Chapitre 3 : Ascension (6/7)

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 À l’aube du cinquième jour, ils avaient enfin trouvé un chemin qui leurs permettraient de passer au travers de la montagne. Ils furent rassuré de voir qu’ils n’étaient pas obligé d’aller jusqu’au sommet pour pouvoir la franchir car ils n’en voyaient toujours pas le pic. La route qu’ils avaient trouvée semblait la traverser de part en part. Du moins l’espéraient-ils. Il s’agissait d’une cavité de glace. Le Soleil se reflétait sur les parois glacées, donnant à l’endroit un côté magique. Lorsqu’ils furent bien engagés, ils furent obligés d’allumer des torches, l’interstice du plafond se rétrécissant au fur et à mesure de leur avancé. La traversé leur prit la journée entière. Seulement, une fois dehors, ils étaient encore et toujours dans la neige, mais la vue était imprenable. Là, ils se sentaient tout petits face au monde qui s’étalait devant eux. Des plaines s’étendaient à perte de vue. De fières forêts se dressaient d’où on pouvait deviner de là où ils étaient leur hauteur hors norme. À côté, leur forêt semblait être des buissons. La lumière du Soleil couchant se reflétait sur des étendues d’eau. Ils pouvaient aisément deviner des lacs, des rivières ou encore des fleuves. Ici ou là, des points plus ou moins grands cassaient cette harmonie. Ils s’agissaient de cités humaines. À d’autres endroits, des filets de fumée s’élevaient, signifiant une bataille ou un village subissant le même sort que Derliahn. Ils restèrent là pendant plusieurs minutes à contempler ce paysage.

« J’aimerais bien qu’on aille jusque là-bas, montra Ulryk du doigt.

‑ J’espère qu’on n'aura pas à aller aussi loin car je doute qu’on retrouve quelqu’un sur cette distance, répondit son ami. »

 L’endroit qu’indiquait son compagnon était à peine visible. Il s’agissait de la seule marque qu’il restait de la Grande Guerre Sans Nom, de la coupure de la Terre qu’avait engendrée le plus grand tyran du peuple des Hommes. Après avoir contemplé l’endroit, par admiration pour Ulryk et par crainte pour Kheryan, ils se remirent en route. Entre temps, ce dernier avait donné son épée à son ami afin qu’il ne soit pas désarmé en cas de problème. Lui, étant plus habile à l’arc, il avait gardé ces quelques flèches, espérant ne pas avoir à s’en servir. Plus motivé que jamais et même si la neige leur arrivé aux genoux, Ulryk avait accélérée le cadence et avait vite prit la tête du groupe. La pente était de plus en plus raide et il ne ralentissait toujours pas son allure malgré les avertissements de Kheryan, qui n’arrivait pas à calmer ces ardeurs. Et ce qui devait arriver, arriva. Il tomba et glissa. L’épaisseur de la neige ne réussit pas à l’arrêter. Il commença à paniquer lorsqu’il aperçut le vide quelques mètres plus loin. Il dégaina l’épée que son compagnon lui avait donnée et utilisa la même technique qui lui avait sauvé la vie quelques jours plus tôt lors de leur ascension. Cela eut pour effet de le ralentir légèrement mais n’ayant pas la force de Kheryan, il lâcha vite l’arme. Il voulut se rattraper à quelque chose mais il n’y avait que de la neige. Lorsqu’il arriva au bout de la piste, il s’envola. Son corps avait quitté le sol. Il regarda son ami arriver prudemment en courant et lorsqu’il fut près du ravin, il lui tendit la main. Seulement, Ulryk avait pris trop d’élan et il ne put que le regardait tomber. En dessous, il y avait une forêt et il espéra qu’elle lui amortisse un minimum sa chute. Il regarda son ami hurler tandis qu’il rejoignait brutalement la terre ferme. Il y eut des bruits de branches cassées et de feuilles puis un cri de douleur lorsqu’Ulryk arriva dans la forêt. Un groupe d’oiseau s’envola en piaillant leur mécontentement. Une fois partit, il n’y eut plus aucun bruit. Kheryan l’appela mais personne ne lui répondit. Il regarda en bas et la montagne était abrupte. La seule solution qu’il lui restait, était de descendre la paroi. Elle était abîmée et offrait de ce fait beaucoup de prise praticable. La voie était assez longue. Il devrait faire des pauses pour éviter la tétanie de ses bras. Il chercha un promontoire rocheux, ou équivalent, pour prévoir sa route. Il en trouva un sur sa droite à environ dix mètres en contrebas. Cela l’éloignerait du point de chute de son ami, mais c’était nécessaire. Il creusa la neige devant lui jusqu’à trouver la roche afin de se donner une première prise solide. Lorsqu’il l’eut atteinte, il se coucha dessus et bascula ses jambes dans le vide. À tâtons, il chercha des prises pour ses pieds. Il continua sa descente ainsi, jusqu’à atteindre sa petite corniche. Plus d’une fois, il faillit tomber avant de l’atteindre, la roche étant très friable. Il eut tout juste la place de s’assoir, les jambes pendantes dans le vide. La cime des arbres étaient quasiment à son niveau. Ils étaient assez grand, surement quinze mètres au vu de la distance qui le séparait encore de la terre ferme. Il reprit sa descente et lorsqu’il fut assez près du sol, il sauta. Il but une grande partie de sa gourde afin d’éviter les courbatures. Vu d’en bas, la forêt paraissait beaucoup plus haute et était beaucoup plus dense qu’elle n’y paraissait. Lorsqu’il s’y engagea, il remarqua que les fourrés arrivaient à sa taille. Prudent, il sortit son arc et y prépara une flèche. Il avançait doucement, évitant autant que possible de casser les branches mortes au sol, pour ne pas se faire surprendre. Ce fut exactement ce qui indiqua la présence de quelque chose dans les alentours. Il s’arrêta et banda son arc dans la direction de la brindille cassée. Il savait que ça ne pouvait être qu’un animal ou un pisteur novice car un vrai pisteur faisait attention où il marchait pour ne pas faire fuir sa proie. S’il s’agissait d’une personne, étant donné son incompétence, elle prendrait surement la fuite. S’il s’agissait d’un animal, cela dépendrait de sa corpulence. Dans ce cas c’était Kheryan qui pourrait s’enfuir. Une nouvelle branche craqua, le sortant de sa réflexion. Il entendit l’animal s’ébrouait. Par prudence, il s’accroupit et attendit de l’avoir dans son visuel. Les hauts fourrés lui fournissaient un camouflage naturel parfait. Lorsqu’il l’eut en face de lui, il rangea sa flèche au carquois et posa son arc face à la magnifique créature qui se présentait à lui. Son pelage était d’un blanc si pur et si brillant que c’était comme s’il avait capturé les étoiles pour les dissimuler dans sa fourrure. Il regarda ces yeux ronds et il sut de suite qu’il avait été repéré. L’étalon, à la musculature parfaite, se prépara à charger vers lui. Kheryan essaya de se détendre afin de rassurer la puissante créature. Il leva doucement les mains pour lui montrer qu’il était désarmé et se leva sans geste brusque. Le cheval bougea ses oreilles. L’adolescent s’avança lentement de deux pas, ces mains toujours en vue. L’animal ne l’avait pas quitté des yeux mais n’avait pas bougé pour autant. Il aperçut un jeune poulain qui passa sous son ventre pour s’approcher du jeune garçon. L’étalon frappa le sol de son sabot afin de faire revenir son petit. Il commençait à s’énerver auprès de lui, trop curieux, qui continuait sa route. L’animal sauta par-dessus sa progéniture et se mit entre le jeune homme et son enfant. Kheryan fit un pas en arrière et s’arrêta. Il se trouvait à à peine deux mètres de la famille. Le cheval le dévisageait, le scruter comme s’il cherchait à savoir qui il était. Finalement, il approcha sa tête et l’adolescent fit de même avec sa main. Il lui murmura des mots apaisants et l’animal se rapprocha prudemment. Il finit par poser sa tête contre sa main, marquant ainsi sa confiance en lui. Le petit imita immédiatement son père et trottina pour le rejoindre. Il flatta doucement l’encolure de l’adulte pour ne pas les apeurer, laissant le poulain le sentir. Vu de près, l’étalon était encore plus beau et il ne put s’empêcher de le lui faire remarquer. L’ayant compris, il se cabra pour le lui confirmer de toute sa hauteur. Kheryan fit un pas en arrière et tomba au sol, apeuré. Sa réaction sembla plaire à l’étalon qui secouait la tête de haut en bas. Quant au petit, il profita qu’il était à sa taille pour lui mâchouiller les cheveux. Il se retourna doucement et commença à lui caresser l’encolure. Énergique et content, le petit lui donna de léger coup de tête dans le torse. L’étalon hennit légèrement et il lui gratouilla la joue tandis que le poulain s’allongea contre lui. Kheryan regarda autours de lui et ne vit pas de jument sortir.

« Je ne vois pas ta femelle. Où est-elle ? demanda-t-il. »

 L’animal accentua son contact avec sa main et versa une larme. Celle-ci se cristallisa et tomba dans la paume du jeune homme. Il regarda alors plus attentivement le corps de l’étalon.

« Tu n’as pas réussi à la sauver, conclut-il en voyant les cicatrices sur son corps. Ça doit être si douloureux et je ne peux même pas comprendre l’immensité de ta peine, continua-t-il en fermant sa main sur le cristal et en versant une larme sur celle-ci. »

 La pierre se mit à briller intensément dans son poing. L’étalon posa ces naseaux sur sa main et son poulain se releva, paniqué. Il alla aussitôt se cacher derrière son père.

« Que se passe-t-il avec cette créature papa, paniqua une voix enfantine.

‑ Qui est là ? paniqua à son tour Kheryan en se mettant devant l’étalon.

‑ Tu as grand cœur petit homme, continua une voix grave.

‑ C’est toi ? demanda-t-il au cheval lorsque celui-ci lui mâchouilla sa tunique. Comment… demanda-t-il abasourdie.

‑ Si tu as besoin d’aide, serre fort cette larme de cristal dans ton poing, le coupa-t-il. Ma fille et moi viendront à ton secours. Cependant, si cette pierre devient rouge… »

 Un cri retentit dans la forêt, faisant fuir la petite famille avant qu’elle ne put finir sa mise en garde.

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