Chapitre 1
Edgar et Georges penaient à émerger de leur soirée de la veille. Dans la cuisine de leur colocation bordelaise, ils buvaient un bol de café en silence, assis autour d’une table pliante que Danny avait fixé sous une fenêtre donnant sur rue. La rue était passante, surtout ce jour-là, le jour du marché, qui se tenait dans la rue perpendiculaire à la leur.
Les petites familles du quartier défilaient par la fenêtre et jetais naturellement quelques coup d'œil discrets. Ils tombaient alors sur ces deux guignols aux cheveux en pagaille, l’un en caleçon et t-shirt batman, l’autre emmitouflé dans une robe de chambre en matière synthétique premier prix. Deux filles de quinze passèrent, pouffèrent de rire, et leur mère leur dit d'avancer. Nos deux compères échangèrent un sourire amusé.
- J’ai une idée, dit Edgar
- Vas-y molo, Ed, je me réveille à peine.
- J’ai une faim de tous les diables, on va faire un grand festin.
- Original.
- Mais cette fois on va faire ça bien.
- Je crois qu’on est déjà pas mauvais dans ce jeu-là, dit Georges amusé. Cette semaine on a quand même fait le kilo de pâte à deux, le lapin de 10H pour 10 personnes et hier soir le saumon au champagne. Trois fois on a roulé sous la table mon vieux, trois fois. Et que tous les deux en plus, on invite jamais personne.
- A part nous deux personne n’est capable de suivre de toute façon.
- C’est pas faux. Quand je pense à Kevin. Tu te rappelles ?
- Ouai, il était pas bien le pauvre garçon. En même temps il a fait le malin sur la raclette, il allait beaucoup trop vite et ce n'était que l’entrée. Sans parler des verres de blanc qu’il descendait comme de l’eau. Bref, l’erreur des débutants, ça a mal fini. T’as des nouvelles d’ailleurs ?
- Non, depuis cette soirée impossible de l’avoir au téléphone. 3 semaines quand même, j’espère qu’il va mieux.
- On pratique un sport dangereux mon Georgy, c’est pas pour tout le monde. Faut mieux garder ça pour nous. Et puis c’est un budget.
- T’as peut-être raison. Bon et alors c’est quoi ton idée ? Le fameux homard à la cannelle qu’ils ont servi aux généreux en 45 après la signature de l’armistice ?
- On va créer un club.
- Tu viens pas justement de dire qu’il fallait qu’on fasse ça que tous les deux ?
- Si. Plus de copains qu’on invite comme ça pour essayer, ça c'est clair. Mais on peut faire un club qui propose d’apprendre, étape par étape jusqu’à pouvoir se faire les repas qu’on fait sans danger. On va recruter des membres et on va leur apprendre à manger beaucoup.
- Ca s’apprend pas ces choses-là, soit on est un ventre, soit on l’est pas.
- Si, j’ai vu une émission. Il y a des pros de classe mondiale. Aux US surtout. Des gens fins comme des brindilles qui s'engouffrent des veaux pour 10 personnes en 20 minutes. On va créer ça ici, à Bordeaux. Après tout c’est une ville de la bonne bouffe ici non ? Va t’habiller, on va voir le tenancier du marché pour essayer de trouver un petit emplacement.
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