Scellé.

Cela serait le mot adéquat qui serait le plus à même de définir si j'y réfléchis bien, autant émotionnellement puisqu'il a fermé son cœur à toute émotion positive qui dépendrait d'une autre personne, comme l'amour, l'amitié et autres synonymes, pour ne pas être blessé par les autres qu'ils soient humains ou Féériques car pour lui, ils pouvaient prétendre le contraire mais ils avaient le même cœur noirci de méchanceté ; que physiquement puisque ses lèvres ont été scellées par lui-même, non pas par un sortilège comme celui qu'a lancé Ursula à Ariel mais par un serment qu'il a fait, il y a nombre d'années, se contraignant, inconsciemment, à faire preuve de mutisme, aucun mot dépasserait ses lèvres jusqu'à ce que le scellement psychologique de sa bouche se retire – cette situation amène des moments improbables.

Malheureusement, il n'y a pas que ses lèvres et son cœur qui étaient scellés... Cet abruti avait réussi à se retrouver enfermer dans une prison crasseuse datant d'une époque bien trop éloignée pour qu'elle soit consignée dans les livres d'histoire actuelle – je parle bien évidemment du Moyen-Age. À peine sorti de prison d'une autre prison, après avoir survécu à ses nombreuses tribulations qu'il a vécues dans cet enfer, il se retrouve une nouvelle fois enfermé dans une geôle aussi insalubre que dans l'ancienne, à la différence près que celle-ci est d'origine Féérique et qu'il n'a plus la force d'effectuer une évasion d'une envergure similaire. Je vous en parle, je vous en parle mais peut-être vous voulez savoir ce qu'il s'est passé pour que notre cher héros se soit retrouvé deux fois enfermé en prison.

Vous savez, ce gamin, depuis qu'il avait quitté son village, a la fâcheuse habitude d'avoir la bougeotte, mais bon, ce n'est pas sa faute, il a aussi la déplaisante tendance d'attirer les ennuis à ses trousses. C'est pour ça qu'à peine qu'il ait quitté la Tour Eiffel VI, il se fait assommer par des chasseurs de prime, bien trop lâches pour se confronter à lui, guettant la moindre occasion pour s'en prendre à lui. Bien sûr, ils ne s'en étaient pas pris à lui de façon gratuite ! Le gamin avait non seulement la mauvaise habitude d'attirer les ennuis mais aussi de s'acoquiner avec les pires personnes existantes sur Terre, donc ces brigands ont cru que s'ils s'en prenaient à ce pauvre petit bonhomme, ils obtiendraient une grosse récompense à cause de la réputation de son « frère » mais tout ce qu'ils gagnèrent en l'emmenant dans la prison de l'Oranas a été de gagner, eux aussi, un séjour dans cette prison.

Au moins, il avait quitté cette lourde armure, il se sentait libéré d'un immense poids, ses mouvements étaient beaucoup plus fluides que lorsqu'il échappait à la chute de la Flèche Verte – attendez, il n'était pas tout simplement coincé dans son armure, en fait ?

Deux heures après leur arrivée, les corps dénudés et sans vie des chasseurs de prime ont été retrouvés dans leurs cellules et apparemment, ça ne serait pas du fait des autres détenus, mais des gardiens eux-mêmes – ces abrutis avaient des primes sur la tête (pas de quoi se payer une canette de Coca à l'époque actuelle), mais comme on dit : « on ne fait pas de petits profits » !

Le jeune garçon n'avait pas eu besoin d'apprendre la nouvelle du décès de ceux qui l'ont capturé pour comprendre qu'il était logé à la même enseigne que des types qui n'étaient absolument pas des enfants de chœur... Pourtant une partie de la population carcérale le craignait, sa description physique faisait écho aux rumeurs qui étaient contées au gré du vent ou par des piliers de bar : yeux rouges pourpres, dents acérées, toujours sous une capuche, mais surtout, ce visage indiscernable, comme s'il n'avait pas de visage discernable par cette « tâche » noire qui recouvrait aussi une grande partie de son corps. Sous cette capuche, on pouvait penser qu'il n'avait pas de visage et que ses yeux et sa bouche flottaient dans les airs.

C'est lui !

La terreur de Franca, la bête sanguinaire qui faisait pâlir les plus téméraires : l'Atroce Démon Sans Visage – ouais, à cette période, il n'était pas encore ce qu'on pourrait qualifier de héros.

Oui, je sais, je vous ai dit que c'était à cause de ses fréquentations que les gens s'en prenaient à lui, mais il est vrai que lui-même avait sa propre réputation bien ancrée dans l'esprit des gens, mais son physique bien "singulier" n'était pas inconnu à cette réputation qui s'était forgée autour de lui.

Quand certains le logeaient à la même enseigne que Baba Yaga, le croque-mitaine et la Dame Blanche – les combats fictifs entre lui et les légendes urbaines étaient très populaires dans la contrée, autant chez les jeunes que chez les parieurs grâce à des algorithmes et des personnages 3D qui avaient été codés pour organiser ces "combats" je serai vous, je ne parierai pas sur lui s'il est face au Chapelier Fou. Conseil d'ami) –, le hissant au rang de monstres de conte de fées – ironique, n'est-ce pas ? –, d'autres le prenaient très au sérieux, surtout ceux qui s'étaient déjà retrouvés face à lui ou qui avaient pu être témoins de ses exploits. Peu de ceux qui l'ont affronté peuvent vous relater la dangerosité de ce jeune homme, mais de ceux qui ont réussi à survivre à ses assauts, on sait que cet enfant, lorsqu'il se bat, a le regard d'un fou, des techniques mortelles jamais vues encore malgré son maniement de l'épée plutôt bâtard, son sourire carnassier et ses cris de bêtes sauvages quand un combat l'excite. Mais ce qu'on retient le plus souvent, c'est quand il n'aime pas une personne et qu'elle n'est pas à la hauteur ou que l'affrontement dure bien trop longtemps à son goût, vous pouvez oublier tout ce que je vous avais dit précédemment... Son attitude change du tout au tout, il obtient un regard dur et froid, son sourire disparaît dans l'ombre de son visage et son excitation disparaît, à ce moment-là, sa colère est à son paroxysme et il devient inarrêtable, révélant son véritable potentiel...

Voici l'homme – enfin, enfant – avide de combats toujours plus sensationnels que tous craignent.

Cependant, est-ce que ces racontars sur sa personne sont vrais ? Physiquement, il est comme on le décrit, mais dans sa psychologie... On verra cela plus tard. Pour l'instant, on va pouvoir l'observer évoluer dans son nouvel environnement.

En un simple coup d'œil, le héros remarque que l'infrastructure de cet édifice souterrain est humaine, pré-fusion des mondes, elle devait être d'un blanc immaculé avant que ces malpropres viennent. Les machines, qui servaient à surveiller les criminels, étaient toujours fonctionnelles bien qu'on puisse entendre le crépitement de leurs vieux circuits qui tournent, néanmoins, ils ont l'air bien inefficace face à des individus d'un gabarit digne des ogres et des orcs. Et on revient toujours au rapport de force entre individus : les gardiens de prison face aux détenus. Les premiers tenaient la prison d'une main de fer dans un gant de titane pour empêcher les seconds de faire leur loi dans la prison et anéantir l'ordre établi. Mais ils étaient imbus d'eux-mêmes, ayant une main mise sur toute la prison, les abus de pouvoir y étaient plus que fréquents, augmentant la frustration des prisonniers.

Et le héros allait devenir l'étincelle qui ferait exploser ce sinistre lieu.

Cela faisait déjà deux semaines que l'adolescent taciturne au visage de ténèbres était arrivé à Oranas, tous l'observaient, guettaient ses moindres mouvements, détenus comme gardiens, étaient à l'affut de ses gestes, même les plus minimes... pour que finalement, ils découvrent qu'il n'y avait rien à observer. Les habitudes et le comportement de celui qu'on surnommait communément le « Démon-Sans-Visage » était vraiment sans intérêt.

Sa journée pouvait se résumer à dormir, manger, lire des livres – et c'était un grand lecteur ! –, réparer les robots dysfonctionnels que l'administration peinaient à faire eux-mêmes et dormir.

Rien de grandiose en somme pour celui qu'on décrit comme étant capable de pétrifier de terreur les gorgones.

La seule chose qu'ils pouvaient qualifier d'étrange chez lui, c'était le fait que, depuis qu'il s'était mis à les réparer, ces machines qui étaient en fait des robots-gardiens le suivaient partout où il allait, comme de vaillants toutous – ou des patapons pour les fins connaisseurs.

Nombre sont ceux qui se sont tentés à l'inviter dans leurs « groupes » - c'étaient plutôt... voire carrément des gangs, en fait –, mais ils ne reçurent qu'un simple détournement de regard ou un secouement de main voire, lorsqu'il était plus loquace, un secouement de tête pour exprimer son refus.

Plus les semaines passaient, plus une déception commune se créait au sein du bâtiment, autant chez les matons que chez les taulards. Il passa de « Démon-Sans-Visage » au « Berger des Machines ».

Certains pensaient, pour les plus optimistes d'entre eux, qu'il était en train de se rassembler une armée pour renverser cet endroit.

Malheureusement, leurs espoirs devinrent vains lorsqu'ils comprirent et surent de sources sures qu'ils n'emploieraient pas les androïdes contre l'autorité carcérale, cela fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase pour les bagnards, pour eux, la réputation du futur Héros était surfaite. C'est un putain d'intello ! Pouvait-on entendre dans les couloirs de la prison. Toute la frustration commune de l'institution carcérale allait être déferlée sur le garçon...

Alors qu'il était dans sa chambre, lisant son bouquin comme à son habitude, ravi de la quiétude qu'il avait, les bandits de la prison d'Oranas vinrent le chercher dans sa cellule et le jette en dehors, sans vergogne et aucune pitié. Déboussolé, il ne réalise tout d'abord pas ce qui venait de lui arriver. L'un des taulards les plus costauds, un ogre aux crocs rouges, les yeux injectés et aux mains poreuses et sales, ses mains étaient si répugnantes à la vue du Héros, lui qui ne supportait pas que les gens puissent le toucher, avait une folle envie de faire goûter le sol à cet impertinent, mais il devait se retenir et faire profil bas pour pouvoir sortir le plus rapidement possible.

L'ogre le souleva hors du sol le prenant par le col et tenta de l'obliger à se défendre pour qu'il prouve ce qu'il est censé être en tentant de l'intimider. Le regard du Héros à son égard était inflexible, vide de toute émotion, il le fixait sans même le regarder, la signification de ce regard pour les prisonniers fut interprété par de l'arrogance et de l'effronterie – et ils n'avaient pas tort, il les regardait bien de haut, sans parler de son actuelle position –, ce qui énerva plus haut point le grand gaillard qui le jeta par terre et lui écrasa la jambe, y mettant toute sa frustration, l'enfant se tordit de douleurs mais ne poussa aucun cri, il se retint de toutes ses forces de le faire, mais cela était si difficile avec toutes les blessures qu'il avait sur le corps – c'était l'une des raisons pour lesquelles il ne supportait pas qu'on le touche.

Puis les autres détenus, voyant l'impuissance du fameux monstre vinrent se joindre à la brimade du jeune garçon. Malgré les bastonnades qu'il subit, le Héros se refusa à se défendre, il en avait assez de se battre, ça n'en finissait jamais, il s'était réservé ses prochaines victimes et ne romprait pas sa promesse pour de vulgaires taulards. Tous expriment leur mépris et leur dégoût vis-à-vis du jeune garçon, en l'injuriant, en le rouant de coups, lui crachant dessus, ils lui sommaient de se défendre, autant verbalement que physiquement, mais il n'en fit rien. Ses os se brisaient sous le martellement des coups, sa chair se déchirait, ses joues se trouaient contre ses dents, ses doigts se tordaient sous les coups de leurs bottes, de leurs poings et autres objets contondants, ses lèvres et ses yeux gonflèrent sous l'acharnement de ses assaillants... Tout cela parce que ces couards avaient pris peur de la réputation d'un enfant n'ayant même pas atteint l'âge adulte.

Cela avait dû durer une heure sans que personne ne s'interpose, sans que quelqu'un ne daigne intervenir, laissant l'enfant se faire battre jusqu'à la lassitude de ses tortionnaires. Ils crachèrent tous avant de s'en aller le même mot à l'encontre du jeune garçon avec une voix remplie de dégoût : « Pathétique » – ça devait être le même genre de sentiment que devait ressentir les fans de la première heure d'une super star lorsqu'il se mettait à changer de registre musical pour faire plus de ventes (oui, c'est du vécu).

Laissé pour mort, une fois que tout le monde était retourné vaquer à ses occupations ennuyeuses et sans intérêts, le garçon encapuché se releva à l'aide de ses bras tordus, ses chevilles étaient cassées et ses doigts brisés. Il était insoutenable pour lui de se tenir debout, la douleur était bien trop grande, encore plus lorsqu'il se mit à marcher, pourtant il devait le faire pour rejoindre l'infirmerie puisque personne ne comptait lui prêter main-forte. Là-bas, il trouverait forcément de quoi se rafistoler complètement au lieu de laisser faire le temps...

Il s'y rendit avec toute la force du désespoir qu'il avait en lui, poussa la porte d'un blanc immaculé qui dénotait complètement avec le vert pain qui colorait toute la prison – la couleur ne devait pas être d'origine vu que les robots et les escaliers de la prison étaient d'un blanc aussi parfait que celui de la porte de l'infirmerie. Le Héros trouva, assis face à un bureau, un homme au crâne dégarni, une fine bande de cheveux gris lui couvrait le bas du crâne.

Le garçon s'allongea sur l'un des lits de patients, à bout de souffle, ayant usé toutes ses forces dans sa longue quête de soin. Il tapa sur les bords du lit pour alerter le médecin de sa présence. Celui-ci vint à la vitesse d'une tortue sur un lit de limace, un vieillard à la longue moustache grisonnant avec des lunettes où transparaissait son regard vitreux.

Un homme de confiance, si je puis dire.

Le Héros blessé avait l'air autant confiance de revoir Zelda qu'en cet homme.

Il lui indiqua le chariot où se trouvait le matériel adéquat pour soigner ses blessures.

- Oui, je vais vous soigner, dit l'homme en se tournant vers le chariot.

Le docteur amena le chariot et le garçon s'en saisit, il prit de l'alcool 90°, du coton, une aiguille et du fil, il se remit les os, qui étaient déplacés, en place puis procéda à se soigner ses plaies lui-même.

- Donc tu comptes le faire tout seul ? s'étonna le vieil homme, soit. Ce n'est pas mon problème si tu meurs d'une infection.

Il s'éloignait du garçon mais l'observait du coin de l'œil, et vit quelques bizarreries sur le corps du jeune homme.

Déjà, révélation, la « Noirceur » s'étendait jusqu'à sa poitrine et l'intérieur de ses jambes. Cette « Noirceur » remettait en question la théorie qu'une grande majorité de personnes qui avait croisé la route du Héros adhérait : le Démon-Sans-Visage serait un homme invisible – débile, mais ce n'est pas moi qui fais les rumeurs, je ne fais que les relater ! De plus, cela ne fait aucun sens vu que de profil, on distinguait bien le profil de son nez ! Leurs arguments étaient que l'ombre que projetait sa capuche sur son visage était celle-là même qui rendait son visage noir et cela expliquait pourquoi il portait des bandages autour des mains, des bras et des gants aux mains.

Pourtant, de ce que voit le docteur, le Garçon a une peau commune à tous les humanoïdes tels que les humains, elfes, fées et j'en passe, qui est mat mais qui est bien en mauvaise santé, puisqu'elle était couverte de grisaille.

Le docteur est impressionné par la dextérité et l'agilité dont il fait preuve dans chacun de ses mouvements, il ne regarde presque pas où va sa main, comme s'il connaissait son corps meurtri comme sa poche.

Dès que ses soins prirent fins, il se mit debout et rendit le matériel que lui avait fourni le médecin, hocha la tête en guise de remerciement et s'endormit sur le lit. Le docteur était admiratif de la précision avec laquelle il avait réussi à se raccommoder, il se demandait bien comment un aussi jeune enfant puisse avoir des connaissances aussi poussées pour pouvoir se soigner sans l'aide de personne, il n'était pas assez superstitieux pour penser que ce bambin puisse être un démon sortit des abysses pour semer la désolation et la discorde comme suggéraient les rumeurs. Bien que le professeur De Brunsmark ne pouvait pas nier l'existence de la magie au vu du nouveau monde qui s'était formé durant sa cryogénisation, lui qui préparait sa thèse sur les Brand New Men, des hommes qui seraient capables de voyager à travers la galaxie, s'est retrouvé sorti de son sommeil dans un monde tiré de l'imagination d'un cinglé, remettant en question toute ses croyances et certitudes, et avec le peu de choses qui a été gardé du passé, il ne savait presque rien de ce monde. Ses yeux ne se sont plus illuminés de joie depuis fort longtemps.

Mais il y a bien une chose dont il était certain, c'était que l'habitude de l'Homme a toujours vouloir trouver un bouc-émissaire à ses maux à cause de quelque chose d'inexplicable était bien encore vivace – cela valait aussi pour les Féériques dans une tout autre mesure – et ce garçon en était la preuve.

Endormi comme il est, il en profiterait bien pour l'ausculter et comprendre le fonctionnement de cet étrange corps que possède ce garçon, mais lui qui prétendait être hors de toute cette manipulation de l'esprit provenant de rumeurs sans fond, était sujet à ces mêmes appréhensions et n'osa pas toucher le garçon au risque qu'un malheur puisse lui arriver, il préféra retourner œuvrer à d'autres occupations.