II - L'autel des Déesses
Quand l’oncle d’Astran les invite à entrer, ils découvrent une cabane composée d’une pièce à vivre et deux chambres dans le fond. Des jouets jonchent le sol et des peluches trônent au milieu de la table en bois. Il y a un reste de petit-déjeuner comme s’ils étaient partis en catastrophe et n’avaient pas eu le temps de ranger. Probablement sont-ils partis sous la panique quand ils ont appris sa disparition du bateau. A cette pensée, Astran se sent coupable et promets de s’excuser.
Des étagères sont disposées entre les portes qui mènent aux chambres et sont remplis de livres, menaçant presque de craquer sous leur poids. Manyia, la tante du jeune bestial est une grande amatrice de livres, elle aime les lire et les relire. Quand ils sont partis du pays, elle a insisté pour en prendre une bonne vingtaine. Astran ne serait pas surpris si elle les avait déjà lu une bonne dizaine de fois chacun.
Alors que le jour est levé, les chambres sont plongées dans l’obscurité et je ne vois que les formes des lits. Une odeur de poisson, lui rappelant la cabine du bateau, vient chatouiller ses narines et, bien qu’il ne puisse plus les voir en peinture, lui donne l’eau à la bouche.
Reylor Kostaros, l’oncle d’Astran entre à son tour, précédé par sa femme et ils s’assoient à la table, enjoignant le jeune couple à les rejoindre, avant que l’oncle ne fasse un signe de tête à sa femme. Celle-ci demande au petit cousin d’aller jouer dans la chambre, et il s’exécute, non sans une moue de déception, souhaitant jouer avec son grand cousin. Celui-ci lui met la patte sur l’épaule et lui promet de jouer avec lui quand ils auront fini de discuter. Un grand sourire vient éclairer le visage du louveteau, avant qu’il ne disparaisse dans l’obscurité de sa chambre. Astran se retourne vers son oncle et lui demande :
- Où sont Telias et Clelya ?
- Partis chercher de la nourriture. Clelya voulait que le petit les accompagne, mais il a préféré vous attendre.
Reylor Kostaros est un Lycan ayant parcouru le monde durant sa jeunesse et ayant, brièvement, participé à la dernière guerre qui a secoué le continent. C’est là qu’il a obtenu cette balafre au visage. Il s’est engagé et a rencontré sa femme lors d’une bataille. Elle était soigneuse dans l’armée et passait beaucoup de temps à soigner Reylor qui venait, souvent, pour un rien, lui avouant quelques temps après ses sentiments et qu’il cherchait toutes les excuses du monde pour venir la voir.
Contrairement à son combattant de mari, elle est un mage qui s’intéresse à tout ce qui touche à l’art de la littérature ou de l’écriture. D’ailleurs, c’est elle qui a appris à lire et à écrire à ses enfants. Et à son mari aussi, qui avait quelques lacunes dans ce domaine. Son visage, comme celui de tout Elfe Noir, peut être trompeur car en réalité elle fait plus que son âge. Néanmoins, c’est un sujet qu’il ne vaut mieux pas aborder avec elle, sous peine de se retrouver à faire des corvées toute la journée à cause de son enjôlement.
- J’avais oublié à quel point tu ressemblais à ton père ! S’exclame Reylor. Le même regard malicieux. La seule question qui nous vient à l’esprit en te voyant avec ce regard : qu’est-ce que tu prépares ?
Astran semble ravi de la comparaison avec son père. A dire vrai, il ne sait pas grand-chose de ses parents, hormis qu’il s’agissait de grands guerriers. Ils auraient participé à la même guerre avec Reylor, faisant parti du même régiment. Ils sont connus pour avoir fait un grand carnage dans les rangs ennemis. Le jeune Lycan réfléchis à la formulation de ses propos et à son plan que n’importe qui pourrait qualifiait d’irresponsable et dangereux. Il décide de mettre carte sur table et d’être honnête avec eux :
- Mon oncle, ma tante. Nous aurions besoin d’aide pour rejoindre le pays des Elfes Noirs.
Vu l’expression de son oncle, il aurait été préférable qu’il avoue avoir tué quelqu’un ou même trompé sa femme plutôt que ça. Même Manyia reste immobile face à cette annonce, le regard chargé d’incompréhension, avant de dire, tempérant son mari en mettant sa main sur son bras :
- Tu n’y penses pas, c’est complètement fou !
- Je m’attendais à cette réaction, soupire Astran… Mais, je n’ai pas le choix ! Répond-il en insistant.
- Comment ça ? Interroge Reylor qui semble peiné à garder son calme.
Astran leur raconte pour la marque, la douleur qu’il ressent et les cauchemars qui ont lieu presque toutes les nuits. Comme cette nuit. Il passe sous silence le passage de la baignade pour rejoindre cette mystérieuse femme. En y réfléchissant, même s’il ne veut pas attiser la jalousie de sa femme, c’est surtout parce qu’il ne comprend pas lui-même ce qui est arrivé, et il s’interroge encore pour savoir si ce n’était pas qu’une simple hallucination.
- Et tu penses que ça justifie de violer la loi martiale pour ça ? Interroge Reylor de son regard le plus sérieux.
De sa jeune mémoire, c’est la deuxième fois qu’il voit cette expression sur le visage de son oncle. La première étant quand un bandit les a menacés dans leur village natal et qu’il lui a demandé s’il voulait vraiment leur faire du mal. Sa voix et son regard ont suffit à le faire fuir.
Néanmoins, il touche un point sensible.
Dans le pays des Lycans, le Roi a décrété la loi martiale qui empêche tout Lycan d’avoir des contacts avec les Elfes Noirs. Cela a causé de nombreux troubles dans la nation, étant donné que ce sont leurs plus proches voisins. Personne n’a bien pris cette mesure au sérieux au début. Jusqu’aux premiers morts… Quand nombre de ceux qui étaient contre se sont fait exécuter, le peuple a compris que ce n’était pas une demande ou une folie passagère du roi, mais un ordre. Le seul problème étant les personnes mariées avec un ou une Elfe Noir.
Pour le roi, être marié avec ou même sortir avec une personne de cette race est un acte de trahison pur et simple, et doit être puni par la mort du couple. Et s’il y en a, des enfants. Peu de temps après cette annonce, Reylor décida de partir avec sa femme. Le jeune couple les a aidés à s’enfuir avec leurs enfants afin qu’ils soient hors de danger.
Astran et sa femme sont retournés à leur vie. Ils ont pu vivre sur le continent sans trahir l’aide qu’ils ont apporté jusqu’à ce que la marque apparaisse. Malheureusement, certains Lycans ont pensé que c’était une marque magique, trahissant une complicité avec des Elfes Noirs, étant donné que les Lycans ne possèdent pas de magie en eux.
Le couple a décidé de partir et prendre le risque d’entrer en territoire ennemie. Ayant fui le pays, le roi Lycan les considère déjà comme des traîtres, et même si les Elfes Noirs ne seront pas particulièrement conciliants avec eux, le jeune homme ne voit pas autre chose à faire. Ce dernier a su par une ancienne connaissance qu’il existe un Elfe Noir nommé Arkôs, vieux de plusieurs siècles qui pourrait avoir des réponses à leurs questions.
- Je n’ai pas d’autre solution. De toute façon, vu ce qui s’est passé quand nous sommes partis du continent, le roi a dû nous décréter comme ennemis publics.
- Vous avez fait du grabuge ? Interroge Reylor.
- On peut dire ça, dit Astran en se remémorant la façon dont ils sont partis du continent pour venir jusqu’ici. Le port d’où ils sont partis va mettre du temps à accueillir de nouveaux bateaux.
- Ça, c’est mon neveu ! S’exclame l’oncle dans un rire tonitruant en venant taper fièrement dans le dos de son neveu.
Le jeune Lycan est surpris de sa réaction, mais son oncle se rassoit bien vite quand sa femme le fusille de son regard noir. Il change très vite de sujet, prenant un ton plus doux pour s’adresser à sa femme :
- Chérie, qu’en penses-tu ? C’est peut être l’œuvre des Dieux ?
- Je ne sais pas, dit-elle en croisant les bras sur sa poitrine. Les Dieux sont connus pour avoir donné beaucoup de malédiction à des imprudents les ayant défiés. Passés un temps, on disait même que bousculer un Dieu et votre famille serait maudit sur les dix prochaines générations. Seulement, ils se sont calmés depuis le temps et je ne pense pas qu’Astran les ait offensés.
Elle dit la dernière phrase en toisant son neveu du regard. Astran s’apprête à protester quand le souvenir de cette journée lui revient en mémoire. Lui qui voulait l’oublier… Mais, il observe sa tante. Le ton de sa phrase évoquait une simple plaisanterie, mais son regard… Le jeune bestial doit se faire des idées, ce n’est pas possible qu’elle sache ce qui s’est passé là-bas. Il n’en a pas parlé aux personnes présentes à cette table, pas même à Luna. Il secoue la tête, se rassurant en se disant qu’elle a juste de la compassion pour l’histoire qu’il a racontée précédemment.
- Et les Dieux, poursuit-elle, sont peu connus pour donner des bénédictions. Ou alors, pendant une bataille qu’ils veulent, eux-mêmes, gagner et cela prend la forme d’une aura. En y pensant, il est vrai que certains Elfes Noirs pourraient avoir des réponses.
- Manyia ! Intervient son mari.
- J’ai dis que c’était une solution, pas la solution. Mais, il faut quand même y réfléchir, ce n’est pas...
Elle n’a pas le temps de finir sa phrase qu’Astran hurle de douleur à cause de la brûlure venant de son œil. La douleur est tellement forte qu’il finit par tomber de sa chaise et se roule à terre. Son cousin sort en trombe de sa chambre pour voir ce qu’il se passe. La marque lui fait encore plus mal qu’à l’accoutumée. Il sent la sueur qui perle sur son front et il a l’impression que son cœur va s’échapper de sa poitrine, tant la douleur est forte.
- Calme-toi, intime la voix enjôleuse de sa tante.
Elle s’est levé et regarde son neveu de ses yeux de nuit, essayant de le calmer par le biais de son pouvoir. Son esprit commence à vagabonder dans des réflexions, lui faisant oublier, pendant quelques secondes, la douleur immense qu’il ressent. Par expérience, le jeune Lycan sait qu’elle est l’une des Elfes Noirs qui maîtrise le mieux l’enjôlement. Du moins, parmi tous ceux qu’il a croisés dans sa vie. Il lui est arrivé de rencontrer des bandits, seulement leur don n’était qu’à ses balbutiements et trahissait un manque d’expérience évident. Mais, Manyia a toujours su bien le maîtriser, punissant le jeune Lycan un peu trop souvent en l’obligeant à faire des corvées.
Il repense à tous ces souvenirs, à toutes ces images qui s’imposent à lui par le biais de la magie de sa tante. Puis, la douleur qui s’était calmée le transperce à nouveau comme s’il se faisait planter par une lame chauffée à blanc.
Quelques secondes plus tard qui lui paraissent une éternité, l’air revient à ses poumons, son cœur cesse de battre à lui en rompre la poitrine et il souffle enfin. Il voit tous les visages qui sont tournés vers lui. Sa femme est agenouillée près de lui, avec son cousin, leur mine inquiète au-dessus de lui. Son oncle et sa tante l’observent, celle-ci semble essoufflée comme quand elle utilise une grande quantité de magie.
- C’est la première fois que je dois utiliser une si grande part de mon pouvoir, dit sa tante en s’asseyant. Quelle est cette marque ?
- Je ne sais pas. Mais, vous voyez pourquoi nous devons aller chez les Elfes Noirs ? Articule faiblement Astran, esquissant des expressions de douleur. Nous devons trouver le dénommé Arkôs.
- Arkôs ? Interroge sa tante.
- N’est-ce pas le nom de ton instructeur ? Demande son mari.
- Si, Arkôs est un puits de connaissance. Il sait énormément de choses et a vécu pendant près de mille cinq cent ans. Il pourra, sans aucun doute, t’apporter des réponses. Le problème, c’est pour entrer dans le pays.
Le jeune Lycan est surpris de voir à quelle vitesse ils ont changé d’avis, mais ce qui vient de se passer doit leur avoir ouvert les yeux.
- J’aurais peut être une idée, continue Manyia. Mais, je dois en discuter avec toi, fait-elle en se tournant vers son mari. Vous voulez bien attendre dehors ? Demande-t-elle au jeune couple. Toi aussi, Laske, s’il te plaît.
Le louveteau est perdu et hoche la tête avant de se diriger vers la sortie avec Luna. Astran regarde son oncle et sa tante qui ont un air triste sur le visage. Il imagine que laisser leur neveu partir pour le pays des Elfes Noirs où il aurait peu de chance de survie, ne les rassure pas. Quand ils sont dehors, il met quelques secondes à ouvrir complètement les yeux à cause du soleil. Le petit tire légèrement sur son pantalon, lui demandant :
- Tu vas mourir, cousin ?
Il reste muet pendant quelques secondes devant sa mine triste et les larmes qui commencent à monter à ses yeux grands comme des soucoupes. Astran ébouriffe sa crinière en s’agenouillant devant le garçon et lui dit avec un grand sourire :
- Ne t’inquiètes pas, il ne m’arrivera rien de grave. Je suis juste un peu malade.
Le petit lui fait un grand sourire, rassuré, et le serre dans ses bras. Il se sent coupable, mais ce n’est pas vraiment un mensonge car il ne sait pas vraiment ce qu’il va lui arriver avec cette marque.
- Tu nous emmènes à l’autel ? Demande le jeune bestial à son cousin, pour changer de sujet.
- Oui ! Dit-il plein d’entrain.
Il prend la main de sa femme et le petit ouvre la marche. Il doit être un peu secoué par ce qu’il a vu car il le voit trembler, et il ne grimpe pas sur ses épaules cette fois-ci. Astran espère que cette petite promenade lui permettra de se changer les idées. Ils marchent à travers le village et le jeune Lycan remarque que les cabanes sont faîtes en palmier, mais semblent assez résistantes. L’air est pur et il se sent bien ici. Rien à voir avec l’ambiance des forêts de son pays. Il était temps qu’il parte et découvre de nouveaux endroits.
Les Lycans vivent en Meute qui sont des villages entiers, voir mêmes des villes ou régions entières pour certaines. L’Alpha de la Meute, qui est le membre le plus fort, est le seigneur de la ville, village ou région. Concernant la meute d’Astran, il y a longtemps vécu, entouré par les mêmes personnes et a grandi avec eux. Il a été éduqué par certains et a appris beaucoup de choses par d’autres.
Au départ, c’était son grand-père qui était le chef de la meute. Son oncle, en tant qu’aîné et plus puissant de la Meute après lui, devait lui succéder, mais celui-ci ne le voulait pas. Et comme le père d’Astran était mort peu de temps après sa naissance, il n’y avait pas d’héritier à proprement parler.
Alors, en attendant de trouver plus fort que lui, son grand-père assure toujours la survie du village, il est épaulé par son lieutenant qui prend la plupart des décisions importantes, le chef ayant les idées ailleurs depuis le départ de son fils. Malheureusement, le lieutenant en question est un partisan du seigneur Lyram, celui qui a déclaré la guerre aux Elfes Noirs.
Pour un Lycan, avoir une meute est quelque chose qui peut paraître vital aux yeux des autres races, un en droit où son âme appartient, où son âme peut reposer en paix, un endroit qui lui restera à l’esprit et auquel il pensera à chaque instant. Mais, maintenant, il se rend compte que cela ne concerne pas que les Lycans.
Quand il voit les oreilles pointues et les loups qui travaillent main dans la main dans ce village, s’entraîner ensemble comme la jeune Elfe qui se bat contre un Lycan plus vieux, qui l’encourage à se battre à fond. Ou encore les louveteaux et les petits elfes qui s’amusent ensemble, grimpent sur les toits des maisons avec une forte agilité. Il voit même un elfe qui grimpe aussi vite qu’un de ses camarades Lycan. Ou alors, ce vieil elfe qui dispense son savoir à des jeunes loups en quête de connaissance. Quand il voit tout ça, il se dit que les différences ne sont rien et que la Meute est l’endroit où l’on vit, où on se sent chez soi et ce pour toutes les races de ce monde, et non uniquement pour la sienne.
Il sourit en pensant à tout ça et continue de suivre Laske à travers le village. Quelques mètres plus loin, ils passent devant la muraille du village. Manyia lui a expliqué que les monstres n’agissent jamais en plein jour et ne se montrent jamais près du village à cause de la barrière magique. Néanmoins, ils ont quand même érigés des défenses pour se protéger contre les monstres, mais aussi contre des bandits.
Astran voit plusieurs gardes armés de lances et dont les visages sont enveloppés dans des foulards et lui rappelle les Hommes du Désert qu’il a déjà rencontré par le passé. Ils portent des armures en cuir simple et l’un d’eux semble somnoler contre la barricade comme s’ils n’avaient pas grand-chose à faire. L’un d’eux les observe en train de longer la barrière.
Il adresse à Astran un signe de la main avec un léger sourire et il le lui rend. Ils doivent tous se connaître ici, c’est agréable d’être apprécié sans même qu’on nous connaisse et qu’il n’y ait pas de méfiance envers les étrangers.
Ils sortent des barricades avant de se diriger vers une modeste forêt de palmiers, débouchant sur un sentier en pente. Ils ne voient pas l’endroit où ils vont, mais ils commencent l’ascension, suivant son cousin qui a toujours l’air d’avoir l’esprit occupé. Sa femme le prend par le bras et il croise son regard. Il acquiesce à sa demande silencieuse. Il se met au niveau du louveteau et lui fais signe de le suivre. Ils se mettent sur le côté du chemin et il s’assoit sur un rocher à ses côtés.
- Tu sais, ce que tu as vu, commence-t-il.
- Quand tu t’es tordu de douleur ? C’est une malédiction, c’est ça ?
Il se met à regarder le sol en réfléchissant. Il n’a jamais vraiment pensé à savoir si c’était bel et bien une malédiction, mais en y pensant, ça pourrait être le cas. Néanmoins, pourquoi l’aurait-il reçu ? Si c’était pour avoir aidé son oncle à fuir le pays, alors tout le village serait maudit. Ou alors, peut être que c’est la conséquence de ce qu’il s’est passé, il y a quelques années. Il revoit ce qu’il s’est passé dans sa tête comme s’il y était. C’est aussi clair que de l’eau de roche, et il ne peut s’empêcher de se sentir mal. Mais, il a déjà connu les conséquences de son acte. Il secoue la tête pour se sortir de ses pensées et dit pour rassurer son cousin :
- Ce n’est pas une malédiction. C’est… juste un passage à vide. Peut être un pouvoir qui est en train de se réveiller. Mais, les douleurs ne dureront pas.
- Les Lycans peuvent avoir des pouvoirs ? Trop cool ! S’exclame-t-il avec enthousiasme.
Astran sourit et ébouriffe les cheveux de son cousin. Le petit dit alors, retrouvant son sérieux :
- Mais, comment tu peux être sûr que c’est ça ?
- Parce que j’ai confiance. J’ai confiance en notre Déesse. Elle ne ferait pas souffrir les siens inutilement.
- Tu as raison ! Les Lycans sont bénis par la Déesse Artémis. Alors, c’est peut être même une bénédiction que tu as reçu. Pour avoir aidé papa et maman à fuir le pays !
- Ah, je sens que l’on tient une piste ! Dit le jeune homme en embêtant son cousin.
Celui-ci se plaint, mais finit par rire et se relève en enjoignant Astran de le suivre. Sa femme les rejoint et ils continuent leur ascension. Au bout de quelques minutes, ils arrivent sur une pente descendante et ils voient, au milieu d’un bosquet en contrebas, l’autel qu’ils recherchent.
Alors, les cousins se mettent à faire la course jusqu’en bas. Malgré la jambe alitée d’Astran, qui fait attention à ne pas la surmener, le petit ne doit pas le sous-estimer et ils dévalent la cuve. Le garçon descend à toute vitesse suivi de près par Astran à cloche-pied, utilisant sa canne comme frein. Il finit par ralentir avec sa canne pour laisser gagner son cousin comme il le fait souvent. Il est heureux d’avoir remporté cette course et le jeune bestial lui promet de prendre sa revanche bientôt.
Puis, ils rejoignent le chemin composé de dalles blanches qui mène à l’autel. Il dénote totalement du reste du lieu et les ruines qui l’entourent font penser à Astran qu’il s’agit d’un ancien temple. Il s’avance à pas lents devant l’autel, celui-ci est entouré par deux colonnes blanches, couvertes de lierre.
Sur l’autel se trouve une statue d’une jeune femme avec un arc, accompagnée par un Lycan. A côté d’elle, une femme en robe prie sur un lit de fleurs. Ce sont les deux Déesses, celle de l’amour qui veille sur les Elfes Noirs, et celle de la chasse, qui veille sur les Lycans. Elles sont là comme représentation de l’alliance du village entre les deux races. Chaque village ou ville se doit de consacrer un endroit à ses Dieux ou Déesses. C’est pour cela que partout, on peut voir des autels comme celui-ci. Ils ne le paraissent pas mais ces autels sont très vieux, on dit que beaucoup sont l’œuvre des premiers habitants du monde. Et il arrive souvent que les temples autour finissent par être détruits. Mais, ils subsistent toujours les autels à la gloire des Divinités.
Astran s’agenouille devant l’autel, alors que Luna les rejoint. Elle fait de même et ils se mettent à prier. Le jeune Lycan veut interroger la Déesse au sujet de la marque, sur sa signification. Il pose la question dans tous les sens, sous toutes les formulations possibles, mais il n’obtient aucune réponse. Il soupire et rouvre les yeux avant de se lever.
Alors, il remarque qu’il n’est plus devant l’autel. Mais, devant une statue de pierre. Deux femmes sont agenouillées, la main liée à l’autre, une trace de larme coulant des yeux de chacune de ces femmes. Il remarque, d’ailleurs, que l’une d’elle est un Lycan et l’autre une Elfe Noire. Il a l’impression que ce ne sont pas de simples statues et une intuition étrange la pousse à les toucher. Il laisse son intuition prendre le dessus.
Soudain, son œil droit se met à s’illuminer, mais sans aucune douleur. Des images viennent s’imposer à son esprit et quatre autres personnes lui font face, dans ce qui semble être des portails. Dans le premier, il voit un homme en train de se battre, une auréole au-dessus de la tête. Une femme est tapie dans l’ombre, semblant épier quelqu’un dans le second. Au sein du troisième, une femme aux cheveux rouges soupire, assise sur un trône. Il y en a une autre au teint pâle et aux oreilles pointues qui prie dans une église en tenue de combat. Et dans le dernier, il voit une Elfe Noire à la chevelure de jais qui s’entraîne à la magie… avec le bâton qu’Astran lui a offert quand ils habitaient ensemble. Que fait-elle ici ?
Il revient à lui devant l’autel, le souffle court, se tenant la tête pour faire passer la sensation de tournis. Que s’est-il passé ? Pourquoi est-ce qu’il a vu toutes ces personnes qui lui sont inconnues ? Et pourquoi… pourquoi portent-elles toutes la même marque que lui ?!
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