Côte de la Lumière
Elise émergea doucement, réveillée par la lumière du jour. Combien de temps avait-elle dormi ?
Puis, elle se rappela : « La Costa de la Luz* », sa destination imprévue. L’avion dérouté à Séville, puis les deux bus. Elle avait laissé faire l’instant présent, sans réfléchir. D’ailleurs, elle ne voulait plus réfléchir, programmer, calculer.
Elle avait fait sa valise du jour au lendemain et plaqué son mémoire interminable. C’en était fini de cet état d’expert-comptable mémorialiste. Assez ! La pression des délais, des clients et le manque de reconnaissance. Assez ! Fini de se donner à fond pour ne jamais satisfaire personne. À vingt-huit ans, elle était déjà usée et déçue de sa vie professionnelle. Et il était hors de question de s’escrimer plus longtemps dans ce nid de vipères où elle n’était pas du tout heureuse. Qu’importe qu’elle fut à ça de finir officiellement ses études, qu’elle fut déjà sur la rampe de lancement pour le rachat de parts du cabinet comptable, ça ne pouvait plus continuer comme ça. Adios** !
Elle tira sur le voilage ivoire, ouvrit la baie vitrée et sortit sur le petit balcon. Le temps était radieux et déjà le soleil dardait sa peau. Elle esquissa un sourire : tant qu’elle se sentirait bien ici, elle resterait. Puis elle repartirait comme elle était venue, vers d’autres destinations inconnues. Au loin, les vagues de l’océan s’échouaient inlassablement dans un ravissant camaïeu de bleus. Il était temps d’aller voir de plus près.
Elle s’habilla rapidement et descendit à la réception de la petite pension dans laquelle elle avait élu domicile. Elle salua le propriétaire brièvement des quelques mots d’espagnol qu’elle connaissait, puis prit la direction de l’océan. Elle traversa une étendue de dunes avant d’atteindre la plage et de foncer droit vers l’eau. Elle s’arrêta lorsqu’elle eut de l’eau jusqu’aux genoux : ce début juin était encore frais.
La plage s’étendait sur des kilomètres : une étendue dorée presque à perte de vue. Elise revint un peu sur ses pas, s’assit dans le sable et laissa son esprit dériver. Il était bon de juste admirer la simplicité du paysage, s’en imprégner et s’y fondre presque.
Côte de la Lumière*
Adieu**
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