Prologue
Dans la Région de Xhu, l'Impérion était l'ennemi. Secrètement mais sûrement, on proférait toute sorte d'injures à l'encontre des cités de l'Empereur. Les villages de pêcheurs leur reprochaient leur manque d'intérêt pour les petites communautés comme les leurs, et cette colère s'était de fil en aiguille muée en haine vicérale. Partout l'on décriait les habitudes des nobles, l'on vantait l'expérience et la débrouillardise des paysans. « Que ces moustachus en jupons aillent au Diable ! » disait-on, dans les campagnes.
Bien entendu, l'Impérion et ses cités avaient eu vent de ce mouvement de révolte envers leur autorité. Comment ces simples d'esprits pouvaient-ils refuser leur condition ? Et, ils aimaient le rappeler à ces marauds : « Sans la protection impériale, vous n'auriez ni terres, ni droits, vous seriez des renégats ». Mais les Xhuites continuaient de menacer leurs souverains. Au palais, on parlait de révolution, d'une forte émancipation de la population ; les commandants écrivirent même dans leurs rapports que le peuple voulait l'anarchie.
Alors, l'Empereur ordonna l'arrêt immédiat de cette révolte. Des commandos secrets issus de l'élite même furent envoyés aux villages de pêcheurs. Les spadassins incendièrent des maisons, empoisonnèrent les ruisseaux, tuèrent tous ceux qui s'opposaient à eux. Dans toutes les Régions alentours, les commérages allaient bon train. « Punis pour l'exemple » déclara l'Empereur. Il voulait à tout prix asseoir son pouvoir sur les terres qu'il contrôlait. Ainsi, la révolution prit fin aussi vite qu'elle avait commencé, et plus personne n'osa contredire le pouvoir de l'Impérion.
Du moins, c'est ce que l'Empereur voulut faire croire. Mais la Région de Xhu, à jamais marquée par la sanglante reprise des villages rebelles, ne s'était pas encore délaissée de ses idées révolutionnaires. Cependant, personne ne voulait revivre le discret massacre subi par ces quelques hameaux, et l'on choisit de se taire. Mais au village de Huishan, non loin de la Route du Printemps, subsistait un couple dont la rage contre l'Impérion ne cessait de croître. Malgré les terribles avertissements de l'Empereur, ils continuaient de cracher sur le blason impérial, dénonçant les cruelles méthodes de gouverneurs corrompus. Evidemment, cela ne plut guère aux intéressés, qui assignèrent à un petit groupe de l'élite de mettre fin aux diffamations de ces deux paysans.
La nuit de leur mort fut terrible pour l'épouse, qui mit au monde un enfant. La petite fille était si faible, si frêle, elle ne pouvait se résoudre à l'abandonner. Son mari, quant à lui, ne voyait que peu d'intérêt de la garder, car ils ne pourraient jamais lui offrir une vie convenable. Mais la femme, peinée de ne pouvoir sauver son enfant, s'enfuit de leur maison et confia le fruit de son corps à la rivière qui bordait le village. Le panier dans lequel le nouveau-né était déposé fut alors emporté par le courant, et la mère rebelle, égorgée sur la berge.
Personne ne sut jamais si, miraculeusement, l'enfant fut bel et bien sauvé par la rivière, ou s'il périt noyé par les ondes glacées. Néanmoins, l'Impérion ne fut plus jamais blâmé publiquement par quiconque. Dans son palais, l'Empereur jouissait de sa merveilleuse condition.
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