il voulait dire, la forêt avait toujours était apaisante pour moi, comment pouvait-il dire qu'elle était maléfique ? Je n'y croyais pas, je ne voulais pas y croire et c'est d'un pas résolu ou presque, que je pénétrais sous les feuillages. Assise sur une vieille souche, je me laissais aller à mon chagrin. Soudain ma mère fut prés de moi, je pleurais de plus belle… Quand j'eus épuisé mes larmes, à ma grande surprise, c'est elle qui se mit à pleurer… Je la priais de m'expliquer la raison de ses larmes et là elle me dit que O' Dort avait raison, je n'étais pas Legorienne, non plus que Gifaroise ou Edonienne, je ne venais donc d'aucun des pays connus d'elle.

Elle me raconta pour la première fois comment elle m'avait trouvé, que je n'avais jamais été sa petite-cousine et des choses bien plus troublantes encore… Par exemple que lorsqu'elle m'avait trouvée, je portais une couronne de fleurs et que jusqu'à ce jour elle l'avait conservé sans qu'elle se fane. Que depuis qu'elle m'avait recueillie de drôle de choses se passait dans la forêt, des musiques sinistres comme des plaintes en sortaient, surtout la nuit et la macabre mélodie rôdait autour du village semant des cauchemars dans le sommeil de ceux qui l'entendaient. En fait, les premiers signes de changements étaient apparus bien avant qu'elle ne me trouve. Mais depuis ils n'avaient fait que s'amplifier et la vie au village s'en ressentait. Paradoxalement notre maisonnette, pourtant la plus proche de la forêt n'avait jamais subi ces attaques musicales. Et ma bonne humeur inaltérable était pour les villageois un signe de plus que tout cela venait de moi.

Elle me narra encore comment m'ayant perdue à l'âge de 5 ans, elle m'avait trouvé devant un arbre mort, ses branches griffues tendues vers moi comme pour me broyer, en train de déblatérer d'un ton sévère dans un langage inconnu. Les branches s'étaient alors redressées, comme si l'arbre m'obéissait. Elle ajouta qu'elle m'avait vu passer ma main doucement sur l'arbre comme on flatte l'encolure d'un cheval.

Durant des années elle avait gardé çà pour elle, y compris le fait que l'arbre mort ait bourgeonné quelques jours plus tard.

- Pourquoi me dis-tu tout ca aujourd'hui, maman, lui demandais-je d'une petite voix.

- Parce qu'il faut que tu partes, mon petit, dit-elle tristement.

- Non ! Hurlais-je avec désespoir.

- Si. Ma mission touche à sa fin : tu es aujourd'hui une belle jeune fille bien éduquée. J'ai le sentiment que tu es en danger ici. Des choses malsaines commencent à sortir de la forêt et à rôder autour des villages… Des émeutes se préparent et tu sais que les villageois ne t'aiment pas, ils s'en prendront à toi bientôt et je ne pourrais pas les en empêcher. Il faut que tu partes.

Elle répéta cette phrase avec des sanglots dans la voix.

Puis redressant les épaules, elle me tendit une couronne de fleurs blanches et une corde tressée sur laquelle était enfilée une sorte de cristal très pur, de forme ovale, qui renfermait une feuille toute petite et dont je n'arrivais pas à reconnaître la provenance.

- Voici la couronne de fleurs que tu portais lorsque je t'ai trouvé et voici un talisman qui se transmet dans ma famille depuis des générations du coté de ma mère. IL te protégera. Il faut que tu partes. Adieu ma petite fille.

Ma mère m'embrassa encore une fois, me donna un baluchon contenant des chemises d'hommes et des pantalons de rechange, quelques tranches de viande fumée puis repartie la tête engoncée entre les épaules. Je rangeais ma couronne de fleurs en faisant bien attention de ne pas l'abîmer et regardais autour de moi.

La forêt me semblait soudain moins accueillante. Le silence s'était fait en quelques secondes et je n'entendais plus que les battements de mon sang à mes oreilles. J’essayai d'assimiler ce qui venait de m’être révélée. Je me sentais observée par quelque chose d'immense et de menaçant… Pas observée en fait, plutôt recherchée… Je secouais les épaules et m'efforçais de penser à la forêt telle qu'elle était habituellement : accueillante et apaisante.

Soudain un cri strident retentit venant de la voûte des arbres. Les arbres n'étaient pas très resserrés dans cette partie de la forêt et je vis un grand faucon traverser le ciel dégagé. Après avoir effectuer plusieurs rond au-dessus de moi, il vint se poser sur une branche maitresse sur l'arbre le plus proche et eut l'air de m'examiner plus attentivement en penchant la tête d'une façon que je trouvais plutôt comique. J’étouffais le gloussement que je sentais tout proche et regardais, moi aussi, l'oiseau : c'était vraiment un très très grand faucon, réalisais-je. Je n'en avais pas vu beaucoup mais assurément il était énorme. Il devait bien faire 2 mètres de haut et 4 mètres d'envergur. Il était magnifique.

Apparemment satisfait de son observation, l'oiseau commença un drôle de manège : il s'envolait, se posait un peu plus loin et revenait. Je finis par comprendre au bout d'un certain temps qu'il ne s'agissait pas d'un jeu mais qu’il voulait que je le suive. N'ayant aucune idée de ce que je pouvais faire d'autre, je me mis donc à suivre cet étrange oiseau. Il allait prestement droit devant lui, évitant les branches basses, mais je ne peinais pas à le suivre car il m’était aussi naturel de courir dans les bois qu'à lui de voler dans les airs.

Au bout de 2h, il s'arrêta devant un arbre immense. C'était un chêne monumental et ses branches s'étendaient aussi loin que je portai mon regard... Il était resplendissant de vie et devait abriter une centaine d'écureuils et oiseaux divers étant donné la cacophonie qui en sortait. On aurait dit une réunion des commères du village, chacun avait son pépiement à dire… Le faucon se posa sur la branche maitresse la plus basse et le silence se fit. Soudain une voix résonna dans ma tête.

- Approche petite, et mets ta couronne de fleurs blanches.

Sans savoir qui me parlait, je sortis ma couronne du baluchon et la posait sur la tête.

- Très bien. Maintenant places-toi à "la croisée des chemins de vie ".

Je regardais tout autour de moi mais il n'y avait que le grand arbre. Je m'approchais lentement.

- Hâte-toi, le temps presse, me dit-on alors.

Au moment où j’allais demander ce qu'était la croisée des chemins, je vis un nœud de racines au pied de l'arbre. Pour un arbre, les chemins de la vie sont ceux de la sève. Je me postais donc devant ce gros nœud.

- Pose tes mains au centre de la croisée.

J’obéis. Soudain je sentis les racines se refermaient sur mes mains. Sans avoir le temps de paniquer, je me retrouvais dans un endroit baigné d'une douce lumière dont je ne pus trouver la source.

- Où êtes-vous, demandais-je, un peu inquiète tout de même.

- Tu ne peux pas me voir, ma petite, tu es à l'intérieur de moi.

- Pourquoi suis-je ici ? Et d'abord je ne suis pas petite ! Je dépasse toutes les femmes de mon village.

- Oh ! Oh ! Oh !

Tout se mit à bouger autour de moi comme un tremblement de terre et je me mis à hurler…

- Oups, excuse-moi ! Ca fait si longtemps que je n'avais pas eu l'occasion de rire, répliqua le chêne.

Oui le chêne, car j’avais fini par se rendre à l'évidence : j’étais dans un chêne qui me parlait. Mais quoique cet arbre parle, je n'étais pas d'assez bonne humeur pour goûter à sa plaisanterie, d'autant que de temps à autre, une secousse se faisait encore sentir comme si l'arbre ne pouvait se retenir de glousser.

- Je n'ai pas eu une journée qui prête à rire ! m’exclamais-je d'une voix furieuse. Et je ne vois pas ce qu'il y a de drôle d'abord ! A moins que ce ne soit de moi que tu rigoles… dis-je soudain d'une voix sourde.

- Quel caractère ! Non, non ne te mets pas en colère… dit-il alors que je m'apprêtais encore à piquer une crise de nerf. Hum… excuse-moi. C'est que je t'ai tant baladé sur mes racines lorsque tu étais bébé, et à cette époque c'est quand je m'arrêtais de te secouer que tu braillais…

- ? !

"L'heure est triste… continua le Grand Chêne. J'ai beaucoup de choses à te révéler et peu de temps pour le faire : tu es un être à part petite ! hors des classifications habituelles : ni humaine, ni elfe, ni nain… Mais je sais que ta mère était une elfe, elle, et de haute caste même. Lorsqu'elle était enceinte de toi, elle avait l'habitude de s'asseoir sur mes racines et d'observer les petits animaux de la forêt. Elle leur chantait des chants anciens, de ceux qui font s'apaiser les cœurs et s'ouvrir les fleurs. Pendant ce temps, je te sentais à l'intérieur. Tu t'exprimais bizarrement quand tu étais là dedans, tu sais ! Euh ! Ne nous égarons pas… Où en étais-je ? Ah, oui ! Peu après ta naissance, ta mère est revenue, elle avait maigrie, elle avait l'air triste. Elle t'a posé à la croisée des chemins, elle était inquiète, je le sentais bien. Elle m'a supplié de te protéger.

Il faut que tu saches que ta mère ne pouvait pas communiquer avec moi comme nous le faisons en ce moment, elle ne m'entendait pas. Aussi abaissais-je une jeune branche pour lui caresser le visage. Elle avait la peau douce comme un pétale après la rosée. Elle comprit et me remercia. Après t'avoir posé cette petite couronne de fleurs sur la tête, elle t'embrassa une dernière fois et …"

Un craquement sinistre se fit entendre tout autour de moi et juste à l'endroit où je regardais, je vis une petite tâche noire apparaître puis disparaître si vite que je crus avoir rêvé.

- Aah ! Gémit le grand chêne. Je n'ai plus que quelques minutes. Ecoute-moi bien. Ta mère a été emportée sous mes yeux par une forme noire. Dès que je vis cette chose, je t'emmenai en ce lieu jusqu'à que l'humaine au talisman passe. Elle était bonne je le savais : elle prenait toujours bien soin de ne pas marcher sur les jacinthes qui poussaient alors dans la clairière. Je m'arrangeais donc pour qu'elle te trouve. Ta mère n'a eu que le temps de me dire de t'envoyer voir Kurya' Aba quand le moment serait venu. Elle vit à la frontière Nord du Grand Bois. Maintenant il faut que tu partes, suis le grand faucon, il te guidera… Pars !

Sans savoir comment je me retrouvais dehors. Le faucon s'envolait déjà. Avant de le suivre, je ne pus m'empêcher de dire un dernier adieu à ce drôle d'arbre qui en fait était un peu ma première nourrice. Mais le faucon me pressait, je tournais juste la tête et embrassais le vaste chêne du regard. Une tâche noire au fond de la clairière reteint mon attention, des branches étaient pourries. Bizarre, je ne l’avais pas remarqué en arrivant.

L'énorme oiseau nous fit presser pendant tout l'après-midi. Lui-même ne volait que sous le couvert des arbres (une prouesse au vu de ses dimensions!) comme s'il avait peur d'être repérer me dis-je. A la tombée de la nuit, j’étais éreintée. Mes jambes refusaient de la porter plus loin et je me laissais tomber plus que je ne m’assis lorsque le rapace donna le signal de la halte. Il se posa à un mètre de moi sur un arbre abattu par des bûcherons.

- Est-ce que Vous avez faim ? Résonna dans ma tête de la même manière qu'avec le Grand Chêne.

- Je ne savais pas que tu parlais répondis-je étonnée.

Je le fus bien plus en comprenant que, moi non plus je ne m'exprimais pas avec ma bouche mais avec ma tête.

- Vous apprenez vite. Mais si je puis me permettre une remarque : Vous émettez encore un peu fort. Lui fit-il parvenir. Puis se redressant de toute sa taille : Je souhaite la bienvenue à l'Elue. Je me présente Ashbor, je suis Votre Guide.

- Attends un peu, répondis-je, en essayant de le faire le plus doucement possible mais l'oiseau fronça ses gros sourcils ce qui n'étaient pas bon signe décidais-je. Je suis l'Elue ? C'est quoi encore cette histoire ! Et de quoi suis-je l'Elue hein !? !

- Je vois que Vous n'êtes pas aussi fatiguée que je le pensais… dit-il. A quelle question voulez-Vous que je réponde ?

Dara n'en était pas tout à fait sûre mais il lui semblait bien que cette grosse volaille se moquait d'elle. L'oiseau dû comprendre qu'il valait mieux répondre :

- Vous portez l'Irax, dit-il en montrant le talisman, et Vous avez été reconnu par le Vieux Roi des Chênes : Vous êtes donc forcément l'Elue. Voilà pour la première question. C'est pour cette raison que je Vous parle.

Marmonnant dans ma barbe, je me disais que quoique doué de la parole ce faucon était complètement fou. Néanmoins jetant un coup d'œil à ses serres acérées, je me dis qu'il valait peut-être mieux l'écouter divaguer sans l'interrompre de façon intempestive. L'oiseau continua donc :

" Je suis Ashbor, prince des Eekows, issu d'une longue lignée de monarques. Mon père Ashkorr a régné sur mon peuple avant le Grand Malheur. Et j'ai été éduqué dans le but de Guider et de Protéger l'Elue… »

Profitant d'une pose dans ce monologue fort intéressant, je demandais :

- Peux-tu me dire en termes clairs qu'est ce que c'est que cette histoire ? Je suis "Elue" pour faire quoi ?

Le dit Ashbor la regarda d'un air surpris :

- Mais tu dois bien le savoir quand même : détruire la Source de l'Ombre Noire…

Je remarquais que dans sa hâte il avait oublié le Vous si embarrassant mais surtout je ne comprenais rien à tout son charabia si ce n'est que visiblement il était très fier de sa royale parentèle.

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