Chapitre 18 - SACHA

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Les mini-ascenseurs se rétractent dans le sol, laissant les quarante-sept femmes éblouies par la luminosité, vulnérables au milieu de l'immense salle de bal.

C'est la première fois que je suis introduit ici, mais je connais déjà sur le bout des doigts le fonctionnement de ces festivités pour être le fils d'un Leader. Après tout, mes origines ne sont-elles pas dans un Sanctuaire similaire, bien qu'à des milliers de kilomètres de là ? Ma mère est morte en me donnant naissance, je l'ai appris de mon père, qui me l'a annoncé avec une certaine satisfaction perverse le jour de mes sept ans. Comme s'il attendait cet instant précis, comme s'il donnait plus de poids à ces paroles. Mais à l'époque, je connaissais déjà tout le maléfice qu'une femme peut représenter, et surtout, j'étais déjà endurci par l'éducation rigoureuse de mon père. Cette annonce ne m'a donc presque pas affecté : j'ai simplement eu le sentiment que justice avait été faite. Que c'était dans l'ordre naturel des choses.

Aujourd'hui, ma haine est toujours intacte, et depuis une demi-heure maintenant, immobile au même endroit, je n'attends qu'une seule chose : que la cabine notée 97, à quelques mètres à peine de moi, dévoile son contenu.

Ce qu'elle vient de faire il y a quelques secondes.

Ma respiration se bloque et je cligne des paupières tout en me demandant si je ne suis pas victime d'hallucinations. Je suis paralysé sur place, incapable de participer aux réjouissances et aux sifflements satisfaits, perverses, de tous les hommes dispersés dans l'immense salle. Forcé par mon propre corps à garder les yeux fixés sur ce qui vient d'apparaître. J'aimerais pouvoir simplement détourner le regard pour vérifier que je ne me suis pas trompé de numéro. Mais au fond de moi, je sais que je suis devant la bonne cabine.

Les paupières plissées, les mains rigides le long de son corps, Astrid ne m'a pas encore remarqué, drapée dans sa robe fourreau d'un rouge écarlate qui dévoile ses épaules fines. Des vagues de mousseline s'écrasent à ses pieds à l'infini en nombreux plis, tandis que le tissu se resserre autour de sa taille pour mettre en valeur ses hanches creuses. Le vêtement est parfaitement bien adapté pour compenser sa toute petite taille, qui contraste cependant toujours singulièrement avec les longues jambes galbées des autres femmes. Ses minuscules poignets croulent sous les bracelets, tous fins et délicatement travaillés dans les métaux les plus précieux. Ses ongles sont vernis d'une élégante couleur noire qui s'accorde avec le rouge de sa robe, et son annulaire gauche est orné d'une bague scintillante. Son cou, quant à lui, n'est décoré que par un unique mais superbe collier : une rivière de diamants qui tombe sur ses épaules et dans le creu de ses seins, eux-mêmes soulignés par un décolleté plongeant osé.

Mais le clou du spectacle reste sans aucun doute ses cheveux, mystérieusement repoussés : un chignon artistiquement élaboré retient la masse impressionnante de ses bouclettes brunes, presques noires, sur sa tête. Tandis que quelques mèches folles s'échappent pour venir se déposer dans son cou, d'autres, plus courtes, tombent sur son front en tourbillons. Quant à son visage, il me coupe littéralement le souffle : ses lèvres pleines, enduites d'un rouge qui fait écho à celui de sa robe, prennent plus que jamais la forme d'un coeur ; une autre touche légère de maquillage relève ses pommettes au milieu de son visage naturellement rond, créant sur ses joues un creux inhabituel mais qui renforce l'aspect adulte et séduisant de ses traits ; ses sourcils, parfaitement épilés, forment un angle encore plus aigu que d'habitude au-dessus de ses yeux ; à ses oreilles, dégagées par le chignon, pendent deux longs fils d'argent qui se balancent doucement sous l'effet de l'accélération qu'elle vient de subir dans l'ascenseur ; ses paupières sont fardées de bleu brillant mêlé à une teinte de violet profond, et ses cils sont rendus encore plus noirs par une couche discrète de mascara.

Dans ces apparats, qui mettent en valeur sa peau métissée, douce et brillante sous la lumière, son corps parfaitement équilibré prend l'allure de celui d'une déesse. Et au milieu de toute cette perfection, de toute cette beauté qui m'éblouit bien plus que la lumière, qui accroche le regard de chaque convive, qui fait touner toutes les têtes, je ne vois cependant que ses yeux nuages qui viennent enfin de se poser sur moi.

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