Scarlett fila dans la nuit jusqu’à apercevoir son habitation. Elle poussa la porte en douceur pour ne pas réveiller son père. Malheureusement pour elle, il était devant la cheminée, installé sur le banc à tailler un morceau de bois avec son couteau. Il releva les yeux vers elle. Embarrassée, la jeune femme ne sut que dire.

– Je croyais que tu voulais faire la fête et t’amuser !

– Sans maman, ce n’est plus pareil, avoua-t-elle.

Elle ne mentait pas en prononçant ces mots. Jamais elle ne se serait aventurée dans cette grange si sa mère avait toujours été là. Elle serait restée à ses côtés à distribuer des gâteaux à tous les habitants, avec le sourire aux lèvres. Scarlett regrettait ces moments de bonheur. À l’époque, elle n’avait pas conscience qu’ils étaient si précieux.

Son père darda ses prunelles sur elle. Durant quelques instants, il se contenta de la fixer sans dire un mot.

– Je…

– Va te coucher ! Tu as à faire demain !

Scarlett qui rêvait de pouvoir s’échapper de cette ambiance pesante, ne se fit pas prier.

– Bonne nuit, papa…

Il ne répondit pas. L’avait-il entendu ? En tout cas, les seuls bruits qui lui parvinrent furent ceux du feu qui crépitait dans l’âtre. Un son apaisant d’ordinaire qui prenait en cet instant une autre tournure.

Alors qu’elle quittait la pièce pour gagner sa petite chambre, la jeune femme entendait son cœur battre la chamade. Elle craignait toujours que son père remarque le changement en elle. Par chance, il ne dit rien.

Une fois seule, elle versa l’eau du broc dans l’assiette pour faire sa toilette. Pouvoir se débarrasser de toute trace de cet homme sur sa peau la soulagea. Ensuite, elle passa sa chemise de nuit et s’allongea sur son matelas de chaume, en espérant que le sommeil ne tarderait pas.