Préparation à l'espionnage des fanatiques de la Légion de Marrynelia
Leur passe d'armes était violente, chaque rencontre entre les lames était accompagnée de grandes étincelles, mais aucun des deux combattants ne relâchait leur attention. Le Héros ne laissa aucun moment de répit à la créature fantomatique, enchaînant coup sur coup, de façon frénétique, ses attaques endiablées, mais la défense de la Cisailleuse était bien rodée, bien qu'elle ne fût pas née avec la capacité de combattre à « l'épée », elle arrivait tout de même à bien se défendre pour protéger son masque.
Si elle n'était pas là, j'aurais pu me déchaîner comme je le voudrais, se plaignit le Héros, mais je ne peux pas en faire un dommage collatéral.
Ainsi, le Héros comprit qu'il allait avoir besoin de l'aide de Malalalivia pour terrasser leurs adversaires. Elle se débrouillait assez bien pour contrer les assauts de sa Cisailleuse qui n'était pas handicapée, sa façon de combattre était fascinante à regarder, elle combattait de façon bien moins brouillonne que le Héros, cela était forcément dû à l'entraînement auquel elle avait eu droit avec la reine et son meilleur ami.
S'il se retrouvait à l'affronter dans un réel combat, affaibli par le sceau que lui ont mis les médecins, sans Ymir et les pouvoirs du Némésis, elle avait peut-être ses chances de le vaincre. Son style de combat se rapprochait plus d'une danse martiale que d'un véritable art martial. Elle se déplaçait en toute souplesse et chacun de ses coups était donné avec une précision chirurgicale – elle aurait peut-être la capacité de lui trancher la trachée.
Mais si elle a ce niveau, Lelelitio doit être un monstre de combat, réfléchit le Héros.
Malalalivia finit par briser l'écrou des ciseaux de la Cisailleuse de Mortalis et la repoussa vigoureusement jusqu'à chez le Héros, celui-ci comprit intensément où elle voulait en venir et lui aussi poussa son adversaire vers Malalalivia. Il restait toujours qu'ils étaient incapables de briser leurs visages. Alors le Héros, se remémorant ses sessions d'entraînement avec la Fée, tenta quelque chose.
Comme tout à l'heure, il s'appuya sur le mur, se propulsa et atterrit sur le bord de la table, courut sur celle-ci et tenta de faire un salto... et le réussit ! Atterrissant maladroitement mais incontestablement sur les lames de son adversaire. Comprenant ce qu'il voulait faire, elle usa de la Poussée aquilons pour rapprocher son ennemie contre celle du Héros. Le Héros se propulsa et planta son épée poing américain dans les deux masques des Cisailleuses avant de s'écraser lourdement sur le sol.
- Pas encore au point toute cette gymnastique...
Néanmoins, les deux Cisailleuses de Mortalis furent abattues et les enfants de l'orphelinat et leurs compagnons furent sains et saufs – aussi Beneltig, mais est-ce que cela avait une quelque once d'importance ?
Le Héros félicita la princesse pour son combat et de s'en être sortie, Malalalivia lui rendit la pareille et commenta :
- Cela se voit que tu ne t'es pas battu à fond.
- En même temps, tu étais sur mon chemin, j'allais pas te trancher un bras par mégarde. Ah merde, excuse-moi, se rattrapa le Héros.
Il venait à peine d'apprendre la façon que la princesse était devenue une sans-ailes, il ne savait pas si elle avait encore des séquelles psychologiques de cette période.
- Pourquoi ? lui demanda la princesse-fée, arrête de me sous-estimer, tu abuses. Il n'y a rien de mal à vouloir prendre soin des autres et de s'inquiéter pour eux.
- C'est pas ce que... laisse tomber.
- J'ai très bien compris où tu voulais en venir, j'ai entendu ta conversation avec Lelelitio, lui révéla-t-elle, tu n'as pas besoin de me prendre en pitié, mais comme je te l'ai dit : il n'y a aucun de mal à s'inquiéter pour autrui. Ou de me ménager d'ailleurs. Viens, on va voir s'ils s'en sont sortis à l'extérieur.
Ils gravirent les marches de la cave, Malalalivia défit le sceau lancé par Lelelitio sur la porte et ils découvrirent leurs compagnons au-dessus du corps de Beneltig, impuissants face à la douleur que ressentait l'ensorcelé. Il n'avait pas cessé de se tordre de douleur, agrippant son cou comme pour arracher le maléfice de lui-même en s'arrachant sa chair, mais rien n'y faisait.
- Vous avez toujours pas réussi à lui enlever ? s'énerva le Héros.
- On fait ce qu'on peut, se défendit Lelelitio, si j'avais un peu plus de temps j'aurais réussi sereinement à lui enlever mais là... ça va être plus compliqué.
- C'est quoi les lettres du maléfice runique ? demanda Malalivia.
- C'est un décompte. Normalement, l'effet aurait dû être immédiat puisqu'il semble avoir été apposé dans un lieu où l'essence magique est beaucoup plus forte qu'ici.
- Si le décompte se termine, il se passe quoi ? le questionna le Héros.
- Sa tête sera tranchée !
- Sans déconner...
La Légion n'avait vraiment pas apprécié que Beneltig dévoile tout leur petit secret. Malheureusement, le Héros devait le garder en vie – à contrecœur ? – et le ramenait auprès de sa bien-aimée. Il repensa à ce que lui avait Sawyer et ce que les Cisailleuses avaient dit, enfin ce que les fanatiques ont dit à travers elles, à propos d'interférences magiques qu'il émettrait.
Il s'avança alors en direction de l'ex-champion et posa ses mains sur son cou.
- Tu fais quoi ? s'excita Lin sur le Héros.
Lin attrapa le Héros et voulut le retirer d'au-dessus du corps de son ami.
- T'excite pas ! Je l'étrangle pas ! dit le Héros, il y a des moyens bien plus rapide pour tuer quelqu'un que passer dix minutes à l'étouffer. Lelelitio regarde s'il y a un changement.
Lelelitio se pencha sur Beneltig et observa les runes autour de son cou.
- Le décompte... ralentit.
Alors les interférences sont bien liées à lui et peut-être qu'elles se font continuellement, se dit Malalalivia.
- Est-ce que si je ralentis le décompte, tu auras le temps d'éviter sa décapitation ?
- Sûrement.
- Alors active-toi.
Lelelitio sortit une fiole contenant un liquide vert et peignit des runes au sol, autour de la tête de Beneltig. Ceux-ci s'illuminèrent et affectèrent le collier de runes violettes.
- Malalalivia, pourquoi m'as-tu demandé si les Cisailleuses de Mortalis pouvaient parler ?
- Si la reine peut surveiller toutes les ondes, les fanatiques ont dû user de magie pour parler à travers ces monstres, donc ils sont proches. Très proches.
- Où exactement ?
- Dans les Basfonds. Ce qui réduit notre champ d'action à ici. Il faudra attendre que Beneltig soit en état de parler pour savoir où ils se trouvent, précisément, dans les Basfonds.
- D'accord.
Si les Cisailleuses de Mortalis ne parlaient pas et ne faisaient que rire, alors le Héros se dit qu'il avait raison de penser que ces voix lui étaient particulièrement familières, il ne saurait les remettre sur les personnes à qui elles appartenaient mais il était incontestablement sûr qu'il a déjà rencontré ces deux voix auparavant, bien qu'il ne saurât pas les resituer dans l'espace ou le temps.
- Sache une chose, Malalalivia, la prévint le Héros, nous n'irons pas nous confronter aux fanatiques maintenant.
- Excuse-moi ? s'égosilla la princesse aptère des Basfonds, comment ça, « on ne va pas les arrêter maintenant » ?
- T'as pas entendu ce que nous a dit Beneltig ? Ces gars sont dans toutes les strates de ton royaume, du petit commerçant à qui tu achètes ton goûter aux Saints de la Reine.
- Mais c'est le moment de les stopper !
- D'accord. Est-ce que tu bats Sawyer ?
- Hein ? Pourquoi cette question ?
- Je t'ai demandé quelque chose ! s'énerva le Héros, est-ce que tu peux battre le chevalier-saint de la reine, fils du héros Torn Vanguard, Sawyer Vanguard ?
- Hé ! Sais-tu à qui tu parles ? s'opposa Lelelitio.
- Oui je le sais très bien, et toi, tu sais que tu as une vie entre les mains ? lui rétorqua le Héros, alors concentre-toi dessus. Et non, je ne parle pas à la Malalalivia titré du rang de princesse. Je parle à celle qui a la Malalalivia qui a la responsabilité d'une dizaine de vies qui nous observent actuellement.
La princesse se tourna en direction de l'entrée de la pièce adjacente à la leur et vit que les enfants les regardaient, à la fois curieux mais aussi craintifs.
- Ton servant m'a parlé de la responsabilité que j'avais envers les gens qui croient en moi et à la vaine espérance qu'ils ont que je puisse refaire réapparaître le ciel. Moi, personnellement, j'en rien à faire, je veux juste venger. Mais toi ! Toi qui tiens tant que ça à être la prochaine héroïne de la légende, lorsque tu as recueilli ces gosses tu as décidé de les prendre sous ton aile, alors tu te dois de réfléchir à tes actes au lieu d'agir sous la colère comme si tu étais moi. T'as réfléchi au sérieux des informations que nous a filés Beneltig ou que nous nous retrouvions face à un mec aussi fort que Sawyer ? Que deviendront ces enfants que tu t'es jurée de protéger ? Est-ce que cet ennemi de l'acabit de Sawyer viendra de lui-même jusqu'ici puisqu'ils nous auraient localisés à cause de Beneltig ? Tu pourras les protéger et défendre ta propre vie ? Ou tu sacrifieras ta vie comme la précédente héroïne ? Ou peut-être même que tu les abandonneras pour pouvoir te sauver ?
Malalalivia était bouche bée, elle n'avait aucune réponse concrète à lui donner. Mais le Héros de son côté n'en avait pas fini avec elle.
- Alors réponds-moi ! tu peux battre Sawyer ou pas ?
La princesse ne savait pas quoi répondre, elle s'agrippa à sa robe, se mordant la lèvre en se demandant quoi répondre. Devait-elle mentir pour son propre ego ? Mais elle était face à celui qui possédait le titre qu'elle convoitait tant. Il saurait forcément qu'elle ment. Elle ne pouvait pas baisser les bras alors qu'elle s'était promise de ne plus délaisser les plus faibles comme elle l'avait été.
- Je... je ne... je ne peux pas le vaincre.
- Voilà. Donc on ne les attaque pas.
- Et tu veux qu'on fasse quoi ? le coupa Lelelitio, tu lui mets des dilemmes sous le nez et tu ne donnes pas de solution !
- Mais j'ai fini de parler ? s'insurgea le Héros, je suis pas une de ces merdes qui vient exposer des problèmes sans avoir de solution. Surtout quand les principaux concernés nous regardent. Maintenant que nous avons confirmation qu'il y a des rats sur le navire, on peut faire intervenir, pas totalement, la reine.
- Elle n'acceptera jamais, dit Lelelitio sceptique.
- On a le témoignage de ce bouffon, c'est suffisant. Je l'ai vu parler à des gens bizarres, c'est bon. Les réglementations de je sais pas quoi, ça passe à la trappe.
- Et son aide, pas si intégrale que ça, va nous servir à quoi ?
- À vous déplacer ailleurs vous et les enfants avec des gens en qui la reine a totalement confiance. Puis on doit monter un piège avec lui comme appât pour les cueillir à la face de tous, mais surtout de la reine, et pour ça, on va les espionner.
- Les espionner ? Tu vas demander à ton amie elfe de Tunsar de nous aider ?
- Si elle était là et qu'elle nous avait entendu, elle se serait déjà manifestée, mais heureusement elle est pas là, car peut-être elle aurait fait un rapport à la mauvaise personne et ça nous aurait mis dans la panade. On va le faire nous-mêmes avec Beneltig comme guide. Mais on agit pas ! Je me suis bien fait comprendre ?
- Oui, dirent-ils à l'unisson.
Malalalivia ne parlait plus avec tant d'éclat qu'avant. Les questions du Héros avaient mis chambouler l'esprit de la princesse, des doutes naquirent sur sa capacité à protéger ceux qui en avaient besoin. Finalement, est-ce que la jeune fée qui s'était faite abominablement arracher les ailes avait raison ? Avait-elle les capacités d'être aussi forte que le veut le titre de reine de Sylvania ou même de héros de la légende ?
- Hé ! Malalalivia, l'interpella le Héros retirant ses mains du cou de Beneltig.
Il se releva et parla directement à la princesse qui se mettait à détourner le regard, gênée par sa piètre prestation.
- Te mine pas le moral. Ça se voit que t'as eu les nerfs à vif en sachant qu'on était proche du but. Mais c'est bien parce que tu as quelque chose à protéger que je t'ai mis sur tes gardes. À te précipiter sans un minimum de réflexion, tu risques juste de perdre inutilement ta vie et les leurs. En plus, t'as l'air plus réfléchie que moi ou ma princesse, garde un peu de sang-froid.
- T'es un peu méchant avec elle, commenta-t-elle timidement.
- Regarde les guignols qu'elle se trimballe, dit le Héros en pointant Beneltig du doigt sans le regarder, comment tu veux que je doute pas de ses compétences intellectuels ?
- Non mais Beneltig je veux bien, mais pas Lin quand même, rit-elle.
- La seconde personne c'est moi, révéla le Héros, bon, je vais jouer avec les enfants en attendant que l'autre bouffon se remette.
- Et on s'en prend quand ? à la Légion ? Aujourd'hui ?
- Ça serait cool, mais non. Ils sont sur leurs gardes et on va devoir échafauder un plan pour les espionner, tout en ne devant pas faire un absurde choix cornélien au cas où ils nous piègent.
La fée était impressionnée par le niveau de réflexion qu'a eu le Héros, c'était comme s'il avait envisagé toutes les possibilités qui pourraient survenir, mais cette réflexion se reflétait aussi dans sa façon de combattre, autant lorsqu'ils ont fait rapidement équipe que ceux dans l'arène. Il n'était pas un adversaire à sous-estimer durant le tournoi – si on omet le fait qu'il était le Héros ce qui rendait la méfiance évidente.
Elle le suivit alors pour poursuivre la conversation.
- Elle a l'air plutôt intéressé par l'humain, remarqua Tarkus.
- Malgré sa vulgarité, le manque d'intelligence ne fait pas partie de ses tares, dit Lelelitio, et c'est sûr que ce n'est pas tous les jours qu'on peut parler à son idole et son « modèle à suivre ».
- Pas trop jaloux ? commenta Lin.
- Jaloux de quoi ? Je suis son servant et non son amant. Mon devoir est de la seconder du mieux que je peux...
- C'est vrai..., dirent Tarkus et Lin.
Après avoir joué un bon quart d'heure et les avoir rassurés sur leur projet, Malalalivia et le Héros couchèrent les enfants qui étaient morts de fatigue. Ensuite, ils retournèrent rejoindre les autres.
- En vérité, après avoir réfléchi, tu es sacrément habile pour quelqu'un qui se dévalorise tant que ça, lui dit la princesse.
- Avec les enfants ? Bah au début, ils avaient peur de moi mais...
- Je parle pas de ça, gloussa-t-elle, je te parle de la façon à laquelle tu as réfléchi à la situation et à tout ce qui pourrait arriver.
- Ah ça ! Ça vient de mon frère. Pas le fait de me dévaloriser hein, mais de penser à toutes les possibilités.
- C'est lui qui t'a enseigné à agir comme ça ?
- Non c'est Helmir, j'ai appris de lui à me méfier ses plans foireux. Il est sympa mais bon toujours m'envoyer dans des endroits bizarres, où y a des cannibales, des géants, avec ou sans aide... et quand il te donne du soutien bah c'est une douille parce que finalement il a piqué la batterie de ton téléphone alors que t'es enfermé dans un putain de cachot avec des putains d'araignées venimeuses...
- Je pense avoir compris, le calma-t-elle.
- Non mais ça rend fou d'être dans des situations merdiques à chaque fois, se plaignit-il, heureusement que je peux pas mourir aussi facilement sinon...
- Les héros peuvent mourir ?
- Bah oui sinon j'aurais pas de successeur, lui fit-il remarquer.
- C'est vrai, tu as raison ! Mais je voulais pas dire...
- De façon naturelle ? Nan c'est impossible. C'est très compliqué de mourir pour un héros : soit faut être le Némésis, soit...
Il s'approcha de son oreille mimant le geste de lui chuchoter quelque chose alors que c'était parfaitement audible par le reste de l'assemblée qui se trouvait dans l'autre pièce.
- Soit faut connaître les addictions du héros en question et les utiliser contre lui. Une restriction imposée par le héros pour renforcer le mental de son « hôte ».
- Sérieusement ?
- Oui ! Et genre moi c'est le sucre.
- Et pourquoi tu me le dis ? lui demanda la princesse un peu choquée de la nonchalance de son interlocuteur.
- Tu vas me tuer ?
- Non.
- Alors c'est bon, lui sourit-il en lui tapotant l'épaule, et en parlant de ma condition de héros de la légende, sache que rien ne te teste pour voir ta valeur et savoir si tu es apte à devenir le héros de la légende.
- Hein ? Comment ça ? De quoi tu parles ?
- Je te préviens juste que ce qui décide d'être un héros n'est absolument pas le courage ou je ne sais quel vertu dérisoire, ce sont juste les circonstances qui le décident donc ne crois pas que si en faisant tel ou tel effort ta valeur te sera reconnue car ça n'est pas arrivé pour mon amie.
- Ah...
Au ton de sa voix, on constatait une certaine déception. Cela se voyait qu'elle ne voulait pas perdre la face en criant sa désillusion mais cela se ressentait aux mimiques de son visage.
- Et comment ça s'est fait qu'on t'ait choisi plutôt que ton amie qui s'était préparée ? demanda-t-elle avec une voix à la limite de l'agacement.
- On m'a pistonné.
Devant le regard circonspect de Malalalivia, il pouffa de rire.
- Comment ça tu t'es fait pistonner ? Pourquoi toi ?
- Ah bah c'est simple : ma mère était l'ancien héros. Et alors que j'allais mourir des mains du Némésis Prime, elle a choisi de me léguer le rôle, car incapable de vaincre le Némésis en forçant un peu la main au Destin du héros, expliqua-t-il avec une expression plutôt détachée, et elle, elle est morte en tant que Némésis.
Face à cette révélation, Malalalivia se confondit en excuses.
- Je suis infiniment désolée, je ne savais pas ! J'aurais dû mesurer mes paroles.
- Mais t'as rien dit ! la rassura le Héros, même si j'ai compris ce que ton cœur pensait et tu n'as pas tort : je ne suis pas légitime à être le héros de la légende. J'ai aucun talent particulier, aucune aptitude physique particulière, enfin, à ce que je sache, j'étais même trop faible pour vivre sans l'aide de quelqu'un ou bien longtemps.
- Tu veux dire que devenir le nouveau réceptacle t'a sauvé la vie ?
- C'est exact. Mais c'est un bien pour un mal. J'ai survécu à ma mère pour être enchainé à un devoir bien trop grand. C'est pour ça que je vais te poser une simple question : pourquoi tu te bats ? Pour me succéder ? Protéger ce qui t'est cher ? Car c'est le devoir des puissants de protéger les plus faibles ?
Malalalivia voulut se précipiter de lui répondre ses profondes convictions, mais le Héros l'arrêta.
- Pas maintenant, tu me le diras quand tu y auras vraiment réfléchi et que tu me le diras avec ton cœur, lui dit-il en pointant sa pompe sanguine en touchant sa peau, à ce moment-là, je t'écouterai et je verrai si... Non rien. Il va pas tarder à se libérer de son enchantement, on devrait les rejoindre.
Il partit en premier voir les autres. Malalalivia resta derrière quelques instants, réfléchissant aux mots du Héros. Avant son arrivée, Malalalivia était certaine de savoir pourquoi elle se battait depuis qu'elle avait décidé de succéder à la reine, mais maintenant, après les derniers mots du Héros, son esprit en était complètement embrouillé.
« Protéger ce qui t'est cher ? », « ...le devoir des puissants... »... où veut-il en venir ?
Finalement, elle ne préféra pas trop s'y attarder.
Après tout, la nuit porte conseil comme on dit.
Beneltig désenchanté du maléfice qui lui avait été jeté, se releva en sursaut, giflant, par inadvertance, au passage, Lelelitio avec sa main.
- Calme-toi, tu n'as plus rien à craindre, tenta de le rassurer Lin.
- Toi ! Toi ; ne me touche pas sale traître ! Tu fais partie de ces gens qui m'ont séquestré et malmené, je ne veux plus rien avoir à faire avec toi.
- Je fais ce qui est juste je te signale, le rabroua Lin, étant donné que, non seulement tu laisses des innocents se faire assassiner, des enfants de surcroît, et en plus, tu as envoyé se faire tuer Thoosa, une fille qui a le même âge que nous et tu vas maintenant laisser ta propre amoureuse se faire tuer pour préserver ta vie ? Je te savais peureux mais pas au point d'être un lâche laissant mourir autrui.
- Es-tu aveugle ? N'as-tu pas vu de quoi ils sont capables ? Il n'y a rien que nous puissions faire pour les comprendre, tout est déjà prévu dans leur plan, cela ne m'étonnerait pas qu'ils aient un plan pour défaire la reine sans même avoir à combattre.
- À moins de s'appeler le destin, rien de ce qu'ils comptent faire n'est inéluctable, les interrompit le Héros, et ce qu'ils n'ont pas prévu c'est ma venue et que je sois lié à la reine.
- Et quoi ? Tu comptes te battre contre toute l'armée de Sylvania à toi tout seul ? pouffa Beneltig nerveusement, même la reine qui te cajole tant ne laissera pas faire.
- Pas besoin., le stoppa le sans-nom, je réfléchis à un plan qui nous permettra de les battre sans vraiment mettre tout le monde en danger. Mais pour cela, il va falloir que tu nous dises où ils se cachent.
Beneltig refusa furieusement, vociférant que se faire attaquer par des Cisailleuses et finir décapiter lui avait bien suffit de leçon. Le Héros lui rappela qu'il n'avait pas vraiment le choix s'il ne voulait pas que Tarkus décide de vouloir sa revanche dans un match à mort sans arbitre. Sachant qu'il n'avait pas le choix, il céda et leur révéla que les sectaires se réunissaient dans le squelette de l'Hydragon.
- L'endroit le plus dangereux des Basfonds, commenta Lelelitio, quelles sont les horaires de leur réunion ?
- Lorsque la Lune montre sa tête.
- À minuit, donc, conclut le Héros, et c'est tous les jours ?
- Non, c'est à chaque événement important.
- Ok, donc on a qu'à le créer.
- Comment ça ? demanda Lelelitio.
- Il y a une chance sur deux qu'ils soient là aujourd'hui. On peut les prendre par surprise mais on peut faire courir la rumeur qu'il est mort et donc ils vont se réunir demain pour en discuter.
- Pas bête, dit Malalalivia, mais es-tu sûr qu'ils seront là ?
- Bah non, sinon on en discuterait pas. Donc là, c'est à vous décider de quand on agit. C'est une proposition comme une autre.
Ni une, ni deux, à l'unisson, tous dirent : « Aujourd'hui. ». Ce n'était pas de l'avis du Héros mais un vote démocratique se devait d'être respecté. De toute manière qu'ils soient là ou non, cela ne changeait rien à son idée. Ce qui était sûr, c'est qu'ils ne devraient pas les affronter sur aucun prétexte. Surtout lui : être accusé d'homicide envers un Féérique dans ce royaume, particulièrement en tant que champion d'une paria, jouerait des tours non seulement à lui, mais aussi à sa princesse, Sawyer et la reine Sélia qui l'avaient soutenu.
À l'égard de ses compagnons, il montrait une certaine assurance mais ce n'était qu'une façade qui pouvait s'éroder à tout moment – comme lorsqu'il demanda à la mère de Thoosa si elle voulait la venger. Heureusement qu'elle lui avait remis un peu les idées en place – il restait toujours aussi enragé.
Ce qu'il se passait à Sylvania n'avait rien avoir avec sa quête de vengeance contre le Némésis et le héros de la légende. Ces ennemis n'étaient que des cailloux sur le chemin de la promesse qu'il avait faite à la Fée, il n'avait pas besoin de se déshumaniser davantage. Ils régleront cela avec une violence modérée.
S'il le dit...
Et comme exigé par la troupe, ils s'en allèrent en direction du cadavre de l'Hydragon laissant derrière eux Lin, avec une pierre de transmission pour surveiller les enfants au cas où un danger venait à survenir. Espérant que tout se déroulerait comme ils le présageaient.
Selon les idées du Héros – on ne pouvait décemmentpas appeler cela un plan tellement c'était brouillon –, ils ne ferontqu'espionner les fanatiques et dénicher dans leurs conversations une quelconqueinformation sur leur identité.
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