La mort d'Elena
Zelda était encore dans le bus, sous le choc de ce qu'elle venait de voir, elle savait que le Héros était fort, mais pas à ce point, ce n'était pas normal qu'un enfant puisse briser la fenêtre d'un bus avec simplement sa force.
Elle le savait extraordinaire mais pas à ce point, peut-être détenait-il un attribut génétique comme les derniers humains modifiés ? Cette chose aurait dû déjà disparaître avec les millénaires qui nous séparent des humains modifiés, ça aurait dû même plus valoir moins de 0,01%...
Même s'il était fort, elle n'allait pas le laisser tout seul dans cette ville en flamme. De toute manière, il était la seule personne à qui elle tenait, et n'avait aucune envie de se retrouver toute seule dans un endroit inconnu sans son ami... son petit frère.
Mère Thérèsa hurla à la Sœur qui conduisait leur bus de s'arrêter, ce fut au bout de la troisième fois qu'elle prit en compte la parole de la Matriarche.
- Pourquoi tu ne veux pas t'arrêter ?
- Parce que nous devons nous éloigner le plus vite possible de Novillios, lui rétorqua la Sœur, vous ne sentez pas cette aura maléfique qui se dégage de ce lieu ? J'en ai des frissons qui parcourent mon corps tout entier.
- Mais le petit d'Elena a sauté du bus pour rejoindre sa mère. On doit le ramener !
- Non.
- Pourquoi ?
- Avec tout le respect que je vous dois Mère Supérieure, je ne peux pas faire demi-tour en mettant en danger toutes les Sœurs qui sont à bord. Sœur Elena est l'héroïne de la légende, elle est la seule à même de pouvoir combattre le Némésis et ne pas se retrouver corrompue, s'il y a bien quelqu'un capable de protéger son fils, c'est elle-même. Il sera au moins la raison pour laquelle elle reviendra.
Zelda en profita pour sauter hors du bus par la fenêtre brisée par le garçon pour s'en enfuir et repartir en direction du village, la Matriarche la remarqua trop tard, elle voulut descendre à sa poursuite, mais les autres Sœurs la retinrent.
La Mère Supérieure laissa passer un juron et dit :
- Pourquoi ces enfants se comportent aussi stupidement ?
- Peut-être sont-ils la cause du retour de notre Sœur. En attendant, nous devons nous rendre en sécurité et rattraper les autres bus.
La vieille femme observa la jeune fille courir à sa perte, rejoignant Novillios, mais céda face aux injonctions des filles. Elle retourna à sa place et Sœur Deliane reprit sa route. Elle demanda à toutes les Sœurs de prier pour qu'Elena et les deux enfants puissent s'en sortir et finissent par les rejoindre dans la prochaine ville où ils habiteront : Octobre.
~
Au cœur des flammes, des cendres, des décombres, du sang, des cadavres et des monstres combattaient les deux « illustres » légendes de Fayiera Terra : l'héroïne de la légende et le serviteur du Malin, le Némésis.
Ayant enfilé son armure de sainte, coiffée d'une couronne d'épines hautes sur un voile blanc de nonne avec des étoiles dorées cerclés lui couvrant les cheveux. Au milieu de la spalière se situait une croix, et elle allait jusqu'à sa cage thoracique et jusqu'à l'une de ses omoplates, sur son coude de bras d'armure se situait un bouclier avec un pique en son milieu, vers les extrémités se trouvaient des pyramides de la même couleur d'argent, un gantelet à une forme plus qu'agressif de fer et d'or sur tout le bras. Elle est ceinturée du côté des droits des cercles de fer et d'or en cercles concentriques avec du rouge pourpre et une ceinture pendante de croix christiques. Son bras gauche est enroulé de ceintures qui sont attachées avec des étoiles.
L'Épée de l'Éternel se métamorphose et une figure du Christ s'y situe de la fusée de l'épée jusqu'à la moitié de la gouttière, celui-ci était enroulé de lianes d'épines, la fusée prenait la forme d'un épi de blé jaune ambre avec un pommeau dont le centre était un rubis et entouré d'or, cette boule en guise de pommeau se trouvait aux extrémités de sa garde. Cette épée était perlée de rubis, dont la structure était aussi faite d'or et la lame prenait la forme d'une flèche avec à son sommet une énième croix.
La voilà vêtue de façon complète avec son armure héroïque de sainte, le front peinturlé d'un liquide rouge, les yeux lumineux grâce au pouvoir du héros de la légende, brulant de fureur face à son ennemi de toujours : le Némésis.
Elena allait en découdre pour la deuxième et dernière fois avec l'ennemi de l'humanité Féérique.
Cependant, son coup d'estoc échoua et elle finit au sol, derrière le Némésis qui avait juste fait un pas en avant.
- Tu me déçois. À notre première rencontre tu avais plus de hargne pour vivre. Serait-ce à cause de ce gamin ? Je peux t'en débarrasser, tu sais. Mais je pense que c'est autre chose, quelque chose que toi et moi savons : le décompte est bientôt écoulé.
Elena se releva et essuya la crasse qui recouvrait sa robe d'armure en un coup de vent.
- Je suis juste rouillée, mais si tu veux tant que ça que je te mette une raclée comme le petit chenapan que tu es. Comme quand j'avais dix ans. Je ne savais pas que t'aimais te faire tabasser par des jeunettes mineures, mais, sur les champs de bataille d'Eden. Bon, je ne peux pas vraiment t'en porter préjudice, ça doit venir de ce nouveau cadavre que tu as corrompu, se moqua-t-elle.
- Même aux portes de la mort, tu n'arrives pas à te transcender pour faire une blague correcte. Pauvre de toi.
- J'aurai encore le temps d'apprendre à être marrante quand je t'aurai rétamé toi... et tes foutus monstres cadavériques qui nous entourent.
Émergeant des ténèbres, les corps ombragés, une armée de monstres corrompus, certains se rapprochant du corps humains, d'autres transcendant l'effroyable et le cauchemardesque – si pouviez voir mais vous ne pouvez pas, il y a Albedo Wata dans le fond à gauche, en direction de la forêt.
Le garçon était terrifié par toutes ces présences maléfiques. Il en avait vu des monstres, des abominables, mais aucun, même ceux qui se rapprochaient le plus de ce qu'il connaissait, n'atteignait la torpeur que ceux lui mettaient. Sa respiration était saccadée, et à tout moment, il pouvait rentrer en apnée pour mourir de peur. Son instinct lui dictait de faire tout ce qu'il pouvait pour ne pas se faire remarquer par ces monstruosités en se mêlant au décor et en faisant le moins de bruit possible.
Elena ressentait la peur de son fils. Elle aurait voulu écourter ce combat le plus vite possible, mais son adversaire n'était pas n'importe qui. Bien qu'il ne soit pas le terrible Maléfique, il n'en restait pas moins le plus terrible des Némésis : Némésis Prime.
Mais les autres figurants, qu'ils soient ses généraux ou non, ils n'avaient pas le niveau pour m... l'affronter !
Les Némésis foncèrent sur l'héroïne, elle contra deux d'entre eux avec ses avant-bras et les repoussa en déployant son énergie magique. Elle rangea son épée pour le moment et prit sa double faux à chaine à travers son armure, lui fit créer un cercle en l'enfonçant dans le sol, créant un nuage de fumée.
Certains monstres-Némésis lui lancèrent des boules de feu, pendant que d'autres mages-Némésis préparaient des sorts surpuissants, l'héroïne sortit de l'écran de fumée et attrapa l'un des mages à l'aide de l'une de ses mini faux, enroulant la chaine immatérielle autour de son cou. Elle l'approcha d'elle et lui enfonça ses pieds dans le ventre pour prendre appui sur lui et le décapiter en lui arrachant sa tête.
Elle poursuivit son assaut en tranchant deux d'entre eux avant de s'en prendre aux Boursures, Plitarcs et harpies non loin qui n'avaient pas encore pris part au combat. Sautant d'ennemi en ennemi, combattant ces créatures avec force et vigueur, elle était aussi rapide que la foudre et aussi agile et adroite que la plus grande des gymnastes, malgré cette lourde et encombrante armure qu'elle portait sur ses épaules.
Malheureusement, ce n'était pas suffisant, sans utiliser son arme héroïque, ils revenaient d'entre les morts en se régénérant de leurs blessures.
Et sans crier gare, elle fut attaquée dans le dos et projetée contre le sol, elle tenta de se relever, tout en apercevant la source de cette attaque traîtresse.
Cet être malfaisant qu'était le Némésis avait réussi à rallier à sa cause le défunt roi des trolls, Morkinkan, équipé de Stelenincia, pur fruit de la technologie de décennies antérieures et de magie ancestrale. L'arme technomagique qui avait réussi à le tuer, il avait la trace de sa mort sur sa figure – puisqu'une partie de sa face n'était pas parallèle à l'autre, ni son nez crochu, pointu et pustuleux.
Elena n'aurait jamais cru croiser ses yeux jaunes et vitreux dans sa vie, mais aussi, découvrir que ce monstre était armé de l'épée du héros Torn qui avait donné sa vie pour l'abattre.
- Tu ne recules devant rien, Némésis, hein ?
- Non, répondit Albedo Wata-Némésis atterrissant sur l'héroïne en lui enserrant le cou avec sa longue queue de serpent méduse, pourquoi je me restreindrai à former une armée de vils salopards comme moi pour votre bon plaisir à vous les héros ? Et tu le sais qui se ressemble, s'assemble, ria-t-il à travers cette chimère.
Elle accentua l'étreinte qu'elle avait sur la trachée de la Sœur. Il devenait de plus en plus difficile pour elle de pouvoir respirer correctement, elle essaya d'enlever cette terrible queue écailleuse de sa gorge que celle-ci lui râpait le cou, mais elle perdait de plus en plus de force.
Allait-elle vraiment mourir ainsi ?
Sans un son de cloche véritable ?
Ce n'était pas comme ça que devait mourir un héros !
Et pourtant... les autres héros avaient eu des morts bien plus impitoyables que la sienne... qu'ils aient combattu jusqu'au bout, trahi l'humanité, ou l'aient abandonnée dans un élan de lâcheté comme elle l'avait fait... Il était rare que nombre d'entre eux aient eu droit à une mort glorieuse. Le plus souvent, ils étaient désespérés au point de supplier aux Némésis de les achever.
Mais même la mort ne leur a pas été permise...
Nous, les héros, sommes contraints de vivre pour faire perdurer la Volonté du héros de la légende, et celle-ci est aidée par le Destin qui est une force dépassant notre propre volonté et libre-arbitre. Nous pouvons avoir une certaine marge de manœuvre mais cela était à nos risques et périls, avoir une famille, des amis, des enfants... tout en assumant le rôle de héros de la légende était bien trop risqué et stupide pour que nous puissions, mais notre nature humaine ou autre pour certains ne pouvait se résigner à vivre seul.
Elle non plus, elle ne pouvait pas vivre seule. Car la solitude vous ronge le cœur jusqu'à votre âme, ce garçon était une bluette qu'elle allait faire croître pour donner un grand brasier capable de me réchauffer. Était-ce égoïste ? Elle ne sait pas. Non ! Dire qu'elle ne savait était un mensonge éhonté ! C'était bien sûr de l'égoïsme ! C'était comme si elle avait profité de lui et de son désespoir pour se sentir mieux... Tout ce qu'elle voulait c'était que mon cœur ressuscite...
Et Zelda... Elle était comme Audisélia. Elle lui vouait une admiration sans borne sans savoir les sacrifices que les héros de la légende devaient endurer. Ils avaient droit qu'aux légendes fantasmagoriques qui encensaient leurs exploits. Toutes les deux voulaient la rejoindre dans ses aventures, mais Elena ne pouvait se résoudre à les mêler à un danger pareil. Quelque fut leur force mentale, physique ou magique... Elle avait à peine daigné entraîner Zelda pour qu'elle sache mieux se défendre mais cette vie héroïque qu'elle se devait de vivre elle l'avait rejeté de toutes ses forces.
Mais voilà que maintenant, cette vie l'avait rattrapée.
Malheureusement, elle n'avait plus assez de force pour se battre.
C'était sa fin.
Elle n'était pas l'élue choisie par la Volonté du héros.
Il allait devoir en trouver un autre et la laisser dépérir.
Perdant petit à petit connaissance, l'air lui manquant, elle était à deux doigts de s'abandonner à la mort...
Lorsque dans les ténèbres de son esprit, elle entendit des petits cris l'interpeller. Ces petits cris devenaient de plus en plus violents, de plus en plus désespérés, de plus en plus forts jusqu'à qu'elle en distincte des mots, puis une phrase. Elle rouvrit les yeux et vit son fils lui crier :
- Maman ! N'abandonne pas !
« Tu sais, mon garçon, même si tu es malade et que cela se voit, tu n'as pas à abandonner l'idée de vivre car quoi qu'il arrive, quelqu'un t'aimera malgré tes défauts. »
C'étaient les mots qu'elle lui avait dit le jour de la rentrée après que l'une de ses blessures se soit ouverte.
- Donc tu ne t'es pas enfui, gamin stupide ? déclara Némésis Prime qui sortit du mur où il avait été enfoncé.
L'héroïne se débattait du mieux qu'elle pouvait pour retirer cette queue écailleuse qu'elle avait autour du cou, mais plus elle le faisait, plus la chimère polyforme resserrait son étreinte.
Némésis s'approchait de l'enfant avec un rictus sadique, il éleva son arme, Blitzstrike, dans les airs et allait la faire s'abattre sur le gamin horrifié, lorsque soudain il fut sauvé in-extremis par Zelda qui se fît brûler la jambe.
Le garçon se jeta sur son amie pour utiliser son corps comme bouclier humain, il demanda à Zelda si elle allait bien.
- Ça me brule de fou, on dirait que ma jambe passe sur un grill.
Elena ouvrit de grands yeux en voyant la mort avoir été à deux doigts de lui retirer son enfant.
« Le plus souvent, on demande aux enfants de se dépasser car ils sont capables de bien plus, mais nous aussi, en tant que parents, on doit savoir se dépasser pour eux. » étaient les dernières paroles de Sœur Leïla avant de les quitter, quelques jours après l'arrivée d'Elena et de son fils.
- Comment... pourrais-je... dire... un enfant de ne... pas perdre foi... de ne pas abandonner... et de se dépasser... alors que je suis en train de faire ce que je lui reproche ? s'emporta Elena, peu importe que l'utiliser me vide de mon essence héroïque, je ne laisserai... aucun de ses deux... enfants mourir sous mes yeux... Némésis !
Elle pointa son doigt derrière elle et le leva avec son autre main au ciel et hurla avec le reste de souffle qu'il lui restait :
- Lève-toi dans le ciel et abats-toi sur mes ennemis, Épée de l'Éternel !
La grande épée qu'elle avait mis sur son dos sol pour utiliser ses faux, s'éleva dans le ciel et s'abattit sur la queue de la gorgone-succube, la trancha comme s'il n'y a rien en dessus. Elle délia la queue qui lui entourait le cou avant de se saisir d'Albedo Wata par la gorge et de la fracasser contre le sol à plusieurs reprises et lui saisir sa queue coupée pour la balançant de gauche à droite, avant de la tourner dans tous les sens et de l'envoyer comme un marteau olympique contre Némésis Prime.
À peine reprit-elle son souffle après la strangulation de la Némésis chimère, qu'elle fut assaillie par des gobelins sortis de nulle part, envoyés par le roi des trolls. Elle les esquiva en attrapant son épée, brisa la chaine de ses deux faux, attacha une partie au manche de l'épée et enroula l'autre autour de son bras. Les gobelins se jetèrent sur elle, elle les découpa en faisant tournoyer son épée autour d'elle.
Les mages lui lancèrent des boules de feu qu'elle stoppa en plein vol avec sa main.
- Pauvres idiots. Utiliser des sorts de feu contre moi qui maîtrise les flammes, vous vous partagez toujours un cerveau par la cinquantaine d'entre vous ? C'est affligeant, se moqua-t-elle, Premier miracle des flammes : flèches de feu.
Les boules de feu s'élancèrent contre leurs invocateurs, les transperçant avant de les carboniser.
Malgré la douleur, Zelda était subjuguée par les prouesses au combat de la mère de son ami. Elle était bien celle qui était louée et glorifiée dans les légendes.
Derrière elle, le roi des trolls rejoignit la terre ferme en sautant du perchoir où il s'était retrouvé et utilisa Stelenincia contre l'héroïne en envoyant des lames de foudre grâce à l'épée.
Il y avait encore assez de pouvoirs magiques appartenant à Audisélia pour qu'il puisse exécuter des attaques grâce à elle ? se demanda Elena.
Elle esquiva les lames en déplaçant à peine son corps de gauche à droite, et dès que l'arme fut complètement vidée, elle passa à l'offensive et lui fonça dessus en lui enfonçant son poing dans la figure. Le coup fut si puissant qu'il l'envoya valser trente mètres plus loin et lui divisa, au passage, son visage en deux.
Une harpie tenta de la prendre à revers mais elle lui attrapa le crâne et l'explosa contre la barricade d'une maison détruite.
Elle ramassa l'arme de Torn et la prit pour arme pour combattre avec deux épées. Elle y insuffla toute sa magie pour pouvoir l'utiliser à son plein potentiel.
Elena se tourna vers les deux enfants :
- Allez vous réfugier plus loin, le temps que je finisse le ménage ici. Puis on partira rejoindre les villageois là où ils sont allés.
Le garçon hocha la tête et soutint Zelda pour l'aider à marcher malgré la douleur qui lui transperçait tout le corps. Mais si sa mère avait repris les armes, alors il se devait de fournir un effort aussi conséquent que le sien à son échelle.
Oui. Sa mère avait repris les armes, celle qu'on surnommait la « Mort » parmi les Bantoues à Eden, le continent au-delà de la Méditerranée, ressuscita de ses cendres. Elle comptait bien faire passer un mauvais quart d'heure à ses empaffés de Némésis pour qu'ils la laissent tranquille elle et ses enfants.
Elle combattait aussi bien dans les airs que sur le sol, tranchant la chair de ses créatures putrides, arrachant les ailes de ses harpies qui la harcelaient de leurs serres acérées en les affrontant sur leurs terrains, sautant d'harpies en harpies.
Avec ses genoux, elle brisait la carapace des Boursures, des lézards créés par les Némésis pour leur servir de « chien d'attaque », ils étaient recouverts d'une roche aussi dure que l'acier qui leur servait autant de protection que d'armes avec leurs griffes acérées. Et trucidait les Plitarcs, des sauvages qui avaient été corrompus par l'essence du mal, ils servaient désormais, corps et âme, leurs maîtres adorés – et petite note drôle mais pas marrante : ils appréciaient de façon maladive la chair fraîche comme le Némésis.
Elle se démenait comme elle le pouvait, se transcendant pour faire face à cette armée d'immortelles monstruosités, mais ça n'en finissait jamais. Elle pouvait bien les estropier, les carboniser, les décapiter, les pulvériser... Ils arrivaient toujours à se remettre debout tant bien que mal, et eux n'arrivaient pas à percer sa défense qu'elle créait en faisant tournoyer l'épée avec la chaine qu'elle y avait accrochée. Elle commençait à être essoufflée, mais le souvenir d'avoir vu son fils être à deux doigts d'être fauché lui redonnait du courage. Un courage qu'elle n'avait jamais connu auparavant, donc ils pourraient être dix, vingt, trente, quarante, cent, deux cents, six cents, un million... elle continuerait à se battre.
Mais elle devait se rendre à l'évidence : elle ne pourrait jamais fuir dans ces conditions. Elle allait devoir, peut-être, elle aussi, trahir l'humanité pour pouvoir laisser une chance aux deux enfants de pouvoir s'échapper.
Se remettant de son ko, Némésis Prime se releva en dégageant le corps d'Albedo Wata, il vit sur le sol les pieds du roi des trolls qui étaient restés là en abandonnant le reste de son corps, expliquant pourquoi il n'était toujours pas revenu. Il avait réussi à le corrompre, mais il était un déchet, il n'avait pas réussi à lui faire acquérir leur régénération infinie. Il observait à bonne distance le combat d'Elena contre ses monstres et ses généraux, et il vit dans son regard, cette férocité qu'il avait vue lorsqu'elle avait réussi à le vaincre pour la première lorsqu'elle avait dix ans au Kongo. Malgré les années et les épreuves, elle n'était toujours pas devenue un bon réceptacle pour le Maléfique. C'était un total échec.
Devait-il reculer avant qu'elle puisse le tuer ?
C'était inconcevable.
Toutefois, elle s'était mise à utiliser des miracles, la seule « magie » capable de vaincre des malédictions grâce à la foi. Bien que ça soit le pouvoir le plus instable car dans un moment de doute, ils pouvaient s'annuler en un rien de temps, mais au paroxysme de leurs puissances, elle pourrait demander à une montagne de se jeter dans la mer qu'elle le ferait. La différence avec la magie conventionnelle, c'était que c'était tout ou rien, ce n'était pas une simple acquisition de pouvoirs grâce à la maîtrise d'arts mystiques ou l'emprunt de pouvoir obtenu de la part d'un dieu... Non. Là, c'était de la foi pure, que cela soit en un dieu ou en sa détermination de survivre, cette foi lui permettait d'accomplir n'importe quel miracle. Surtout qu'elle était un prodige du combat, donc si sa foi augmentait encore et encore, elle pourrait, peut-être, contrer le Destin s'il n'est pas un ordre divin.
Le Némésis ordonna à ses troupes d'arrêter le combat et s'approcha d'Elena.
- J'ai un marché à te proposer, dit le chevalier Némésis.
- Non, rétorqua froidement Elena.
- Laisse-moi parler.
- Non. Je vais te démembrer ici et maintenant, tout ce qui sortira de ta bouche ne sera que vilenies et balivernes, l'invectiva l'héroïne.
- Je ne pense pas que tu puisses te permettre ce genre de remarque alors que tu as deux poids morts là-bas.
Elena lui lança un regard noir, s'il s'en prenait à l'un des deux en voulant les utiliser comme otage, elle le réduirait en charpie autant de fois qu'il le faudra pour qu'elle puisse avoir la certitude d'avoir la paix.
- Je vais t'écouter mais à la moindre entourloupe, je vous transforme en brochettes de brahamine.
- Tu vois que tu sais être raisonnable quand tu veux, la complimenta-t-il avec anxiété, foutre le feu aux villes sur mon passage, tabasser des humains et des Féériques, et les souiller n'est qu'un passe-temps. Toi et moi, étant liés par le Destin, savons quel est mon véritable objectif : faire de toi l'une des nôtres pour que tu deviennes un corps de substitution pour mon maître. Donc je n'ai aucune raison de m'en prendre à tes enfants, tu me suis jusque-là ?
- Oui.
- Donc le marché que je te propose c'est de m'affronter en un contre un, si tu gagnes, je te laisse t'en aller avec tes mômes et je « perdrai ta trace », mais si je gagne, tu es à moi. Toutefois, je sais me montrer bon quand je le souhaite, par conséquent, en aucun cas, je les tuerai.
Si elle parvenait à exploiter la pleine puissance de sa foi, elle réussirait à...
- ...à nous exorciser ? le coupa-t-elle dans les fils dans sa réflexion, nous faire disparaître ? Ne t'inquiète pas, notre lien est bien trop fort pour que je le brise sans conséquence. Cela aurait été le Maléfique, j'aurais pu le vaincre avec peut-être un miracle mais toi et encore plus tes sbires, à part perdre mon temps... Bon j'accepte vu que tu me le proposes si gentiment, ricana-t-elle.
Némésis Prime grogna d'avoir pris peur inutilement. Il avait établi un accord avec elle pour faire un contre un, si elle arrivait à le mettre hors d'état de nuire, il louperait l'occasion de passer le flambeau du héros de la légende à quelqu'un beaucoup plus susceptible d'être corrompu... Non, son temps est presque écoulé. Il le savait. Ils étaient connectés par le fil rouge du Destin, donc il savait que son temps était venu. Elle n'allait tout de même pas être la première héroïne à échapper à la mort ?
Le Destin avait réussi à créer une opportunité pour qu'elle ne puisse pas lui échapper.
Elle était condamnée.
- Commençons.
Elena chargea Stelenincia de toute son énergie la faisant devenir complètement verte et la recouvrant de cette énergie, puis fonça vers Némésis Prime, l'assaillant de coups qu'il avait du mal à voir venir, frôlant à chaque fois d'être embroché par l'Épée de l'Éternel ou d'être pulvérisé par l'énergie émise par l'arme de Torn, enchaînant avec ses deux lames les coups de taille et d'entaille, éraflant les joues et l'armure du chevalier Némésis. Il arrivait tant bien que mal à esquiver, mais la lourdeur de Blitzstrike et de son encombrante armure technologique le faisait peinait à se mouvoir.
Il la repoussa en projetant sur elle une charge électrique, avant d'utiliser Blitzstrike en tant que masse, elle riposta en lui brisant le coude et lui tranchant le bras droit, il prit Blitzstrike avec sa main gauche et lui envoya des éclairs qu'elle contra en remuant son épée à l'aide de sa chaine, repoussant les éclairs partout autour d'elle, parmi les décombres.
Bien qu'il réussît à régénérer son bras, sa pseudo-immortalité ne serait pas suffisante pour la vaincre. Elle était vraiment trop forte. Il finirait plus par épuiser ce corps que d'arriver à la battre.
- C'est bon ? T'as fini ton monologue dans ton esprit ? Parce que moi, je vais t'achever !
Elle se jeta à son encontre et dans les airs, elle commença à incanter un miracle en faisant une prière :
- Que le Saint-Esprit accomplisse le plus grand des miracles des flammes : Divine Absolution Enfl...
Elena se stoppa nette de parler et cracha une floppée de sang sous le regard circonspect de Némésis Prime, y voyant la chance qui se présenta à lui. Il la saisit et mit une droite dans la mâchoire de l'héroïne, la renvoyant d'où elle venait mais lui attrapa le pied pour reproduire la même action qu'avait fait subir Elena à Albedo Wata, avant de l'envoyer valser contre l'épave d'une holovoiture, faisant tomber sur le sol ses deux épées.
Némésis Prime souffla de soulagement. L'ordre des choses revenait à la normale, Elena était définitivement condamnée et c'était ainsi, qu'ici, sa vie allait prendre fin. Il hésitait à aller tuer les deux observateurs. Mais bon, il avait plus important, les laisser en vie serait son cadeau d'adieu.
Le garçon laissa Zelda contre un arbre et courut jusqu'à sa mère en l'appelant.
Anticipant l'ambition de l'enfant juvénile de vouloir se dresser contre lui, alors qu'il voulait se repaître de sa proie, sans savoir qu'il ne le voyait comme un simple moucheron, il lança à son encontre un javelot d'énergie noire.
L'attaque allait atteindre sa cible lorsque soudain, Elena se redressa au dernier moment et se dressa face au javelot de Némésis Prime. Le prenant dans l'épaule, elle poussa un horrible cri de douleur avant de s'écrouler sur le sol.
Le garçon était désemparé. Il voyait un énorme objet noir, malsain, déchirer l'épaule de sa mère. Tout son corps se mit à trembler, à avoir des spasmes de peur, des larmes s'écoulèrent de ses yeux, il était paralysé devant cette scène horrible.
- Je vou... vou... voulais juste...
- Je sais, lui dit tendrement sa mère, tu sais très bien que ce n'est rien ça pour moi. Tu peux me retirer ce truc s'il te plaît ?
Le garçon tenta de se relever mais ses jambes flageolaient sous la pression. Elles n'arrivaient plus à se tenir sur leurs appuis. Il n'arrivait pas à se relever. Alors Elena lui tourna le dos et lui dit de lui retirer le javelot.
- Mais tu tiens à ton marmot Elena ? lui demanda surpris le Némésis, je l'ai fait dans la plus pure magie maléfique qui m'ha...
- Ne t'inquiète pas pour moi ou pour lui, je sais ce que je fais.
Elena l'aida à retirer le javelot d'énergie maléfique en se poussant vers l'avant et il réussit, Elena le saisit et le jeta loin d'elle avant de se relever le dos courbé par la fatigue et de faire face à son adversaire. Le Némésis était circonspect, il observait le garçon et ne vit aucune trace de corruption, cela était impossible, aucun être, mis-à-part le héros, était capable de ne pas se soumettre au mal qui se trouvait dans cette énergie.
Mais qui est ce garçon ? grogna le Némésis.
C'était la première fois de sa « vie » qu'il découvrait une telle anomalie dans sur cette terre. Il ne pouvait pas accomplir une telle prouesse sauf si... Le Destin se jouait-il de lui ? Moïra avait-elle réussi son coup ?
La fatigue avait envahi le corps d'Elena. Elle peinait à tenir debout face à cette douleur immense que lui procurait le trou dans son épaule.
Foutu Destin, injuria-t-elle, il n'y avait pas un autre moment pour me faire caner que devant lui ?
Non, lui répondit le Destin, le héros de la prochaine et dernière génération est ici, il est temps pour lui d'assumer le rôle qui lui incombe.
A parce que tu me réponds, pétasse ? En plus, il a fallu que tu me répondes à une question rhétorique. Comme si j'en avais quelque chose à foutre de tes plans avec la Volonté du Héros...
« Dernier » ce mot trotta dans l'esprit de l'héroïne. Que voulait dire la voix par « dernier ». Que c'est notre dernière chance avant la venue définitive du Malin ? Elle savait que ce foutu sceau n'avait jamais servi à rien. Tant d'êtres sacrifiés, déchus, meurtris pour quelque chose d'aussi éphémère que ce sceau.
Le temps d'un instant, elle aperçut le futur... La Volonté lui avait offert, le temps d'un instant une vision du futur de ce monde. Elle en ressentit une immense joie.
Elle n'était pas rassurée pour autant, mais si ce qu'elle venait de voir était vrai, comme dans les livres alors... elle voulait bien faire un effort.
- Je pense qu'il est temps qu'on en finisse, déclara le Némésis, je vais te faire rejoindre l'au-delà avec ton fils ! Je ne peux pas ignorer qu'un être de cette planète ne puisse pas être soumis à la Corruption.
Les veines du visage du corps d'emprunt de Némésis Prime se noircirent, son œil devint rouge et son iris jaune, une longue queue noire et hérissée éclata l'arrière de son armure et des griffes brillantes dépassèrent de ses gants.
- Même métamorphosé, je reste plus forte que toi..., cracha-t-elle accompagnée d'un filet de sang.
- Oui... Mais pas assez pour le protéger en même temps !
Il chargea une boule d'énergie corrompue noirâtre et écarlate du bout des doigts et tira dans le torse du garçon. L'attaque fut si rapide qu'Elena n'avait pas pu la voir venir. Elle aurait pu l'anticiper si elle était venue sur elle, mais cela ne fut pas le cas. Elle se jeta sur le corps encore chaud de son fils qui crachotait du sang, ses poumons à moitié détruits, calcinés, carbonisés par le Némésis.
- Comment as-tu pu...
- La même rengaine à chaque vie, à chaque successeur, à chaque héros. Vous pensez pouvoir échapper à la vengeance, la haine, à la peur de perdre les vôtres, du désespoir... en vous mettant à l'écart des vôtres, en oubliant que votre humanité vous rattrape à chaque fois. Cela vaut aussi pour les Féériques, mais bon, ils sont un cas à part et de toute façon, les imaginaris et les réaliterriens, cela revient au même. Maintenant, je n'attends que de voir où va te mener ta colère, désormais que tu n'es plus digne d'être l'héroïne, il est temps de passer le flambeau à plus apte que toi. Je ne peux que te souhaiter un doux repos dans les méandres de la Volonté du Héros.
La Sœur chanta une comptine mélancolique au chevet de son fils, en essuyant les larmes de son petit garçon alors qui n'arrivait plus à respirer, à ne plus parler, regardant douloureusement sa mère en lui agrippant le bras. Elle finit sa chanson en s'excusant de n'avoir pas pu le sauver, puis déclara, le regard rempli de rage :
- Je trahis l'humanité pour m'adonner au mal et offre la Volonté de sauver l'humanité, les Féériques et tous les habitants de cette planète à mon successeur qui saura vaincre le Maléfique !
L'héroïne, en larmes, se redressa avançant pas à pas jusqu'au héros, ses dents devinrent des crocs, la sclérotique de ses yeux se noircit et l'essence du mal se mit à lui recouvrir tout le corps, des ailes démoniaques lui sortirent du dos pour lui permettre de s'envoler dans le ciel, son armure prit une couleur qui était un mélange de noir, de rouge écarlate et de pourpre Elle ouvrit grand la bouche et lui envoya un rayon d'énergie sur le Némésis explosant toute la zone.
Celui-ci se protégea avec son bras et éclata de rire devant la fureur d'Elena corrompue.
- Hé bien, ma chère, tu as choisi l'abandon de ton humanité et tu veux qu'en même résister à l'appel de notre maître ? Et de toute manière, ce n'est pas maintenant qu'il fallait te décider à vouloir devenir le Prime. Surtout que malgré ta force extraordinaire, pour une humaine non modifiée, si on omet le fait que tu avais la force des précédents héros, tu ne m'égales pas assez dans le désespoir et la rancœur pour te hisser à ma droite ou pour pouvoir me dépasser.
Elena se jeta sur lui le plaquant au sol, les yeux emplis de cette folie malsaine qui n'appartenait qu'aux sujets du Malin, crachant de la fumée blanche de sa bouche.
- Je ne... je ne... suis pas une Némésis, dit Elena avec une voix d'outre-tombe et dans une autre langue qui était étrangère aux mortels, il me reste assez de force pour... t'emporter avec moi !
- Qu'est-ce que tu racontes ? dit le Némésis en prenant la même intonation qu'elle et la même langue, je te suis supérieur en tout point !
Némésis Elena tendit la main vers son ancienne arme héroïque et avec le peu d'humanité qui lui restait, elle réussit à l'envoyer près du corps du Héros. Némésis Prime ne comprit pas le geste de son ancienne partenaire, il se demandait si la Corruption, bien qu'elle soit l'une des héroïnes de la légende, ne l'avait pas perverti au point qu'elle en devienne folle.
Zelda, ayant assisté à toute la scène, réussit à rejoindre, tant bien que mal avec sa blessure à la jambe, le corps de son défunt ami. Elle n'aurait jamais cru qu'elle verrait son ami se faire tuer sous yeux. Pourquoi avait-il fallu qu'il veuille rejoindre sa mère ? Il l'avait, elle. Pourquoi fallait-il qu'il aille s'empêtrer au milieu d'un siège guidé par le légat du Prince des Ténèbres, ennemi des Hommes et des Féériques ? Ils allaient s'en sortir, bon sang !
- S'il te plaît, reste en vie, l'exhorta-t-elle à mi-voix se voilant la face sur la mort de son ami.
Arrivée au lieu où se trouvait le cadavre de son décédé complice dans tous ses coups farfelus, Zelda crut percevoir une hallucination due à sa blessure. Alors, elle voulut lui toucher la poitrine, et comprit qu'il ne s'agissait pas d'une simple illusion provoquée par son cerveau fatigué mais de la réalité : le corps du garçon avait cicatrisé. Il n'y avait plus cet énorme trou au milieu de sa poitrine.
D'un seul coup, les yeux du jeune homme se rouvrirent, illuminés d'une lumière dorée. Il s'assit et expira un bon coup comme s'il venait de terminer le marathon du millénaire, à quatre pattes crachant tout l'air de ses poumons. La jeune fille se réjouit de le voir en vie et voulut l'étreindre, mais le garçon se releva, esquivant Zelda et ramassa l'épée qui se trouvait à ses côtés.
- Mais qu'est-ce que tu fais ? Je veux te faire un câlin, ce qui est rare, et toi, tu m'esquives ?
Mais Zelda remarqua quelque chose qui lui fit n'en pas croire pas ses mirettes. Comment se faisait-il qu'avec son corps aussi meurtri et affaibli, il puisse porter l'épée de l'héroïne ? Elena lui avait fait porter son arme et elle avait été dans l'incapacité de la soulever, alors que lui la tenait qu'à une main. Sœur Elena lui avait expliqué que seule, elle, était capable pouvait porter sa propre arme, et personne d'autre. Et lui, y arrivait aisément.
Une voix assaillit l'esprit du garçon. Elle n'était pas toute seule. Elles étaient plusieurs, il ressentit cela comme un martèlement incessant qui lui tabassait le crâne. Ces voix parlaient sans discontinuer, puis des images de gens qui lui étaient totalement inconnus, toutes ces personnes qui avaient vécus d'innombrables vies, qui avaient eu d'innombrables familles, d'innombrables amis, qui finirent par mourir d'innombrables fois, regrettant d'innombrables non-actions, d'innombrables remords... Voir ces visages torturés, ces voix meurtries, suppliantes... tourmentait l'esprit du garçon. Les voix devinrent de plus en plus persistantes, mais elles étaient toujours si inaudibles, jusqu'à qu'elles s'unirent pour déclarer la même chose : « Tue-la ! Tue celle qui a abandonné l'humanité ! Tue cette Némésis ! »
Il releva les yeux et vit une femme à l'apparence démoniaque qui combattait le chevalier qui s'en était pris à eux, l'aura qu'ils dégageaient l'horripilait au plus haut point. Les voix qui devinrent qu'une seule lui ordonnèrent de se saisir de la lame de sa prédécesseuse et d'occire cet être maléfique avant qu'il ne soit trop tard.
Si c'était le seul moyen de la faire taire, il s'exécuterait.
- Tout être soumis au Malin se doit de périr de la lame du protecteur de l'Humanité et des Féériques, déclara le Héros.
Zelda se rappela la formule qu'avait dit la mère du garçon lorsqu'elle le tenait dans ses bras. C'est à ce moment-là qu'elle comprit. Elle venait de lui confier la responsabilité de ce monde.
Elle comprit la nécessité de le faire, elle savait pourquoi Elena avait fait cela, mais une interrogation persistante se mit à tournoyer dans son esprit : « Pourquoi ne m'a-t-elle pas confié la Volonté du héros au lieu de la donner à son trouillard de fils ? »
Alors qu'aucun mot n'était sorti de sa bouche, elle se plaqua les mains devant. Elle n'avait aucun droit de penser de telles choses alors qu'il venait de revenir à la vie par miracle. Mais si elle lui avait confié à elle le sort de l'humanité par le biais de l'héritage du héros de la légende, elle aurait pu porter l'épée et les sortir de la panade dans laquelle ils se trouvaient...
Mais bordel pourquoi je me mets à penser à ça ? C'est pas le moment ! s'engueula-t-elle.
Puis elle vit son ami aller droit vers le danger. Elle cria après lui pour le retenir, mais le garçon n'avait pas l'air de l'entendre. En fait, son esprit n'avait pas l'air d'être présent dans son corps, comme s'il était guidé par quelque chose qui avait pris la place de l'âme du jeune garçon. Son esprit était bombardé par cette multiplicité de voix harassante qui n'avait de cesse de répéter son ordre. Toutefois, plus il se rapprochait des deux êtres démoniaques qui déchainaient leur colère l'un envers l'autre, plus il avait un mauvais pressentiment, comme s'il allait commettre une erreur monumentale. Cependant, s'il ralentissait, la voix se faisait de plus en plus forte pour lui imposer d'exécuter son injonction.
Ne pouvant plus supporter ces ordres, il finit par céder et à courir vers la Némésis en mettant son arme face à lui pour la faire s'abattre sur les deux créatures, Némésis Prime fut le premier à la voir et en voyant le regard de son ennemi se diriger vers un autre point, Némésis Elena comprit que quelque chose était venue près d'eux. Elle sentit l'intention meurtrière de cette personne et s'en éloigna, en faisant un pas de côté. En regardant son assaillant, elle recouvrit totalement ses esprits et vit que son agresseur n'était plus ni moins que son fils.
Donc ce n'est pas Zelda qu'Elle a choisie mais toi ? Je ne sais pas si je dois La remercier ou La maudire... Zelda aurait peut-être le soigner avec sa magie ou son pouvoir... Non, c'est mieux ainsi... Enfin, je n'en sais rien ! Pourquoi faut-il toujours que rien ne se passe comme je le voudrais ?
Le véritable Némésis, choqué de voir que l'enfant qu'il venait de transformer en donut se tenait debout, possédant la force de porter l'épée d'un héros de légende, ne savait pas comment réagir dans cette situation. Il observait les yeux dorés du garçon qui avait l'air d'être complètement possédé par la Volonté du héros de la légende.
Ne me dites pas qu'en plus de ne pas pouvoir être atteint par la Corruption, il a fallu qu'il soit le nouveau héros de la légende, enragea le Némésis.
L'essence du mal se retira du visage d'Elena et l'un de ses yeux revint à la normale, celle-ci se tourna vers son garçon et lui fit un sourire, les yeux embués de larmes, malgré la souffrance que lui procurait sa résistance à se transformer en Némésis.
- Je suis si... contente que tu sois... en vie..., dit l'ancienne héroïne à bout de souffle.
Le tout nouveau héros ne lui répondit et tenta simplement de la trancher en deux. Elle remarqua, elle aussi les yeux dorés de son fils, et comprit que c'était la Volonté du héros qui avait pris le dessus sur l'esprit de son fils. Elle lui mit un coup de poing dans la mâchoire et exigea de la Volonté héroïque de laisser place à son fils si elle ne voulait pas qu'un nouveau Némésis soit créé. Après un petit temps de latence dans l'esprit du garçon, la lumière dans les yeux du jeune homme n'était plus aussi éclatante qu'au départ, et il put retrouver sa personnalité.
- Ma.. Maman !
- Oui, c'est ça mon p'tit gars, c'est moi.
- Pourquoi t'as un costume... aussi moche ?
- Comme si j'avais voulu être recouverte... par ce truc visqueux ! se vexa-t-elle, je suis désolée, mais nos retrouvailles... ne pourront pas durer aussi longtemps... que je... le voudrais. Il va falloir que tu... m'aides.
- Comment ?
- Quand je te... le dirai, tu sauras quoi... faire, tiens-toi juste... prêt avec... mon épée héroïque.
- Mais je n'ai jamais tenu une épée de ma vie.
- Pourtant... regarde tes mains, lui fit-elle remarquer en pointant du doigt l'arme qu'il tenait entre ses doigts.
Le garçon se surprit à avoir une arme entre les mains, il s'écria de peur et la lâcha par réflexe, rebuté par le fait de tenir quelque chose qui pouvait retirer la vie à un autre être vivant.
- On a pas le temps... pour que tu fasses... ta mijaurée. Si tu tiens à Zelda... et à moi, il va falloir que tu prennes ton courage... à deux mains et que tu m'écoutes !
Le nouveau héros prit une grande inspiration, reprit l'épée et hocha la tête.
- Bien...
Elena vola jusqu'au Némésis, et le combattit avec toute la force qui lui restait avant que son esprit soit inondé par la malveillance du Maléfique et de sa corruption. Elle l'enchaîna de coups avec une force inouïe, lui écorchant la peau avec ses griffes, déployant tous les pouvoirs qu'elle était en train d'acquérir en se transformant en Némésis, envoyant des sphères démoniaques en direction de son ennemi, celui-ci les esquiva et contre-attaqua avec des lames d'air en agitant ses index, elle les esquiva et le projeta contre le sol, à peine relevé, elle l'entrava avec un sort végétal.
- Des racines du grand arbre-monde aux racines de l'arbre de la connaissance, enracinent mon ennemi au sol : Liens d'Yggdrasil !
Des racines venant de toute part s'enroulèrent autour du corps du Némésis et entravèrent les membres du Némésis qui se retrouva paralysé.
- C'est avec ce genre de tour de passe-passe que tu comptes me vaincre, pauvre sotte ?
- Absolument, grand dadais !
Elle le bombarda d'attaques dévastatrices tout en répétant son sort végétal à chaque fois pour le fatiguer. Son corps ne semblait plus pouvoir tenir longtemps.
Le garçon observait sa mère tenter de repousser avec virulence cette chose qui lui parcourait le corps, tout en combattant le Némésis, il la voyait serrer des dents à s'en faire saigner les gencives, à deux doigts de faire exorbiter ses yeux, faisant éclater les veines logées dans ses globes oculaires, ses ongles s'arrachaient et sa chair se calcinait à cause de ce pouvoir contre-nature qu'elle ne pouvait cesser d'utiliser. La peau de ses mains n'étant pas recouverte par l'essence du mal brulait à vue d'œil, et sa résistance face aux attaques du Némésis, qui ne se laissait pas faire, s'amenuisait avec le temps qui passait. Seule sa propre volonté lui permettait de continuer à se battre aussi vigoureusement. Le garçon ne pouvait croire que c'était sa mère qui faisait preuve d'une telle ténacité, il se demandait comment elle pouvait être aussi forte bien qu'elle soit l'héroïne de la légende.
Comment ne pouvait-elle pas céder face à ce monstrueux personnage ? Lui aurait fui le plus loin possible depuis très longtemps. Qu'est-ce qu'il raconte ? Il était venu justement car il était là et qu'il ne voulait pas que sa mère se retrouve tout seul et a entraîné celle qu'il considérait comme sa grande sœur dans cette malheureuse histoire.
Le Némésis réussit à s'échapper des assauts d'Elena et envoya une boule d'énergie sur le garçon. Elena réussit à la réceptionner à temps et fut clouée sur le sol. Elle la retint, écrasée par l'imposante force qui s'en dégageait. Elle la repoussait avec toutes les forces qui lui restaient. La voir se rebiffer face à son propre destin, ne fit qu'augmenter l'admiration du jeune garçon envers sa mère.
- Qu'est-ce qu'il y a Elena, je pensais que tu allais te surpasser pour me vaincre ? Montre-moi plus de hargne pour ton grand final ! Tu ne voudrais pas trépasser aussi facilement. Encore un héros qui ne fait pas le poids face à nous... C'est triste mais vous êtes les seuls mortels à pouvoir accomplir quelque chose de concret en ce monde. A travers les âges, vous n'avez fait qu'échouer ! Perdant toute raison de vivre car nous vous prenions tout. Rien n'a changé. Tout revient au même endroit. Un cycle infernal dont vous ne pouvez vous évader car telle est votre mission. C'est la seule vérité qui existe en ce monde : vous êtes damnés !
- Mais tu vas la fermer, Némésis ! s'emporta Elena, tu veux faire peur à mon gosse ou quoi ? cria-t-il avec un immense sourire au bord des larmes, comme si le foutu héros de la légende était le seul à pouvoir sauver ce monde ? Si on nous a confié le monde à deux, c'est parce que seul, nous sommes incapables de faire quelque chose, que nous soyons humains ou Féériques.
- Si tu parles de cette fée, elle n'est toujours pas en état de faire quelque chose contre moi. Je suis l'être le plus puissant qui existe actuellement sur cette foutue terre.
- Peut-être que je ne pourrais rien faire mais quelqu'un le pourra... Ce héros sera capable de vous arrêter, toi et ton maître ! Il saura se battre et renverser n'importe quelle situation ardue en allant au-delà de la simple Volonté du Héros, en allant au-delà des limites de son esprit. Le miracle qu'il accomplira dépassera l'entendement... Sache une chose, abruti, tout ira bien dans le futur.
- Qui te l'a dit ? Ton ami imaginaire ?
- Je l'ai vu. Je peux te dire que tu n'y es pas, Enricio, toi qui as choisi de ton plein gré d'abandonner l'humanité.
Le Némésis serra des dents. Comment connaissait-elle son ancien nom ? Sous la colère, il mit plus de force dans son attaque pour faire fléchir l'héroïne.
- Maintenant, tu es rassuré, mon p'tit gars ? dit-elle en s'adressant à son fils.
Le garçon la fixa, troublé. Ses mots lui étaient aussi adressés ?
- Comme je l'ai dit à Zelda : « nul besoin de naître extraordinaire pour être extraordinaire ». Comme je te l'ai toujours dit, ça ne doit pas être ton corps qui doit t'arrêter, sinon à quoi aura servi ta vie ? Je sais que je t'ai fait d'innombrables promesses mais je ne pourrai en accomplir aucune malheureusement. Alors note-les dans ta tête et rappelle-toi de la prière que tu adressais au Seigneur chaque matin et chaque soir, car même si ce n'est pas aujourd'hui, ni demain, je suis sûr qu'elle te sera accordée parce que tu es une bonne personne et que les bonnes personnes attirent toujours du monde, après il ne faut pas tout baser sur sa gentillesse mais tu le comprendras plus tard. La seule chose que je puisse te dire, c'est : ne sois pas une trouillarde comme je l'ai été, et tu vivras sûrement une vie heureuse, malgré cet horrible monde ! Sois résilient !
Sa résistance commençait vraiment à agacer le Némésis.
Elena ne faisait que retarder sa mort.
Si elle ne voulait pas mourir seule, alors il l'emporterait elle avec tout ce village.
Avant qu'il puisse mettre son idée à exécution, des racines vinrent l'attraper et le ramener au sol. Elena avala l'attaque du Némésis, et emplie d'énergie magique, elle continua son sort en exécutant une série de signes avec ses doigts et en marquant sur ses avant-bras des glyphes. Elena allait exécuter un sort transcendant les écoles de magie, les glyphes s'illuminèrent d'une couleur orange et, elle fit un rectangle avec ses pouces et ses index en visant le Némésis.
- Contraction magique : Tombeaux, mausolées, pyramides... Que ces derniers lieux de nos vies scellent mon ennemi en échange de mes pouvoirs ! Autel du Séjour des Morts !
De grandes mains noires sortirent de terre et agrippèrent la cage végétale où était emprisonné le Némésis et ils l'enfoncèrent dans le sol, le faisant disparaître de la surface de la terre.
Elle fut satisfaite de son acte, mais épuisée par cet enchainement de sort et ce combat plus qu'exténuant, elle ne put retenir sa fatigue et tomba sur le sol, elle suffoquait bruyamment, appuyant ses mains sur sa poitrine qui s'enflammait.
Pas maintenant ! Il me reste peu de temps.
- Approche..., dit-elle en s'adressant au garçon.
Il s'agenouilla à ses côtés, s'inquiétant pour son état.
- Tu as vu de quoi je suis capable... et de ce qu'il est capable ? lui demanda sa mère, sache que ce n'est même pas... l'étendue des pouvoirs des Némésis que tu vas devoir affronter maintenant... que tu es le héros de la légende.
- Mais non, c'est toi l'héroïne ! réfuta le garçon.
- Arrête ! Tu es intelligent... tu l'avais déjà compris, p'tit gars... Tu vas devoir... me tuer...
Le nouveau héros s'écria, horrifié par l'injonction de sa mère et ne put se résoudre à faire ce que lui demandait l'ancienne héroïne.
- T'inquiète, je suis pas devenue... totalement... le Némésis donc... la malédiction n'agira...
- Mais je m'en fiche de ça ! s'énerva le petit garçon en secouant la tête, comme si c'était le plus important...
Elena tendit sa main noircie par l'essence du mal vers le garçon, elle essuya la larme qui s'écoula de l'œil de son enfant. Elle ressentit une sensation étrange en touchant son fils. Le pouvoir héroïque ne semblait plus la reconnaître comme humaine.
- Je le sais... J'aurais voulu que tu ne sois... jamais confronté à une telle absurdité comme nos... prédécesseurs qui y ont été contraints, mais pour protéger... ceux que tu aimes, tu dois le faire... Une mère ne devrait pas avoir à exiger cela de son fils, mais pour le sort de toutes les espèces qui peuplent cette planète... et pour moi qui ne veut définitivement pas devenir un monstre qui risquerait de s'en prendre à toi... Je t'en prie... Tue-moi !
- Je veux pas ! Je veux pas ! Je veux pas ! répéta-t-il en criant et en secouant la tête.
Il pleurait à chaudes larmes, refusant d'écouter ce que sa mère avait à lui dire. Le voir dans un tel état ne pouvait que provoquer l'émoi d'Elena, mais elle savait la dangerosité des Némésis. Elle connaissait leur folie et leur cruauté, elle ne pouvait pas se laisser envahir par ce pouvoir maléfique.
Elle inscrivit alors un glyphe en forme de N inversé aux barres courbées sur le torse de son fils, il s'illumina d'une lumière dorée, il s'en diffusa une énergie bienfaisante qui l'entoura et recouvrit son épée.
- J'ai forcé l'activation du pouvoir des héros, il faut que tu le fasses pour sauver Zelda de moi, je t'en conjure, fais-le.
Le garçon éclata en sanglot. C'était sûr, il allait mourir avec sa mère, à peine, dix ans. Dire qu'ils n'ont jamais pu voir les étoiles, ni cette mer de soleil, ni voir ceux à quoi ressembler une plage. Il n'avait même jamais vu ce qu'était une tortue. S'il était plus fort... s'il avait été plus fort... il aurait pu tous les protéger... il n'aurait jamais eu besoin qu'on le protège comme le faisait sa mère à cet instant ou Zelda plus tôt. Pourquoi était-il né avec ce corps aussi défectueux ? Ce lamentable et misérable corps qui ne lui avait rapporté que railleries et moqueries ? S'il était issu d'une meilleure naissance... S'il ne l'avait pas rencontrée... Cette situation n'aurait peut-être jamais eu lieu...
Le garçon déglutit et finit par céder, comprenant la gravité de la situation, il avançait d'un pas chancelant vers le corps allongé de sa mère et pointa la lame de l'arme de sa prédécesseuse au-dessus de celle-ci. Ses mains étaient tremblantes, sa respiration saccadée et ses larmes ne cessant de s'écouler de son visage. Elena lui sourit pour le rassurer.
- Ne m'en veux pas, maman...
- Jamais je ne t'en voudrais...
Était-ce comme ça qu'elle avait vu sa mort ?
Saria lui avait toujours dit que peu importe qui on était, on ne choisissait jamais le lieu de sa mort. Peu importe notre force, notre courage, notre chance. On ne pouvait qu'accepter que ce lieu soit le nôtre.
Et Audisélia... Elle pleurerait encore en apprenant ce qu'elle était en train de faire, quand est-ce qu'elle allait devenir plus mature ? Les années passaient, et elle continuait à chouiner ! Elle pria pour que Sawyer prenne soin d'elle, et qu'il finisse par lui avouer ses sentiments.
Après un long temps d'hésitation, le jeune Héros finit par enfoncer l'épée dans la poitrine de sa mère la faisant s'écrier de douleur, l'énergie héroïque s'écoulant dans ses veines et entrant en contact avec l'énergie maléfique du Maléfqiue, elle serra les dents pour que son fils ne s'arrête pas, elle saisit la lame de l'épée et l'aida à la faire entrer plus profondément en elle pour qu'elle ne puisse définitivement pas survivre à cela. Le point de rupture allait bientôt survenir, il ne lui restait plus que le temps d'un instant...
- Zelda ! cria l'ancienne héroïne, je te confie mon monde... Je vous confie, à tous les deux, le monde ! Maintenant, fais-le !
Sa peau se déchira, ses dents se brisèrent et de tous ses orifices ressortait une lumière blanche resplendissante, avant que survienne une incroyable explosion faisant naître une immense boule de lumière ardente, elle balaya tout sur son passage.
Au dernier instant de sa vie, les derniers mots auxquels elle pensa furent :
Oui, Saria, tu avais raison, on ne peut pas mourir sans regrets...
Le garçon s'envola comme une brindille lors d'une tempête, ce fut le cas aussi pour Zelda, il rattrapa l'Epée de l'Eternel et la planta dans le sol pour ne pas être emporté plus loin par le souffle de l'explosion, il s'y agrippa de toutes ses forces en utilisant cette force mystérieuse qui lui permettait d'être plus fort. Zelda attrapa en l'air le rebord d'une fenêtre détruite et l'enserra de ses bras faiblards du mieux qu'elle pouvait. Ils tinrent l'objet de leur survie jusqu'à ce que le souffle s'estompe et que le Héros et Zelda soient de nouveau soumise à la gravité terrestre.
Les blessures créées par le surpassement de ses limites s'effacèrent instantanément. Bizarrement, il ne ressentait plus aucune douleur.
La Volonté du héros de la légende et son Destin viennent de t'être légués, lui dit une voix féminine.
A ces mots, il se souvint de sa mère et courut au lieu de l'explosion. Il n'y vit qu'un immense cratère qui devait mesurer dix mètres de diamètre. Il n'y avait plus rien, plus la moindre trace du moindre corps, juste des cendres qui pouvaient aussi bien appartenir à des maisons, à la terre, à des arbres qu'à Elena. Il frappa le sol, le cœur succombant au désespoir, demandant à Dieu pourquoi elle l'avait obligé à commettre un matricide.
Puis il fut interrompu dans ses suppliques par un bruit sourd, qui devenait de plus en plus fort, devenant un vrai bruit et il vit sortir Némésis Prime, couvert de sang, apparemment, lui aussi avait été impacté par l'explosion qu'avait causé la mort de Némésis Elena. Il était scarifié de partout, les yeux mi-clos, de l'hémoglobine noir et rouge qui jaillissait de tout son corps sans s'estomper comme une fontaine.
Le Héros était désemparé, il n'arrivait pas à croire que sa mère avait pu disparaître sans laisser de trace et que l'ennemi de l'humanité pouvait toujours exister.
Quelque chose se brisa en lui, une coquille qui protégeait son âme, son cœur, ses émotions et que sais-je... de cette chose noire, de sombre, sortant du tréfond des abîmes de son être pour commencer à pourrir son cœur...
Subitement, le Némésis rouvrit les yeux et sortit entièrement du sol, la bouche ouverte, laissant s'écouler de la bave de sa bouche.
- Bordel ! Son plan c'était pas de la merde ! J'aurai pu y passer !
Il releva les yeux et vit le fils d'Elena le fixer avec des yeux remplis de rage et de haine.
- T'es encore là, toi ? dit-il en reprenant sa respiration, t'as pas à me regarder comme ça, ce n'est pas moi qui me suis fait exploser...
- Pourquoi t'es en vie ? cracha le garçon en s'approchant de lui.
- C'est simple : parce que je suis le plus fort !
Le Héros courut vers lui et lui mit un coup de poing dans le ventre, le Némésis ne sentit presque rien, et le dégagea en lui rendant son coup au visage. Le garçon attrapa son épée et voulut lui donner un coup mais l'Epée disparut en poussière devant le Némésis.
- Effectivement, elle est morte. Scénario quatre, en conclut le Némésis.
Le légat du Maléfique lui mit un coup de genou dans le menton, l'envoyant dans les airs, avant de l'y réceptionner et de le renvoyer au sol en se serrant les mains et lui envoyait dans le dos son coup de poing de toutes mains. Le Héros se pensait mort mais contre toute attente, il était encore en vie. Ses cicatrices disparaissaient instantanément. Mais bien qu'il survécût aux coups du Némésis, il se savait trop faible pour pouvoir le vaincre, et pourtant, il ne pouvait oublier qu'il était la cause de la mort de sa mère. Il pleurait sa propre impuissance face à cette abomination.
Le Némésis se laissa rattraper par la gravité et redescendit sur terre. Bien qu'il ait survécu, l'attaque suicide d'Elena ne l'avait pas laissé indemne. Son corps se balançait de gauche à droite, il avait la nausée et sa vision se troublait. Les autres Némésis et Aberrations et Corrompus s'approchèrent de lui pour savoir s'il allait bien.
- Depuis quand je vous ai permis de me prendre de haut ? s'emporta Némésis Prime en tuant tous ceux qui s'approchèrent de lui en un seul coup.
Pris de colère, il écrasa la poitrine du nouveau héros avec son pied jusqu'à qu'il puisse entendre ses os craquer. Zelda intervint et se jeta sur Némésis Prime pour qu'il cesse de torturer son ami. Le Némésis la souleva par le col, la fixa et lui demanda avec une voix rauque et des yeux perçants :
- Qui es-tu pour lui ?
Devant cette créature qui feignait l'apparence d'un humain, elle se mit à trembler de peur, son corps fut parcouru d'un frisson aussi froid que le vent glacial de l'Arctique. Elle ne savait pas quelle réponse lui fournir pour qu'il ne la tue pas.
- Je ne vais pas me répéter ! perdit patience le Némésis.
- Il est mon petit frère ! s'écria la jeune fille.
Le Némésis regarda le garçon et retourna ses yeux en direction de la fille.
- Tu te foutrais pas de moi, il a l'air plus âgé que toi.
- C'est mon petit frère et rien ne changera cela.
Le Némésis grinça des dents avant d'accepter cette réponse et de mettre la fille sur son épaule. Il fit signe à son armée de reprendre la route et ils s'en allèrent.
Le jeune garçon répara ses os brisés, se releva difficilement et se saisit de l'arme d'emprunt de sa mère, Stelenincia, et menaça dans le dos son nouvel ennemi juré.
- Relâche mon amie ! lui ordonna le garçon.
Némésis se retourna et eut un rictus moqueur.
- Tu me donnes des ordres maintenant ? Ce n'est pas toi, il y a quelques instants qui chialait contre le sol ?
Il avait beau se moquer, il ne pouvait ignorer le regard que lui jetait le garçon, il était enragé, ses dents crissaient et ses mains tremblaient, non pas de peur, mais de colère. Voir la mort de sa mère avait réveillé quelque chose de malsain chez lui.
Le Némésis avait-il trouvé celui que son maître attendait depuis si longtemps ?
- Si tu tiens tant à me battre, trouves-toi ton arme héroïque par toi-même avant de vouloir te confronter à moi. Et encore, malgré ta force dépassant celle du mollusque de base qu'est l'humain, tu n'es toujours pas à mon niveau. Je te prends ta sœur pour que tu ne fasses pas comme Elena à fuir à travers le monde. Je compte sur toi.
Le garçon se releva et rempli de rage, hurla :
- Pourquoi... Pourquoi tu m'as pris ma mère ?
Le Némésis rit à gorge déployée.
- Tu te fous de moi ? Je ne t'ai rien pris ! C'est toi qui l'as tuée ! Et Dieu sait, s'Il existe, que j'adore tuer des gens mais ne m'impute pas la faute de crimes que je n'ai pas commis. Ce n'est pas ma faute si elle t'a choisi pour mettre fin à ses jours... Surtout que désormais, comme elle, il est de ton devoir de mourir pour « nos » vies à nous, les mortels, que nous soyons humains ou Féériques – bien que ce terme soit mensonger. Car elle a fait de toi la marionnette du Destin des héros de la légende comme elle l'avait été avant toi ! s'esclaffa-t-il hilare.
Ces mots frappèrent l'esprit du garçon : sa mère n'avait pas choisi d'être le héros, elle n'avait fait que subir ce maudit rôle, alors que sa vie au couvent était bien meilleure que cette vie de sacrifiée.
- Alors... c'est toi et le Héros qui avaient pris ma mère ? grogna-t-il, c'est ça que je dois comprendre ?
Le Némésis entendait à sa voix que ce petit garçon, qui avait tellement peur face à la mort, bouillonnait d'une colère noire. Il n'arrivait même pas à comprendre que c'est par le sacrifice de sa mère qui était l'héroïne qu'il était encore envie. Raisonnait-il encore avec intelligence ?
- Si ça te rassure... Mais ça ne la ramènera pas...
- Donc c'est pour ce misérable monde qu'elle s'est sacrifiée ? dit-il en bougeant frénétiquement les doigts de colère.
- Arrête-toi ! lui hurla Zelda, je t'en supplie, ne fais pas ça !
La jeune fille devenait nerveuse, ses mains tremblaient et claquait des dents, le Némésis Prime sentait la peur de cette mortelle et ne comprenait pas pourquoi elle était dans un tel état. Il tenta alors de sonder l'esprit de ce nouveau héros mais, pour la première fois de sa vie, il avait été bloqué par l'esprit de ce garçon. Ni lui, ni ses prédécesseurs n'avaient été confrontés à un blocage pareil, la communication avec les héros pour les tourmenter avait toujours été fluide.
Non c'était autre chose, il n'était pas bloqué, c'est qu'il ne le trouvait, ce qu'il voyait dans son esprit commençait à se vider, ce garçon ne pouvait pas être dénué d'intelligence, de traits d'esprit ou de quelconques aspirations. Aucun être humain n'était aussi vide qu'une coquille vide !
A l'intérieur de lui ne se trouvait que... le Néant.
La colère du garçon s'estompa et il abaissa son visage comme un automate en manque d'énergie.
Zelda devenait de plus en plus nerveuse, se débattant avec plus de force et de hargne que lorsqu'elle avait été prise par le Némésis, celui-ci remarquait qu'elle commençait plus à craindre son ami que de lui.
Qu'est-ce qui est en train de lui arriver ?
Le garçon releva la tête, son visage caché dans les ténèbres, il pointa du doigt le Némésis, une étrange boule se créa au bout de son index, le Némésis sentait l'air s'engouffrer dedans et... disparaître. Ce qu'il se passait devant lui était impossible, aucune loi scientifique, ni magique n'obéissait à ce qu'il se produisait.
« Rien ne se crée, rien ne se perd tout se transforme » comme disait Lavoisier.
Mais là, tout disparaissait, tout était anéanti.
Cela éclaircit certains points dans l'esprit du Némésis.
Mais le fil de ses pensées fut coupé par les paroles du jeune homme qui semblait possédé par une force supérieure, supérieure même à celle de la Volonté du héros de la légende.
- Au commencement, il n'y avait...
Mais soudainement, il s'écroula sur le sol, le corps fumant, les yeux révulsés et la bave aux lèvres, comme si ce qui venait de prendre le contrôle de son corps avait épuisé le reste de ses forces.
Pour la première fois de sa vie, le Némésis et les autres créatures démoniaques qui l'accompagnaient prirent peur. Ce pouvoir qu'il avait ressenti n'était comme nul autre, il était le premier de son genre. Enfin, les réminiscences du passé du Maléfique vinrent lui rappeler de vague souvenir à la vue de ce pouvoir.
Toutefois, Némésis Prime était extatique. Ce garçon avait véritablement le potentiel pour être l'un des leurs, plus qu'aucun héros ne l'avait été auparavant, ni lui, ni les autres traîtres ! S'il arrivait à corrompre son cœur en parachevant sa haine jusqu'à qu'elle soit parfaite, il pourrait bien le faire devenir le parfait réceptacle que recherche le Démon Maléfique.
Zelda continuait à se débattre pour que le Némésis la relâche et qu'elle puisse aller voir le garçon évanoui. Le Némésis lui mit une tape à la nuque pour l'assommer. L'un de ses généraux, Kankar, un Belgrom, s'approcha de lui. C'était un être qui était né du ressentiment des morts dans les cimetières et les charniers pour venger les injustices qui leur ont été infligés lors de leur vivant. Il avait une peau blafarde, sans poil sur tout le corps, des stries sur ses avant-bras et ses jambes qui laissaient échapper de la fumée blanche à chacune de ses respirations – sans doute des cendres des cadavres qui l'avaient créé -, ses bras étaient gigantesques touchant presque ses genoux avec des pics en os qui ressortaient de ses coudes, des veines violettes lui parcouraient tout le corps, il était dénué de globe oculaire et il avait des dents noires crochues dont les canines se tordaient.
Il demanda à leur chef par le sifflement de ses pores, ce qu'ils allaient faire de lui et de la fille. Il avait l'air bien trop dangereux pour être laisser en vie.
- Il n'est pas encore temps pour lui de mourir, aucun de nous ne pourrait le tuer car cela dévierait du scénario. Il faut qu'il reste en vie jusqu'à ce qu'une opportunité se présente à nous pour le rallier à notre cause.
Il fit apparaître une longue épée à la lame cristallisée avec des inscriptions rouges et la jeta au pied de l'enfant.
- Voici le Bras Droit du Titan Ymir ! Mon arme de prédilection. Si tu arrives à maîtriser son pouvoir, je peux te garantir que tu obtiendras une force et une puissance incommensurables. Alors entraîne-toi et viens récupérer ta sœur ou me prendre la tête, au choix !
Et la troupe du mal s'en alla, le laissant seul au milieu de ce paysage dévasté, de ce village rempli de cadavres et de traces de leurs immondices innommables. Il était bien déterminé à prendre la tête de ce chevalier..., ce légat du Némésis ! Mais une autre haine se développer en lui, une inimitié qui était dirigée envers celui qui avait obligé sa mère à mourir ! Il tuerait le héros de la légende qui habitait en lui.
Au sol, légèrement blessé, le moral au plus bas, les larmes aux yeux, une haine insatiable commençait à naître en lui, sa quête de vengeance envers ceux qui lui avaient tout pris allait débuter. Il anéantirait tout sur son passage jusqu'à détruire le monde s'il le fallait...
Oui... Détruire le monde est bien ce qu'il fallait faire pour réclamer justice.
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