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Le soir, nous dinons avec l’hôtelier, Charles, et son fils, Alex.

Alex est un adolescent de seize ans. D’aspect frêle, il a de longs cheveux blonds, légèrement bouclés. Il semble très réservé, ne levant que rarement les yeux, parlant d’une voix faible et retenue. Alors, on peut lire comme un désarroi dans son regard. Il répond à peine aux questions, semblant étranger et lointain.

Pendant le repas, nous avons très peu de conversation. Charles est réservé, avec toujours cette infinie tristesse dans le regard. Alex est injoignable. Avec Manon, nous n’osons pas parler de nos petites affaires.

Le lendemain, j’aide Charles à mettre un peu d’ordre. Pendant que nous travaillons à la laverie, il me raconte sa vie. Ils ont repris cet hôtel avec Clarence, sa femme, il y a près de quinze ans. Ils ont tout refait et ils se sont lancés dans cette activité un peu particulière. Ils ont une clientèle d’habitués, généralement des personnes haut placées à la sexualité exubérante. J’ai du mal à lui faire dire que ce sont principalement des dirigeants et des hommes politiques. Tout allait bien jusqu’à il y a deux ans. Un cancer foudroyant a emporté Clarence en quelques mois. Alex a été très perturbé très malheureux.

— Déjà avant, il était un garçon un peu spécial. Je ne lui connais pas d’amis. Il est très solitaire. Depuis la mort de sa mère, j’ai pratiquement perdu le dialogue avec lui.

Je regarde cet homme, il me touche par son histoire. C’est encore un bel homme avec beaucoup de charme. Il devait être très beau dans sa jeunesse. Sans bien savoir pourquoi, je m’approche de lui je lui saisis les deux mains. Il parait surpris, mais se laisse faire. Je m’approche encore plus et pose mes lèvres sur les siennes. Il a un mouvement de recul, puis se laisse emporter par cette sensation qu’il avait sans doute oubliée. Nous restons silencieux. Mes mains commencent à caresser son corps. Il se laisse faire comme hypnotisé. Je retrouve mes impulsions et bientôt, je l’accompagne dans une envolée. À mon habitude, pendant l’acte, je lui pose un suçon dans le cou. Nous remontons. Il ne dit rien, n’exprime rien. Cependant, je crois percevoir un changement dans son regard. Je ne comprends pas bien moi-même ce qui vient de se passer. Je sens que, pour lui, ce n’était pas sa première expérience homosexuelle, mais qu’elle était lointaine, oubliée. Il a renoué avec des impressions de sa jeunesse.

Le midi, nous restons encore silencieux au repas. J’aimerais beaucoup faire la connaissance d’Alex, car son étrangeté doit être une richesse. Mon adolescence n’est pas encore si loin et me replonger dans cette période avec un jeune de notre époque me tente. Malgré mes tentatives, il demeure dans ses retranchements.

Au cours de l’après-midi, alors que nous continuons à ranger ce qui ne va plus servir, Charles reprend l’histoire. Il me dit son souci pour Alex. Depuis la mort de sa mère, il a pris l’habitude de temps en temps de s’habiller avec les vêtements de sa mère. La première fois, Charles a été saisi et lui a presque sauté dessus comme si Clarence était de retour, tellement la ressemblance était confondante. Il le laisse faire, car il sent que cela fait du bien à Alex, même si, lui, cela le plonge dans une nausée désagréable. Généralement, il dine habillé ainsi. Notre présence le perturbe, l’empêche de procéder à son rite. Si je peux en parler avec Manon, dit-il, je crois qu’il serait heureux de venir habillé à son habitude. J’explique à Manon cette situation un peu étrange. Je la connais encore peu, mais je la sais ouverte et généreuse. Il n’y a pas de problème.

Le soir, nous sommes à table, Charles, Manon et moi, quand Alex arrive. Il a vêtu une robe légère de sa mère. Son attitude est troublante de féminité. Il vient vers nous la tête haute et il s’assoit avec grâce. Manon ne peut retenir un compliment et Alex le prend avec un sourire en rougissant. Avons-nous réussi à rompre la glace ?

La nuit, je suis seul avec Manon. Nous consolons notre solitude avec une grande tendresse, doucement, longuement. Non seulement cette fille est belle, mais elle sait vous mener avec charme et sa compagnie intelligente et pétillante est un plaisir. Dommage qu’elle soit lesbienne, sinon, je l’aurais demandé en mariage ! Je lui fais ma demande, la complimentant, en rigolant à moitié. Elle est touchée par ce jeu, plein de sincérité. À son tour de me reprocher d’être gay ! Ce que je démens en lui prouvant, encore, ma capacité à la faire monter.

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