(In)décision
Alors qu’il l’attendait dans le lit, elle ferma les stores, comme à son habitude. Après avoir enlevé ce qui lui restait de vêtements, Adèle s’avança jusqu’à la couchette et se pencha sur lui. Elle le sentait brûler de désir mais il l’attendait docilement. Aussi, elle commença par lui embrasser le torse. Tout en déboutonnant son pantalon, elle l’entendit gémir de plaisir et d’impatience : comme il était dressé par l’excitation, elle ne résista pas à l’envie de descendre plus bas et prit tout son temps pour l’honorer avec sa bouche. Elle remonta finalement vers lui pour rejoindre ses lèvres. Basculant sur le côté dans la passion de leur baiser, les mains d’Adèle retrouvèrent l’objet du désir qu’elle caressa ardemment tandis qu’il se mit à embrasser ses seins, qui pointaient de désir. L’obscurité quasi-totale ne permettait pas à Adèle de voir le visage aimé mais elle imaginait chacun de ses traits, de ses fossettes qui lui donnaient un charme fou à ses cheveux éternellement indisciplinés. Alors qu’elle l’embrassait avidement, elle vint à califourchon sur lui, continua à le caresser et finit par se redresser pour accéder au plaisir ultime de l’accueillir en elle. L’union de leur deux corps était naturelle et parfaite. D’abord tendre, l’étreinte devint vite animale. Il l’agrippa fiévreusement tandis qu’elle faisait courir ses ongles le long de son dos.
« Adèle », souffla-t-il
« Chut », lui intima-t-elle « Ne dis rien ».
Par-delà ses gémissements, il lui semblait entendre encore sa voix, son timbre si particulier, elle voulait lui répondre mais ne pouvait que répéter « Encore, encore » comme elle sentait la vague de chaleur familière arriver et la faire défaillir.
Après avoir profité à peine un instant du confort de ses bras, elle se leva de la couchette et se rhabilla.
« Tout va bien ? » lui dit-il
Elle prit un visage de circonstance avant de se retourner. « Bien sûr », pourtant le peu de lumière qui filtrait des stores reflétait ses yeux brillants.
« Tu es sûre que tu ne veux pas rester cette nuit ? »
« Merci, mais tu sais bien que je dors mieux chez moi. »
« Comme tu préfères, ma douce ».
Il avait beau être compréhensif, elle sentait que chaque séparation le peinait davantage. Malgré tout, elle finit de remettre ses vêtements avant de l’embrasser :
« On se voit mardi à la même heure ? »
Et elle sortit pour prendre la navette la ramenant à l’échangeur qui lui permettrait de rentrer chez elle. Un trajet d’une trentaine de minutes qui lui laissa le temps de penser à ces derniers mois écoulés.
Cela faisait maintenant quatre mois qu’Adèle sortait avec Léo, peu après être tombée sur lui dans ce bar, lors de la Sainte-E5E. Elle s’était littéralement effondrée dans ses bras en constatant qu’il n’était pas Noah. Déconcerté, il lui avait proposé de s’asseoir dans un coin tranquille et de venir la voir à la fin de son service, qui était presque terminé. C’est ainsi qu’ils avaient passé une partie de la nuit à discuter de Noah, qu'il ne connaissait malheureusement pas. Léo était bel homme, blond foncé, la mâchoire carrée, un physique indéniablement avantageux. L’heure avançant, il proposa à Adèle de la revoir quelques jours plus tard. Il se serait renseigné auprès de ses collègues pour voir si l’un d’entre eux connaîtrait Noah d’un précédent bar. Ils échangèrent leurs coordonnées, comme le permettait l'application E5E en ce jour particulier.
Malgré ses efforts, Léo ne put porter aucune bonne nouvelle à Adèle. Il se risqua pourtant à lui proposer un autre rendez-vous, qu’à sa grande surprise elle accepta.
De fil en aiguille, ils devinrent amants. Et elle devait bien l’admettre : ce qu'ils partageaient était agréable et physiquement, assez incroyable. Mais elle ne pouvait s'empêcher de penser à Noah, même pendant qu'ils faisaient l'amour. C'était son nom qu'elle avait envie de dire, sa voix qu'elle rêvait d'entendre. Néanmoins, cela ferait bientôt deux ans qu'elle le cherchait désespérément depuis leur désunion. Il était peut-être temps de prendre une résolution à défaut qu'elle soit bonne... Elle décida qu'à l'occasion de ce triste anniversaire, elle devrait cesser d'espérer.
« Je dois te laisser partir, mon amour », pensa-t-elle.
Assise dans la navette presque vide, Adèle regardait les yeux dans le vague la page d’accueil de E5E et, les mains crispées, ne put retenir les larmes qui coulaient en silence le long de ses joues.
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