— Bon, ça fait un moment que je veux t’en parler et je pense que je suis comme toi…

— Comme moi… Tu veux dire quoi par-là ?

— Bah ça ne veut pas dire trente-six mille trucs non plus !

— Je vois pas trop en fait désolé…

—Je suis gay…

Son visage s’était décomposé, et il avait presque les larmes aux yeux. Un silence s’était installé dans la chambre, mais celui-ci fut brisé aussi vite par sa voix tremblante :

— Je…Je suis désolé.

— Mais non, t’excuse pas, je ne vois même pas pourquoi tu le fais.

— Bah t’es mon meilleur pote, ça fait hyper longtemps qu’on se connait maintenant, et je ne t’ai même pas dit que j’étais vraiment…

—T’inquiète pas pour ça, tu n’étais pas prêt à le dire c’est tout. Et hyper longtemps ou pas t’es toujours le nouveau, dis-je en riant.

Son sourire réapparut presque instantanément sur son visage, et il dit :

— T’es con toi.

— Je sais, je sais.

— Ça va les chevilles ? dit-il en riant.

— Oui, oui elles vont bien. Mais bref, tu le sais depuis quand.

— De quoi ?

— Bah que tu es homosexuel.

— Ah ça, depuis je sais pas… un an ou deux.

— D’accord.

À ce moment précis les phrases de sa mère prenaient une autre dimension.

— Et tes parents, ils le savent ?

— Bien sûr.

— Hum je vois, et simple question comme ça : t’as parlé de moi à ta mère ?

Il se mit instantanément à rougir et répondit :

— Pas grand-chose…

— C’est-à-dire ?

­— Que t’es mon meilleur ami c’est tout…

— T’es sûr, rien d’autre ?

— Oui…enfin…oui.

— Tu sais que tu mens très mal.

— Oui je sais, bredouilla-t-il.

— J’adore te taquiner. Mais bref, si tu ne veux pas me dire aucun problème.

— Merci, je te promets un jour je te dirai.

— T’inquiète pas pour ça, sinon on fait quoi maintenant ?

— Bah écoute, y’a trois options : soit on monte un groupe de musique là maintenant et on joue de la musique, soit on joue à la console et enfin troisième et dernière option, on prend nos vélos et on va faire un tour tu sais où.

— Alors… je ne sais ni chanter ni jouer d’un instrument enfin si je sais faire le petit bonhomme en mouse avec un kazoo, mais ça ne compte pas. La console je t’éclate à chaque fois, et je suis venu à pieds.

— Ahah, effectivement et si tu veux y’a le vélo de mon père.

— Je vais pas me permettre.

— Rho t’es chiant, suis-moi, dit-il en sortant de la chambre.

Il avançait avec un pas affirmé et rapide, j’avais presque du mal à la suivre. Il s’est rendu dans le salon dans lequel sa mère était en train de lire un livre.

— Maman ?

— Oui ? dit-elle en relevant la tête.

—Est-ce que Romain peux prendre le vélo de papa, il est venu à pieds et on voulait aller se balader à vélo ?

— Mais oui bien sûr.

—Tu vois je t’avais dit que tu pouvais, dit-il avec un sourire presque provocateur.

— C’est bon te la pète pas non plus parce que tu avais raison, et merci madame.

— Ne me remercie pas, et tu me fais penser que je ne me suis même pas présentée. Je m’appelle Christelle, dit-elle après s’être levée et m’avoir tendue la main.

Je lui ai serré la main, puis Pierre et moi sommes partis.

Après quelques minutes de vélo, il dit :

— Bon, on va où ?

—Bah je sais pas moi, c’est toi qui a voulu faire un tour.

— Pas faux… Ah j’ai une idée !

— Vas-y dis.

— Je vais te rendre la pareille, tu te souviens la première fois qu’on s’est parlé ?

— Ouais pourquoi ?

— Bah tu m’a payé un sandwich, et là je vais rembourser ma « dette ».

— T’es pas obligé, mais si ça te fait plaisir.

Nous avons pédalé pendant une bonne vingtaine de minutes avant d’arriver devant un Mac Donald. Une fois le pied à terre il me dit :

— Une glace ça te dit ?

— Pourquoi pas.

Après avoir pris notre commande, nous nous sommes rendus dans un coin que je connais bien, un petit banc en forêt avec un bras de rivière qui passait à côté.

C’est sur cette vue que nous avons dégusté nos glaces, du moins ce qui n’avait pas fondu.